Le rapport publié hier, jeudi 27 mars, par B4Ukraine, Razom We Stand et l’International Renaissance Foundation, qui ont établi une liste des navires composant la « flotte fantôme » dont se sert Moscou pour échapper aux sanctions, indique que les pays occidentaux disposent d’une importante marge de manoeuvre pour exercer davantage de pression économique sur la Russie.

  • Au 24 mars 2025, 338 navires des 848 que compte la flotte (463 transportant du pétrole brut et 385 des produits pétroliers) font l’objet de sanctions d’au moins une des juridictions du G7 retenues ici : Union européenne, Royaume-Uni, Canada et États-Unis. Cela représente un peu moins de 40 % du total 1.
  • Les listes de désignation individuelles des navires variant selon les pays, seulement 25 transporteurs de pétrole brut sont visés simultanément par les quatre juridictions.
  • Les données du Centre for Research on Energy and Clean Air (CREA) indiquent pourtant que les sanctions ont un impact direct sur la capacité des navires russes à opérer et donc sur les revenus générés par la vente de pétrole.
  • Suite à l’introduction des premières sanctions européennes et britanniques, les volumes de pétrole livrés ont chuté de 13 % — puis de 24 % supplémentaires suite à la deuxième vague de sanctions.
  • Bien que les revenus tirés par Moscou de la vente de ses hydrocarbures ont baissé de 18,4 % en février par rapport à l’an dernier, les bénéfices générés par les entreprises énergétiques russes continuent de financer massivement la guerre du Kremlin contre l’Ukraine.

Ces dernières semaines, Donald Trump a signalé qu’il était prêt à « voir ce qui peut être fait » pour lever une partie des sanctions imposées sur la Russie depuis 2022, suite aux demandes formulées par le Kremlin lors du dernier cycle de négociations de cessez-le-feu en Ukraine qui s’est achevé lundi 24 mars à Riyad, en Arabie saoudite. 

  • La Russie exige que les sanctions visant la Banque agricole russe « et d’autres banques qui assurent le commerce dans le complexe agro-industriel » soient levées pour que Moscou observe le cessez-le-feu en mer Noire qui a supposément fait l’objet d’un accord avec Washington lundi.
  • La Russie demande également à ce que ces institutions bancaires soient reconnectées à SWIFT, le système de paiements internationaux dont les banques russes sont exclues depuis 2022. Toutefois, les États-Unis ne peuvent pas unilatéralement prendre cette décision et auraient besoin de l’Union européenne, le service SWIFT étant fourni par une entreprise basée en Belgique.
  • Interrogé vendredi 28 mars sur la position de l’administration Trump vis-à-vis de ces demandes, le secrétaire d’État Marco Rubio a déclaré : « Nous allons en quelque sorte analyser ce que notre équipe a rapporté. Nous présenterons ces options au Président. Le Président prendra ces décisions. Nous n’en sommes pas encore là » 2.
  • L’Union européenne et une partie de ses dirigeants ont d’ores et déjà fait savoir jeudi 27 lors du sommet organisé à Paris par Emmanuel Macron qu’une levée des sanctions était exclue tant que le conflit n’aura pas été réglé par une « paix juste ».

Une autre solution récemment formulée par deux anciens hauts responsables américains pour augmenter la pression économique sur la Russie consisterait à placer des sanctions secondaires sur les pays et entreprises important toujours du pétrole russe, notamment l’Inde et la Chine 3.

  • De décembre 2024 à fin février, la Chine a acheté 47 % des exportations de pétrole brut de la Russie, suivie par l’Inde (38 %).
  • Sur la même période, l’Union européenne a été le premier acheteur de GNL russe. 
  • En 2024, l’Union a payé plus à la Russie pour l’achat d’hydrocarbures qu’elle n’a envoyé d’aide financière à l’Ukraine : 21,9 milliards d’euros contre 18,7 milliards 4.
Sources
  1. Addressing The Russian Shadow Fleet Threat With A Joint Eu And Allies Approach For Enhanced Targeted Sanctions, B4Ukraine, Razom We Stand et International Renaissance Foundation, 27 mars 2025.
  2. Secretary of State Marco Rubio Remarks to the Press, U.S. Department of State, 28 mars 2025.
  3. Glenn Hubbard et Catherine Wolfram, « How to Punish Russia, Make Money and End the War », The New York Times, 27 mars 2025.
  4. EU imports of Russian fossil fuels in third year of invasion surpass financial aid sent to Ukraine, Centre for Research on Energy and Clean Air (CREA), 24 février 2025.