Londres. “Let’s Fund our Nhs instead” ou “Finançons plutôt notre service de santé”. Ces mots étaient inscrits en gros caractères sur le bus rouge immatriculé “Vote Leave” qui est devenue l’image la plus célèbre de la campagne du Brexit. Mais les défis qu’une sortie de l’Union pose au National Health Service (Nhs) sont considérables.

Jeudi dernier, l’Hôpital Kingston, dans la circonscription électorale de Dominic Raab, nouveau ministre en charge de la négociation, a rendu public un document interne révélant que le Brexit pourrait provoquer une augmentation des coûts et entraîner des coupes dans le personnel médical (2). Cet hôpital n’est pas une exception. Selon une étude publiée la semaine dernière par la “Health Foundation”, le nombre d’infirmières en provenance de l’Union a déjà diminué de 87 pour cent depuis l’année 2016/2017, passant de 6400 à 800. Un sondage montre aussi que 71 pour cent des Britanniques pensent que le Royaume-Uni devrait continuer, après le Brexit, à attirer des infirmières de l’Union (3).

Selon l’institut de recherche “Uk in a Changing Europe”, les conséquences du Brexit sont à mesurer sur le long-terme et le service de santé britannique est lié aux politiques migratoires. Les risques pour le secteur sont évidents : augmentation des coûts, réduction dans la qualité des services, coupes dans le personnel médical. Celui-ci est souvent issu de l’immigration, comme c’est le cas à Londres, dans le sud-est du pays ou en Irlande du Nord. De plus, le choc économique provoqué par la sortie, à plus forte raison par un “Brexit dur”, pourrait pousser le gouvernement vers des choix difficiles, comme une augmentation des impôts (6). En juin, Theresa May a promis qu’afin de soulager le Nhs, son gouvernement pourrait – n’ayant plus à supporter la contribution britannique au budget européen – y injecter 20 milliards de livres supplémentaires chaque année, jusqu’en 2023. Un cadeau qui serait, selon The Times, inférieur à la hausse moyenne annuelle constatée depuis la mise en place du service, donc essentiellement utile à endiguer une crise immédiate (4), sans pour autant donner de garanties sur les exigences d’une population vieillissante.

Toujours selon “Uk in a Changing Europe”, les détails de l’accord qui doit être signé avec l’Union seront déterminants pour le futur du National Health Service après le Brexit. C’est sur ces détails que les médecins britanniques souhaitent s’exprimer. La British Medical Association, le plus grand syndicat de médecins britannique, qui représente 160 000 professionnels et étudiants, vient de soutenir l’idée d’un second référendum, afin que les citoyens obtiennent un dernier mot sur les termes de l’accord final (1). Le syndicat a adhéré à la campagne lancée par le journal The Independent, intitulée “Final Say”, qui a obtenu environ 500 000 signatures (4). À l’heure où les avertissements redoublent face à l’hypothèse d’une sortie “sans accord”, une explication avertie des effets du Brexit sur le système de santé  pourrait contribuer à transformer une opinion publique en quasi-état d’alerte.

Perspectives :

  • Les négociations officielles entre Bruxelles et Londres doivent reprendre le 13 août

Sources :

  1. COLSON Thomas, Britain’s doctors believe Brexit will harm the NHS and are calling for a second referendum, Business Insider, 31 juillet 2018.
  2. COWBURN Ashley, ‘Brexit warnings released by NHS hospital serving Dominic Raab’s constituents’, The Independent, 2 août 2018.
  3. Large drop in the number of nurses coming from the EU to work in the UK, The Health Foundation.
  4. Final Say : Half-a-million people have signed The Independent’s petition calling for referendum on any Brexit deal, The Independent, 2 août 2018.
  5. Cash infusion, The Times, juin 2018.
  6. Brexit and the NHS, The UK in a Changing Europe, mars 2018.