Depuis juin 2022, un règlement européen fixe un taux de remplissage de 90 % des réserves de gaz des États membres avant le 1er novembre de chaque année. Cette règle a été assouplie en juin suite à une demande formulée par une coalition de pays, et les membres de l’Union doivent désormais atteindre cette cible à tout moment entre le 1er octobre et le 1er décembre.
- Au 29 septembre, l’Union affichait un taux de remplissage de ses réserves de gaz naturel de 82,6 %, soit un niveau confortable qui est néanmoins inférieur de près de 12 points à l’année dernière (94,3 % à la même période).
- Sur les 18 États membres disposant de réserves propres de gaz, seulement 7 pays ont atteint la cible de 90 % : la Pologne, le Portugal, la Roumanie, la Belgique, la Tchéquie, l’Italie et le France.
- Le règlement européen prévoit néanmoins une flexibilité de 10 % « en cas de conditions difficiles liées au remplissage des installations de stockage ». Celle-ci peut être accrue de 5 % par la Commission « en cas de persistance de conditions de marché défavorables ».
Ces nouvelles règles visent à réduire l’exposition des États membres à la spéculation sur les marchés. Les prix TTF à un mois ont considérablement diminué depuis leur pic de 2022 et se situaient au 30 septembre autour de 31 €/MWh, mais demeurent supérieurs aux niveaux ayant précédé l’invasion de 2022.
Malgré plusieurs signaux positifs — notamment le détachement de la dépendance européenne au gaz russe —, des inquiétudes demeurent.
- Des options négociées sur les marchés fin septembre laissaient entrevoir des prix du gaz allant jusqu’à 50 €/MWh à l’été 2026, soit une augmentation de 60 % environ par rapport aux niveaux actuels 1.
- Ces incertitudes sont notamment liées aux températures hivernales, qui pourraient être inférieures aux années précédentes, ainsi qu’à la perspective de nouvelles sanctions sur les exportations énergétiques russes, qui seraient susceptibles d’accroître la volatilité sur les marchés.
- Le gaz russe représentait 7,3 % des importations européennes l’an dernier, contre 41 % en 2021. La dépendance de l’Union au GNL est toutefois plus durable : 14 % en 2024, contre 16 % trois ans plus tôt.
Selon les projections de BloombergNEF, en l’absence de perturbations majeures, l’Union devrait terminer l’hiver avec des stocks de gaz allant de 33 % dans un scénario de base à 22 % en cas d’hiver particulièrement froid — soit bien en-deçà de la moyenne des cinq dernières années, qui se situe à 45 % 2.
Comme le répétait Mario Draghi lors de son discours prononcé le 16 septembre à Bruxelles, un an après la publication de son rapport, les prix élevés du gaz en Europe contribuent à entretenir un désavantage compétitif pour les entreprises du continent.
- Dans l’Union, les prix du gaz sont encore près de quatre fois plus élevés qu’aux États-Unis, auprès desquels Ursula von der Leyen s’est engagée cet été à acheter jusqu’à 750 milliards de dollars de produits énergétiques.
- Or, comme le souligne Draghi : « Depuis mars, le GNL acheminé en Europe coûte 60 à 90 % plus cher que le même gaz aux États-Unis — même après prise en compte des coûts logistiques et de regazéification ».
Sources
- Priscila Azevedo Rocha, « Europe Gas Traders Are Already Betting on Price Jump Next Summer », Bloomberg, 23 septembre 2025.
- Elena Mazneva et Priscila Azevedo Rocha, « Europe Enters Winter With Gas Tanks High Enough to Calm Market », Bloomberg, 1er octobre 2025.