Depuis le 7 octobre 2023, la guerre entre Israël et le Hamas est un exemple probant de la mobilisation stratégique de l’espace informationnel en soutien des opérations militaires. Que ce soit dans le cas de l’opération « Déluge d’al-Aqsa » lancée par le Hamas et ses alliés le 7 octobre 2023, ou lors de l’opération israélienne « Glaives de fer » déclenchée en réponse le jour même, les belligérants ont intégré la dimension informationnelle à leur stratégie afin de convaincre les opinions publiques internationales de la justesse de leur cause et de leur légitimité à agir.
Ce conflit illustre à ce titre la manière dont le champ informationnel est devenu stratégique dans les opérations militaires contemporaines, faisant du champ des perceptions un front décisif de la confrontation.
Pour le Hamas, acteur non étatique qualifié de terroriste par l’Union européenne et les États-Unis, en position d’infériorité militaire, le soutien international est crucial afin de compenser son manque de capacités conventionnelles et de restreindre, voire d’empêcher, une riposte israélienne. Pour Israël, ce même soutien est indispensable pour tenter de légitimer sa réponse militaire et assurer la reconstitution de ses stocks d’armements, son projet politique de conquête territoriale et ses manquements répétés au droit international.
Au niveau géopolitique, les lignes de fracture sont nettes : les pays du monde occidental ont soutenu Israël, du moins au début du conflit, tandis que le « Sud global » appuie la cause palestinienne. Les deux camps disposent en outre de membres parfois très actifs au sein de leurs diasporas respectives, qui relaient, amplifient et mobilisent des segments entiers des sociétés civiles à travers le monde. À cela s’ajoutent les prises de position de plusieurs États, qui s’efforcent de tirer parti de ce conflit pour renforcer leur poids sur la scène internationale, à l’image de la République islamique d’Iran mais également de la Russie.
Dans le conflit qui les oppose depuis le 7 octobre 2023, comment les Forces de défense israéliennes et le Hamas s’approprient-ils les médias et réseaux sociaux ? Quels usages les soutiens des deux camps font-ils de ces moyens d’information — comme des relais diasporiques — pour mobiliser l’opinion mondiale et défendre la légitimité de leur cause ?
La réorganisation institutionnelle des acteurs informationnels après le 7 octobre
La riposte militaire israélienne « Glaives de fer » visant à éliminer le Hamas à Gaza a démontré que les réussites tactiques sur le terrain ne peuvent faire l’économie de succès sur le plan de la guerre des opinions. Afin de mener à bien son effort de guerre, Israël est dépendant de la communauté internationale, et principalement des États-Unis. Le soutien de Washington lui est nécessaire pour financer son effort de guerre, reconstituer ses stocks, mais également pour assurer sa position stratégique.
Pour le Hamas, l’infériorité qualitative et numérique de ses forces armées le place dans une stratégie du faible vis-à-vis du fort qu’est Israël. Ainsi, la pression internationale pour mettre fin à la réponse militaire israélienne est un levier crucial pour compenser son incapacité tactique à obtenir une victoire.
Israël : la hasbara 2.0
Les institutions israéliennes
Les efforts conduits au niveau politique pour justifier les opérations militaires d’Israël et sa position vis-à-vis de la Palestine participent de ce que les Israéliens appellent la hasbara. De l’hébreu laasbir, qui signifie « expliquer », la hasbara se situe à mi-chemin entre la diplomatie publique et la propagande, et vise à présenter les actions de l’État sous un angle rationnel, en explicitant les raisons qui pourraient les justifier 1.
Au cours des dernières années, la hasbara a été placée sous la responsabilité de différentes administrations en Israël. Un ministère, chargé de la coordination stratégique et des relations médiatiques, lui a même été consacré de 2022 jusqu’au 12 octobre 2023, jour où démissionne sa ministre Galit Distel-Atbaryan.
Ce jour-là est créé en remplacement du ministère précédent un bureau en charge de la hasbara au sein des services du Premier ministre : c’est le National Public Diplomacy Directorate. Il est en relation directe avec le cabinet de guerre de Benjamin Netanyahou, démontrant ainsi l’importance particulière de la hasbara dans la stratégie informationnelle israélienne depuis le 7 octobre.
Ce bureau a notamment été créé dans le but de coordonner différentes institutions impliquées dans la diplomatie publique civile, telles que :
- Le ministère des Affaires étrangères 2 (MAE), qui a vu son rôle évoluer entre les différents ministres en activité (Eli Cohen de décembre 2022 à janvier 2024 ; Israël Katz de janvier 2024 à novembre 2024 ; Gideon Saar depuis novembre 2024). Le ministre actuel a demandé en 2025 que soit alloué à son ministère un budget de 150 millions de dollars américains pour la hasbara ; il a également convoqué la même année différentes ONG impliquées dans la hasbara lors d’une conférence ayant pour but de fixer les objectifs de « la guerre informationnelle pro-israélienne » 3
- . Les narratifs du MAE israélien sont également relayés par les ambassadeurs et les comptes officiels des ambassades sur les réseaux sociaux.
- Le ministère de la Diaspora, chargé de diriger et de coordonner les actions informationnelles menées par les citoyens israéliens et les communautés juives établies à l’étranger. Ce ministère est également en charge de lutter contre les narratifs antisémites et de produire des contre-narratifs sur ce sujet. Le poste est occupé par Amichai Chikli — dont les deux parents sont de nationalité française. C’est lui qui a organisé en mars 2025 la visite de responsables politiques français d’opposition en Israël, notamment de Jordan Bardella, du Rassemblement National.
- Le ministère de la Défense est également associé à ces discussions en anticipation de phases tactiques pouvant susciter de fortes réactions (frappes sur les hôpitaux, entrée dans les villes de Rafah et de Gaza-ville). Les FDI disposent à cet égard d’une forte autonomie, du fait du rôle joué par l’Unité du porte-parole de Tsahal. Avec une newsroom, qui fonctionne 24 heures sur 24, et des effectifs de plus d’un millier de personnes, cette unité assure la communication opérationnelle tout en ayant la charge de répondre aux sollicitations des journalistes nationaux et étrangers. On doit notamment à cette structure la production du film de 48 minutes Bearing Witness, documentant les massacres du Hamas ; entre autres lieux, il fut diffusé à l’Assemblée nationale française 4
Le ministre de la Défense, le chef d’état-major (Herzi Halevi de 2023 à mars 2025, puis Eyal Zamir), et le porte-parole officiel des forces armées israéliennes (Daniel Hagari de 2023 à mars 2025, puis Effie Defrin) disposent aussi de comptes sur les réseaux sociaux ; ils assurent une grande visibilité à leurs messages. Leurs narratifs sont alors relayés par plusieurs représentants dans différentes langues, notamment Olivier Rafowicz en France.
La capacité de ces acteurs militaires à utiliser les innovations technologiques et à casser les codes de la communication institutionnelle, leur donne une visibilité particulière. Les FDI se sont pleinement appropriées les codes de communication issus des réseaux sociaux (utilisation de l’humour et de la provocation 5).
La société civile israélienne
La société civile israélienne a toujours été un relais important de la hasbara ; au fil des années, cette politique 6 a été investie par des acteurs non-gouvernementaux.
- L’ONG StandWithUs, par exemple, est impliquée dans la diplomatie publique israélienne depuis 2001. Subventionnée par l’État israélien dans le but de sensibiliser l’opinion publique internationale en faveur d’Israël, elle est née aux États-Unis et portée par Roz Rothstein. Elle est l’une des organisations sionistes les plus influentes, avec plus de dix-huit bureaux à travers le monde, et plus de 25 millions de dollars américains de budget annuel.
- D’un autre côté, l’association DiploAct, créée en 2016 est, elle aussi, particulièrement active dans la défense d’Israël dans le monde, notamment à travers l’organisation de séjours en Israël pour les jeunes ou d’interventions dans les universités. Sa branche DiploAct France est l’une des plus importantes de l’ONG.
La hasbara étant un concept connu et répandu au sein de la société israélienne, beaucoup des citoyens de l’État hébreu perçoivent toute critique envers Israël comme un échec de cette politique. Ce sentiment face à la propagande du Hamas semble avoir été particulièrement partagé au lendemain de l’attaque du 7 octobre 7.
En décembre 2023, deux mois après les attaques, l’Institute for National Security Studies a proposé une cartographie des initiatives civiles de la hasbara. Ses chercheurs dénombrent 120 « operations rooms » ou forums de discussion, dont une centaine de bases de données servant à soutenir un narratif pro-israélien ; parmi cette centaine de structures, 40 organisations développent des outils technologiques spécifiques. Sur les forums, permettant de se concerter sur des modes d’actions, 72 sont bénévoles : 13 d’entre eux émanent d’organisations qui existaient avant la guerre 8, le reste a été créé après le 7 octobre, démontrant ainsi l’augmentation significative de la mobilisation de la société civile.
La constitution d’un réseau d’organisations civiles, qui peuvent servir de relais tout en proposant des contenus perçus comme plus authentiques ou plus viraux, est efficace : elle a l’avantage de casser les codes de la communication institutionnelle, qui est paradoxalement perçue comme peu fiable par certaines audiences. Cela permet également de limiter l’exposition des acteurs étatiques, et donc de les préserver — puisque ce ne sont pas eux qui agissent.
Pour autant, l’action du National Public Diplomacy Directorate concerne également la coordination d’acteurs privés pour soutenir la communication officielle israélienne. Depuis le lancement de l’opération « Glaives de fer », le National Directorate of Hasbara s’est appuyé alternativement sur des ONG et des initiatives civiles plus ou moins spontanées ; de manière plus directe, il a eu recours à des influenceurs 9. Selon le ministère des Affaires étrangères israélien, près d’un millier d’entre eux, de toutes nationalités, ont été approchés 10.
Organisations civiles menant la lutte informationnelle à l’étranger
Les sociétés civiles européennes et américaines sont également ciblées par des organisations israéliennes liées à différents degrés au gouvernement.
