De l’accélération réactionnaire dans l’Amérique de Trump à la montée du révisionnisme de l’AfD en Allemagne, soutenu par Elon Musk — l’extrême droite progresse. L’histoire ne se répète jamais, mais on gagne toujours à l’étudier — et à étudier ces figures intellectuelles qui ont vécu dans «  un monde grand et terrible  » (Antonio Gramsci), souvent au risque de leur vie, en construisant des œuvres qui peuvent encore nous éclairer. Pour recevoir par e-mail les nouveaux épisodes de cette série, abonnez-vous

Antonio Gramsci est partout. Il a vécu (1891-1937) dans « un monde grand et terrible », selon l’expression qu’il répétait fréquemment et avait emprunté à Kim de Rudyard Kipling. Le fascisme fut un des éléments de ce monde terrible, de sa fondation en mars 1919 à sa victoire après la marche sur Rome d’octobre 1922 puis à sa transformation en régime. Gramsci fut le témoin de cette ascension violente et de la défaite des mouvements populaires puis l’une des victimes de la dictature puisqu’il fut arrêté en novembre 1926 et condamné par le tribunal spécial à vingt ans de prison.

Dans un premier temps, nous suivrons à grands traits sa lecture du phénomène fasciste, d’abord dans les articles militants qu’il écrit jusqu’à son arrestation puis dans ses Quaderni del carcere (Cahiers de prison), rédigés à partir de février 1929, dans lesquels il tente, entre autres questions, de comprendre la défaite des ouvriers et des groupes subalternes italiens face au fascisme. Ensuite, nous aborderons la façon dont, dans l’Italie et la France du second XXe siècle, l’extrême droite — en une sorte d’hommage du vice à la vertu — a fait émerger l’idée qu’il pouvait exister un « gramscisme de droite ». 

Pour Gramsci, le fascisme est au début un pur instrument dans les mains des forces économiques dominantes, un mouvement de petits-bourgeois.

Jean-Claude Zancarini

La lecture gramscienne du fascisme

Antonio Gramsci, dès les premières offensives militaires des squadre fascistes qui commencent en 1919, se montre conscient du danger qu’ils représentent. Dans l’Ordine Nuovo du 8 mai 1920 il écrit  :

La phase actuelle de la lutte de classe en Italie est la phase qui prévoit  : ou la conquête du pouvoir politique par le prolétariat révolutionnaire […]  ; ou une terrible réaction de la classe propriétaire et de la caste gouvernementale. Aucune violence ne sera négligée pour soumettre le prolétariat industriel et agricole à un travail servile  : on cherchera à briser inexorablement les organismes de lutte politique de la classe ouvrière (Parti socialiste) et à incorporer les organismes de résistance économique (les syndicats et les coopératives) dans les engrenages de l’État bourgeois.

Il y a là une intuition à la fois sur l’extrême violence qui va s’exercer sur les ouvriers et les paysans mais aussi, à plus long terme, sur les effets de cette violence qui visera à détruire les organismes politiques des ouvriers mais aussi à « incorporer » syndicats et coopératives dans « les engrenages de l’État », ce qui de fait sera un des enjeux du régime fasciste. Or au moment où Gramsci écrit cet article, nous n’en sommes qu’au tout début du processus et ce sont les ouvriers et les paysans qui sont à l’offensive depuis la fin de la guerre. Le mouvement fasciste n’en est qu’à ses débuts  : Mussolini a fondé à Milan les Fasci di combattimento, le 23 mars 1919. Dès le 15 avril, les fascistes attaquent et dévastent le siège d’Avanti ! journal du parti socialiste à Milan. Mais c’est surtout à partir de l’automne 1920 que les actions des squadre fascistes se développent dans les zones agricoles de la vallée du Pô, de la Toscane et des Pouilles. Les propriétaires fonciers financent et arment les fascistes et les attaques des squadristes se multiplient contre les Maisons du peuple, les Bourses du travail, les coopératives et les municipalités socialistes. C’est le début d’une longue offensive militaire, qui convaincra non seulement les grands propriétaires terriens mais aussi les industriels, la monarchie italienne et l’armée de l’efficacité des fascistes contre les rouges et qui aboutira à la Marche sur Rome d’octobre 1922 et au premier gouvernement Mussolini.

Il faut cependant bien voir que les premières interventions de Gramsci portent la marque d’un marxisme rigoureusement classiste qui l’empêche de développer ses intuitions pourtant éclairantes   ; pour lui, le fascisme est un pur instrument dans les mains des forces économiques dominantes, un mouvement de petits-bourgeois qui, après l’expérience de la guerre, croient pouvoir jouer un rôle historique alors qu’ils ne sont qu’une force d’appoint au service des forces économiques dominantes, entrepreneurs capitalistes et grands propriétaires fonciers. Cette analyse — qui est aussi une manière de reconnaître l’activité historique autonome de la petite-bourgeoisie, ce qui en soi est assez original dans le marxisme de l’époque —, il la développe dans « Le peuple des singes » 1 et elle ne va pas vraiment évoluer jusqu’à la marche sur Rome d’octobre 1922. 

