En 2022, Kherson est devenue le symbole de la résilience, de l’espoir et du plus grand succès de la contre-offensive d’automne de l’Ukraine dans le sud. Depuis lors, la ville a continué à vivre sur le fil du rasoir : avec l’armée russe prête à attaquer à tout moment, elle n’est protégée que par la rivière, le système de défense ukrainien et l’esprit fort des habitants. Ces derniers ont survécu aux horreurs de l’occupation ennemie et sentent chaque jour la lame de la guerre peser sur eux. Au cours des deux années de bombardements continus, plus de 70 bibliothèques de la ville ont été endommagées ou détruites. Cependant, la plus jeune génération d’habitants de Kherson a trouvé un moyen d’apporter le plaisir de la lecture de la bibliothèque à leur habitat quotidien : les abris anti-bombes. 

Nous ouvrons notre série « Ukraine : plongée dans une société en guerre » par une conversation avec Maryna Tchyzhova, la jeune fondatrice du projet Bookshelter qui renforce la défense de la ville par la lecture de livres.

Le jour de l’entretien, Maryna vient de recevoir une distinction honorifique du ministère de la jeunesse et des sports. Nous nous appelons par WhatsApp mais elle previent que des problèmes de connexion pourraient nous interrompre — elle utilise des données cellulaires, parce que depuis six jours, il n’y a plus d’électricité dans son quartier de Kherson nommé Ostriv (une île en ukrainien), ou sans doute même plus, elle ne s’en souvient plus. C’est l’un des quartiers les plus proches des positions russes — le lendemain de l’entretien, un incendie a été signalé à la suite des frappes russes sur le quartier. Il ne fait plus 40°C à Kherson comme c’était le cas il y a quelques semaines encore mais toujours 30°C quotidiennement cette semaine. Le manque d’électricité se fait sentir, ne serait-ce que pour les questions d’aération, de réfrigération ou d’accès internet. Malgré tout, Maryna a une voix très énergique.

Vous êtes originaire de Bila Tserkva, une ville de l’oblast de Kyiv. Pouvez-vous partager avec nous votre parcours jusqu’à Kherson ? Depuis combien de temps y vivez-vous désormais ?

Cela fera bientôt deux ans que je suis à Kherson. Je suis venue ici pour rejoindre mon petit ami, que j’ai rencontré dans ma ville natale. Il était à Bila Tserkva pour son travail à l’époque, mais il est originaire de Kherson. Le 11 novembre 2022 la ville était libérée de l’occupation russe, et il est tout de suite revenu le 1er décembre. Je l’ai suivi.

C’est ainsi que je m’y suis installée de manière permanente. J’ai ensuite commencé à faire du bénévolat, ce qui m’a finalement amenée à participer au projet de leadership politique de l’International Republican Institute (IRI). C’est par ce biais que je me suis vraiment impliquée dans la vie de la ville, notamment par notre projet.

Si vous deviez capturer l’essence de Kherson en quelques mots, que diriez-vous ? À quel point cette ville est-elle devenue la vôtre ?

Je dirais que c’est une ville en plein essor. Au printemps, tout a commencé à fleurir ici, c’est vraiment la saison que je préfère. Kherson est aussi un peu folle, mais dans le bon sens. C’est ici que j’ai rencontré des gens extraordinaires, des personnes que les mots ne peuvent pas vraiment décrire. En somme, Kherson est fleurie, folle, et tout simplement invincible.

Même si je retourne parfois chez mes parents, je ne dirais pas que je me sens chez moi ailleurs. C’est ici que je me sens vraiment chez moi. Cette ville est devenue quelque chose qui m’appartient. Quand je rêve de la restaurer, je me rends compte que, même si ce n’est que récent, elle est déjà notre Kherson. Alors, oui, Kherson est devenue ma ville.

Kherson est fleurie, folle, et tout simplement invincible.

Maryna Tchyzhova

Pourriez-vous nous dévoiler les origines de votre projet Bookshelter ? Qui sont les personnes derrière cette initiative, et comment l’idée a-t-elle germé ?