Israeli Spirit
Parmi les initiatives de la société civile israélienne en faveur de la diplomatie publique, l’ONG Israeli Spirit a été l’une des premières à naître dès le lendemain du 7 octobre.
Elle revendique près de 25 000 volontaires pour mener des opérations informationnelles défensives, notamment contre l’antisémitisme et la propagande du Hamas. Elle a été également la première à créer des bases de données Google Drive avec des narratifs et hashtags à diffuser massivement, qui ont été repris ensuite sur les réseaux sociaux 11. Cette organisation s’est rapidement structurée et a trouvé des soutiens auprès du gouvernement israélien : en témoigne en 2023 la visite du ministre des Affaires étrangères en poste, Eli Cohen 12.
IDSF – Forum pour la défense et la sécurité d’Israël (IDSF)
L’IDSF regroupe plus de 20 000 officiers et commandants de réserve ou vétérans de l’armée israélienne.
Par l’entremise de l’agence B&K, spécialisée dans la communication stratégique à l’échelle de l’Union européenne, elle a contacté plusieurs chercheurs dans les think tanks et instituts de recherche européens afin de leur présenter les narratifs israéliens.
Le Forum a pour cela produit des points de situation hebdomadaires afin d’accompagner les mouvements militaires de l’opération « Glaives de fer », tout en proposant aux chercheurs identifiés des vidéos de briefing et des éléments de documentation. Les réservistes de cette organisation participent ainsi à la création et à la diffusion d’éléments de langage soutenant la politique israélienne par des acteurs tiers, bénéficiant d’un rôle de prescripteur dans le débat public des États européens.
Les relais médiatiques à l’échelle mondiale
Ces efforts de production, de coordination et de diffusion de narratifs soutenant la politique gouvernementale israélienne et l’opération militaire « Glaives de fer » sont le fruit d’une collaboration plus ou moins formelle entre des initiatives privées, des organisations non gouvernementales et des institutions étatiques israéliennes.
Afin d’atteindre une importante visibilité, Israël a pu bénéficier de relais de la part des influenceurs israéliens — comme Amir Tsarfati — mais aussi internationaux — américains, européens 13, indiens 14). L’État hébreu a pu compter tant sur des membres de la diaspora israélienne que sur d’autres — alignés sur l’idéologie du gouvernement Netanyahou : influenceurs MAGA, ultra-conservateurs ou membres de la deuxième administration Trump 15).
Cette alliance idéologique s’est manifestée lors de l’intervention du ministre de la Diaspora israélien Amichai Chikli (évoqué supra) aux conférences de la CPAC 2025 à Budapest 16 et de la NatCon 2024 à Bruxelles 17. Ces deux événements d’origine américaine, désormais bien implantés en Europe, réunissent des leaders et influenceurs politiques ultraconservateurs 18. Amichai Chikli y a notamment défendu la place d’Israël comme défenseur de la « civilisation judéo-chrétienne » face à la « menace islamiste ».
I24News
Malgré l’importance croissante des influenceurs, le rôle des médias traditionnels reste décisif pour diffuser et légitimer les narratifs. La chaîne israélienne d’information en continu I24news, fondée par le franco-israélien Patrick Drahi en 2013 sur le modèle de France24, joue à cet égard un rôle important dans l’espace médiatique francophone puisqu’elle diffuse en hébreu, en arabe, mais également en anglais et en français. Pour son PDG, Frank Melloul, il s’agit de créer une « alternative à Al Jazeera » pour présenter le point de vue israélien 19.
La ligne éditoriale portée par cette chaîne soutient la ligne politique du Likoud 20, et les interventions de Benjamin Netanyahou y sont largement diffusées : les colonies y sont présentées comme des « implantations » ; et la Cisjordanie est appelée « Judée-Samarie ».
Lors de l’attaque terroriste du 7 octobre 2023, la chaîne a diffusé une information non vérifiée selon laquelle 40 bébés auraient été retrouvés décapités dans le kibboutz de Kfar Aza. Cette rumeur, d’abord présentée comme un fait, a été massivement reprise par de nombreux médias internationaux et relayée par l’ancien président américain Joe Biden, renforçant son impact émotionnel dans l’opinion publique mondiale ; elle a depuis fait l’objet d’un démenti 21.
L’organisation de la sphère informationnelle pro-palestienne
Le Hamas
Le Hamas a très tôt investi le champ de la communication, avec un triple objectif : se positionner comme le représentant légitime du peuple palestinien, en particulier depuis sa prise de pouvoir en 2007 et l’expulsion de l’Autorité palestinienne de la bande de Gaza ; dénoncer les actions israéliennes prises à son encontre, qu’elles soient militaires ou politiques ; et mobiliser la communauté internationale à son profit.
Dès sa prise de pouvoir à Gaza en 2007, le mouvement a en effet cherché à se doter d’instruments médiatiques comparables à ceux d’un État — radio, chaînes de télévision, séries télévisées, agences de presse, sites web 22. En s’appropriant les outils du web, le Hamas a investi des champs sociaux et culturels plus larges, intégrant la vie quotidienne, la jeunesse et la sphère associative dans ses récits. Cette communication numérique s’ancre dans une logique de légitimation sociale, visant à présenter l’organisation terroriste comme l’expression la plus authentique de la « palestinité » 23.
En 2018, les manifestations dites de la « marche du retour » ont été largement diffusées, sans que le Hamas ne revendique directement la paternité du mouvement 24. Au cours de celles-ci, des milliers de Gazaouis ont convergé vers la frontière avec Israël afin de commémorer la Nakba — l’expulsion des Palestiniens lors de la création d’Israël en 1948 — et de dénoncer le blocus israélien imposé à l’enclave.
En 2021, la crise au cours de laquelle des colons israéliens ont provoqué des Palestiniens dans le quartier de Cheikh Jarrah à Jérusalem Est, et qui fut suivie par des heurts sur l’esplanade des Mosquées à Jérusalem, a donné lieu à un affrontement militaire entre le Hamas et Israël 25. Ce conflit s’est accompagné d’un emballement sur les réseaux sociaux de la part des sociétés civiles israélienne et palestinienne. 26.
Les brigades Izz el Din al Qassam
Le 7 octobre 2023 voit l’émergence d’un acteur majeur de la communication du Hamas, les Brigades Izz el Din al Qassam, classées comme organisation terroriste par les États-Unis et l’Union européenne. Leur communication passe quasi exclusivement par la plateforme Telegram, qui propose moins de modération que Facebook, Instagram ou X — plateformes sur lesquelles les Brigades sont interdites.
Leur compte Telegram, qui existe depuis 2015, a vu croître son nombre d’abonnés de manière très significative dans les jours suivant le 7 octobre, avant d’être interdit au sein de l’Union le 25 octobre 2023 27.
Elles diffusent des vidéos préalablement montées et scénarisées, où elles se présentent comme une organisation militaire professionnelle. Cette communication institutionnalisée met en scène les capacités militaires de l’organisation — destruction des capteurs de la barrière intelligente à la frontière de Gaza, prises des bases militaires en Israël, destruction de chars israéliens. La qualité des vidéos démontre que les Brigades ont investi dans du matériel professionnel pour filmer leurs opérations, illustrant leur prise en compte de la dimension stratégique du champ informationnel.
Dans le même temps, les civils palestiniens, ou les membres du Hamas, diffusent et/ou partagent via leurs
réseaux personnels des vidéos des crimes perpétrés le 7 octobre 2023 : décapitation, pillage, dégradation de cadavres. Ces vidéos n’ont pas été partagées sur les comptes officiels du Hamas, qui a cherché à soigner son image pour apparaître comme un acteur étatique plutôt que comme une organisation terroriste.
À la suite du déclenchement de l’opération militaire israélienne « Glaives de fer », la communication officielle du Hamas s’est employée à produire des vidéos des otages visant à accroître les dissensions à l’intérieur de la société civile israélienne sur la nécessité d’un cessez-le-feu.
Abu Obeida
La personne d’Abu Obeida, porte-parole officiel des Brigades, émerge après le 7 octobre comme figure centrale de la communication du Hamas, bien qu’il soit actif depuis 2007 28.

Ses interventions reprennent des codes visuels précis : il apparaît le visage masqué, coiffé d’un keffieh rouge ne laissant voir que ses yeux. En arrière-plan figure l’Esplanade des Mosquées, de manière à renforcer l’image du mouvement comme le défenseur d’Al-Aqsa, et asseoir sa légitimité dans le monde arabe et musulman.
Abu Obeida est un acteur central de la politique informationnelle du Hamas ; c’est pour cette raison qu’il a été tué par une frappe israélienne ciblée le 30 août 2025 à Gaza.
Le bureau politique
Historiquement, le Hamas a séparé ses activités militaires de sa branche politique, afin de conserver la légitimité de cette dernière 29 à l’international. Les membres du bureau politique du Hamas sont en exil, principalement au Qatar et au Liban. Ils ne disposent pas de comptes officiels sur les réseaux sociaux accessibles en Europe, et s’expriment le plus souvent en arabe, ce qui limite leur audience dans les sphères non arabophones. Leur communication est principalement tournée vers les pays de la région, afin de sécuriser l’existence en exil du bureau politique du Hamas, de prévenir toute forme de normalisation entre les pays arabes et Israël, et de mobiliser les opinions publiques musulmanes pour la cause palestinienne.
En janvier 2024, les membres du bureau politique ont produit un document en anglais intitulé « Our narrative Operation al-Aqsa Flood » à destination des audiences occidentales.
Ce document, structuré en cinq parties, revient sur les objectifs de l’opération « Déluge d’Al Aqsa », son déroulé et ses conséquences.
Le Hamas s’y présente comme un acteur soucieux du droit international et affirme ne pas avoir voulu cibler les civils israéliens ; il y reconnaît la légitimité de la Cour pénale internationale 30.
Le ministère de la Santé
Le ministère de la Santé est l’autorité sanitaire officielle à Gaza, placé sous l’autorité du Hamas depuis sa prise de pouvoir en 2007.
