Téhéran. Le 8 mai 2018, les États-Unis sont effectivement sorti de l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien. Signé sous l’administration Obama en juillet 2015 et prévoyant une levée progressive des sanctions économique et diplomatiques contre la République Islamique d’Iran, le Jcpoa négocié avec le président iranien Hassan Rouhani avait soulevé de nombreux espoirs tant dans la société iranienne qu’en Europe, entre promesses économiques et renouement de liens diplomatiques anciens. La réinstauration des sanctions américaines s’insère dans un contexte de pivot de la politique étrangère américaine vis à vis du régime iranien et des soupçons de la reprise d’un programme nucléaire stratégique, en dépit de la résistance affichée des parties européennes de l’accord (4).

L’embargo sur le pétrole iranien, qui entrera officiellement en vigueur en novembre, déstabilise déjà un marché mondial incertain quant au prix du baril à venir (2). La chute du prix du pétrole observée en juin 2014 a plongé tous les acteurs du secteur, à commencer par les majors (ExxonMobil, Shell, Bp, Total,…) et les Nocs (National Oil Companies, e.g Saudi Aramco, Nioc, Rosneft,…), dans une situation financière brutalement précaire, et a précipité une réduction drastique des investissements dans de nouveaux gisements. Les niveaux de production actuels s’en ressentent, l’Agence internationale de l’énergie (Aie) évoquant un risque de déséquilibre entre demande mondiale croissante et offre de pétrole en berne (1). L’Iran, membre co-fondateur de l’Opep et 4e pays mondial en termes de réserves de pétrole, a produit 3,8 millions de barils par jour en 2017, dont 2,5 millions exportés. Il s’agit donc d’un acteur majeur du marché pétro-gazier mondial, dont l’ostracisation prochaine a déjà des échos sérieux sur les indicateurs financiers (3).

Le baril de Brent, pétrole brut de mer du Nord et l’un des prix de référence du marché, s’achète aujourd’hui à 72$. Alors que les fluctuations du prix du pétrole observées depuis la crise économique de 2008 ne cessent de s’intensifier et de s’accélérer, une question se pose en Europe. L’Union parviendra-t-elle à maintenir des relations énergétiques avec l’Iran, alors que Total a annoncé début juin l’interruption de ses activités dans le pays ? Les Etats-Unis, producteurs et exportateurs de pétrole et de gaz grâce à leurs ressources non-conventionnelles, semblent en tout cas en position de tirer profit à court terme de cette crise diplomatique aussi sur le plan énergétique.

Perspectives :

  • 5 novembre : début de la deuxième phase des sanctions américaines contre l’Iran, destinée aux exportations de pétrole.

Sources :

  1. International Energy Agency, Oil Market Report, 10 août 2018.
  2. MEREDITH Sam, ‘More volatility’ expected as Iran sanctions set to prompt wild swings in oil prices, Vopak CEO says, CNBC, 17 août 2018.
  3. Mix énergétique de l’Iran, Connaissance de l’énergie, 16 mai 2018.
  4. SEVASTOPULO Demetri, KHAN Mehreen & BOZORGMEHR Najmeh, US reimposes economic sanctions on Iran, Financial Times, 7 août 2018.

Clémence Pèlegrin