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L’européanisation de la politique française, accélérée par la dissolution du soir de l’élection du nouveau Parlement européen, pourrait-elle connaître un nouveau pic ?
Si une Assemblée nationale divisée en trois blocs paraît difficile à structurer sans coalition, les positionnements des partis français lors du vote du 18 juillet de la présidente sortante Ursula von der Leyen pourrait créer un moment politique, proposant un modèle de cadre d’une grande coalition et d’un gouvernement Ursula.
- Les chefs d’État et de gouvernement réunis lors du Conseil européen du 27-28 juin ont décidé de renouveler le mandat d’Ursula von der Leyen (PPE) à la tête de la Commission européenne pour cinq ans de plus.
- Dans un exercice qui s’annonce périlleux, elle se présentera le 18 juillet devant le Parlement européen réuni en session plénière à Strasbourg. Pour être élue, elle a besoin d’une majorité absolue, soit au moins 361 députés.
- Si en théorie les votes de la coalition qui l’a soutenue en 2019 seraient suffisants — PPE, Renew et S&D ont ensemble 400 sièges — les nombreuses défections à l’intérieur de chaque groupe pourraient mettre en péril son élection.
- Le vote est en effet secret. S’il est difficile d’estimer le nombre exact de défections, en 2019 malgré une majorité confortable sur le papier (414 députés), von der Leyen n’a été élue qu’à une courte majorité (9 voix). De plus, le PiS polonais (27 députés) avait ouvertement déclaré que sa délegation avait voté en faveur de son mandat.
Une coïncidence dans les dates : la majorité européenne peut-elle définir la majorité française ?
- L’Assemblée nationale française se réunira pour la première fois au même moment : le jeudi 18 juillet. Alors qu’à Paris les tractations pour la formation d’un gouvernement se poursuivent, l’élection d’Ursula von der Leyen pourrait refléter la future majorité française ?
- Si en amont des élections européenne von der Leyen avait laissé la porte ouverte à une alliance avec des partis plus conservateurs, notamment avec le CRE de Meloni (79 députés) une coopération ouverte avec les conservateurs semble aujourd’hui peu probable : les socialistes et démocrates ont en effet mis en garde contre une possible perte de soutien si elle venait à s’appuyer sur un rapprochement avec les conservateurs. La même ligne a été également avancée par les Verts (53 députés) qui pourraient offrir leur soutien en échange probablement de quelque compromis sur le Pacte vert.
- À l’intérieur du PPE, les défections risquent également d’être nombreuses : les Républicains (6 sièges au Parlement européen) ont en effet déclaré qu’ils n’allaient pas soutenir sa candidature. Le congrès du parti à Bucarest, qui a acté son investiture comme tête de liste, montre aussi le peu d’enthousiasme de son propre camp : elle n’a été élue qu’avec 410 voix (sur 737 électeurs, seuls 499 ont voté et 83 ont voté contre elle).
- Son élection pourrait ainsi se faire avec une partie conséquente du PPE, le S&D, Renew, les Verts et le vote secret d’une partie du CRE (par exemple Fratelli d’Italia, 24 députés).
Quels seraient les chiffres d’une majorité Ursula à l’Assemblée nationale ?
- Selon nos projections, avec 293 députés « une coalition Ursula » réunissant les forces politiques qui pourraient voter pour la reconduction de la présidente le 18 juillet (EELV, PS, Divers gauche, Modem, Renaissance, Horizon, Divers centres et Divers droite) aurait la majorité absolue.
- En suivant les positionnements d’une partie des députés LR, le vote d’Ursula von der Leyen pourrait être également le prétexte pour une clarification au sein du parti : avec le passage d’une partie des députés constructifs à la majorité ou avec un engagement informel de non-vote de toute motion de censure potentielle.
Le précédent italien
- En 2019 le vote d’Ursula von der Leyen au Parlement européen avait accéléré la chute du gouvernement Conte I, en faisant passer à l’opposition la Ligue et son chef, l’alors tout puissant ministre de l’intérieur Matteo Salvini. Le Mouvement 5 Étoiles avait en effet voté pour von der Leyen, en signalant un changement de cap structurel qui avait permis à une majorité pro-européenne de s’installer dans le pays.
- La Ligue, qui fait partie du groupe Identité et démocratie, avait voté contre, tout comme Fratelli d’Italia. À l’époque, Matteo Salvini gouvernait avec le M5S, et s’était montré très critique, mais aussi prophétique, à l’égard de son allié : « Depuis deux jours, ils sont déjà au gouvernement ensemble, pour l’instant à Bruxelles ».