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La première votation du conclave est surtout l’occasion de peser les différentes candidatures — une élection dès le premier vote paraît largement impossible, les conditions d’une majorité des deux tiers pour un candidat ne semblent pas réunies.

  • Après ce premier scrutin, si l’on se fie aux estimations des conclaves précédents, une dizaine de noms sont capables d’agréger plus de deux voix.
  • Les cardinaux seront bien sûr orientés par le choix de leurs collègues, et verront qui est en tête.
  • Des désistements — parfois même de papabiles médiatiques — pourraient avoir lieu dès ce premier scrutin, qui pourrait ainsi dégonfler certaines baudruches.

Pourtant, le cardinal Filoni, figure clef de grand électeur qui pourrait faire partie des papabiles, a déclaré à la presse italienne qui lui posait la question de savoir si le nom du pape aurait été trouvé avant le 7 mai : « Ce la faremo » (« Nous parviendrons à savoir quel sera le nom. »)

Une source vaticane nous conseille de lire cette déclaration étonnante comme suit : « Il y a aujourd’hui trois camps : Erdö, Aveline et Parolin. Il semble que les soutiens d’Erdö soient prêts à converger, contrairement à ceux d’Aveline et de Parolin. Cette première votation permettra de comprendre si ces deux candidatures sont réellement soutenues par le Collège ».

La décision sera donc remise au lendemain, en fonction de la force des différentes candidatures : « Dans l’après-midi du 8, il faudra prendre une décision : soit se rendre, soit camper sur ses positions. Et le 9, se posera de nouveau ce choix : céder ou s’entêter ».

Peter Erdö

Le cardinal Erdö peut être identifié comme l’un des principaux papabiles conservateurs : universitaire polyglotte (il maîtrise 8 langues, du latin au slovaque), travailleur acharné et homme de compromis, tout autant que grand spécialiste du droit canonique, il a joui de la confiance de Jean-Paul II et de Benoît XVI, sans être mis sur la touche par François.

  • Erdo est connu pour sa dévotion mariale. C’est un grand défenseur du dialogue œcuménique avec les Églises orthodoxes.
  • Très classique en théologie morale, il a pris position contre la réadmission à la communion des personnes divorcées remariées, contre la reconnaissance des unions homosexuelles, contre la contraception et l’avortement.
  • Fait notable, il a fait entendre une vraie divergence avec François sur les questions migratoires en 2015, affirmant que soutenir l’accueil massif de réfugiés équivaudrait à accepter le trafic d’êtres humains.
  • À côté du changement climatique, qu’il reconnaît, il identifie avec des accents ratzingériens un « changement anthropologique » tout aussi dangereux.

Pour autant, il serait bien trop réducteur d’en faire un séide du calviniste Viktor Orban, avec qui les relations ont connu des hauts et des bas. Si ses orientations sont indéniablement conservatrices, il ne braquerait pas non plus les progressistes contre lui, ce qui pourrait contribuer à faire émerger sa candidature.

Jean-Marc Aveline

Le seul papabile français cumule nombre d’atouts : pasteur attentif d’un diocèse multiculturel touché par une grande pauvreté, engagé résolument en faveur du dialogue interreligieux, érigeant la Méditerranée et la condition migrante au rang de lieux théologiques, demandant la tenue d’un synode spécial à ce sujet  – et se positionnant en cela comme émule du pape François, qui l’a bien remarqué, Jean-Marc Aveline est tout à la fois un intellectuel érudit et un homme très chaleureux, au sens du contact et de l’écoute naturels.

  • Prélat d’ouverture en politique comme en théologie morale, il sait également dialoguer avec des sensibilités plus conservatrices, et a participé lui-même à des cérémonies selon le rite traditionnel latin.
  • Il est la figure de proue d’une Église de France qui a énormément perdu en influence sous le pontificat de François.
  • Sa carrière quasi exclusivement marseillaise et son expérience internationale relativement limitée avant son accession au cardinalat pourraient en revanche représenter des handicaps.

Pietro Parolin

Actuel n°2 du Saint-Siège comme secrétaire d’Etat depuis les débuts du pontificat de François, le cardinal Pietro Parolin figure de toute évidence comme un des papabiles les plus crédibles.

Diplomate chevronné et négociateur de grand style, il est le principal artisan du grand retour du Saint-Siège sur la scène internationale, après les errements de son prédécesseur, le cardinal Bertone.

  • On ne compte plus les conférences internationales auxquelles il a participé, les grandes instances mondiales devant lesquelles il a pris la parole, de même que les négociations délicates dans lesquelles il a été impliqué en coulisses : il est reconnu en particulier comme un excellent deal maker avec les pays du Sud global, y compris certains États notablement hostiles à l’influence de l’Église, comme Cuba.
  • Il est sur la ligne bergoglienne, qu’il a d’ailleurs contribué à définir, en matière d’écologie et de migrations ; en théologie morale, il a pu exprimer de manière ouverte des positions classiques.
  • Il a une approche plus souple et policée que le pape François.

Certains observateurs, parmi les conservateurs, mais pas seulement, lui font cependant grief de l’accord du Saint-Siège avec la Chine de 2018, dont il a été la cheville ouvrière : ils accusent le cardinal Parolin d’avoir sacrifié les catholiques chinois de « l’Église clandestine » sur l’autel de cette nouvelle Ostpolitik, tout à son objectif de rapprochement avec la 2e puissance mondiale.

Vous pouvez retrouver dans notre Observatoire du Conclave — la plus grande collecte de données ouvertes sur les cardinaux électeurs, l’histoire, la géographie et la géopolitique de cette institution singulière — le profil des 130 autres cardinaux grands électeurs qui prennent part à l’élection du prochain souverain pontife.