À l’ombre de Mars : penser la diversité des guerres
Comment penser la guerre à nouveaux frais alors qu'elle est de retour dans des sociétés qui l'avaient longtemps refoulée ?
Comment nommer les nouvelles formes de conflit et les nouvelles figures de la violence à l'ère de l'IA et des drones ?
Antony Dabila montre qu’une typologie de la guerre est toujours concevable : derrière la variété apparente des affrontements, les moyens des belligérants sont finalement toujours limités.
Alexandre Escudier recense un ouvrage ambitieux qui propose rien moins qu'un modèle théorique de la guerre au XXIe siècle.
Longtemps refoulée par des concitoyens bénéficiant, innocemment des dividendes de la paix, moquée par les sciences sociales sous l’étiquette péjorative d’« histoire-bataille », la guerre n’en finit pourtant pas de refaire irruption sur le devant de la scène.
Dans un premier temps, à partir des années 1950, la dissuasion nucléaire avait relégué au second plan l’hypothèse même d’un conflit conventionnel majeur. Puis, à partir des années 1960–1970, vinrent les guérillas insurrectionnelles, souvent fondées sur des stratégies asymétriques du faible au fort — parfois rudimentaires, mais redoutablement efficaces. Elles suscitèrent en retour l’élaboration de doctrines de contre-insurrection, de David Galula au général David H. Petraeus 1.
Depuis le milieu des années 2010, nous sommes confrontés à une situation inédite. Avec la guerre hybride en Ukraine dès 2014, la brutalisation du théâtre syrien, la militarisation croissante de l’espace indo-pacifique et l’intégration doctrinale par la Chine de la « guerre hors-limites » 2, c’est un théâtre stratégique qui se reconfigure.
Désormais, trois dimensions — guerre nucléaire, conflit conventionnel, lutte asymétrique — tendent à s’empiler et à s’activer simultanément (p. 32).
Retour de la guerre et crise des fondements
Cette recomposition élargit considérablement la surface stratégique que doivent couvrir à grands frais (p. 33), les démocraties libérales. Elle survient au moment même où celles-ci subissent déjà de fortes tensions internes : ralentissement de la croissance, coût élevé de leurs modèles sociaux, charge croissante liée à la transition environnementale et instabilité politique interne alimentée par l’enchaînement des crises budgétaires et de la dette publique.
Dans ce double contexte de géopolitique incertaine et de pressions domestiques accrues, les régimes démocratiques sont contraints de repenser en profondeur leurs schémas doctrinaux. Ils renouent ainsi avec ce que le général Lucien Poirier avait identifié dès les années de l’atome triomphant comme la « crise des fondements » 3 de la pensée stratégique contemporaine.
À l’équation militaire à trois variables — nucléaire, conventionnelle, asymétrique — s’ajoute désormais une seconde équation, celle-ci interne. Il s’agit des vulnérabilités propres aux démocraties, devenues selon le terme de Clausewitz un point de « friction » de toute conduite stratégique de long terme — en amont comme en aval de celle-ci. Polémologie et science politique peinent encore à en penser conjointement les termes, pourtant décisifs pour toute gouvernance éclairée.
Désormais, trois dimensions — guerre nucléaire, conflit conventionnel, lutte asymétrique — tendent à s’empiler et à s’activer simultanément.
Alexandre Escudier
La guerre comme opérateur central de bifurcation historique
Dans L’Échiquier stratégique 4, Antony Dabila 5 engage ce nouveau « Grand Débat », tant interne qu’externe. Il montre que la guerre n’est pas un simple épisode violent de l’histoire humaine, mais un opérateur de bifurcation centrale. Cette bifurcation s’opère sur un plan domestique : recomposition des régimes politiques, réorganisation des hiérarchies sociales, mobilisations économiques et technologiques. Elle se double aussi d’un plan international : transformation des rapports entre entités politiques, redéfinition des frontières, basculements hégémoniques.
Ce changement cristallise en effet un entrelacs de variables non militaires — logistiques, écologiques, idéologiques, religieuses ou démographiques — qu’elle active, redistribue ou détruit. Au-delà de cette fonction systémique, la guerre concrète est surtout, selon Dabila, un champ dynamique de combinaison et de superposition de régimes stratégico-tactiques, qui se succèdent ou s’articulent au sein d’une même séquence conflictuelle.
Cette pluralité opératoire génère des effets propres — de sidération, d’usure, de harcèlement, de contention, de surprise et de concentration — qui, plus encore que les résultats politiques apparents, conditionnent la morphogenèse des ordres sociaux issus des conflits.
C’est sur ce point décisif que la polémologie de Dabila — articulée à une réflexion encore trop peu suivie sur la dialectique entre conflictualité externe et structuration interne du politique — ouvre vers une sociologie historique comparée de la guerre, envisagée dans ses effets structurants sur les sociétés humaines, tant en amont (ante bellum) qu’en aval (post bellum) des séquences guerrières.
