Il ne s’agit pas de la première fois depuis le lancement de l’invasion de 2022 que l’armée ukrainienne conduit des opérations dans la région russe de Belgorod. En mai et juin 2023, Kiev avait initié des raids transfrontaliers qui visaient — avant Koursk — à contraindre l’état-major russe à détourner des ressources affectées dans le Donbass. Ces opérations étaient toutefois d’une envergure limitée.
- Mardi 18 mars, plusieurs rapports russes publiés sur Telegram ont fait état d’opérations mécanisées ukrainiennes autour de la frontière séparant les oblasts de Soumy et de Belgorod, au sud de Koursk 1.
- Ces informations ont été confirmées le lendemain, mercredi 19, et les données vectorielles de Institute for the Study of War indiquent que l’armée ukrainienne contrôle une poche d’environ 5 km² à l’ouest des villages de Demidovka et de Grafovka.
- Rien n’indique pour l’heure que la présence ukrainienne à Belgorod sera durable, ni que l’état-major ukrainien a pour intention de lancer une percée dans la profondeur en territoire russe.
Si les objectifs militaires de cette opération sont pour l’heure incertains, il apparaît que celle-ci sert pour le moins un objectif politique, alors que l’armée ukrainienne est dans le même temps poussée par les forces russes hors de l’oblast de Koursk. Ainsi, le lancement de l’opération coïncide avec l’appel entre Trump et Poutine du mardi 18 mars, à la suite duquel le président russe a déclaré être favorable à un cessez-le-feu limité aux infrastructures énergétiques.
Cette incursion a toutefois des implications concrètes pour Moscou, alors que des frappes de drones ukrainiens dans la nuit de lundi à mardi ont provoqué au moins un mort et plusieurs blessés dans la région 2. Des évacuations de villages ont par ailleurs été ordonnées par les autorités locales.
- En août 2024, l’incursion de Koursk, lancée seulement une cinquantaine de kilomètres plus au nord, avait pris de court les autorités militaires russes et conduit à la prise de contrôle par Kiev de plus de 1 300 km² au cours des premières semaines de l’opération.
- Si l’opération de Belgorod semble pour l’heure d’une ampleur bien moindre, le franchissement de la frontière — sans grande opposition — par des chars ukrainiens fragilise Vladimir Poutine et affaiblit le récit de victoire militaire en Ukraine porté par le Kremlin.
Selon le major-général Viktor Nazarov, ancien conseiller de l’ex-commandant en chef des forces ukrainiennes Valeri Zaloujny, le lancement d’une opération d’ampleur dans l’oblast de Belgorod figurait parmi les options considérées par l’état-major de Kiev dès fin 2022 3. En « amenant des opérations militaires sur le territoire de l’ennemi », la stratégie visait à menacer les capacités de l’armée russe à lancer des attaques sur Kharkiv, capitale régionale partiellement encerclée dans les premiers mois de l’invasion russe en février 2022.
Sources
- Publication de Рыбарь sur Telegram, 18 mars 2025.
- Publication de Настоящий Гладков sur Telegram, 19 mars 2025.
- Генерал Віктор Назаров : Залужний у 2022 році пропонував наступ на Бєлгород, але його не підтримали, YouTube, 2 février 2025.