Nous sommes la jeunesse active de Kherson. Le projet a commencé de manière presque fortuite. À l’origine, nous n’étions qu’un groupe de jeunes de la région, sans nom particulier, aujourd’hui nous sommes l’ONG « The Shine of Limitless Dream ». 

Tout a commencé le 1er décembre 2023, lorsque avec mon ami Anton Novikov nous avons participé à l’Académie de leadership politique organisée par l’International Republican Institute (IRI), où nous devions créer un projet en équipe. C’est ainsi que nous avons rencontré Aelita Horbounova et que le concept de Bookshelter a émergé. Plus tard, notre équipe était renforcée par Roman Fedorov et Ksenia Trousova, qui est un élément clef dans notre projet « Steel Youth ». Le noyau de l’organisation est constitué de 5 jeunes activistes, renforcés par des nombreux bénévoles qui nous aident.

L’idée initiale était simple : créer des espaces dans les abris où les gens pourraient trouver des livres pour se distraire des combats et se réfugier mentalement. Très vite, notre mission s’est retrouvée dans une formule : « Le livre comme abri moral contre la guerre ».

Ce qui a commencé comme une idée modeste s’est rapidement transformé en une initiative précieuse pour notre communauté. Aujourd’hui, Bookshelter est un projet qui installe des bibliothèques dans les abris de la région de Kherson. Nous avons déjà 24 espaces actifs dans toute la ville, offrant aux habitants un répit face à la violence quotidienne. C’est quelque peu surprenant de voir à quel point notre projet a pris vie et a trouvé un écho auprès des gens.

Pouvez-vous nous donner un aperçu du fonctionnement de Bookshelter ? Comment les livres sont-ils collectés, et quelle est leur destinée au sein du projet ?

Tout commence par la recherche d’endroits appropriés pour installer nos bibliothèques. Nous avons une liste de refuges dans la ville de Kherson, et avec notre équipe, nous les visitons un à un. Certains abris sont en bon état et adaptés à notre projet, d’autres ne le sont pas, et nous les écartons.

Une fois un abri sélectionné, nous contactons le responsable de la copropriété, ou directement Sergey Tarasenko, la personne en charge des abris dans la ville. Après avoir obtenu les autorisations nécessaires, nous planifions l’installation.

Nous avons une équipe de bénévoles qui nous aide à transporter les étagères jusqu’aux refuges. Comme nous sommes principalement un groupe de filles, ce sont les bénévoles qui s’occupent de la logistique. Les étagères sont ensuite livrées et installées sur place, parfois déjà montées, parfois à assembler.

Nous sommes la jeunesse active de Kherson.

Maryna Tchyzhova

En parallèle, nous avons organisé plusieurs campagnes de collecte de livres, en collaboration avec l’administration régionale de Kherson. Par exemple, nous avons lancé l’initiative « Lecture gratuite en ukrainien » et « Un étudiant pour un livre pour la région de Kherson ». Ces campagnes ont permis de recueillir des livres de toute l’Ukraine, et même de l’étranger.

Grâce à ces efforts, nous avons pu constituer une collection importante de livres, qui sont ensuite répartis dans les différents abris. Le résultat est surprenant : de simples bibliothèques dans des abris sont devenues un véritable soutien pour les habitants en temps de guerre.

Comment avez-vous accueilli vos premiers livres pour Bookshelter, et quelles ont été vos premières impressions ?

La toute première fois, nous avons reçu des livres de la bibliothèque régionale de Honchar. Au début, cela n’a pas été facile. Bien que la bibliothèque nous ait promis de l’aide, il y a eu des retards et des difficultés. Finalement, grâce à la visibilité que nous avons donnée au projet sur les réseaux sociaux, ils ont tenu leur promesse et nous ont fourni une cinquantaine de livres. Ces livres ont été utilisés pour ouvrir notre première bibliothèque, située sur une île, à seulement 800 mètres de la rive occupée.

Après cela, nous avons été soutenus par le PEN Club. J’ai rencontré des gens merveilleux. Ils nous ont apporté environ 500 livres. Ce sont les premiers que nous avons pu distribuer dans les centres d’hébergement.