Dabila reprend ces questions à la racine en opérant une double réinscription de la guerre : d’une part, au sein d’une théorie générale des affaires humaines structurées par la pluralité irréductible des unités politiques souveraines (les polities) ; d’autre part, dans une architecture stratégique et combinatoire fondée sur une grammaire élémentaire des manœuvres et des configurations politico-militaires.
Il en résulte une thèse forte : à partir d’un certain seuil de densité humaine et de coalescence politique, la guerre s’impose comme une possibilité constitutive — virtuellement latente — des relations entre polities. Dans une conjoncture donnée, l’alignement de facteurs sociologiques peut générer des conflits , activant par là même certains éléments sélectionnés par les acteurs, en fonction du contexte, au sein de l’ensemble analytiquement pensable de la gamme stratégico-tactique.
Dans un double contexte de géopolitique incertaine et de pressions domestiques accrues, les régimes démocratiques sont contraints de repenser en profondeur leurs schémas doctrinaux.
Alexandre Escudier
La possibilité de la guerre comme contrainte de survie
La guerre, selon Dabila, n’est ainsi ni l’effet direct d’une pulsion biologique ni un accident sans cause : elle est la forme, certes extrême mais structurellement toujours possible, des relations entre polities, inhérente au fait de leur coexistence dans un champ d’interaction conflictuel. En effet, dès lors que plusieurs unités souveraines partagent un même espace d’influence ou de dépendance, il suffit qu’un différend porte sur un enjeu clef, inaccessible à toute médiation, pour que la tension latente se mue en affrontement organisé, où la parole cède la place à la violence structurée par l’action militaire.
Cette possibilité persistante de la guerre impose à toute politie — quel que soit son régime politique (autocratique, démocratique ou hiérocratique 6) et quelles que soient ses préférences normatives, d’intégrer structurellement les contraintes de cette possibilité dans l’architecture même de sa gouvernance instituée. Tout ordre politique doit ainsi les internaliser comme une contrainte de survie : comme le dit Dabila, un « corps politique doit avoir non seulement une capacité de résistance aux agressions, mais également une stratégie » (p. 10). Si les communautés politiques diffèrent, ce n’est qu’à deux niveaux distincts : d’une part, leur aptitude à élaborer la stratégie militaire la plus efficace face aux chocs externes de survie ; d’autre part, la légitimité de leur régime politique, appréciée à l’aune de la validité — objectivement argumentable — des normes qui fondent les finalités politiques que leur conduite stratégique, qu’elle soit militaire ou infra-guerrière, entend poursuivre.
Homo strategicus : entre « endo- » et « exopolitique »
Une telle approche s’oppose frontalement aux pensées politiques « hémiplégiques » 7, qui évacuent l’extérieur stratégique des polities au nom d’une normativité réduite au seul ordre interne du « régime politique » : compétition électorale, principes institués de justice et régime d’affects centré exclusivement sur les injustices liées à la redistribution et la reconnaissance. Contre cette réduction de l’ensemble du politique — dans ses dimensions internes et externes — à une pure « endopolitique », par oubli ou déni de l’« exopolitique », Dabila rejoint les prémisses centrales de Raymond Aron 8 et de Jean Baechler 9 : la guerre n’est pas seulement une nuisance structurelle apparue avec la densification néolithique des sociétés, elle fonctionne de manière chronique comme un mécanisme implacable de sélection des formes politiques, et du même coup des idéaux de « bonne vie » sous-jacents. Une pensée politique qui ferait l’impasse sur une contrainte aussi massive n’est tout simplement pas une pensée politique, en ce qu’elle méconnaît les pressions sélectives qui s’exercent depuis l’extérieur sur les frontières de l’unité politique qu’elle postule, bien imprudemment, comme souveraine.
Si les communautés politiques diffèrent, ce n’est qu’à deux niveaux distincts : d’une part, leur aptitude à élaborer la stratégie militaire la plus efficace face aux chocs externes de survie ; d’autre part, la légitimité de leur régime politique.
Alexandre Escudier
L’analytique et la sociologie historique des pratiques stratégiques que propose Dabila se fondent en conséquence sur la figure d’homo strategicus : non pas l’homme calculateur de l’utilité maximale, à la manière de l’homo economicus, mais l’homme confronté à la nécessité de survivre dans un monde d’incertitude et de violence, qu’elles soient radicales ou structurées ; un homme privé aussi de toute instance pacificatrice de rang supérieur aux polities.
L’histoire humaine apparaît dès lors comme une succession et superposition de séquences au sein desquelles la stratégie fonctionne comme un mécanisme d’adaptation, de survie ou de projection d’ordre — non seulement militaire, mais aussi institutionnel, diplomatique, logistique et symbolique.
Pour autant, la guerre n’est en cela que l’expression extrême et politiquement évitable du spectre plus large des relations nouées entre les unités politiques souveraines : ces relations peuvent comprendre pressions économiques, dissuasion, diplomatie ou usage symbolique de la puissance. La guerre constitue donc un « échec de la pacification » 10, c’est-à-dire de la capacité d’un système politique à stabiliser son environnement international sans recourir à la violence organisée. Cela suppose que la stratégie militaire proprement dite — définie comme mise en œuvre de cette violence organisée — ne soit jamais autonome. Elle doit toujours être subordonnée à une conduite stratégique plus englobante, expression synthétique des finalités politiques définies par la politie en situation.