Il constitue aujourd’hui la principale source de données locales sur les morts et les blessés gazaouis. Le compte Telegram du ministère de la Santé, qui publie régulièrement ce décompte, est toujours accessible dans l’espace européen 31.
Ces chiffres ont donc régulièrement fait l’objet de controverses, et leur fiabilité a été mise en doute, au motif que le Hamas conserve un contrôle institutionnel direct sur cette administration et que les bilans ne distinguent pas toujours clairement les combattants des civils. Cependant, à ce jour, rien ne permet d’établir que les décomptes du ministère relèvent d’une stratégie de communication délibérément instrumentalisée. En pratique, plusieurs vérifications menées par l’ONU, des ONG et des experts indépendants montrent que, malgré des marges d’erreur et des biais possibles, les chiffres produits par le ministère se révèlent généralement cohérents et proches de la réalité en matière d’ordre de grandeur 32. Ainsi, si leur usage reste politiquement sensible et contesté, ces données demeurent une référence incontournable pour analyser l’impact humanitaire du conflit.
Les civils gazaouis
Depuis 2007, l’État israélien impose un blocus strict à la population gazaouie et rend particulièrement difficile l’accès à la bande de Gaza pour les journalistes internationaux.
Depuis le 7 octobre 2023 et le début de l’opération militaire israélienne, ce territoire est devenu quasiment inaccessible ; les images parvenant de Gaza sont presque exclusivement produites par des journalistes et photographes gazaouis ou par la population civile elle-même. Aussi les habitants de la bande de Gaza ont-ils un rôle particulièrement important dans la communication pro-palestinienne.
Alors que les images sont au centre de la guerre informationnelle, il est à ce jour difficile d’évaluer l’implication que pourrait avoir le Hamas dans la production des vidéos et photographies montrant des scènes de bombardement et de famine à Gaza.
Les civils sont en tout cas une source importante d’illustration du conflit pour les médias internationaux — ce qui fait d’eux des acteurs informationnels clés.
Le rôle d’Al Jazeera et son influence sur les audiences pro-palestiniennes
La presse étrangère a difficilement accès à la bande de Gaza, ce qui complique la couverture médiatique du conflit et crée une situation de dépendance vis-à-vis des vidéos diffusées directement sur les réseaux sociaux par les populations civiles. De plus, de nombreux reporters palestiniens ont été tués au cours de ce conflit, comme l’ont documenté les rapports de Reporters Sans Frontières, qui fait état de plus de 210 journalistes tués en 23 mois de guerre 33.
Dans ce paysage, Al Jazeera occupe une place centrale. Très présente sur le terrain, la chaîne qatarie a été l’un des seuls médias internationaux capables de couvrir Gaza 34. Sa branche numérique, AJ+, relaie en continu les vidéos et images produites sur place, et dispose d’une grande popularité en France, notamment chez les 18-55 ans 35.
Al Jazeera se démarque par un traitement appartenant supposément au prisme « israélo-centré » des médias occidentaux, dénoncé par les sphères pro-palestiniennes. Le 7 octobre 2024, la chaîne a produit un reportage fait par sa cellule d’investigation, documentant de potentiels crimes de guerre commis par les forces israéliennes dans l’enclave, à partir de vidéos et photos diffusées par les soldats israéliens eux-mêmes sur les réseaux sociaux 36.
La chaîne a été interdite en Israël dès mai 2024, une décision dénoncée par le journal israélien Haaretz comme une volonté de museler la presse 37.
La cause pro-palestinienne instrumentalisée par les acteurs pro-Iran
Enfin, si le Hamas détient son propre agenda et sa propre stratégie communicationnelle, la République islamique d’Iran dispose de son côté de capacités techniques (inauthentiques) dans le champ informationnel lui permettant d’instrumentaliser la cause palestinienne à son profit.
En effet, les manœuvres informationnelles servant des narratifs pro-palestiniens peuvent également servir les intérêts iraniens. La République islamique d’Iran, premier soutien militaire du Hamas, a donc largement investi la sphère informationnelle dans le but principal de s’immiscer dans le débat public de ses rivaux occidentaux, à savoir Israël, les États-Unis, mais également la France. La puissance médiatique de la République islamique d’Iran, son influence sur les mouvances chiites et sa faculté à intégrer des sphères pro-palestiniennes internationales, lui ont ainsi permis de promouvoir des narratifs pro-iraniens et/ou anti-occidentaux en instrumentalisant la situation à Gaza.
L’évolution des récits depuis le 7 octobre
Les récits pro-israéliens
Le 7-Octobre comme point de départ
L’une des stratégies narratives des sphères pro-israéliennes a été de désigner les actes du 7 octobre 2023 comme l’unique point de départ du conflit en cours à Gaza.
Si les événements ont été vécus comme une véritable catastrophe sécuritaire par l’ensemble de la population israélienne, le gouvernement de Benjamin Netanyahou a systématiquement remobilisé ce narratif au cours des deux ans de conflit afin de justifier sa stratégie militaire ; pourtant, le nationalisme palestinien est antérieur à la création de l’État d’Israël, et les conflits opposant Israéliens et Palestiniens se déroulent depuis le début du XXe siècle.
Première année : convaincre l’Occident des dangers du Hamas
« Hamas = ISIS »
Les discours produits par les sphères pro-israéliennes se sont donc principalement attardés sur la dénonciation des actes du Hamas, et sur le danger que l’organisation terroriste représente pour Israël et pour l’ensemble de l’Occident.
Dès le lendemain du 7 octobre, un premier récit a été observé comparant le Hamas et l’État islamique.
Dans les jours qui ont suivi l’attaque du Hamas et la découverte des villages touchés, plusieurs photographies d’un drapeau de l’État islamique, prétendument retrouvé sur place 38, ont été partagées par la plupart des acteurs précédemment cités, conférant au narratif une forte visibilité. En s’appuyant sur cette image, le récit « Hamas = ISIS » a été largement observé au sein des sphères pro-israéliennes — y compris étatiques 39.
Le but de cette comparaison réside principalement dans le fait de sensibiliser les opinions publiques et les gouvernements des pays occidentaux touchés par Daech, en ravivant le souvenir des multiples attentats djihadistes sur le sol européen.
« The West Is Next »
Un autre récit à destination d’un public occidental a été promu par les sphères pro-israéliennes, présentant l’Europe, et plus généralement l’Occident, comme les prochaines cibles du Hamas 40. Ce narratif est souvent associé à la théorie selon laquelle Israël serait le dernier rempart pour l’Europe face à la menace islamiste 41.
Le même récit a trouvé un écho important auprès des sphères politiques de droite et d’extrême droite occidentales 42 souhaitant relayer des discours portant des caractéristiques islamophobes.
« Bring Them Home »
Le mouvement « Bring Them Home » a appelé à une libération sans conditions des otages israéliens détenus dans la bande de Gaza. Ce narratif a été porté par les familles des otages, regroupées au sein du Hostages and Missing Families Forum. Il a été repris dans des campagnes visuelles — affiches sur les otages dans l’espace public, graffitis « Bringthemhome », puis ruban jaune sur les vêtements — afin de faire des otages une cause nationale et mondiale.
En Israël, ce récit a d’abord servi à contester l’intervention militaire « Glaives de fer ».
Alors que le Premier ministre Benjamin Netanyahou mettait en avant le double objectif d’éliminer le Hamas et de ramener les otages, les familles et leurs soutiens insistaient sur l’urgence d’un retour immédiat, parfois au prix de compromis politiques ou militaires. Le narratif fonctionnait donc comme un outil de pression interne, dénonçant l’instrumentalisation des otages, et révélant une fracture entre l’agenda politique (guerre totale) et l’agenda humanitaire (sauvetage des otages).
Dans le contexte français, le même narratif a été réinvesti par les sphères pro-israéliennes pour critiquer les dénonciations des souffrances des Gazaouis, au motif qu’elles ne prenaient pas en compte les otages. Le narratif « Bring Them Home » a été utilisé pour demander à ce que la compassion envers les Israéliens soit la condition implicite et préalable à toute discussion sur les victimes palestiniennes. Cela vise à marginaliser ou à décrédibiliser les voix pro-palestiniennes, perçues comme sans empathie ou même hostiles aux victimes israéliennes.
Ainsi, en octobre 2024, la déclaration du président de la République Emmanuel Macron évoquant la fin des livraisons d’armes françaises à Israël à l’antenne de France Inter a suscité de vives protestations dans les sphères pro-israéliennes, où le président a été accusé de manquer de solidarité et de détourner l’attention du drame des otages. L’épisode illustre la manière dont la centralité du narratif des otages peut être utilisée pour recadrer le débat public, disqualifier d’autres priorités — ici l’appel à limiter l’effort militaire israélien — et replacer la souffrance israélienne au cœur de l’espace informationnel et politique 43.
Sur les réseaux sociaux, les publications relatives aux victimes palestiniennes ont suscité de nombreux commentaires pro-israéliens utilisant le hashtag #BringThemHome, transformant tout espace de discussion sur Gaza en rappel constant du sujet des otages israéliens.
Cet usage a amplifié la visibilité du narratif et servi à court-circuiter la mise en avant de la souffrance palestinienne, en imposant, de fait, une hiérarchie des victimes.
Deuxième année : justifier la politique militaire et la situation humanitaire à Gaza
« Le dernier effort »
Le récit pro-israélien a évolué au fur et à mesure de l’avancée militaire à Gaza.
L’objectif lors de la deuxième année du conflit n’était alors plus de justifier l’offensive militaire de Tsahal, mais de légitimer le maintien des forces armées au sein de la bande de Gaza. L’État hébreu et ses soutiens ont alors défendu les différents plans pour Gaza promus par Benjamin Netanyahou et Donald Trump, aussi bien sur des questions de déplacement de la population gazaouie, du contrôle militaire israélien, que des politiques d’aides humanitaires. Ce narratif s’est appuyé sur les déclarations récurrentes de B. Netanyahou demandant à sa population un dernier effort, étant « à un pouce de la victoire » (כפסע מניצחו), ou demandant la « victoire totale 44 » (ניצחון מוחלט).