En plus des livres, le PEN Club nous a aussi fourni des boîtes à livres, que nous avons installées dans chaque refuge pour marquer nos bibliothèques. Ces premiers dons ont été essentiels pour lancer notre projet et équiper nos premières bibliothèques dans les abris.

Vous avez mentionné le projet « Steel Youth » auparavant. Pouvez-vous nous éclairer sur ses objectifs et ses ambitions ?

Ce projet me prend beaucoup de temps car il nécessite une organisation constante : création d’événements, encouragement des jeunes, gestion des inscriptions, etc.

L’objectif principal de « Steel Youth » est de réduire le stress psycho-émotionnel des habitants de Kherson et de rassembler les jeunes. Nous avons mené une enquête qui a montré le besoin d’un espace sûr à Kherson, où les jeunes peuvent se retrouver, jouer, regarder des films, et simplement passer du temps ensemble. En septembre, nous lancerons des formations pour les jeunes, animées par le même professeur qui nous a appris à monter des projets.

Quels sont, selon vous, les éléments fondamentaux qui animent et unissent ces deux projets ?

Un des aspects essentiels est la création d’activités qui attirent et engagent la communauté. Par exemple, nous avons lancé un club de lecture et j’ai été agréablement surprise par le nombre de jeunes chez qui cela a suscité de l’intérêt. Cela montre qu’il y a un vrai besoin d’espaces pour partager et discuter autour des livres.

Nous avons aussi organisé un événement pour les enfants, une journée du livre pour enfants, dans une de nos librairies. L’idée était de rendre l’expérience amusante et interactive, avec des concours, des énigmes, et même une petite pièce de théâtre. L’événement a eu beaucoup de succès, et les parents nous ont demandé quand nous en organiserions un autre.

Ces projets, qu’ils soient destinés aux jeunes ou aux enfants, visent à offrir des moments de partage et de divertissement à Kherson. Ils montrent que même dans des périodes difficiles, il est possible de créer des expériences positives pour la communauté. Nous avons l’intention de continuer à organiser ces types d’événements régulièrement, car ils apportent un réel réconfort et une source d’énergie à ceux qui y participent.

En pleine guerre, il y a un vrai besoin d’espaces pour partager et discuter autour des livres.

Maryna Tchyzhova

Comment s’est développée votre collaboration avec les autorités locales dans la réalisation de vos initiatives ?

Nous avons pris l’initiative de collaborer avec les autorités municipales, et cela s’est avéré vraiment bénéfique. Grâce à leur soutien, nous avons reçu un afflux de livres non seulement de toute l’Ukraine, mais aussi de l’étranger, ce qui a été une surprise pour nous. Bien que nous n’ayons pas pu organiser parfaitement tous les aspects logistiques, comme le suivi précis des livres reçus, l’administration régionale de Kherson a joué un rôle crucial en nous aidant à trouver les abris que nous recherchions.

Je tiens à exprimer ma gratitude envers l’administration régionale et municipale de Kherson. Ils ont prêté attention à nos initiatives et nous ont soutenus dans leur mise en œuvre, ce qui a été une contribution très importante.

Notre première rencontre avec les autorités a eu lieu lors de notre programme à l’Académie de leadership politique. Le chef adjoint de l’administration régionale de Kherson, Volodymyr Kliutsevskyi, a assisté à la présentation de nos projets. Il a ensuite organisé une réunion à Kherson pour que nous puissions présenter nos projets aux principaux responsables de la ville, y compris les directeurs de la culture, de l’éducation, et de la jeunesse et des sports.

Après cette présentation, leurs secrétaires ont commencé à nous contacter pour organiser des réunions et discuter des moyens de soutenir notre projet. Bien qu’il y ait eu quelques difficultés au début, les choses se sont rapidement arrangées, et nous avons pu avancer ensemble.

Parmi les œuvres que vous avez découvertes grâce à Bookshelter, lesquelles vous ont le plus marqué, et pourquoi ?

Un des livres qui m’a le plus marqué est Lovely War de Julia Berry. C’est une histoire captivante qui mêle des récits de dieux et d’humains en guerre. Bien que ce ne soit pas facile de lire sur la guerre en pleine guerre, ce livre m’a profondément touchée.