Dans cette perspective, Dabila réaffirme un principe cardinal hérité de Carl von Clausewitz, de Hans Delbrück, du général André Beaufre 11 et du général Lucien Poirier : l’art de la guerre n’a de sens qu’en référence à un objectif politique. Son « finalisme stratégique » (p. 24) implique que toute opération militaire n’est qu’un instrument — certes décisif — au service d’une volonté souveraine, visant par l’action violente à contraindre une autre politie à reconnaître un certain ordre de pacification. Le stratège militaire n’est pas un acteur autonome : il est l’exécutant supérieur d’un dessein politique, dont la légitimité dépend du régime auquel il appartient, et non de la seule logique interne de l’engagement guerrier.
Concrètement, pour nous Modernes, si une démocratie libérale n’a nullement le loisir de faire l’économie d’une pensée et d’une conduite stratégiques unifiées, à la mesure des défis contemporains, celles-ci ne sauraient être absorbées par la seule rationalité militaire : elles doivent demeurer pleinement compatibles avec les normes juridiques, éthiques et politiques qui fondent son identité politique et conditionnent le soutien de la société civile — nationale comme transnationale. « La violence que l’on oppose à la violence ne doit être ni dérisoire ni immorale car c’est le projet politique proposé lui-même qui en pâtirait. » (p. 45).
La guerre : « conflit violent entre au moins deux polities »
La sociologie historique comparée et l’anthropologie sociale du politique montrent que la guerre n’est nullement propre au monde moderne de l’État, bureaucratisé et militarisé 12. Il convient donc d’en scruter aussi la logique « dans les sociétés n’ayant pas encore atteint une organisation étatique solide » (p. 122). C’est précisément afin d’éviter les biais analytiques liés à une conception trop étatisée de la stratégie militaire que Dabila s’appuie sur des notions formellement neutres et empiriquement transversales, telles que celles d’« unités politiques » (Raymond Aron) ou de « polities » (Jean Baechler).
Le stratège militaire n’est pas un acteur autonome : il est l’exécutant supérieur d’un dessein politique, dont la légitimité dépend du régime auquel il appartient
Alexandre Escudier
Une politie, ou unité politique, se définit selon une double dimension (p. 55). Sur le plan interne, elle constitue un espace social de pacification tendancielle, ordonné par une formule de justice mise en œuvre à travers un ensemble de règles instituées, dont l’application peut requérir le recours à la coercition. Sur le plan externe, toute politie — quels que soient son niveau d’organisation sociale, son époque ou son horizon culturel — évolue dans un espace d’interactions entre unités politiques où, en l’absence de mécanismes supérieurs de régulation, tout différend peut dégénérer en violence militarisée. La face interne définit le périmètre de l’« endopolitique » (intra-politique, c’est-à-dire la politique domestique) propre au régime de la politie ; la face externe correspond, quant à elle, au champ de l’« exopolitique » (inter-politique ou « transpolitique », c’est-à-dire la politique extérieure) qui régit ses relations avec les autres communautés politiques territorialement constituées.
Cette dynamique externe d’interaction s’exprime selon Dabila à travers ce qu’il nomme la « propagation transpolitique ». Ce concept englobe l’ensemble des actions extérieures d’une politie, puisant dans ses ressources endopolitiques pour assumer les trois fonctions fondamentales de toute stratégie : « dissuader », « défendre » et « attaquer ». Il se substitue utilement aux catégories plus classiques de « grande stratégie » ou de « stratégie intégrale », en ce qu’il refuse d’ériger la stratégie — trop souvent réduite à sa seule dimension militaire — en principe central de la liberté d’action de toute communauté politique.
Trois éléments indissociables constituent, dans ce cadre, le phénomène éminemment social de la guerre : une discorde initiale, le recours à la violence et l’inscription de cette violence dans un cadre politique. L’entrée en guerre transforme un litige en une « épreuve de force » dotée de sa propre logique. Dabila en précise les niveaux de réalité (p. 43) : l’objet du conflit (l’enjeu général), les finalités politiques (non militaires), les objectifs stratégiques (traduction militaire de l’ordre politique poursuivi post bellum) et les buts tactiques (traduction concrète en engagements armés séquencés).
Cette chaîne de traduction n’est jamais mécanique : elle suppose un acte d’interprétation, confié à la stratégie militaire, définie comme « l’interprétation d’un dessein politique » (p. 21). Interpréter, ici, c’est à la fois traduire, donner sens et représenter. Les stratèges ne se contentent pas de transmettre une intention politique : ils la reformulent en fonction des rapports de force, des intentions adverses, des contraintes héritées et des moyens disponibles. La « propagation transpolitique » désigne le cadre où s’élabore cette médiation interprétative entre volonté politique et conduite de la guerre.