« Pollywood/Gazawood »
Ainsi, la stratégie communicationnelle israélienne s’est concentrée sur la délégitimation de tout organisme ou individu extérieur impliqué dans la médiatisation ou la politique d’aide humanitaire à Gaza.
L’UNRWA, l’ONU, Amnesty International, Reporters Sans Frontières et les journalistes présents à Gaza ont été pointés du doigt pour leur proximité supposée avec le Hamas et/ou leur comportement supposément antisémite.
Ces derniers ont également été accusés de participer à la politique communicationnelle dite « Pallywood » (ou « Gazawood » 45) qui serait, selon les sphères pro-israéliennes, une stratégie de mise en scène des morts civiles et de la famine à Gaza 46.
À l’inverse, la politique d’aide humanitaire israélo-américaine a été défendue et présentée comme efficace, et ce malgré les vives polémiques concernant les drames survenus lors des distributions de nourriture et la famine avérée de la population gazaouie.
« Am Yisrael Chai »
Le narratif « Am Yisrael Chai » (« Le peuple d’Israël vit ») fait référence à l’histoire juive et à sa résilience.
Il fut notamment mobilisé comme symbole de survie lors de la libération du camp de Bergen-Belsen en 1945. Après les attaques du 7 octobre 2023, il a été utilisé sur les réseaux sociaux comme un cri de ralliement incarnant l’invincibilité d’Israël.
Ce narratif est surtout utilisé pour soutenir le récit d’Israël comme une puissance militaire dominante. Sur les réseaux sociaux, on le retrouve associé à plusieurs opérations militaires majeures — l’attaque des bipeurs contre le Hezbollah en septembre 2024, l’opération « Rising Lion » (Am Kalavi) contre la République islamique d’Iran en juin 2025, ou encore les frappes au Qatar en septembre 2025.
Dans ces contextes, « Am Yisrael Chai » agit comme un marqueur discursif qui présente Israël à la fois comme la terre d’un peuple de survivants et comme une force militaire victorieuse.
Ce cadrage participe à restaurer l’image d’une puissance invaincue. En articulant réussite opérationnelle et continuité collective, il contribue à remodeler l’imaginaire post-7 octobre : il efface la vulnérabilité initiale en réaffirmant la supériorité stratégique et en réinstallant une posture dissuasive.
« Israël rempart de l’Occident face à l’Iran »
Dès 2015, la politique de diplomatie publique israélienne mise en œuvre par Benjamin Netanyahou a eu pour objectif de convaincre la communauté occidentale de la menace que poserait pour elle l’obtention par la République islamique d’Iran de l’arme nucléaire.
Cette orientation se manifeste dès son discours à l’ONU en 2015, ainsi que dans sa critique répétée de l’accord JCPOA (Joint Comprehensive Plan Of Action), conclu entre la République islamique et les cinq puissances du Conseil de sécurité de l’ONU (dont la France), l’Allemagne et l’Union.
Dans le prolongement du conflit à Gaza, cette stratégie a été déployée de nouveau lors de la « guerre des douze jours » de juin 2025. La République islamique d’Iran y a été décrite non seulement comme une menace existentielle pour Israël, mais aussi comme un péril direct pour l’ensemble des pays occidentaux. L’objectif de ce cadrage était double : d’une part, légitimer les frappes israéliennes en présentant Israël comme le dernier rempart protégeant l’Occident (« The West Is Next ») et, d’autre part, neutraliser les critiques internationales en construisant l’image d’un État assumant le « sale boulot » que les démocraties occidentales, jugées hypocrites et timorées, refuseraient d’endosser.
« La France antisémite »
Enfin, à la suite des nombreuses critiques émanant des pays occidentaux visant les politiques israéliennes à Gaza et en Cisjordanie, les sphères pro-israéliennes se sont largement mobilisées.
Ces dernières ont notamment accusé le gouvernement français de favoriser l’antisémitisme, après les déclarations d’Emmanuel Macron sur la reconnaissance d’un État palestinien par la France.
Si ce narratif s’inscrit dans une stratégie plus large visant à qualifier d’antisémite toute critique d’Israël, les sphères pro-israéliennes ont particulièrement insisté sur le manque de mesures du gouvernement français pour endiguer l’antisémitisme dans le pays 47. Depuis le 7 octobre 2023, les actes et prises de parole antisémites et antisionistes intervenus en France ont également été des occasions pour les sphères pro-israéliennes d’appeler les Juifs de France à l’alyah 48.
Récits pro-palestiniens
Depuis la réponse israélienne aux attaques du Hamas du 7 octobre, les sphères pro-palestiniennes se sont largement mobilisées autour d’un narratif persistant : Israël commettrait un génocide à Gaza.
Les appels à la mobilisation ont été nombreux, notamment en France, où le gouvernement a été pointé du doigt pour son supposé immobilisme, voire même pour une prétendue forme de complicité dans ce génocide.
« Le Hamas, héros de la résistance palestinienne »
La stratégie de communication du Hamas vise à construire une image de supériorité morale par contraste avec l’armée israélienne. Cette démarche se traduit par la diffusion de contenus sélectionnés, tels que des vidéos du 7 octobre montrant des combattants épargnant des enfants ou des personnes âgées.
Elles servent à appuyer le discours selon lequel les membres du mouvement islamique respecteraient un « code éthique » strict, contrairement aux Israéliens. Cette mise en scène demeure toutefois en tension avec la réalité, marquée par la prise en otage de nombreux civils, y compris des enfants et des personnes âgées.
La gestion médiatique des otages constitue par ailleurs un axe central de cette propagande.
Le Hamas a régulièrement diffusé des vidéos où ces derniers apparaissent souriants. Le mouvement a également utilisé la libération des otages comme une opération informationnelle, orchestrant des séquences de « cérémonies » où ces derniers recevaient des « cadeaux ». Dans le même esprit, des photomontages ont été largement relayés, mettant en parallèle des images d’otages détenus par le Hamas en apparente bonne santé avec celles de prisonniers palestiniens incarcérés par Israël, torturés ou affaiblis. L’objectif de ces contrastes visuels est de renforcer l’idée d’un traitement moralement supérieur des prisonniers par le Hamas, et d’accentuer la disqualification de l’adversaire, y compris sur le plan religieux.
En parallèle, le Hamas valorise la bravoure et le sacrifice de ses combattants dans des productions audiovisuelles qui insistent sur leur capacité à affronter, avec des moyens rudimentaires, une armée technologiquement supérieure. Des séquences montrent par exemple des militants avançant à pied pour poser des explosifs sur des chars israéliens, inscrivant cette tactique dans ce que la propagande qualifie de « guerre à zéro distance » ou à « distance nulle » (Masafat al sifr, الصفر مسافه en arabe). Ce cadre narratif s’apparente à une relecture contemporaine du motif de David contre Goliath : une résistance aux ressources limitées opposée à une puissance militaire perçue comme surarmée et oppressive.
Enfin, certains contenus visent à incarner ce récit de manière héroïque. La vidéo de la mort de Yahya Sinwar présenté comme combattant jusqu’au dernier souffle et lançant symboliquement un bâton contre un drone israélien, illustre cette mise en scène. Elle contribue à renforcer l’image d’un combat asymétrique et perçu comme injuste, opposant une domination technologique associée à l’Occident à une résistance décrite comme courageuse, déterminée et moralement supérieure.
« Israël génocidaire »
Le narratif qualifiant Israël de régime génocidaire trouve son origine bien avant le 7 octobre 2023, puisque les allégations de génocide des Palestiniens remontent à 1948 lors des événements de la Nakba.
Pour autant, les sphères pro-palestiniennes ont largement mobilisé ce narratif à la suite des bombardements à Gaza. Elles ont trouvé un appui juridique avec la plainte portée par l’Afrique du Sud à la Cour internationale de justice (CIJ), le 29 décembre 2023, pour violation de la Convention de répression du crime de génocide 49.
Au cours de la deuxième année du conflit, la politique de bombardement particulièrement meurtrière a laissé place à un blocus humanitaire d’ampleur, provoquant une famine 50. Cette stratégie a également été accusée par les sphères pro-palestiniennes de porter les caractéristiques d’un génocide. Au cours de l’été 2025, ce discours a été défendu de manière plus large, en particulier par des ONG et par une commission de l’ONU.
Ce narratif vise principalement à mobiliser la communauté internationale pour mettre fin à l’action militaire israélienne, sous la forme d’embargo ou de sanctions. Par exemple, la substitution de l’acronyme désignant les forces armées israéliennes IDF (pour Israeli Defense Forces) — que certains remplacent par IOF (Israeli Offensive Forces) — participe à nier la présentation faite par Israël de son opération militaire, qu’elle qualifie de défensive.
« La France complice »
L’un des principaux narratifs poussés par les acteurs de la mouvance pro-palestinienne en France est celui de la complicité de l’armée française — et plus largement des armées occidentales — dans les actions militaires israéliennes.
Depuis le 7 octobre 2023, de nombreuses opérations informationnelles s’inscrivant dans ce narratif ont pu être observées dans l’espace numérique français. Ainsi, la présence de soldats francophones au sein de Tsahal a offert l’occasion aux acteurs de la mouvance pro-palestinienne de détourner certains contenus en affirmant que des soldats de l’armée française avaient été mobilisés aux côtés des soldats de l’armée israélienne 51
De la même manière, ce narratif a également été observé le 20 janvier 2024 lorsque l’agence de presse affiliée au Hamas, Quds News Network, a relayé sur X, puis sur Telegram, une vidéo accompagnée d’un commentaire trompeur en langue anglaise, laissant supposer la présence de soldats français au sein de Tsahal : « French soldiers in the Israeli military posted a video in which they say ‘We’re going to #Gaza, we’re going to massacre them’ ». Cette publication a été partagée plus de 9 100 fois, et a suscité un nombre de vues significatif sur X (plus de 3,3 millions).
