Trump avait déclaré qu’il lui faudrait quelques minutes pour savoir si Poutine était sérieux au sujet d’un éventuel accord sur l’Ukraine, et avait menacé de quitter la réunion ou de tenir une conférence de presse seul si les discussions tournaient mal.

  • La tenue même de cette conférence de presse conjointe constitue en soi un signal : Trump y verra nécessairement un motif de présenter le sommet comme un succès.
  • Il s’agit de la première conférence de presse conjointe entre un président américain et un président russe depuis celle d’Helsinki en 2018, au cours de laquelle Trump avait paru privilégier la parole de Poutine à celle des agences de renseignement américaines concernant l’ingérence russe en 2016.

Du côté russe, la rencontre est perçue de manière très positive.

  • Dans une vidéo publiée sur Telegram, le ministre russe de la Défense, Andreï Belousov, interrogé par l’agence Tass au sujet de son ressenti après la rencontre entre Trump et Poutine répond simplement : « Excellent ».
  • L’ambassadeur de Russie aux États-Unis a déclaré à la télévision russe que l’atmosphère était globalement positive, mais a reconnu qu’il n’y avait « pas encore de percée » dans la restauration des relations bilatérales entre les deux pays.

Vladimir Poutine a ouvert la conférence de presse en évoquant les relations historiques entre la Russie et les États-Unis.

  • Habituellement, lorsqu’un président américain reçoit un homologue étranger, la conférence de presse conjointe s’ouvre par une déclaration du dirigeant américain, suivie de celle de son invité.
  • Sur l’Ukraine Poutine a uniquement annoncé qu’ils avaient trouvé un accord pour « ouvrir la voie vers la paix en Ukraine ». Il maintient toutefois la position qu’il adopte depuis trois ans : pour mettre fin au conflit en Ukraine, il faut éliminer les causes profondes de la guerre. Il a mis en garde les dirigeants européens contre toute tentative de « saboter » cet effort émergent.

Sa déclaration :

La situation en Ukraine est liée aux menaces fondamentales qui pèsent sur notre sécurité. Nous sommes convaincus que, pour parvenir à un règlement durable et de long terme, il faut éliminer toutes les causes profondes, toutes les racines premières de ce conflit. Il faut prendre en compte toutes les préoccupations légitimes de la Russie et rétablir un juste équilibre de la sécurité en Europe et dans le monde dans son ensemble. Et je suis d’accord avec le président Trump, comme il l’a déclaré aujourd’hui, sur le fait que, naturellement, la sécurité de l’Ukraine doit également être garantie. Naturellement, nous sommes prêts à travailler en ce sens. J’aimerais espérer que l’accord auquel nous sommes parvenus ensemble nous aidera à nous rapprocher de cet objectif et ouvrira la voie vers la paix en Ukraine. Nous nous attendons à ce que Kiev et les capitales européennes perçoivent tout cela de manière constructive et qu’elles ne créent aucun obstacle, qu’elles ne tentent pas de perturber les progrès naissants par des provocations ou des intrigues en coulisses.

Dans son allocution, Trump a déclaré que les discussions avaient été productives et que des progrès avaient été réalisés : « Nous avons vraiment fait de grands progrès aujourd’hui », a-t-il affirmé, sans toutefois donner de détails précis — « There’s no deal until there’s a deal » 1.

  • Il a déclaré qu’il appellerait bientôt les dirigeants de l’OTAN et Zelensky pour leur parler de la réunion d’aujourd’hui. Il a ensuite immédiatement évoqué ses « excellentes relations » avec Poutine.
  • « Nous avons eu une réunion extrêmement productive et nous nous sommes mis d’accord sur de nombreux points, il n’en reste que quelques-uns. Certains ne sont pas très importants. L’un d’entre eux est probablement le plus important, mais nous avons de très bonnes chances d’y parvenir. Nous n’y sommes pas encore parvenus, mais nous avons de très bonnes chances d’y arriver. »

En amont de la réunion, le président américain avait déclaré que son objectif était d’obtenir un cessez-le-feu et une deuxième rencontre qui inclurait aussi Zelensky. Il semble avoir échoué sur les deux points. 

  • Malgré la menace de « conséquences très graves » adressée à Poutine s’il n’acceptait pas de mettre fin aux combats, la Maison Blanche n’a fait aucune annonce concernant de nouvelles sanctions.
  • Dans la journée, le département du Trésor américain avait suspendu temporairement certaines sanctions contre la Russie jusqu’au 20 août.
  • La proposition de Poutine en amont de la réunion concernait surtout un nouveau traité de contrôle des armements et plusieurs responsables russes avaient insisté sur le fait que la position de Moscou concernant le conflit en Ukraine n’avait pas changé.

Pour la Russie, cette rencontre sur le sol américain, à laquelle a participé une délégation composée de personnalités presque toutes visées par des sanctions occidentales, constitue une victoire. Elle permet à Moscou de se placer sur un pied d’égalité avec Washington sur la scène mondiale, tout en lui donnant l’occasion de gagner du temps et d’éviter de nouvelles sanctions.

  • Avant la réunion, le récit officiel du Kremlin mettait surtout en avant l’idée que les États-Unis et la Russie sont deux grandes nations qui doivent entretenir de bonnes relations, indépendamment des conflits locaux.
  • Des responsables russes ont également mis en avant l’un des thèmes les plus chers de la propagande russe : la Seconde Guerre mondiale. Avant la rencontre en Alaska, Poutine s’est rendu à un mémorial en Russie rendant hommage à la coopération entre l’Union soviétique et les États-Unis durant le conflit et dans une vidéo, on le voit déposer des fleurs au monument de Magadan qui rappelle la route aérienne Alaska-Sibérie. Il a également évoqué ce sujet lors de la conférence de presse.

Il n’est pas clair où la réunion d’aujourd’hui laisse les efforts pour mettre fin à la guerre. 

Le Premier ministre britannique Keir Starmer a indiqué que le Royaume-Uni, avec d’autres pays européens, avait préparé des plans « réalistes » pour déployer en Ukraine, après un éventuel cessez-le-feu, une « force de réassurance » comprenant une couverture aérienne de l’ouest du pays, la formation de militaires et des opérations de déminage en mer Noire.

  • Lors d’un appel avec des dirigeants européens le 13 août, Donald Trump aurait affirmé qu’il serait prêt à offrir des garanties de sécurité à l’Ukraine en dehors de l’OTAN. 
  • L’Allemagne a annoncé, le 13 août, qu’elle financerait l’achat pour 500 millions de dollars d’équipements et de munitions américains destinés à l’Ukraine. Selon les données de Kiel Institute, depuis le début de l’invasion en 2022 et jusqu’en juin 2025, l’Europe a consacré au moins 35,1 milliards d’euros d’aide militaire via des achats d’armement — soit 4,4 milliards de plus que les États-Unis.
Sources
  1. Il n’y a pas d’accord tant qu’il n’y a pas d’accord.