Grammaire générale : « clavier tactique », « plan de guerre », « équation de paix »
Pour rendre possible la comparaison analytique de conflits issus de contextes hétérogènes, Dabila propose une grammaire stratégique fondée sur trois instruments complémentaires, articulés en un système cohérent allant de l’action tactique élémentaire à la décision politique de paix : le « clavier tactique », le « plan de guerre » et l’« équation de paix ». Le « clavier tactique », inspiré du « clavier stratégique » de Beaufre mais recentré sur l’échelon approprié (la tactique, et non la stratégie), offre un vocabulaire élémentaire permettant de décomposer toute opération militaire en une série d’actions génériques, définies non par leurs intentions mais par leurs effets dans l’interaction : attaquer, surprendre, tromper, fatiguer, rompre ou menacer. Ces touches combinables, exposées dans un tableau synthétique (pp. 96-97), permettent de composer des séquences opératoires selon la logique d’une gamme musicale, et non pas en toute certitude mécaniste, reproductible more geometricum.
La sociologie historique comparée et l’anthropologie sociale du politique montrent que la guerre n’est nullement propre au monde moderne de l’État, bureaucratisé et militarisé.
Alexandre Escudier
Le « plan de guerre » assure ensuite la cohérence verticale entre lignes politique, stratégique et tactique, par un mécanisme adaptatif de diagnostic, de coordination et de révision continue — chaque niveau devant rester révisable à la lumière de celui qui le surplombe.
Enfin, l’« équation de paix » (p. 106), prolongement direct de la « loi d’espérance politico-stratégique » de Lucien Poirier 13 (p. 104), formalise les conditions cognitives et psychiques de l’acceptation de la défaite : la guerre cesse non lorsqu’un camp est militairement anéanti, mais lorsque le décideur — compte tenu de son centre de gravité brisé — estime que la poursuite du conflit coûterait davantage que ce qu’il reste à espérer. La guerre est ainsi pensée non comme un pur affrontement mécanique, mais comme un processus où la perception des coûts, la lucidité stratégique et la résilience morale du groupe combattant — y compris celle de l’arrière — jouent un rôle central. Ce triptyque analytique — clavier tactique, plan de guerre, équation de paix — permet à Dabila de relier l’échelle des manœuvres concrètes, la cohérence des plans opératoires et les finalités politiques dans une « syntaxe stratégique » complète (pp. 50, 95, 111), apte à rendre comparables des séquences historiques de guerre en apparence dissemblables.
L’Échiquier des seize modes stratégico-tactiques
L’analytique générale de Dabila aboutit à un échiquier combinatoire de seize « modes stratégico-tactiques » (p. 91), déduits de trois couples fondamentaux : offensive/défensive, tactique/stratégique, directe/indirecte. Cette matrice typologique complète permet de décrypter la conduite stratégique selon différents régimes d’action militaire possibles. Chaque mode peut être activé ou corrompu en fonction des contextes, des doctrines, des configurations politico-institutionnelles et des régimes de commandement.
Les stratèges ne se contentent pas de transmettre une intention politique : ils la reformulent en fonction des rapports de force, des intentions adverses, des contraintes héritées et des moyens disponibles.
Alexandre Escudier
Pour appliquer cette matrice à l’analyse historique, Dabila propose enfin trois critères empiriquement observables, permettant de classer typologiquement les cas :
— L’objectif stratégique global de la campagne — au niveau des finalités politiques — est-il de préserver un ordre établi (conservatisme) ou de le transformer (révisionnisme stratégique) ?
— Sur le plan tactique, l’acteur prend-il l’initiative de l’engagement militaire ou organise-t-il sa défense ?
— L’approche opératoire consiste-t-elle à frapper le centre de gravité adverse, ou bien à le contourner par des manœuvres de diversion, de surprise ou d’encerclement ?
La réponse à ces trois questions princeps permet de coder la séquence selon les seize configurations possibles de l’échiquier stratégique.
Loin d’une simple manie taxinomique dénuée d’enjeu cognitif et pratique, cette typologie vise à rendre identifiables et comparables des opérations issues de contextes historiques, technologiques ou culturels très hétérogènes, en réduisant leur complexité opératoire à un schéma d’ensemble intelligible. Elle fournit ainsi à l’analyste un levier pour diagnostiquer la forme stratégique dominante d’un affrontement donné, et au praticien une grammaire d’action pour choisir, à chaque étape d’une campagne, parmi les formes disponibles de conduite de la guerre — dont aucune, toutefois, n’est adéquate ou efficace à tous les coups.
La mise à l’épreuve comparative : un large échantillon historique de cas
Dans la seconde partie de L’Échiquier stratégique, Dabila déploie avec rigueur une galerie de cas historiques qui démontrent empiriquement la robustesse de sa grille analytique. Cette approche combinatoire — fondée sur les couples stratégie offensive/stratégie défensive, tactique offensive/défensive et approche directe/indirecte — permet une lecture transhistorique des séquences de guerre, tout en respectant les singularités contextuelles.