J’ai également beaucoup apprécié Keeping the Dead de Tess Gerritsen. C’est un roman policier très prenant, et je suis une grande fan de ce genre d’histoires. En tant que lectrice qui aime aussi les romans d’amour, It Ends with Us de Colleen Hoover est un autre livre qui m’a marqué, même si ce n’est qu’une nouvelle.

Pour être honnête, en parlant du premier livre, il faut dire que ce n’est pas une si bonne idée que cela de lire sur la guerre pendant la guerre — même si cela a ses avantages. C’est moralement difficile. Vous êtes déjà en guerre — 800 mètres de rivière vous séparent de vos « voisins ». Et puis, vous êtes en train de lire et un obus tombe quelque part à côté… 

Y a-t-il une différence entre lire un livre dans le confort de sa maison et le faire dans un abri anti-bombe ?

Cela dépend des circonstances dans l’abri. En été, c’est supportable, mais en hiver, il fait très froid. Pourtant, les livres apportent un certain réconfort, peu importe où vous les lisez. Les gens peuvent venir, échanger des livres, ou simplement en emprunter un pour le lire chez eux. C’est un petit acte de normalité dans un contexte qui en manque cruellement.

Lire sur la guerre en pleine guerre est étrange. Vous êtes déjà en guerre — 800 mètres de rivière vous séparent de vos « voisins ». Et puis, vous êtes en train de lire et un obus tombe quelque part à côté… 

Maryna Tchyzhova

Quelles sont les sources de votre inspiration qui vous poussent à continuer sur cette voie ?

C’est d’abord l’avenir de l’Ukraine. Je crois que beaucoup de personnes partagent ce sentiment actuellement. Nous sommes nombreux à être activement engagés, avec une position civique forte, car nous nous soucions profondément de ce que deviendra l’Ukraine après la victoire. C’est probablement ma principale motivation.

Un autre facteur qui me pousse à continuer, c’est que je ne me vois pas dans un rôle traditionnel : bien que chaque profession soit essentielle, surtout dans le contexte actuel, je ressens le besoin de m’engager différemment. Il y a aussi cette dynamique parmi les jeunes, ce mouvement encore modeste mais bien présent, qui m’inspire.

Nous avons commencé à rétablir le Conseil de la jeunesse de Kherson, à la fois au niveau local et régional. Le recrutement pour ce conseil, sous l’égide des autorités municipales, est en cours, et nous sommes invités à y participer. Cette opportunité de contribuer à la reconstruction et à l’avenir de Kherson est une source d’inspiration supplémentaire pour moi.

Vous avez évoqué l’Ukraine et votre vision de son avenir. Comment imaginez-vous le pays que vous souhaitez contribuer à bâtir en tant que membre actif de la jeunesse ?

Pour moi, il est essentiel de faire tout ce qui est possible pour que les jeunes aient envie de revenir en Ukraine et de contribuer à son développement. Nous avons énormément de ressources dans ce pays, et je crois fermement que nous pouvons compter sur nous-mêmes pour reconstruire et progresser, sans dépendre de qui que ce soit d’autre.

En tant que membre actif de la jeunesse, je pense que nous devons nous concentrer sur la création d’opportunités pour les jeunes. C’est pourquoi j’ai demandé au ministère de la Jeunesse et des Sports de créer le Conseil de la jeunesse. Nous allons essayer de mettre cela en place, même si la guerre complique tout et rend les projets incertains. Si nous savions que ce que nous allons faire maintenant ne s’effondrerait pas dans quelques jours, nous le ferions. C’est pourquoi c’est difficile. 

Notre objectif est de créer des centres pour les jeunes, des forums, et des espaces où ils peuvent se réunir, échanger et développer des idées. Je pense aussi à une plateforme en ligne où les jeunes, de 14 à 35 ans, pourraient s’exprimer librement sur ce qui leur manque actuellement. Cette plateforme pourrait rassembler des personnes partageant les mêmes idées et faciliter la compréhension des besoins spécifiques dans différentes villes, au-delà de Kherson.

Les livres apportent un certain réconfort, peu importe où vous les lisez.