Au moment où le fascisme lance la marche sur Rome, Gramsci est à Moscou

Jean-Claude Zancarini

« La petite bourgeoisie […] cherche par tous les moyens à conserver une position d’initiative historique  : elle singe la classe ouvrière, elle descend dans la rue. » C’est en 1915, dans les manifestations pour l’entrée en guerre de l’Italie que cette « classe de bavards, de sceptiques, de corrompus » a inauguré cette « tactique » qui est « comme la projection dans la réalité d’une nouvelle de la jungle de Kipling  : la nouvelle des Bandar-Log, le peuple des singes, qui croit être supérieur à tous les autres peuples de la jungle, posséder toute l’intelligence, toute l’intuition historique, tout l’esprit révolutionnaire, toute la sagesse de gouvernement, etc., etc. […] Avec la fin de la guerre, la petite bourgeoisie, y compris dans son ultime incarnation politique du « fascisme », s’est définitivement montrée dans sa vraie nature de serviteur du capitalisme et de la propriété foncière, d’agent de la contre-révolution. Mais elle a aussi démontré qu’elle est fondamentalement incapable de réaliser une quelconque fonction historique  : le peuple des singes remplit la chronique, il ne crée pas d’histoire. Il laisse des traces dans les journaux, il n’offre pas de matériau pour écrire des livres ».

Au moment où le fascisme lance la marche sur Rome, Gramsci est à Moscou, où il représente le Parti communiste d’Italie [PCd’I] — fondé en janvier 1921 — dans les instances dirigeantes de l’Internationale communiste [IC]. En 1924, après avoir été élu député lors des dernières élections libres, il revient en Italie. C’est alors que le fascisme connaît une crise profonde, consécutive à l’assassinat du député socialiste Giacomo Matteotti. Les communistes se joignent à l’ensemble des opposants au fascisme qui décident de se retirer du parlement. On pense alors que la parenthèse du gouvernement Mussolini va se refermer et que l’Italie va retrouver les gouvernements libéraux d’avant octobre 1922. Mais les forces — les classes dirigeantes, la monarchie, l’armée — qui avaient permis l’accession au pouvoir du fascisme continuent de le soutenir et le discours de Mussolini de janvier 1925 marque la fin de la crise et le début d’une dictature qui va durer jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. Gramsci se rend alors compte que le fascisme n’est pas seulement la « mouche du coche » 2 des classes dirigeantes mais qu’il fait preuve d’une réelle autonomie politique qui va provoquer des effets de long terme sur le pays. C’est en prison — arrêté en novembre 1926, il est condamné à 20 ans de prison avec d’autres dirigeants communistes — qu’il va élaborer ses analyses du fascisme et expliquer les raisons de la défaite du mouvement populaire.

Le fascisme naît pour Gramsci de la crise d’hégémonie qui a suivi la guerre et au cours de laquelle le mouvement socialiste n’a pas su l’emporter. 

Jean-Claude Zancarini

Ce travail de réflexion doit être mis en relation avec un « tournant » important dans la ligne de l’Internationale communiste et la prise de pouvoir par Staline dans le Parti communiste de l’Union soviétique. À l’été 1928, le VIe congrès de l’IC adopte une ligne d’offensive généralisée, dite « classe contre classe » qui assimile les socialistes au fascisme (le « social-fascisme »). Gramsci est en désaccord profond avec cette nouvelle ligne politique. Il va par exemple le dire à son frère Gennaro quand celui-ci, envoyé par le PCd’I, vient le voir dans le pénitencier de Turin en juin 1930  : quand Gennaro lui exprime son espoir que la ligne d’offensive générale du prolétariat entraîne une fin proche du fascisme, Antonio répond  : « Tu te trompes […] je ne crois pas que la fin soit si proche. Je te dirai même que nous n’avons encore rien vu, le pire est à venir. » Et à ses camarades de prison il présente une ligne alternative à celle prônée par l’IC  : le mot d’ordre qui peut unifier les grandes masses du peuple-nation contre le fascisme est la revendication démocratique d’une Constituante républicaine… ce qui implique l’alliance de toutes les forces antifascistes. C’est en lien avec ce moment déterminé qu’il faut comprendre l’effort théorique de Gramsci dans ses Cahiers de prison  : il pense, en liant les concepts les uns aux autres, sans jamais les disjoindre, la guerre de position dont la traduction politique est la lutte pour l’hégémonie, la crise d’hégémonie, la révolution passive. Le fascisme naît de la crise d’hégémonie qui a suivi la guerre et au cours de laquelle le mouvement socialiste n’a pas su l’emporter. 