Chaque « mode stratégico-tactique » donne lieu à une mise en situation dans des périodes historiques et aires civilisationnelles contrastées : du monde grec antique à l’Empire ottoman, de la Chine des Royaumes combattants aux guérillas des XXe-XXIe siècles, Dabila recompose une cartographie comparative des formes concrètes de la guerre.
La stratégie défensive directe appuyée sur une tactique défensive directe se retrouve par exemple, de manière paradigmatique, dans l’héroïsme sacrificiel des Thermopyles (480 av. J.-C.) ou la défense de Verdun (1916), où l’on « choisit de laisser l’avantage à l’adversaire et [de] le laisse[r] lancer ses forces sur ses résistances » (p. 233). Ce mode d’attrition relève d’une logique de temporisation politique sous contrainte de puissance, où la victoire réside moins dans la conquête que dans la capacité à empêcher l’ennemi d’atteindre ses propres objectifs. Il permet à Dabila de réévaluer des séquences classiquement perçues comme des échecs tactiques en victoires stratégiques différées ou symboliques (au niveau de l’énergie morale du groupe belligérant d’alors et de ses réactivations mémorielles jusqu’à nous, pour tenir).
La guerre est pensée non comme un pur affrontement mécanique, mais comme un processus où la perception des coûts, la lucidité stratégique et la résilience morale du groupe combattant jouent un rôle central.
Alexandre Escudier
L’analyse de cas issus de sociétés segmentaires — dépourvues d’État sédentaire à légitimité rationnelle-légale, comme en Occident —, tels que certaines campagnes montées des Nuer, des Mongols ou des chefferies zouloues, permet de tester la robustesse de la grille jusque dans des configurations de conflictualité infra-étatiques ou alter-étatiques ; en effet, on sait désormais que les Mongols ont bien disposé d’une forme redoutable d’État itinérant 14. Citant Polyen (IIe siècle ap. J.-C.) à propos des peuples alentour (notamment les Parthes) faisant la guerre tout autrement que les « cités » gréco-romaines, a fortiori que l’empire de Marc-Aurèle, Dabila insiste à juste titre sur l’importance de ne pas « mépriser comme des hommes sans finesse ni malice » (p. 123) ces polities acéphales, dont la ruse et la mobilité forcent à requalifier des tactiques souvent jugées primitives comme relevant en réalité de stratégies conscientes, bien qu’indirectes.
La percée heuristique de la table des éléments stratégico-tactiques proposée par Dabila repose ainsi sur sa capacité à intégrer aussi bien les combats mécanisés voire numérisés des XXe-XXIe siècles que les embuscades segmentaires du Néolithique ; elle permet ainsi de révéler, au-delà de la diversité de ces conflits, une combinatoire transhistorique des formes de la guerre, finie et structurée et dénombrable.
Le comparatisme historique proposé, étendu au temps long et aux divers espaces de l’histoire humaine, met ainsi à l’épreuve l’analytique générale élaborée par Dabila dans la première partie de l’ouvrage, au niveau des « formes élémentaires » (p. 9) de la « grammaire stratégique » (p. 51). À la lecture des exemples, minutieusement restitués et analysés, le lecteur voit peu à peu se dégager des logiques stratégiques, là où il ne percevait jusqu’alors qu’un enchaînement de cas isolés, traités comme de pures singularités dans le style souvent besogneux des narrations historiques traditionnelles. Celles-ci étaient incapables de faire apparaître le choix stratégique effectivement opéré par les protagonistes d’alors parmi les possibles disponibles de la gamme pérenne. Ce sont les facteurs déterminants de ces choix, ainsi que leurs conséquences, que le « clavier tactique » construit par Dabila permet de révéler, en rendant visible l’architecture opératoire des décisions militaires, jusque-là dissoute dans la contingence du récit.
Pourquoi les acteurs d’alors choisissent-ils tel ou tel « mode stratégico-tactique » ? Avec quels effets, quel succès ou quel échec du « plan de guerre » (p. 98 et 109) ? Autrement dit, avec quelle capacité d’adaptation à la réaction ajustée de l’ennemi, lui-même anticipant les anticipations de l’autre ? C’est cette logique « inter-réactionnelle » sans fin que Dabila (p. 53).
Sociologiser l’histoire des idées stratégiques
Toutes ces dimensions sont analysées à l’occasion de chaque exemple d’affrontement armé.
Dans la section « Auteurs » propre à chacun des seize modes stratégico-politiques mis en exemple, Dabila examine la manière dont l’expérience vécue, ou l’observation minutieuse des engagements, a modifié après coup la pensée des stratégistes — c’est-à-dire des auteurs de doctrines. De même que la philosophie politique, selon l’image célèbre de Hegel, ne déploie ses ailes qu’au crépuscule des événements qu’elle thématise, la pensée stratégique ne se développe, elle aussi, qu’après la fête, à partir d’expériences historiques déjà advenues.
Le général de Gaulle dénonçait la tentation de transformer un mode d’action ponctuellement victorieux en une « métaphysique absolue de l’action » — posture vouée à l’échec, dès lors qu’elle fétichise un succès passé en l’érigeant en modèle indépassable.