Appel au boycott d’Israël et de ses alliés
En parallèle, quelques jours après le déclenchement de l’opération militaire à Gaza et toujours avec l’objectif stratégique d’isoler Israël sur la scène internationale, plusieurs hashtags, visant le boycott de produits israéliens mais aussi d’entreprises occidentales soutenant supposément Israël, ont émergé sur les plateformes. Deux campagnes ciblant l’entreprise française Carrefour ont notamment pu être observées : #BoycottCarrefour (en anglais) et #BoykotCarrefour (en turc). Entre le 13 et le 15 octobre, le hashtag #BoycottCarrefour a été particulièrement relayé dans les espaces numériques anglophones et arabophones par le compte X @BDSmovement. Le même jour, les médias islamistes turcophones ont également repris l’information, contribuant ainsi à augmenter sa visibilité. Le hashtag a été repris 4 280 fois entre le 15 et le 20 octobre 2023.
Enfin, les sphères pro-palestiniennes se sont largement mobilisées pour appeler au boycott de la délégation israélienne lors des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024.
Plusieurs campagnes menées par des acteurs proches de la République islamique d’Iran ont notamment diffusé les informations personnelles des athlètes israéliens 52 accompagnés des hashtags #BoycottGenocide et #BanIsraelfromOlympics.
La diffusion massive de hashtags sur X
Pour relayer ces différents narratifs, les sphères pro-israéliennes et pro-palestiniennes se sont mobilisées à travers la diffusion massive de hashtags, notamment sur X, qui ont inondé les réseaux sociaux depuis le 7 octobre 2023, particulièrement au début du conflit.
Dans l’ensemble, la volumétrie de diffusion des hashtags semble décroître entre la première et la deuxième année du conflit. Cela peut notamment s’expliquer par un changement de stratégie informationnelle, où le traitement généralisé du conflit a peu à peu laissé place à des opérations informationnelles sur des sujets plus ciblés.
Les modes opératoires à l’ère du numérique
Les stratégies informationnelles déployées depuis le 7 octobre 2023 témoignent d’un développement de nouveaux modes opératoires s’appuyant sur les innovations numériques.
Ces modes opératoires concourent à des effets tactiques et/ou stratégiques recherchés par les belligérants : l’enjeu est de modeler un espace informationnel à son avantage. Cela suppose de créer massivement des contenus, de les diffuser largement de manière à saturer l’espace informationnel, et enfin d’empêcher la diffusion de contenus adverses par l’invisibilisation — noyer les contenus — ou l’intimidation — réputationnelle, par le naming and shaming, ou judiciaire.
La preuve par l’image : substituer les faits aux images
Mise en image des récits : le rôle de l’émotion dans la guerre informationnelle
Le conflit entre Israël et le Hamas a été marqué par une prolifération inédite de représentations, au point d’être qualifié de « guerre d’images » par les médias 53.
Dès le 7 octobre 2023, des vidéos ont circulé depuis des sources multiples : captées par les victimes israéliennes des attaques, par les combattants du Hamas eux-mêmes ou par des civils gazaouis, puis reprises par les autorités israéliennes pour alimenter leur propre communication (par exemple à travers le montage du film Bearing Witness évoqué supra) 54.
Au fil de l’opération « Glaives de fer », les images des bombardements de Gaza et des combats terrestres ont également afflué, produites aussi bien par des civils palestiniens que par des combattants du Hamas ou des soldats israéliens. Ce volume considérable de contenus visuels traduit une transformation structurelle du champ de bataille contemporain : la multiplication des capteurs (smartphones, caméras de surveillance, drones) et la connectivité instantanée, qui confèrent aux guerres locales une portée mondiale où la légitimité des belligérants se joue désormais aussi sur le terrain des images.
La prolifération de supports visuels s’explique également par leur viralité. Contrairement aux textes, elles peuvent être immédiatement comprises par-delà les barrières linguistiques, et suscitent immédiatement une réaction émotionnelle du fait de leur nature, ce qui augmente le taux d’engagement des publications les diffusant sur les réseaux sociaux.
Depuis le 7 octobre 2023, les images ont été utilisées de manières différentes dans les stratégies informationnelles des belligérants. Elles sont d’abord des instruments utilisés pour affermir la cohésion interne, convaincre l’opinion internationale et générer des émotions fortes grâce à leur caractère brut et viral. De nombreux sites web ont été mis en ligne pour répertorier les exactions du 7 octobre — par exemple iron-swords[.]co[.]il, hamas-massacre[.]net) — tandis qu’à l’inverse des plateformes militantes comme Tech for Palestine relaient des images de victimes gazaouies afin de documenter les destructions 55.
Ces images remplissent également une fonction tactique, puisqu’elles sont mobilisées pour analyser les tactiques ennemies, estimer les pertes, ou même guider le ciblage.
Les images partagées en direct par les victimes du Hamas auraient été exploitées par des pilotes israéliens pour localiser certains commandos infiltrés 56.
Cette dynamique est amplifiée par le rôle de l’OSINT 57, où experts et internautes analysent collectivement le matériel visuel en temps réel.
La controverse suscitée par la frappe sur l’hôpital Al-Ahli à Gaza le 17 octobre 2023, initialement attribuée à Israël, puis vraisemblablement à un tir de roquettes raté du Djihad islamique, a illustré la manière dont les photos diffusées pouvaient faire l’objet d’évaluations indépendantes dès lors qu’elles étaient mises en ligne 58.
Enfin, à l’ère de la judiciarisation des conflits, les images servent aussi de preuves devant des instances internationales comme la Cour internationale de justice ou la Cour pénale internationale. De même, certaines associations ou organes de presse sont spécialisés dans la collecte d’images postées sur les réseaux sociaux. Par exemple, la Hind Rajab Foundation est une ONG pro-palestinienne qui mobilise les preuves issues des réseaux sociaux pour identifier et documenter les exactions présumées de soldats israéliens. Elle transforme ces traces numériques — photos, vidéos, géolocalisations — en dossiers judiciaires, déposés devant la CPI ou des juridictions nationales grâce au principe de compétence universelle. Cette stratégie illustre un mode d’action inédit : retourner l’auto-exposition en ligne des combattants contre eux-mêmes pour en faire un outil de judiciarisation du conflit 59.
La montée en puissance d’images générées par l’IA
À ces usages s’ajoute désormais la circulation d’images générées par intelligence artificielle : présentant un fort potentiel de viralité, celles-ci accentuent la difficulté à distinguer preuves authentiques et fabrications 60.
Fait marquant de ces mois de guerre informationnelle, le visuel accompagnant le hashtag #AllEyesOnRafah, généré par intelligence artificielle, a été créé le 27 mai 2024 par l’utilisateur Instagram @shahv4012, un photographe malaisien. La publication est partagée 30 millions de fois en vingt-quatre heures, et 47 millions de fois en quarante-huit heures, devenant ainsi une image symbolisant le soutien à la cause palestinienne.

Les capacités de génération d’image de l’intelligence artificielle ont également été mobilisées par le gouvernement israélien.
La capacité du porte-parolat de Tsahal à utiliser les innovations technologiques dans la sphère des télécommunications et à « casser les codes » de la communication institutionnelle lui permet d’atteindre une visibilité particulière. Celle-ci est ainsi venue en appui des opérations sur le terrain, pour tenter d’expliquer — et de légitimer — une offensive pouvant susciter de fortes réactions à l’international.
Par exemple, le 27 octobre 2023, les forces israéliennes ont diffusé sur leurs réseaux sociaux une modélisation 3D générée par l’IA d’un réseau complexe de tunnels et de bunkers situé sous l’hôpital Al-Shifa, affirmant que le Hamas s’en servait comme centre de commandement.
Le National Public Diplomacy Directorate est également venu en appui des opérations sur le terrain pour contrer les accusations en génocide formulées à l’encontre d’Israël. La vidéo « Come visit beautiful Gaza », diffusée en janvier 2024, montre une succession d’images générées par IA montrant ce que pourrait être la bande de Gaza si elle n’était pas contrôlée par le Hamas. Elle impute ainsi la responsabilité de la destruction actuelle de la bande de Gaza au Hamas, et non à l’armée israélienne.
L’amplification des narratifs via des outils numériques
Dans la guerre informationnelle, l’avantage ne tient pas à la véracité ou à la fiabilité des contenus, mais à leur nombre et à la rapidité de leur diffusion — viralité — après un événement déclencheur. À ce titre, elle nécessite de créer très rapidement des contenus viraux, et de les amplifier par la coordination de divers acteurs.
L’Amplification des narratifs pro-israéliens
Les entreprises technologiques israéliennes
Au-delà des initiatives menées principalement par les groupes d’influenceurs et par l’État hébreu, de nombreuses sociétés technologiques israéliennes se sont également investies dans le but de fournir des outils numériques pouvant servir la hasbara.
Une manœuvre informationnelle a déjà été révélée le 5 juin 2024 dans une enquête du New York Times et de Meta. Selon eux, entre octobre et novembre 2023, des dizaines d’entreprises technologiques israéliennes ont reçu des messages sur WhatsApp les invitant à rejoindre des réunions et groupes de travail afin de devenir des « soldats du digital en soutenant l’effort de guerre israélien ». Selon des captures d’écran analysées par la rédaction du Times, les messages ont été directement envoyés par le gouvernement et des incubateurs de start-ups israéliennes 61.
Israel Tech Guards
Une initiative de la Direction nationale de l’information, du ministère des Affaires de la diaspora et de la lutte contre l’antisémitisme a regroupé des entreprises technologiques sous le nom d’Israel Tech Guards. Cette initiative regroupe plus de 500 personnes, dont la plupart sont des programmeurs, des experts en produits et des personnes ayant de l’expérience dans la construction de systèmes avancés dans le secteur technologique israélien. Fondé dès le lendemain du 7 octobre, le groupe s’est employé à fournir des outils technologiques favorisant les recherches d’otages, les collectes de dons du sang, et la géolocalisation des abris antiaériens. Dans le même temps, le groupe a revendiqué la création d’outils servant à la communication extérieure et à « l’explication » du 7 octobre sous le prisme israélien.
