Berlin. Le mardi 25 septembre a eu lieu à Berlin un vote pour désigner le nouveau président du groupe (Fraktionschef) CDU/CSU au Bundestag. Il s’agit d’un poste important, considéré parfois comme un tremplin vers des fonctions encore plus prestigieuses (Konrad Adenauer, Helmut Kohl et Angela Merkel furent tous chefs de faction avant de devenir chanceliers). Depuis 2005 et le retour des chrétiens-démocrates au pouvoir, le chef du groupe était Volker Kauder, un fidèle de la chancelière et présidente de la CDU. Si Merkel a connu plusieurs ministres de la chancellerie et secrétaires généraux du parti, Kauder s’est maintenu pendant 13 ans à la tête du groupe. Il était réputé plus conservateur, mais aussi plus chaleureux que Merkel, et il était devenu un acteur discret mais essentiel de sa stabilité à la tête du pays.
L’élection de mardi devait être une formalité, puisque Kauder était soutenu par le gouvernement tout entier, à la fois par Merkel et son ministre de l’intérieur Seehofer (un accord entre eux est devenu assez rare pour être noté). Mais, favorisé par la procédure de vote à bulletin secret, un challenger quasiment inconnu, Ralph Brinkhaus a pu remporter le scrutin de justesse à sept voix d’écart (1). Brinkhaus n’est pas vraiment un vieux briscard de la politique : il est entré en 2009 au Bundestag et il est devenu en 2014 un des onze vice-présidents du groupe.
Le fait que le choix de Merkel n’ait pas été respecté a semblé être un affront très grave pour beaucoup d’observateurs, à l’affût des signes des temps annonçant la fin d’une ère. Le commissaire européen Oettinger est allé jusqu’à décrire Merkel comme un “lame duck” (canard boiteux), terme anglais désignant les dirigeants en fin de mandat privés de toute influence (2). L’opposition a demandé au gouvernement de poser la question de confiance, ce qu’il a refusé. Mais le nouveau président de groupe se défend d’être un rebelle ouvertement opposé à la chancelière.
Cependant, Brinkhaus avait réagi avec beaucoup de scepticisme aux ouvertures du gouvernement après les propositions européennes d’Emmanuel Macron (4). En avril dernier, il avait publié un texte demandant plus de dureté et moins de compromis dans les négociations en cours. Cette position conservatrice l’a rendu populaire au point d’être élu à la tête du groupe quelques mois plus tard. Si la fin du mandat de Merkel n’a pas encore sonné, sa marge de manoeuvre sera désormais encore plus limitée qu’auparavant par ses propres troupes au parlement (3).
Perspectives :
- 18 octobre 2018 : prochain Conseil européen. Le nouveau président de groupe pourrait signifier une réaffirmation de la majorité parlementaire dans la politique européenne de l’Allemagne, et probablement pour freiner les projets de réforme du président Macron.
Sources :
- “Merkel-Vertrauter Kauder verliert überraschend gegen Ralph Brinkhaus”, Die Welt, 25/09/2018
- Oettinger spricht von Merkel als ‘lame duck’, Die Welt, 27/09/2018.
- ROßMANN, Robert, Neuer Chef der Unionsfraktion : Ralph wer ?, Süddeutsche Zeitung, 26/09/2018.
- Union-Fraktionsvize Brinkhaus hält nichts vom Eurozonen-Haushalt, ARD Morgenmagazin, 20/04/2018.