Alexandre Escudier
Ces expériences lentement décantées donnent naissance à des doctrines stratégiques successives, souvent en conflit les unes avec les autres ; en effet, les stratéges se lisent, se répondent et s’opposent. Ainsi, Basil H. Liddell Hart 15, ardent promoteur de la stratégie « indirecte », vouait aux gémonies la tradition clausewitzienne, accusée d’avoir inspiré par sa glorification de la stratégie directe et de la montée aux extrêmes les états-majors aveugles, responsables de la boucherie de 1914-1918.
En mobilisant une large constellation d’auteurs issus de la tradition stratégique — de l’Antiquité chinoise ou gréco-romaine à la pensée classique et moderne européenne, de Sun Tzu à Joly de Maizeroy (inventeur des termes « la stratégique » en 1770 et « la stratégie » en 1777 16), de Jacques de Guibert à Clausewitz, Jomini ou Liddell Hart — Dabila propose une relecture structurée de l’histoire de la pensée stratégique à partir de sa propre analytique des seize modes stratégico-tactiques.
Si cette grille typologique s’avère conceptuellement exhaustive et empiriquement discernable dans les conflits armés documentés, elle autorise alors à reconfigurer l’historiographie des doctrines classiques, en suggérant de les envisager désormais non plus comme théories générales autosuffisantes, mais comme autant d’explicitations partielles, historiquement situées, de certains modes opératoires spécifiques. À y bien regarder, en effet, chaque stratégiste tend à privilégier un type de guerre, identifiable par sa structure stratégique et tactique dominante, et souvent réductible à un ou quelques modes de l’échiquier — parfois même à un seul — qu’il érige en paradigme de l’efficacité guerrière : « Les grands auteurs militaires ont, pour la plupart, conseillé un type de guerre, qui peut se ramener à quelques modes stratégico-tactiques et parfois même à un seul » (p. 123). Ce sont ensuite ces doctrines, ainsi polémiquement constituées, qui reconfigurent — partiellement ou en profondeur — les dispositifs de formation et de reprogrammation intergénérationnelle du raisonnement stratégique, au sein des appareils militaires ou politiques des polities. À ce titre, les sections « Auteurs » de Dabila ne relèvent ni d’une simple histoire ni d’une paraphrase érudite des idées stratégiques : elles esquissent une sociologie historique comparée des doctrines et des pratiques, attentive à leurs conditions d’émergence, à leurs effets de cadrage opératoire, comme à leurs angles morts structurants.
Théâtres de guerre contemporains : ultime mise à l’épreuve des outils d’analyse opératoire
Dans la section sur la « résurrection de Bellone » qui conclut son ouvrage (pp. 347-374), Dabila applique sa matrice à seize cases aux théâtres contemporains majeurs pour démontrer la robustesse opératoire de son modèle. La guerre d’Ukraine illustre d’abord une stratégie offensive avec tactique offensive directe (attaque massive et frontale dès février 2022), rapidement réorientée par la Russie vers une stratégie offensive avec tactique défensive indirecte (repli organisé, fortifications, saturation logistique), signe d’un échec de la charge initiale. En face, l’Ukraine combine une stratégie défensive avec tactique défensive directe dans les premiers mois (tenue de terrain, protection des villes), puis développe une tactique offensive indirecte — frappes à longue portée, usage de drones, ciblage des nœuds logistiques — tout en conservant une posture stratégique défensive.
L’agir stratégique suppose toujours une décision ad hoc — sous contrainte, dans l’incertitude des circonstances comme des conséquences, et face à un belligérant qui anticipe déjà les options probables de son adversaire.
Alexandre Escudier
Dans le Haut-Karabakh, le conflit de 2020 voit l’Azerbaïdjan mobiliser une stratégie offensive avec tactique offensive indirecte : reconquête méthodique par saturation, usage intensif des drones turcs Bayraktar, ciblage des lignes de ravitaillement et des centres de commandement. Inversement — à l’instar de la France de 1940, fustigée par de Gaulle —, l’Arménie reste figée dans une stratégie défensive avec tactique défensive directe, tenant ses positions sans adaptation au nouveau paradigme technologique. Dabila y voit une sorte d’ossification politique par défaut d’actualisation de la conduite stratégique.
En Syrie, le théâtre se structure selon une pluralité de modes dissemblables : le régime Assad adopte une stratégie défensive avec tactique offensive indirecte, misant sur l’usure des poches rebelles ; les Kurdes pratiquent une stratégie défensive avec tactique défensive indirecte (esquive, retraits, contrôle de couloirs) ; la Turquie intervient selon une stratégie offensive avec tactique indirecte (frappes ciblées, zones tampons, proxies), illustrant un environnement stratégico-tactique où aucun mode ne devient hégémonique.
