La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a annoncé aujourd’hui, mardi 4 mars, les contours d’un plan d’investissement pour la défense intitulé « Rearm Europe » (Réarmer l’Europe). Celui-ci vise à mobiliser 800 milliards d’euros pour la sécurité du continent. 

  • Parmi les mesures annoncées, la Commission proposera une dérogation du Pacte de stabilité et de croissance pour permettre aux États membres de dépenser davantage pour la défense sans être visés par une procédure de déficit excessif.
  • Au total, la Commission estime que cette modification devrait permettre de dégager une marge de manœuvre budgétaire supplémentaire de 650 milliards d’euros sur une période de quatre ans. Ce chiffre correspond à une augmentation des dépenses de défense de 1,5 % du PIB en moyenne par État membre.
  • Von der Leyen a également annoncé un nouvel instrument qui permettra aux États membres d’avoir accès à une facilité de prêt, garanti par le budget européen pouvant aller jusqu’à 150 milliards d’euros pour les dépenses militaires. Ce montant provient probablement des fonds non dépensés du plan de relance NextGenerationEU adopté en réponse à la pandémie de Covid-19.
  • La Commission propose aussi d’utiliser les fonds de cohésion européens pour des dépenses liées à la défense. Il n’est toutefois pas clair ce que cette mesure pourrait financer, le budget européen comportant des restrictions en matière de financement des dépenses militaires. 
  • Von der Leyen propose également de revoir le mandat de la Banque européenne d’investissement afin de permettre le financement des entreprises de la défense. En 2024, la BEI a doublé son soutien aux projets éligibles en matière de sécurité et de défense, le portant à 1 milliard d’euros (sur 8 milliards alloués). Ce montant devrait atteindre 2 milliards d’euros cette année. Le mandat de la BEI a déjà été élargi l’année dernière afin de financer des projets à double usage.

Ces propositions ont été envoyées aux 27 dans une lettre officielle qui devrait constituer la base des discussions prévue jeudi à Bruxelles. Deux sujets principaux seront abordés : la défense européenne et l’assistance à l’Ukraine. 

  • Donald Trump a annoncé la mise « en pause » hier, lundi 3 mars, de l’assistance militaire à l’Ukraine. Depuis son investiture, l’aide américaine, approuvée lors de la précédente administration démocrate, avait continué d’arriver en Ukraine et il reste environ 3,85 milliards de dollars de crédits pour le retrait d’équipement. 
  • Depuis février 2022, le soutien militaire américain à l’Ukraine s’est élevé à 64 milliards d’euros, et les 27 pourraient facilement remplacer ce montant. La question est de savoir si Washington conservera son soutien en matière d’accès aux satellites Starlink et de renseignement, et si l’administration Trump autorisera l’achat d’armement américain pour soutenir l’Ukraine.

Le Conseil européen spécial de jeudi devrait permettre aux États membres de s’accorder sur une position commune sur l’Ukraine, bien que celle-ci soit menacée par l’appel du Premier ministre hongrois Viktor Orbán à établir un canal de communication direct avec la Russie.

  • Plusieurs diplomates européens ont déclaré que les conclusions du Conseil pourraient ne pas être acceptées à l’unanimité, comme c’est généralement le cas. 
  • Au lieu de cela, un communiqué commun à 25 pays pourrait être publié à l’issue de la réunion, en excluant la Hongrie et la Slovaquie.
  • Celle-ci pourrait également servir à débloquer un nouveau paquet d’aide militaire de 20 milliards d’euros à l’Ukraine, proposé par la Haute représentante Kaja Kallas. Selon des sources consultées par la revue, ce paquet est pour l’heure toujours en suspens.
  • Le président ukrainien Volodymyr Zelensky devrait également être présent à Bruxelles lors de la réunion. 

Selon la présidente de la Commission, les dépenses de défense dans les années à venir devaient être « massives ». Elle a appelé à une coordination plus étroite entre les États membres.

  • Selon un calcul conservateur, les 27 auront besoin d’augmenter leurs dépenses de défense de 250 milliards d’euros à court terme afin d’être en mesure de dissuader la Russie 1.
  • Moscou devrait dépenser autour de 145 milliards de dollars (137,8 milliards d’euros) pour la défense en 2024. En 2023, les 27 avaient dépensé ensemble 279 milliards d’euros pour la défense 2.
Sources
  1. Alexandr Burilkov, Guntram B. Wolff, Defending Europe without the US : first estimates of what is needed, Bruegel, février 2025. 
  2. Defense data 2023-2024, European Defense Agency, 2024.