Words of Iron
Words of Iron est un outil permettant de partager des contenus sur X et Instagram, prétendument choisis aléatoirement, avec un catalogue d’influenceurs pro-israéliens. De plus, la plateforme permet de recenser tout contenu anti-israélien afin de signaler massivement celui-ci aux différentes plateformes.
Créé par Israel Tech Guards, Words of Iron invite ses utilisateurs à signaler les messages « anti-israéliens » qu’il détecte en utilisant les catégories « discours ou symboles de haine ». L’outil permet également de « partager ou commenter » (grâce à des commentaires auto-générés) des publications d’influenceurs israéliens ciblés.
De nombreux autres outils fonctionnant de la même manière, et générant des commentaires ou des likes automatiques, ont été créés dans les jours ou les semaines suivant le 7 octobre 62. Pour autant, ce type d’outil n’enfreint pas les règles d’utilisation des plateformes puisque l’action et la génération de commentaire se font en dehors de celles-ci. Ce genre de mode opératoire relève d’une technique de propagande de type astroturfing 63.
Hasbarathon
De plus, en novembre 2023 un « hasbarathon » — contraction des mots hasbara et hackathon 64 — organisé par l’Afeka College 65 s’est tenu à Tel Aviv avec de nombreux sponsors, dont de grandes entreprises technologiques israéliennes. Celui-ci a eu pour objectif principal de mettre en commun des idées de développement technologique en faveur de la communication pro-israélienne. Il est difficile de mesurer l’impact et les retombées effectives de ces événements de manière concrète, hormis la structuration de la collaboration entre les différents participants, sponsors et organisateurs du « hasbarathon ». Pour autant, les organisateurs revendiquent la création de plus de 35 outils technologiques de soutien à la hasbara lors de cet événement.
STOIC
Enfin, la stratégie informationnelle israélienne a également pu se reposer sur des entreprises spécialisées dans les manipulations de l’information, comme en témoigne l’affaire autour de la société STOIC basée à Tel Aviv. Cette dernière a notamment été accusée d’avoir participé à une large campagne visant des audiences nord-américaines, via la génération de plusieurs milliers de faux comptes Instagram et Facebook, générés par IA, d’étudiants de confession juive ou d’étudiants afro-américains 66. Cette campagne avait pour but principal de faire pression sur des magistrats et médias américains quant à leur traitement du conflit à Gaza. La rédaction du New York Times a attribué cette opération au ministère de la Diaspora israélien.
Contenus sponsorisés et contrats avec les grandes plateformes
La stratégie de communication institutionnelle israélienne s’est également caractérisée par une forte sponsorisation des contenus en ligne. L’annonceur officiel des administrations étatiques, LAPAM, s’est ainsi montré particulièrement actif, en particulier via des publicités Google (YouTube, Google Play et Google Search). L’usage de la sponsorisation sur des sujets politiques et particulièrement clivants (aide humanitaire à Gaza, désarmement du Hamas, décrédibilisation de l’UNRWA, légitimation des opérations militaires à Gaza et en Iran) est soumis à un encadrement légal et réglementaire que LAPAM semble avoir contourné (mauvaise labellisation, diffusion d’images et de narratifs violents) sans pour autant avoir été suspendu par la plateforme.
Dès les jours qui ont suivi le 7 octobre 2023 et l’attaque du Hamas, le gouvernement israélien a largement investi le secteur des contenus sponsorisés dans le but de dénoncer les atrocités commises par le Hamas, et ainsi légitimer la réponse armée à Gaza. Cette stratégie a été documentée par la presse, notamment pour les contenus publicitaires violents apparus sur des applications de jeux pour enfants 67, dans le but de sensibiliser l’opinion occidentale aux massacres du 7 octobre. Cette campagne s’est notamment accompagnée de la publication coordonnée de vidéos par les comptes officiels israéliens, et en particulier les comptes liés aux ministères des Affaires étrangères (comptes d’ambassade, porte-paroles, comptes officiels, comptes des diplomates et ambassadeurs) sur X, Instagram, YouTube et Facebook.
Ce procédé a été reproduit à de multiples reprises entre 2023 et 2025 dans le but de mettre en avant le discours officiel israélien avec des narratifs en lien avec les principales actualités (frappes à Gaza, au Liban et en Iran, aide humanitaire à Gaza, condamnation de la Cour pénale internationale visant Benjamin Netanyahou et des membres de son gouvernement).
La première cible des annonces de LAPAM est d’abord la sphère nationale israélienne, puisqu’elle produit et diffuse, entre autres, des campagnes pour les ministères de la Santé, de l’Intérieur et de l’Éducation. Les audiences internationales sont également visées, notamment par des campagnes en faveur des ministères des Affaires étrangères, de la Défense, de la Diaspora et du Tourisme.
De plus, à la différence des acteurs non-étatiques pro-palestiniens, l’État hébreu a l’avantage de pouvoir traiter directement avec les principales plateformes numériques, à l’instar de Google, Meta ou X. Cette collaboration en faveur de la propagande israélienne a déjà été révélée par de nombreux médias 68, y compris dans les stades les plus récents du conflit, avec un supposé contrat avec Google estimé à 45 millions d’euros en faveur de la hasbara 69.
Amplification et coordination des narratifs pro-palestiniens
À la suite de l’opération du Hamas « Déluge d’Al Aqsa » et de la réponse de l’armée israélienne dans la bande de Gaza, une mobilisation des acteurs de la mouvance pro-palestinienne à l’internationale s’est engagée. Si, comme vu précédemment, le Hamas dispose de peu de moyens en propre dans la guerre de l’information, les narratifs pro-palestiniens ont trouvé un écho important du fait de la mobilisation d’une myriade d’acteurs internationaux. Dans le cadre de ce conflit asymétrique, la stratégie observée par les acteurs pro-palestiniens, a consisté à isoler Israël et son gouvernement sur la scène internationale, afin de pousser à une résolution du conflit en faveur des Palestiniens. À ce titre, les objectifs définis par les acteurs pro-palestiniens sont multiples :
- maintenir une forte pression sur les partenaires historiques d’Israël, en particulier sur la France et les États-Unis ;
- instrumentaliser la cause palestinienne pour donner de la légitimité à des gouvernements antagonistes (République islamique d’Iran notamment) ;
- appeler au boycott global en annulant toutes formes de coopération économique, scientifique et universitaire avec la société israélienne.
Afin de remplir ces objectifs, plusieurs manœuvres informationnelles utilisant des modes opératoires variés ont débuté en octobre 2023, à destination d’un public occidental et des diasporas arabes en Occident.
Tech for Palestine
Parmi les initiatives civiles non coordonnées par des acteurs palestiniens (Hamas ou Autorité palestinienne), certaines ont clairement affiché leur objectif de rendre viraux les narratifs pro-palestiniens par différentes méthodes. À ce titre, l’organisation Tech For Palestine, déjà évoquée supra, a créé de nombreux outils permettant une amplification des contenus pro-palestiniens et/ou hostiles à Israël. Cette organisation, créée en décembre 2023 par Paul Biggard 70, dispose d’une multitude d’outils numériques et de sites web associés, dont la majorité semble servir d’outils de détection de produits israéliens. D’autres outils sont également disponibles comme des bases de données compilant des images de Gaza, ou encore des prises de paroles facilement partageables pour les utilisateurs.

Un serveur Discord du même nom est également associé à ce site 71. Celui-ci regroupe plusieurs milliers d’internautes travaillant en synergie sur des projets numériques afin de soutenir, à travers la technologie, les Palestiniens à Gaza. Le serveur Discord permet alors une facilité de coordination entre différents acteurs pro-palestiniens internationaux.
Boycott z
Parmi les outils répertoriés par Tech For Palestine, le site web boycott-z[.]com propose le téléchargement d’une extension de navigateur sur Google Chrome ou Mozilla Firefox, censée aider les utilisateurs à repérer les produits et services affiliés à Israël ou à ses soutiens. L’extension, développée conjointement par deux ingénieurs, fonctionne comme un outil permettant de révéler, à l’aide d’un message d’alerte, les affiliations des marques et des sites internet à des « régimes faisant preuve d’une grande brutalité envers les personnes innocentes comme l’impact des régimes sionistes sur le peuple palestinien ».
Dans l’ensemble, les outils d’amplification — artificielle ou non — développés par les Palestiniens eux-mêmes semblent très peu nombreux, voire inexistants. Les outils numériques pouvant servir à l’amplification de narratifs pro-palestiniens restent dans l’ensemble, des initiatives internationales.
Réprimer les narratifs adverses
Le signalement massif des contenus adverses
La confrontation informationnelle entre Israël et les sphères pro-palestiniennes depuis le 7 octobre 2023 a été marquée par des stratégies de pression visant à réprimer l’expression d’opinions dans la sphère publique française. Ainsi, les progrès technologiques permettant un certain degré d’automatisation dans les techniques informationnelles ont été observés chez chacun des deux acteurs du conflit. Outre le partage massif de narratifs, ces progrès ont également permis l’envoi en grand nombre d’emails à des entreprises dont les employés ont relayé des prises de position sur le conflit ; s’y ajoutent le screening automatique des réseaux sociaux pour détecter des prises de position, les « raids numériques » 72 disqualifiant les publications jugées problématiques et la révélation de données personnelles. Les plateformes 73 et les responsables politiques étrangers 74 ont parfois pris en compte ces signalements pour prendre des mesures, faisant de ceux qui divulguent des données personnelles (appelés « doxxeurs ») des acteurs informationnels d’importance.
Le doxxing
Plusieurs comptes sur les réseaux sociaux et différentes organisations se sont investis dans une forme de traque au contenu adverse. Une fois détecté, le contenu pro-israélien ou pro-palestinien est aussitôt qualifié d’apologie de génocide pour l’un, et d’antisémitisme pour l’autre.
Généralement, ces comptes ne se contentent pas de citer la publication. En effet, deux stratégies peuvent être observées : la première vise à signaler à la plateforme le contenu de la publication (parfois de manière automatisée 75) ; la seconde à révéler un maximum d’informations personnelles sur l’auteur de la publication (méthode du doxxing). Cette dernière a été particulièrement observée dans le cadre du conflit en cours à Gaza, notamment en France 76.