Enfin, dans le conflit opposant Israël à l’« arc chiite », Dabila voit un affrontement permanent à seuil d’escalade modulable. Israël déploie une stratégie défensive avec tactique offensive indirecte : frappes préventives contre les infrastructures du Hezbollah ou les convois iraniens, cyberattaques, éliminations ciblées, élimination du Hamas dans la bande de Gaza en réaction à l’attaque du 7 octobre 2023 — le tout sans volonté de conquête territoriale mais afin de desserrer l’étau de l’axe dit « de la Résistance ».
En miroir, l’Iran poursuit une stratégie offensive adossée à une tactique défensive indirecte — réseau de proxies, encerclement graduel, saturation périphérique — relevant d’une combinatoire de modes visant moins la conquête que l’érosion de la liberté d’action adverse. Le théâtre qui en résulte est celui d’une conflictualité continue et non déclarée, où les effets sont calibrés pour gérer le seuil d’escalade, maintenir une pression stratégique durable, et ménager des fenêtres de bascule vers des séquences tactiques offensives. Cette démonstration finale de Dabila confirme sans équivoque que ses seize combinaisons typologiques ne constituent pas des modèles rigides, mais bien des repères analytiques tangibles, permettant de décrypter les conflits contemporains au-delà de leur plasticité stratégique et de leur hybridation technologique croissante.
L’« agir » stratégique contre la « corruption » des modes stratégico-tactiques
On insistera pour finir sur le fait que chaque chapitre consacré aux seize modes stratégico-tactiques se referme par une section intitulée « Corruption ». Il y a à cela une raison de fond, inhérente à l’analytique de la conduite stratégique, déployée dans la première partie. En effet, Dabila montre que si toutes les « formes générales » et « élémentaires » de la « syntaxe stratégique » (p. 111) sont, par nature, immédiatement concevables par chaque protagoniste suffisamment lucide quant à l’existence de ces possibles opératoires — à l’image des coups disponibles dans une partie d’échecs —, ceci n’implique nullement qu’un mode donné constitue une martingale valide en toute situation. Autrement dit, aucun régime stratégique n’est, en soi, garant ni de la justesse des objectifs politiques, ni de l’efficacité stratégico-tactique de la conduite de guerre : il est structurellement indéterminé, aussi bien du point de vue des finalités poursuivies par la politie que de la compétence de son état-major.
De même que la philosophie politique, selon l’image célèbre de Hegel, ne déploie ses ailes qu’au crépuscule des événements qu’elle thématise, la pensée stratégique ne se développe, elle aussi, qu’après la fête, à partir d’expériences historiques déjà advenues.
Alexandre Escudier
Le général de Gaulle avait pleinement conscience de ce point clef lorsqu’il dénonçait la tentation de transformer un mode d’action ponctuellement victorieux en une « métaphysique absolue de l’action » (cité p. 138) — posture rigide, vouée à l’échec dès lors qu’elle fétichise un succès passé en l’érigeant en modèle indépassable. C’est précisément ce moment de bascule qui définit la « corruption » d’un régime stratégique : lorsqu’une politie, à travers ses dirigeants politiques et militaires, cesse d’ajuster sa conduite à la singularité de la situation pour reconduire mécaniquement une forme d’action jadis efficace, croyant tirer sa légitimité du précédent historique plutôt que de l’analyse dynamique des inter-réactions guerrières du moment — que ce soit au niveau de la bataille, de la campagne ou de la séquence stratégique d’ensemble. A contrario, une conduite stratégique réellement efficace se doit d’être multi-modale, adaptative, c’est-à-dire en capacité — cognitive et opérationnelle — de pivoter à tout moment en fonction des dynamiques mouvantes du conflit.
Ces qualités, la conduite stratégique doit les incorporer, car l’agir stratégique suppose toujours une décision ad hoc — sous contrainte, dans l’incertitude des circonstances comme des conséquences, et face à un belligérant qui anticipe déjà les options probables de son adversaire et met en œuvre des contre-stratégies qu’il faut deviner sans pouvoir les prédire, dans l’espoir de maximiser son propre « plan de guerre » et de forcer une certaine « équation de paix ». Cette dynamique rend la stratégie irréductible à un savoir clos (homo sapiens) académiquement transmissible, à un plan parfait ou une recette garantie (homo faber). Elle engage une rationalité du conflit fondée sur l’incertitude de l’« agir » (homo agens) 17, où la pertinence d’un mode stratégico-tactique ne se juge qu’à l’aune du rapport mouvant entre finalités politiques, configurations concrètes du théâtre de guerre et enchaînement contingent des « inter-réactions » stratégiques.
Le nouveau Grand Débat des démocraties libérales du XXIe siècle
Alors que les démocraties libérales, ainsi que la proto-fédération inachevée qu’est l’Union européenne, redécouvrent avec stupeur les contraintes géopolitiques pesant sur la promesse moderne d’émancipation — égale dignité humaine, dans la sécurité, la prospérité et les libertés politiques et sociales, L’Échiquier stratégique de Dabila ramène au premier plan, épurée, la table des éléments de la « conduite stratégique » et de la « stratégie militaire » à travers les âges. Sa polémologie constitue, à ce titre, l’un des fondements les plus assurés d’une doctrine unifiée de la résilience démocratique (externe/interne), à l’heure de la montée conjuguée des périls autocratiques domestiques et néo-impériaux.