Maryna Tchyzhova

Quels obstacles avez-vous rencontrés dans la mise en œuvre de vos projets, et de quoi avez-vous besoin pour surmonter ces défis et avancer ?

L’un des principaux obstacles est lié à la sécurité à Kherson. Il est impossible de communiquer des adresses précises pour nos événements ou nos initiatives en raison des risques de bombardements. Cela rend la communication avec les habitants très difficile. Même si les gens commencent à utiliser nos livres, la demande n’est pas aussi forte que nous le souhaiterions, mais elle existe tout de même.

Un autre défi majeur est la difficulté à mobiliser les jeunes. Beaucoup ont quitté la ville, et ceux qui restent ne sont pas faciles à atteindre. Nous essayons de les engager via des plateformes comme TikTok, mais ce n’est pas simple. Nous avons aussi dû surmonter des obstacles administratifs pour diffuser des informations sur nos événements, comme obtenir les contacts des directeurs d’école pour informer les jeunes.

Nous avons également eu des problèmes avec l’installation de nos bibliothèques dans les abris. Le ministère des Situations d’urgence nous a adressé des mises en garde et des reproches, car les livres présentent un risque d’incendie. Après des négociations, nous avons convenu de limiter le nombre de livres à 50 par bibliothèque.

Enfin, juste avant la création officielle de notre ONG, nous avons fait face à des accusations infondées affirmant que notre organisation utilisait des symboles russes. C’était une surprise et un frein inattendu, mais nous avons continué malgré tout. Ces défis sont nombreux, mais nous restons déterminés à poursuivre notre travail pour Kherson.

Kherson a longtemps été une ville où le russe prédominait. Avez-vous constaté des changements dans les habitudes linguistiques, avec une augmentation de l’usage de l’ukrainien ?

Oui, j’ai été surprise de constater des changements significatifs. Pour commencer, sur les 8617 livres que nous avons reçus dans le cadre du projet, seulement une quinzaine étaient en russe. C’est un signe clair de l’évolution des habitudes linguistiques.

Mon petit ami, qui est originaire de Kherson, parlait principalement russe, mais en vivant ensemble, il s’est progressivement tourné vers l’ukrainien. Ce processus s’est fait naturellement, et c’est quelque chose que je trouve très positif.

Avant de venir ici, je parlais déjà ukrainien, mais au début, il y avait parfois un léger décalage, un manque de compréhension. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas, et je constate que de plus en plus de gens passent eux-mêmes à l’ukrainien, à leur rythme et quand ils le jugent nécessaire. C’est une transition douce que j’apprécie beaucoup, car elle se fait de manière volontaire et naturelle.

Sur les 8617 livres que nous avons reçus à Kherson, seulement une quinzaine étaient en russe. C’est un signe clair de l’évolution des habitudes linguistiques.

Maryna Tchyzhova

En ces temps de guerre, quel rôle attribuez-vous à la culture, et en particulier aux livres ? Pourquoi sont-ils, selon vous, essentiels aujourd’hui ?

Le front culturel est toujours pertinent, surtout aujourd’hui, en temps de guerre. Récemment, nous avons eu l’honneur d’être invités à l’Arsenal du Livre, un événement organisé par le Club du Crayon. Je crois fermement que, même à Kherson, sur la ligne de front, il est essentiel que les enfants et les jeunes continuent à lire des livres.

Les livres jouent un rôle fondamental. Ils sont non seulement une source de connaissance, mais aussi une manière d’apprendre à vivre. Les livres sont souvent adaptés en films, mais l’expérience de la lecture est unique et irremplaçable. Il est difficile de décrire exactement ce que les livres apportent, mais leur importance est indéniable. Ils sont une part essentielle de notre culture, même, et surtout, en temps de guerre.

Lire un livre, c’est bien plus qu’une simple activité éducative ou un loisir. À Kherson, le livre devient une défense émotionnelle contre la dure réalité de la guerre. Par exemple, lorsque je lis un roman policier de Tessa, je me plonge tellement dans l’histoire que cela m’aide à ne pas prêter attention aux explosions autour de moi. C’est une manière de se protéger mentalement.