Depuis le 9 juin vous avez été plusieurs millions à lire et à partager nos analyses. Ce travail a un coût. Si vous avec les moyens de contribuer, pour nous aider à continuer dans cet élan, nous vous demandons de vous abonner au Grand Continent
Nous publions une nouvelle mise à jour de notre projection 1.
Nous en tirons trois grandes tendances à partir des scénarios définis hier dans ces pages.
1 — La mobilisation d’un front républicain a cassé la dynamique du RN en ce début de campagne d’entre-deux-tours
Une campagne législative bâclée d’entre-deux-tours a fait émerger les faiblesses et la radicalité du parti de Marine Le Pen et Jordan Bardella.
- Depuis notre projection d’hier, on observe une évolution négative pour le RN qui perdrait une dizaine de députés et qui, avec environ 230 députés, verrait s’éloigner la majorité absolue.
- Selon des sources proches du dossier 240 députés (soit la fourchette haute de notre projection d’hier) pourrait être une limite au-dessus de laquelle Jordan Bardella pourrait proposer un gouvernement.
2 — Le scénario Grande Coalition devient plus probable
La définition d’un Front Républicain plus dynamique a provoqué 212 désistements et a amené les 306 triangulaires du soir du premier tour à 94.
- On observe une dynamique positive pour les forces centristes et de la gauche qui semble à ce stade rendre plus probable le scénario d’une grande coalition.
- Avec environ 270 députés, une « grande coalition » réunissant les Républicains, les centristes et le Nouveau Front Populaire, tout en excluant LFI frôlerait la majorité absolue. Reste à voir si, dans ce cas de figure, une négociation d’un programme de gouvernement a minima de reconstruction nationale pourrait permettre de parvenir à un compromis et éviter la censure.
3 — La participation reste le déterminant clef et l’inconnue principale
Nos nouvelles projections convergent vers les conclusions des données et modèles Vincent Pons : pour faire fonctionner l’hypothèse du front républicain et éviter que le RN n’ait la majorité absolue, tout repose désormais sur la mobilisation des électeurs du bloc centriste et du bloc de gauche le jour du vote.
- Selon l’institut Cluster 17 qui a conduit un sondage la veille du premier tour sur les reports de voix, environ 60 % des électeurs de la majorité présidentielle envisageaient de s’abstenir dans le cas où leur candidat ne serait plus présent, 30 %, voteraient en faveur du NFP et 10 % en faveur du RN.
- De manière similaire, plus de 50 % des électeurs du NFP envisageaient de ne pas choisir entre un candidat RN et un candidat Ensemble dans un second tour sans candidat issu de leur camp, contre 40 % qui se déclaraient disposés à activer la logique du barrage républicain.
- Selon les calculs de Jean-Yves Dormagen et Céline Braconnier les abstentionnistes faisant ainsi défaut au front républicain auraient pesé samedi près d’un quart des électeurs.
- Selon notre projection dans le cas où le vote de barrage serait divisé par deux la valeur moyenne RN+LR/RN verrait un intervalle entre 254-278 en frôlant donc la majorité absolue.
L’éloignement de la majorité absolue du RN rend moins probable le scénario Gouvernement RN, en entraînant paradoxalement une forte volatilité électorale qui pourrait nuire au front républicain.
On observerait une dynamique en deux temps, fondée sur une logique de performativité négative :
- Plus les électeurs du centre et de la gauche ont peur de l’arrivée imminente au pouvoir du RN, plus ils se mobilisent en produisant une baisse du score potentiel du parti de Marine Le Pen.
- Plus il baisse, moins son arrivée au pouvoir paraît probable, en démobilisant les électeurs du centre et de la gauche — le plus il risque finalement de monter.
Nous publierons dans la journée une version du simulateur prenant en compte les différentes hypothèses de variations de la participation.
Sources
- Réalisée à partir de la composition définitive des seconds tours et des matrices de transition entre premier et second tour publiées par Cluster 17 le 28 juin. Les circonscriptions ont été considérées une à une et une issue déterminée manuellement pour chacune d’entre elles en prenant en compte : l’identité et l’avance du candidat arrivé en tête au premier tour ; la projection du modèle pour le second tour avec et sans les reports des abstentionnistes ; l’affiliation partisane des candidats NFP ; et certaines configurations locales particulières. En cas de grande incertitude, plusieurs vainqueurs potentiels ont été déterminés, donnant lieu à une fourchette de sièges pour chaque parti.