Le 21 octobre, le gouvernement de la République de l’Altaï, un sujet fédéral russe d’Asie centrale situé entre le Kazakhstan et la Mongolie, a annoncé la mise en œuvre à partir de mars 2026 de mesures supplémentaires visant à limiter la consommation d’alcool. Une semaine plus tôt, le chef de la République, Andreï Tourtchak, avait déclaré que ces nouvelles restrictions visaient à réduire le taux de mortalité dans la région 1.

Ces dernières années, plusieurs dizaines de sujets fédéraux russes ont fait de la lutte contre la consommation d’alcool l’une de leurs priorités. 

  • Dans la République de l’Altaï, il ne sera plus possible d’acheter de l’alcool les dimanches, les jours fériés et en-dehors des plages horaires fixées pour le reste de la semaine : de 11 à 19h du lundi au jeudi, jusqu’à 16h le vendredi et 14h le samedi.
  • Les produits alcoolisés ainsi que le tabac devront être retirés des présentoirs à proximité des caisses, et des mesures seront prises pour mieux encadrer les nalivaïka (наливайка, ou débits de boissons) dans les zones résidentielles 2.

Selon des sources citées par Vajnye Istorii (Важные истории), ces instructions auraient été directement données par le Kremlin au gouvernement de la République de l’Altaï dans le cadre d’une campagne plus large de santé publique 3. Le ministère de la Santé estime que jusqu’à 25 % des décès en Russie sont « souvent liés à la consommation d’alcool » — ce qui représenterait plus de 450 000 personnes l’an dernier 4.

  • De son côté, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que 18 % des décès en Russie peuvent être attribuables à la consommation d’alcool — soit le cinquième taux le plus important au monde.
  • Huit des dix pays où l’alcool contribue le plus aux causes de mortalité dans le monde faisaient partie de l’ex-Union soviétique 5.

Suite à l’approbation par le gouvernement d’un large plan en décembre 2024 — précédé par le vote d’une loi en avril visant spécifiquement la vente —, 63 des 89 régions russes ont mis en œuvre des mesures visant à limiter et dissuader la consommation d’alcool.

  • Si les autorités se félicitent d’une baisse de la demande — -4 % pour les ventes de vodka sur la période janvier-août par rapport à l’an dernier, et jusqu’à -13 % dans l’oblast de Vologda —, il est très probable qu’une part ait été transférée vers l’économie souterraine 6.
  • Dans les régions principalement rurales, comme la République de l’Altaï, les mesures mises en œuvre par les autorités se révèlent généralement moins efficaces que dans les centres urbains, l’alcool contrefait étant plus accessible et moins cher.

Derrière cet enjeu de santé publique réside une volonté du Kremlin de relancer la démographie afin d’éviter « l’extinction » du peuple russe, selon la formule utilisée à plusieurs reprises par Vladimir Poutine ces derniers mois.

  • Cette priorité figure parmi les trois principaux axes du budget pour l’année 2026 étudié en ce moment à la Douma, aux côtés des dépenses de défense et du « respect des obligations sociales » de l’État.
  • Avec 141 enfants pour 100 femmes en moyenne au cours de leur vie, le taux de fertilité russe est l’un des plus faibles au monde.
  • L’OMS anticipe une diminution de la population russe de 8 millions d’habitants d’ici 2050, alors que la guerre en Ukraine aurait provoqué plus de 1,1 million de pertes parmi les forces russes depuis février 2022.