Des outils de pression se propageant au champ physique
Pour autant, c’est aux États-Unis, et plus particulièrement sur les campus des grandes universités, que le doxxing en lien avec le conflit à Gaza s’est répandu dans la sphère physique. Le collectif Shirion, créé en novembre 2023 aux États-Unis, se présente comme un « réseau de surveillance » traquant et exposant de « manière agressive » l’antisémitisme. Le groupe est actif en ligne et revendique l’utilisation de l’intelligence artificielle dans le but de détecter tout contenu anti-israélien sur les campus américains, mais également d’identifier les manifestants pro-palestiniens.
L’outil Shirion s’est notamment fait connaître pour avoir affiché les noms des étudiants pro-palestiniens sur des camions publicitaires à Harvard, et être lié à Canary Mission 77, site utilisé par les douanes israéliennes 78 et utilisé pour tenter d’exclure les étudiants pro-palestiniens des campus américains 79.
A contrario, le collectif Tech For Palestine évoqué supra a répertorié un projet visant à contrer Canary Mission — le projet « Reverse Canary Mission » — en désignant toutes les personnalités pro-israéliennes, en révélant des informations personnelles et en conservant leurs prises de paroles à cet égard 80.
Wikipédia : l’exemple de la guerre informationnelle numérique
Enfin, l’intensification de la lutte informationnelle peut se matérialiser de manière très précise dans la bataille du contenu sur Wikipédia. En effet, les sphères pro-israéliennes comme pro-palestiniennes se sont rapidement saisies des pages de la plateforme qui traitent du conflit. Des moyens importants ont été alloués par chacune d’elles dans le but de faire apparaître leurs narratifs et d’invisibiliser les récits adverses.
À cet égard, le compte X pro-israélien @Wikibias2024 81 comptabilisant 10 000 abonnés ne publie que des contributions sur Wikipédia, dans le but de leur faire gagner de la visibilité ou au contraire de signaler des contenus pro-palestiniens sur la plateforme. A contrario, Tech For Palestine a été accusé, par des médias israéliens, de promouvoir des contenus hostiles à l’État hébreu sur Wikipédia 82.
La plateforme est ainsi l’objet de luttes importantes, démontrant son poids dans les stratégies informationnelles de chacun des belligérants 83.
Conclusion
Le 7 octobre marque un point de bascule dans les stratégies informationnelles observables dans le contexte du conflit israélo-palestinien. Sous l’effet de la violence de ce dernier, les dynamiques préexistantes de mobilisation de l’opinion publique dans l’espace numérique français se sont amplifiées, illustrant un changement d’échelle des stratégies de chacun des acteurs. La visibilité que celles-ci ont obtenue dans le débat public français s’explique à la fois par la centralité acquise par les réseaux sociaux dans l’écosystème informationnel français, et par l’essor et la démocratisation de l’intelligence artificielle (génération de contenus, textes et images à fort potentiel de viralité).
Pour Israël comme pour le Hamas et ses alliés, les opérations informationnelles relèvent d’une stratégie assumée visant à influencer les opinions publiques nationales et internationales — mise en lumière des dommages civils et matériels commis à Gaza par Israël et accusation de génocide d’un côté ; justification des manœuvres opérationnelles devant l’opinion publique, face à des accusations de génocide et de frappes non ciblées pour l’autre.
Pour autant, leurs contours et la régulation des moyens employés restent complexes en raison de la porosité entre initiatives individuelles, actions coordonnées et soutiens étatiques.
De nombreuses initiatives privées concourent de manière plus ou moins autonome à diffuser et à relayer ces récits, des citoyens prenant parfois sur eux la responsabilité d’initiatives ayant pour objectif de convaincre de la légitimité d’un des belligérants. Ce sont souvent des publics convaincus de la justesse de leur cause, et qui n’ont donc pas toujours conscience de devenir les vecteurs d’une stratégie informationnelle plus large.
En outre, l’étude des stratégies informationnelles pro-israéliennes et pro-palestiniennes informe sur l’asymétrie des moyens entre un acteur étatique, bénéficiant de ressources et d’un cadre juridique permissif, et un acteur non étatique considéré comme terroriste par l’Union et les États-Unis mais bénéficiant d’un soutien massif et d’une mobilisation de l’opinion publique internationale. La répression des canaux de diffusion du Hamas sur les réseaux sociaux, permise par les législations européenne et américaine, a constitué un frein partiel à son récit dans le camp occidental.
Enfin, les deux belligérants partagent le sentiment de ne pas réussir à convaincre en dehors d’audiences déjà acquises à leur cause, et font régulièrement état de leur frustration devant la « répression » ressentie de leurs discours.
Cela engendre une incertitude sur la notion même de vérité. La multiplication de récits contradictoires, souvent émotionnels et polarisants, nourrit un sentiment de défaitisme sur la possibilité même d’avoir accès à une information fiable qui ne soit pas instrumentalisée ou manipulée par l’un ou l’autre camp. Cette incertitude est clef, tant pour les acteurs de l’information traditionnels, privés d’accès direct à Gaza, que pour les décideurs politiques quant à l’attitude à adopter vis-à-vis de ce conflit. Plus largement, l’importance des stratégies informationnelles dans les conflits contemporains, leur efficacité, et la viralité des campagnes soulèvent pour la France une question de nature stratégique : celle de la préparation des forces et de la société civile face à des actions informationnelles susceptibles d’être reproduites sur d’autres théâtres de confrontation.
Sources
- Céline Marangé et Maud Quessard (dir.), Les Guerres de l’information à l’ère numérique, Presses universitaires de France, 2021.
- Le rôle du MAE israélien dans la création de narratifs en période de guerre avait déjà été documenté pour la guerre de Gaza en 2014 : voir Manor, I., & Crilley, R. (2018). « Visually framing the Gaza War of 2014 : The Israel Ministry of Foreign Affairs on Twitter », Media, War & Conflict, Vol. 11, No. 4 (2018), pp. 369-391.
- Asaf Elia-Shavel, « Israel has spent millions trying win hearts and minds abroad. It’s about to spend 20 times more », Forward, 28 décembre 2024.
- Nicolas Rouger, « Crimes du Hamas : qu’y a-t-il dans la vidéo de 48 minutes d’horreur que montre Tsahal à la presse étrangère ? », Libération, 2 novembre 2023.
- Israel Defense Forces, X, 4 décembre 2024. https://x.com/IDF/status/1864365421945667803.
- Refaella Goichman ; « This anti-BDS Initiative Failed. So Israel Throws Another $30 Million at It », Haaretz, 26 janvier 2022.
- Tolik Piflaks, « Réécrire le scénario de la Hasbara : La lutte d’Israël pour remodeler son discours mondial », Allisraelnews, 23 juillet 2024.
- David Siman-Tov, Inbar Noy-Freifeld, Attila Somfalvi et Ella Keinan, « Civil Public Diplomacy (Hasbara) in the Gaza War : Potential in the Influence Arena », INSS, 11 décembre 2023.
- Dont certains dans des domaines très éloignés du champ militaire, comme des influenceurs culinaires ou de voyage.
- T. Lefèvre, « Des influenceurs franco-israéliens au service de la propagande de l’État hébreu », Radio France, 14 mars 2024.
- De nombreuses bases de données sont hébergées sur des Google Drive (comme celui-ci) avec des narratifs pro-israéliens.
- Eli Cohen, X, 27 novembre 2023. https://twitter.com/elicoh1/status/1729182083715862919.
- À l’instar du compte pro-israélien polonais @Visegrad24. Voir Damien Leloup et Michaël Szadkowski, « Visegrad24, le petit compte polonais sur X devenu l’un des plus efficaces soutiens d’Israël en ligne », Le Monde, 16 avril 2025.
- À l’image du hashtag #IndiaStandWithIsrael partagé massivement sur X par des influenceurs indiens pro-israéliens. Le gouvernement a directement payé des influenceurs internationaux pour créer du contenu à Gaza durant l’été 2025. Voir Luc Bronner, « À la frontière gazaouie, des influenceurs au service de la propagande israélienne », Le Monde, 29 août 2025.
- L’État hébreu est perçu par les sphères ultra-conservatrices, notamment pro-Trump, comme un allié incontournable face à la menace islamiste.
- Voir ici son intervention lors de la CPAC 2025, à Budapest.
- Son intervention est disponible sur le site de la NatCon, à ce lien.
- Ces grands événements, organisés sous forme de conférences, sont des plateformes permettant d’exporter en Europe des concepts et narratifs formés aux États-Unis. La CPAC vise à mobiliser une base militante et à produire des figures populaires, quand la NatCon semble davantage jouer un rôle de théorisation idéologique. Cette dernière a par ailleurs été fondée par Yoram Hazony, intellectuel américano-israélien, ancien conseiller de B. Netanyahou, puis fondateur et président du Herzl Institute basé à Jérusalem. Après avoir œuvré en faveur de la coalition entre le Likoud et les partis suprémacistes juifs israéliens, Y. Hazony s’est notamment impliqué dans le rapprochement entre les sphères ultra-conservatrices américaines et israéliennes. Voir Joseph Confavreux, « Qui est Yoram Hazony, l’éminence grise de Jérusalem à Washington ? », Mediapart, 12 mai 2024.
- Philippe Larroque, « i24 News apportera un autre regard que celui d’Al-Jazeera », Le Figaro, 17 avril 2013.
- Parti politique du Premier ministre B. Netanyahou faisant partie de la coalition majoritaire à la Knesset avec les partis d’extrême droite.
- Voir William Audureau, Samuel Forey et Assma Maad, « Quarante bébés décapités » : itinéraire d’une rumeur au cœur de la bataille de l’information entre Israël et le Hamas », Le Monde, 3 avril 2024.
- Par exemple, Shehab News ou le groupe Al-Aqsa Media Network.