Dans le cadre de l’État libéral, « l’exercice ‘normal’ de l’hégémonie sur le terrain devenu classique du régime parlementaire, est caractérisé par une combinaison de la force et du consentement-consensus (consenso) qui s’équilibrent, sans que la force ne l’emporte trop sur le consensus… » 3. Gramsci estime que ce fonctionnement « normal » cesse dans l’après-guerre : « Dans la période de l’après-guerre, l’appareil hégémonique se fissure et l’exercice de l’hégémonie devient toujours plus difficile. » 4

Au seuil des années 1930, Gramsci relève surtout dans le fascisme « le pur exercice de la force qui interdit à de nouvelles idéologies de s’imposer ».

Jean-Claude Zancarini

Gramsci revient quelques mois plus tard, en juin-juillet 1930, sur la désagrégation produite par la guerre sur l’appareil hégémonique, sous la rubrique « Passé et présent » qui lui sert le plus souvent à réfléchir sur l’histoire immédiate de son propre présent  :

L’aspect de la crise moderne que l’on déplore comme une « vague de matérialisme » 5 est lié avec ce que l’on appelle « crise d’autorité ». Si la classe dominante a perdu le consensus, c’est-à-dire qu’elle n’est plus « dirigeante » mais uniquement « dominante », détentrice de la pure force coercitive, cela signifie justement que les grandes masses se sont détachées des idéologies traditionnelles, ne croient plus à ce à quoi elles croyaient avant, etc. La crise consiste justement dans le fait que le vieux meurt et que le nouveau ne peut pas naître ; dans cet interrègne, se vérifient les phénomènes morbides 6 les plus variés 7.

Il met donc en évidence les « phénomènes morbides » (nette allusion au fascisme) qui apparaissent au cours de cette crise. À ce stade, il relève surtout dans le fascisme « le pur exercice de la force qui interdit à de nouvelles idéologies de s’imposer ». En 1932-1933, dans le cahier 13, § 23, Gramsci donne son nom conceptuel, « crise d’hégémonie », à « ce que l’on appelle ‘crise d’autorité’ ». Il précise ce qu’elle signifie d’un point de vue social et politique  :

Observations sur certains aspects de la structure des partis politiques dans les périodes de crise organique. À un certain point de leur vie historique, les groupes sociaux se détachent de leurs partis traditionnels […]. Quand ces crises adviennent, la situation immédiate devient délicate et menace de s’écrouler, parce que le champ est ouvert aux solutions de force, à l’activité de puissances obscures représentées par des hommes providentiels ou charismatiques. […] Dans chaque pays, le processus est différent, bien que le contenu soit le même. Et ce contenu, c’est la crise d’hégémonie de la classe dirigeante, qui advient soit parce que la classe dirigeante a failli dans quelque grande entreprise politique pour laquelle elle a demandé ou imposé par la force le consentement (consenso) des grandes masses (comme la guerre), soit parce que de vastes masses (en particulier de paysans et de petits-bourgeois intellectuels) sont passées d’un coup de la passivité politique à une certaine activité et posent des revendications qui, dans leur ensemble inorganique, constituent une révolution. On parle de « crise d’autorité » et c’est précisément cela, la crise d’hégémonie, ou crise de l’État dans son ensemble 8.

La crise d’hégémonie peut déboucher sur la victoire du « vieux » ou du « nouveau », ce sont la lutte politique et l’habileté des combattants de part et d’autre qui vont en déterminer l’issue. Gramsci fait une lecture sans concession des erreurs de son camp dans l’immédiat après-guerre, en prenant en compte sa propre expérience, celle du « mouvement turinois » de 1919-1920. Deux notes de juin-juillet 1930 sont éloquentes à cet égard. Dans l’une 9, il part de « la fable du castor », qu’il résume ainsi : « le castor, poursuivi par les chasseurs qui veulent lui arracher les testicules dont on extrait des médicaments, pour se sauver la vie, s’arrache lui-même les testicules » et qu’il fait suivre par une question sans appel : « Pourquoi n’y a-t-il pas eu de défense ? » L’image parle d’elle-même : le mouvement socialiste s’est lui-même désarmé face aux initiatives militaires des fascistes, il n’a pas su se défendre. Parmi les réponses qu’il donne, « une conception fataliste et mécanique de l’histoire », une incapacité à sentir de l’intérieur les besoins des classes populaires, une méfiance permanente vis-à-vis des initiatives spontanées des masses :

[…] ce qui était ‘spontané’ était une chose inférieure, indigne de considération, indigne même d’être analysée. En réalité, le ‘spontané’ était la preuve la plus écrasante de l’incapacité du parti, parce qu’il démontrait la scission entre les programmes sonores et les faits misérables. Mais en attendant les faits spontanés advenaient (1919-1920), lésaient des intérêts, dérangeaient des positions acquises, suscitaient des haines terribles même parmi des gens pacifiques, faisaient sortir de la passivité des groupes sociaux stagnant dans la pourriture  : ils créaient, du fait justement de leur spontanéité et du fait qu’ils étaient désavoués, la panique ‘générique’, la ‘grande peur’ qui ne pouvait que concentrer des forces répressives impitoyables pour les étouffer.

