Depuis le 8 juillet, le président Emmanuel Macron peut à nouveau dissoudre l’Assemblée nationale, mais il a a priori exclu cette possibilité en annonçant le 8 septembre au soir qu’il nommerait un nouveau Premier ministre dans les prochains jours.
- Cette option pourrait toutefois se présenter à nouveau au cours des prochaines semaines si l’on constate qu’aucun chef de gouvernement potentiel n’est en mesure de faire adopter le budget 2026.
Bien que « classique » au cours de la Cinquième République, la nomination directe par le Président d’un nouveau Premier ministre sans avoir au préalable laissé les forces politiques négocier la formation d’une majorité susceptible sinon de le soutenir du moins de ne pas le censurer paraît risquée et dans le contexte actuel. Le président de la République ne paraît pas en effet être le mieux placé pour réussir seul à coaliser les forces politiques.
- Le sujet central reste celui de l’arc politique qui serait capable, sinon de soutenir un tel gouvernement, du moins de ne pas le faire tomber — en particulier sur le budget.
- L’Assemblée nationale compte aujourd’hui 577 députés, avec 3 sièges vacants.
- Pour censurer un gouvernement, il faut rassembler 288 députés.
Avec 348 députés, un accord de non-censure entre l’extrême droite, la droite et le bloc central permettrait un gouvernement stable. Michel Barnier comme François Bayrou ont essayé à plusieurs reprises de recourir à cette configuration.
- Au-delà de son caractère dangereux pour les équilibres institutionnels et l’avenir du pays, cette option semble peu praticable aujourd’hui parce que le RN vise plutôt une dissolution rapide de l’Assemblée voire une démission du président.
Un accord de non-censure entre les partis qui soutenaient le gouvernement Bayrou (la droite et le bloc central) et les socialistes seuls est l’option que semble privilégier Emmanuel Macron.
- Avec seulement 276 députés, un tel regroupement ne permettrait cependant pas de mettre solidement le gouvernement à l’abri d’une motion de censure.
- Il placerait surtout les socialistes dans une position très exposée à gauche et risquerait de les affaiblir fortement dans la perspective des élections municipales de mars 2026 et des prochaines échéances nationales.
- Ce qui avait été ponctuellement possible au début de l’année avec la non-censure de François Bayrou paraît aujourd’hui beaucoup plus difficile à renouveler.
- Si Emmanuel Macron privilégie de nouveau cette option, la crise politique pourrait se prolonger et s’aggraver.
Un accord de non-censure engageant les socialistes, les écologistes, les communistes, Ensemble pour la République, le Modem et Horizons rassemblerait 282 députés.
- Moyennant le ralliement de quelques députés non-inscrits ou LIOT, il pourrait être suffisant pour éviter une censure conjuguée de la droite, de l’extrême droite et de la France Insoumise qui rassemblent 258 députés.
- Mais l’équilibre qui permettrait de conclure un accord de ce type serait difficile à trouver, tout comme la personnalité susceptible de former un gouvernement acceptable pour toutes ces forces.
Un accord de non-censure entre les partis du Nouveau Front Populaire et Ensemble Pour la République rassemblerait 283 députés, et se retrouverait dans une position analogue à celle évoquée dans l’hypothèse précédente.
- Une telle option semble aujourd’hui exclue car La France Insoumise la refuse, et parce qu’elle supposerait une division du « bloc central » qui de ce fait risquerait de disparaître du paysage politique.
La seule option réaliste à ce jour semble être celle d’un accord entre le « bloc central » et l’ensemble de la gauche hors LFI. Ce n’est cependant visiblement pas l’option privilégiée par le président de la République, et les conditions de sa réalisation semblent très difficiles à réunir, notamment en matière budgétaire.
Selon le calendrier annoncé avant le vote de confiance, le budget 2026 devait être présenté à l’Assemblée le 14 octobre et au Sénat le 24 novembre, et le budget de la Sécurité sociale le 21 octobre et le 10 novembre.
- Le budget de Bayrou visait à réduire le déficit public à 4,6 % d’ici 2026, contre 5,6 % cette année et 5,8 % en 2024, par le biais d’un plan d’économies de 44 milliards d’euros.
- Selon la Loi organique relative aux lois de finances, le budget doit être présenté avant le 7 octobre et adopté avant le 31 décembre.
- Cela signifie qu’en théorie, avant le 7 octobre, le gouvernement doit consulter à la fois le Haut Conseil des finances publiques et le Conseil d’État, et que le projet de loi doit également être présenté au Conseil des ministres.
- Ce calendrier est aujourd’hui dépendant de la rapidité avec laquelle le président nommera un nouveau Premier ministre. Le gouvernement Bayrou, bien que gérant les affaires courantes, pourrait cependant semble-t-il le cas échéant présenter un budget.
- Pour le budget de l’État, l’Assemblée et le Sénat disposent au total de 70 jours pour examiner le texte.
- Le prochain gouvernement pourrait donc choisir de jouer la montre. Selon l’article 47 de la Constitution, « Si le Parlement ne s’est pas prononcé dans un délai de soixante-dix jours, les dispositions du projet peuvent être mises en vigueur par ordonnance ».