- Jean-François Legrain « La e-communication du Hamas », OrientXXI, 2017.
- Guillaume Gendron, « Pour le Hamas, la frontière israélienne ‘n’est pas une vache sacrée ou un tabou’ », Libération, 12 mai 2018.
- « État d’urgence décrété dans la ville de Lod après des ‘émeutes’ de la minorité arabe », Ouest-France, 12 mai 2021.
- Robin Richardot, « Le conflit israélo-palestinien se joue aussi à coups de hashtags », Le Monde, 22 mai 2021.
- Dana Doulah et Kaylan Geiger, « Explainer : The evolution of Hamas media operations », BBC, 11 octobre 2023.
- Marie Jo Sader, « À Gaza, la mort d’Abou Obeida, le porte-parole masqué de la branche armée du Hamas », Le Monde, 2 septembre 2025.
- Voir Leila Seurat, Le Hamas et le monde, CNRS éditions, 2015.
- Bureau politique du Hamas, « Our Narrative : Operation Al-Aqsa Flood », 21 janvier 2024.
- Démontrant ici l’utilité pour le Hamas de différencier sa branche politique de sa branche militaire.
- Assma Maad, « Morts à Gaza : pourquoi les chiffres du ministère de la Santé du Hamas sont considérés comme fiables par l’ONU et certaines ONG », Le Monde, 9 octobre 2024.
- Thibaut Bruttin, « Plus de 210 journalistes tués à Gaza : RSF et Avaaz appellent les médias du monde entier à une mobilisation médiatique d’ampleur le 1er septembre », Reporters sans frontières, 28 août 2025.
- Madjid Zerrouky, « La guerre Israël-Hamas vue par Al-Jazira, fenêtre d’expression quasi unique des Palestiniens de Gaza », Le Monde, 17 novembre 2023.
- « AJ+ : derrière la modernité, le média d’influence du Qatar », INA, 1er décembre 2020.
- « War Crimes in Gaza », Al Jazeera, 7 octobre 2024.
- « Israel Is Using the War to Silence Journalists. Just See How It Hounded Al Jazeera », Haaretz, 26 septembre 2024.
- « Hamas Terrorists Brought ISIS flags to Massacre Israeli Children, Women and Men », Israel Defense Forces, 12 octobre 2023.
- Le narratif comparant le Hamas à l’État islamique avait déjà été mobilisé par le passé, notamment lors de la guerre de Gaza de 2014. B. Netanyahou avait alors porté ce discours à l’ONU et les comptes officiels de l’État hébreu avaient relayé de manière coordonnée le message « Hamas is ISIS ». Cela témoigne d’une volonté étatique de pousser ce narratif.
- Ce narratif a été étendu à des cibles plus précises comme « La France est la prochaine » ou « Paris est la prochaine » en particulier lors des récents événements terroristes sur le sol français et européen (attentats d’Arras, Bir-Hakeim et Bruxelles).
- Eli David, X, 15 octobre 2023. https://twitter.com/DrEliDavid/status/1713586748691808659.
- i24News France, X, 18 janvier 2024. https://x.com/i24NEWS_FR/status/1748035309403533354.
- Nathalie Segaunes, « À Paris, l’hommage aux victimes du 7-Octobre troublé par les propos d’Emmanuel Macron sur les livraisons d’armes à Israël », Le Monde, 8 octobre 2024.
- Ciaran Jenkins, « Israel PM Netanyahu claims ‘decisive victory’ close in Gaza », 4News, 21 août 2025.
- Le terme « Gazawood » renvoie également à un compte X pro-israélien (@Gazawood) déjà accusé par de nombreux médias de participer à la désinformation pro-israélienne dans le conflit à Gaza. Voir Frédéric Métézeau, « Gazawood, le compte qui désinforme en masse, selon une organisation israélienne », Forbidden Stories, 11 avril 2025.
- Cette stratégie a été qualifiée de désinformation par de nombreux médias. Voir par exemple Jean-Pierre Filiu, « Anatomie d’une campagne israélienne de désinformation », Le Monde, 30 juin 2024.
- Notamment à la suite des allégations formulées par l’ambassadeur américain en France en août 2025. (« États-Unis — Allégations de l’ambassadeur sur l’antisémitisme en France », France Diplomatie, 24 août 2025) et à l’échange de lettres entre B. Netanyahou et E. Macron sur le sujet de l’instrumentalisation de l’antisémitisme.
- Le terme alyah, qui signifie en hébreu « montée », désigne le fait pour une personne juive de venir vivre en Israël.
- « Justice internationale : plainte sud-africaine contre Israël pour ‘génocide’ à Gaza », Nations Unies, 9 janvier 2024.
- « Gaza : l’ONU déclare officiellement la famine, qui aurait ‘pu être évitée’ sans ‘l’obstruction’ d’Israël », RFI, 22 août 2025.
- Entre le 25 et le 27 octobre, les mots clés en langue arabe « armée française en tenue sioniste » ont été diffusés par plusieurs dizaines de comptes (74 publications originales sur X).
- Cette campagne a notamment été attribuée à des acteurs pro-iraniens comme « zeusistalking ». voir « Le gang de pirates Zeus s’en prend aux athlètes lors des Jeux olympiques », Bitdefender, 7 août 2024.
- Cécile Lemoine, « Gaza : les images, l’autre guerre qui fait rage entre Palestiniens et Israéliens », La Croix, 17 août 2025. Pour une analyse de l’utilisation des images dans la guerre, voir Sara Oscar, Cherine Fahd, « Images from Gaza have shocked the world – but the ‘spectacle of suffering’ is a double-edged sword », The Conversation, 17 août 2025.
- De nombreux sites web ont été créés afin de répertorier et diffuser des visuels des exactions commises par le Hamas le 7 octobre ; ainsi iron-swords[.]co[.]il/ ; HamasIsISIS[.]co ; hamas-massacre[.]net ; hamas[.]com ; saturday-october-seven[.]com.
- À l’instar de tiktokgenocide[.]com.
- Elihay Vidal, « The day WhatsApp changed from a messaging app to a lifesaver in war », CTech, 22 octobre 2023.
- Open Source Intelligence (ou renseignement en source ouverte).
- David Leonhardt, « Revisting the Gaza Hospital Explosion », The New York Times, 3 novembre 2023.
- Mehul Srivastava, Heba Saleh, « Two Israelis questioned in Belgium over war crime allegations in Gaza », Financial Times, 21 juillet 2025 ; « The NGO holding Israeli soldiers to account », Al Jazeera, 31 juillet 2025.
- David Klepper, « Fake babies, real horror : Deepfakes from the Gaza war increase fears about AI’s power to mislead », AP News, 28 novembre 2023.
- Sheera Frankel, « Israel Secretly Targets U.S. Lawmakers With Influence Campaign on Gaza War », The New York Times, 5 juin 2024.
- Ainsi, par exemple, de https://fighthamas[.]co.il/ ; https://www.commentron[.]ai/fuck-hamas ; https://www.hasbaraa[.]com/hasbaraatoolbox.
- Méthode de propagande consistant en la simulation d’un mouvement spontané ou populaire à des fins d’ordre politique ou économique pour influencer l’opinion publique.
- Hackathon : processus créatif, très utilisé dans le domaine de l’innovation numérique, qui consiste à faire travailler ensemble et sans interruption des volontaires sur une durée de 24 à 48 heures environ, dans le but de faire émerger des idées novatrices. 40 entreprises technologiques ont sponsorisé ce hasbarathon.
- École d’ingénieur de Tel Aviv.
- Cette campagne a été détectée par Meta en mai 2024. Voir « Meta identifies networks pushing deceptive content likely generated by AI », Reuters, 29 mai 2024.
- Raphael Satter, Katie Paul et Sheila Dang, « Graphic pro-Israel ads make their way into children’s video games », Reuters, 30 octobre 2023.
- Josef Federman, « Israel’s Netanyahu is to meet Elon Musk. Their sit-down comes as X faces antisemitism controversy », AP News, 14 septembre 2023.
- « Google under fire for $45m deal with Netanyahu’s office to spread Gaza genocide propaganda », Middle East Monitor, 4 septembre 2025.
- Se présentant comme un activiste pro-palestinien irlandais vivant à New York.
- https://github.com/TechForPalestine/.
- Ou cyber-harcèlement en meute, sanctionné en France par la loi du 3 août 2018.
- « Meta : Censure systémique de contenus pro-palestiniens », Human Rights Watch, 21 décembre 2023.
- Elise Viniacourt, « Sciences-Po Lille : l’étudiante gazaouie accusée de propos antisémites ‘a vocation à quitter le territoire national’ », Libération, 31 juillet 2025.
- Comme l’outil Words of Iron évoqué supra mais également la plateforme développée par Stop Antisemitism (https://stopantisemitism[.]org/) et l’outil You Stand With Israel (https://devhelps.github.io/you-stand-with-israel/)pour les sphères pro-israéliennes ; pour les sphères pro-palestiniennes, on trouve l’outil Media Bias du site intifada[.]pro (https://intifada.pro/media-bias).
- Christophe Ayad et Samuel Laurent, « Pro-Israeli groups are using digital guerrilla warfare against pro-Palestinian activists », Le Monde, 10 février 2024.
- Voir leur site : https://canarymission[.]org/.
- Noa Landau, « Official Documents Prove : Israel Bans Young Americans Based on Canary Mission Website », Haaretz, 4 octobre 2018.
- Anemona Hartocollis, « After Writing an Anti-Israel Letter, Harvard Students Are Doxxed », The New York Times, 18 octobre 2023.
- https://www.reversecanarymission[.]org/.
- Voir le compte X de Wikibias à ce lien.
- Ohad Merlin, « Wikipedia suspends pro-Palestine editors coordinating efforts behind the scenes », The Jerusalem Post, 12 décembre 2024.
- Le sujet de Wikipédia a notamment été largement investi par les sphères ultra-conservatrices (dont celles pro-israéliennes) au cours des deux dernières années. Voir « Les conservateurs veulent la peau de Wikipédia », Radio France, 9 septembre 2025.