Léon est la forme française du latin Leo, qui signifie tout simplement «  lion  ». Il a comme dérivés Lionel et Léonard. Le latin Leo apparaît à Rome comme un emprunt au grec. Comme d’autres mots empruntés, il a été adapté à la grammaire et à la déclinaison latines  : Leo, leonis au génitif. En latin comme en italien (Leone), il se confond avec le nom commun qui sert à désigner le lion.

  • Rappelons que la christianisation de l’Empire est allée de pair avec l’emprunt par le latin (et donc les langues filles) de nombreux mots grecs – langue véhiculaire du christianisme : église, prêtre, eucharistie, évangile, etc. Mais aussi de nombreux noms grecs, qui rentrent via le christianisme dans la latinité : Georges, Timothée, Léon, Etienne, Hélène etc.
  • Ces noms sont en général portés par des Saints et martyrs célèbres et vénérés avant de se diffuser dans la population.
  • C’est le Pape Léon Ier le Grand (440-461), au Vème siècle, qui semble avoir popularisé ce nom. Ce Pape, docteur de l’Église, pape de l’important concile de Chalcédoine qui définit et distingue les deux natures du Christ, est aussi connu pour avoir détourné de Rome le péril des Huns. Avant lui, un martyre de Lycie, Saint Léon de Patare (IIIème siècle) a aussi porté ce nom.

En grec ancien, le prénom Leôn Λέων , « Lion », est portée par de nombreux personnages de l’Antiquité  : il désigne un Roi de Sparte (VIème siècle av JC), un compagnon de Socrate (Vème siècle av JC) ou encore un mathématicien (IVème siècle av JC). Il ne semble pas que le grec leôn (λέων) soit d’origine indo-européenne, la langue mère du grec et du latin. Il semble plutôt s’agir d’un emprunt à une autre langue, peut-être sémitique.

  • C’est de leôn λέων que sont dérivés les mots pour désigner les lions dans les langues d’Europe occidentale : allemand Löwe, it. leone, hollandais leeuw.

Quant à son premier prénom, Robert, devenu un peu désuet en France mais toujours assez porté dans le monde anglo-saxon, il est issu du germanique occidental ancien, Hrod-behrt, qui signifie « gloire brillante »  ; comme beaucoup de prénoms germaniques, il s’agit d’un nom de guerrier, ensuite christianisé par des saints évêques et moines au Moyen Âge, comme Robert de Molesmes, fondateur de l’ordre des cisterciens. 

  • Son second prénom, Francis, identique à la forme anglaise du nom de règne de Jorge Mario Bergoglio, est issu d’une forme contractée du latin Franciscus, d’abord un surnom donné au jeune Giovanni Bernardone, le futur saint François d’Assise : il signifie « français » ou « le petit français », soit que la mère de saint François ait été d’origine française, soit que son père marchand de drap revînt justement d’un voyage en France au moment de sa naissance. 
  • Il pourrait encore s’agir d’un surnom de jeunesse, le « Français » désignant aussi l’amateur de romans de chevalerie et de littérature courtoise, écrite en cette langue, qu’était avant sa conversion le futur saint, un des plus populaires du monde catholique. 

Quant à Prevost, c’est un nom de famille bien français (son père est d’origine française) qui désigne une fonction administrative. 

  • Prevost correspond à l’ancienne orthographe de prévôt (ost=ôt), telle qu’on la trouve en ancien français. Le terme est issu du latin praepositus « celui qui est placé devant », qui a aussi donné préposé.
  • Sous l’Ancien Régime, le prévôt désigne l’officier royal chargé de la justice et de l’administration sur un territoire donné, un juge de première instance depuis le XIe siècle. 
  • À Paris on parle aussi de prévôt des marchands pour désigner la personne à la tête de la guilde des marchands.

Dans un contexte religieux, prévôt est le titre porté par des chefs de certaines congrégations, comme le Prévôt (praepositus) des Carmes déchaussés. Prévôt permet aussi de désigner celui qui est à la tête d’un chapitre de chanoines, dans une cathédrale ou une collégiale  ; même si le terme de doyen s’est largement imposé dans l’usage pour désigner cette fonction. 

  • Léon XIV est désormais le prevost de l’Église catholique, et ce au sens le plus littéral : praepositus, c’est-à-dire « celui qui est placé devant ».

On le voit, Nomen est omen (le nom est un présage)  : par son nom, Robert Francis Prevost semblait, si l’on ose dire, prédestiné à être élu le préposé (Praepositus) ou supérieur général de son ordre des Augustins, entre 2001 et 2013. Ce «  fils de saint Augustin », comme il s’est défini lui-même à la loggia de Saint-Pierre, a vécu selon la règle issue des écrits du Père de l’Église qui aura le plus pensé les questions de la prédestination et de la vocation… Voilà  donc un Praepositus doublement prédestiné  !