Toute la question maintenant lancinante est de savoir si les déséquilibres devenus flagrants de nos démocraties libérales — déséquilibres sociaux, fiscaux, budgétaires, identitaires et, partant, politiques — permettront de hisser le débat public à la hauteur de ce nouveau Grand Débat du XXIe siècle sur la conduite stratégique.
Qu’on s’y adonne ou s’y refuse, ce Grand Débat a d’ores et déjà lieu sous nos yeux, moyennant la triple contrainte conjuguée des autocraties néo-impériales continentales, des périls climatiques et environnementaux de l’Anthropocène, et de l’ingouvernabilité chronique des régimes démocratiques. La difficulté majeure tient à ce que ces régimes de prospérité et de liberté, si durablement déshabitués aux enjeux de sécurité et aux misères concrètes de la guerre sur leur propre sol, peinent désormais à hiérarchiser leurs objectifs politiques internes et externes. Cette incapacité s’aggrave du fait que ces objectifs entrent en concurrence pour l’allocation de marges de manœuvre budgétaires désormais fortement contraintes — comme en témoigne la prolifération de mouvements sociaux désencastrés des traditions syndicales, dont la gestion absorbe à son tour une part non négligeable des capacités budgétaires et sécuritaires de l’État. On se trouve dans un cercle vicieux. Le risque systémique, pour les démocraties, est dès lors qu’elles échouent à penser la conduite stratégique de leur politie — et de leur système d’alliance — soit parce qu’elles demeurent paralysées de l’intérieur par une hyperconflictualité structurelle, soit parce qu’elles ne parviennent plus à appréhender leur environnement international autrement qu’avec les coordonnées de l’humanitarisme moral, qui ne suffisent plus à penser la situation : non pas la penser éthiquement, bien sûr, mais opérationnellement et dans l’urgence.
Sources
- David Galula, Contre-insurrection : théorie et pratique, préface du général d’armée David H. Petraeus, Economica, 2008.
- Qiao Liang et Wang Xiangsui, La Guerre hors limites, Payot & Rivages, 2006.
- Lucien Poirier, La Crise des fondements, Economica, 1994.
- Antony Dabila, L’Échiquier stratégique. La grammaire de la guerre à travers les âges, Seuil, 2025. Le numéro de page sera, dans ce qui suit, directement indiqué entre parenthèses, au fil du texte.
- Antony Dabila est chercheur associé au Centre de Recherches Politiques de Sciences Po (CEVIPOF, Paris) et co-animateur du Fonds de sociologie historique Jean Baechler. Ses travaux portent sur les mutations stratégiques contemporaines, les doctrines et systèmes militaires, et les tensions entre sécurité (interne/externe), technologie et démocratie dans les sociétés libérales. Il s’intéresse notamment aux conditions de résilience des institutions démocratiques face aux menaces hybrides et aux reconfigurations géopolitiques en cours.
- J. Baechler, Précis de la démocratie, Calmann-Lévy/UNESCO, 1994.
- Alexandre Escudier, « Une ‘grande stratégie’ de gauche est-elle possible ? Accélération géostratégique et socialisme démocratique », revue Germinal, n° 4, mai 2022, pp. 195-208.
- Raymond Aron, Paix et guerre entre les nations, Calmann-Lévy, 1962.
- Jean Baechler, Les phénomènes révolutionnaires, PUF, 1970, p. 30 ; Guerre, histoire et société. Éléments de polémologie, Hermann, 2019. Voir aussi la série encyclopédique sur tous les aspects sociologiques de la guerre : Jean Baechler et al. (dir.), L’Homme et la Guerre, Hermann, 2014-2019.
- J. Baechler, Guerre, histoire et société. Éléments de polémologie, op. cit., p. 10.
- André Beaufre, Introduction à la stratégie, Colin, 1963, et Id., La Stratégie de l’action, Armand Colin, 1966.
- Christophe Darmangeat, Casus belli. La guerre avant l’État, La Découverte, 2025.
- Lucien Poirier, Le Chantier stratégique, entretiens avec Gérard Chaliand, Hachette, 1997.
- Marie Favereau, La Horde : comment les Mongols ont changé le monde, Perrin, 2023.
- Basil Henry Liddell Hart, Stratégie [1941-42], Perrin, 1998.
- Paul-Gédéon Joly de Maizeroy, Institutions militaires de l’Empereur Léon le philosophe, tome I, 1770, p. 6 et Id., Traité de la guerre, Paris, 1777, p. 1-2. Voir aussi la mise au point de Alexandre David, « ‘L’interprète des plus grands maîtres’. Paul-Gédéon Joly de Maizeroy, l’inventeur de la stratégie », in Stratégique, vol. 99, n° 1, 2010, pp. 63-85, en particulier pp. 79-80.
- J. Baechler, Agir, faire, connaître, Hermann, 2008.