C’est précisément à propos de cette incapacité à se situer vis-à-vis de la spontanéité populaire que Gramsci renvoie, dans une note de la même période 10, à l’expérience des luttes turinoises dans lesquelles l’Ordine nuovo a joué un rôle important : 

Négliger, et, ce qui est pire, mépriser les mouvements dits ‘spontanés’, c’est-à-dire renoncer à leur donner une direction consciente, à les hausser sur un plan supérieur en les insérant dans la politique, peut avoir souvent des conséquences très sérieuses, très graves. Il arrive presque toujours qu’un mouvement ‘spontané’ des classes subalternes soit accompagné d’un mouvement réactionnaire de la droite de la classe dominante, pour des motifs concomitants : une crise économique, par exemple, détermine d’une part un mécontentement des classes subalternes et des mouvements spontanés des masses, et de l’autre elle détermine des complots de la part de groupes réactionnaires qui profitent de l’affaiblissement objectif du gouvernement pour tenter des coups d’État. Parmi les causes efficientes de ces coups d’État il faut placer le refus des groupes responsables de donner une direction consciente aux mouvements spontanés et à les faire donc devenir un facteur politique positif.

L’incapacité des forces socialistes à « insérer dans la politique » les mouvements spontanés du biennio rosso a permis la victoire des fascistes soutenus par les classes dirigeantes et la monarchie. Avec l’arrivée au gouvernement de Mussolini, une nouvelle phase s’ouvre. Pour reconstituer une hégémonie des classes dirigeantes le fascisme devra passer par « une phase objectivement régressive et réactionnaire » 11.

Le césarisme moderne sert à Gramsci pour penser la première phase du fascisme, la prise du pouvoir. La révolution passive lui sert à comprendre le fascisme comme régime, son rapport avec les masses, la transformation de la société italienne.

Jean-Claude Zancarini

Cependant, le fascisme ne pourra pas se contenter du pur usage de la force ; il devra tenir compte de l’existence et des aspirations de cette « nouvelle force » (les ouvriers, les paysans) qui a émergé après la guerre et qu’il lui faudra essayer d’intégrer… pour cela le fascisme va « incorporer » les masses dans l’activité étatique (et Gramsci va penser le fascisme comme la forme de « révolution passive » propre au XXe siècle) et il va développer des formes de « politique totalitaire », avec un parti unique et la suppression du parlementarisme (c’est ce que Gramsci nomme le césarisme moderne). Le césarisme moderne lui sert pour penser la première phase du fascisme, la prise du pouvoir. La révolution passive lui sert à comprendre le fascisme comme régime, son rapport avec les masses, la transformation de la société italienne. 

Pour décrire la première phase consécutive à la crise de l’après-guerre, Gramsci utilise donc le concept de césarisme (« l’homme providentiel »)  : 

Quand la crise ne trouve pas cette solution organique [= «la fusion d’une classe sous une seule direction pour résoudre un problème dominant et existentiel»] mais celle de l’homme providentiel, cela signifie qu’il existe un équilibre statique, qu’aucune classe, ni la conservatrice ni la progressiste, n’a la force de vaincre mais aussi que la classe conservatrice a besoin d’un patron. 12

Pour réfléchir à la construction du régime dans les années qui suivent, Gramsci a recours à une double conceptualisation  : la période qui s’ouvre après la première guerre mondiale est une période de guerre de position (et non plus de guerre de mouvement) et de révolution passive (pour le dire très simplement, il y a « révolution passive » quand les classes dominantes gardent la direction de la vie économique et politique, mais doivent tenir compte des masses et de leurs aspirations). 

Le corporatisme fasciste tend à faire émerger un développement des forces productives de l’industrie grâce à une « économie moyenne » ou « dirigée » 13 (intermédiaire donc entre la libre initiative des entrepreneurs capitalistes et l’économie planifiée). L’affirmation d’une telle politique, indépendamment de sa réalisation effective, a pour fonction de créer « une période d’attente et d’espoir » pour « la grande masse des petits-bourgeois urbains et ruraux », la base sociale du fascisme, et « à maintenir le système hégémonique et les forces de coercition militaire et civile à la disposition des classes dirigeantes traditionnelles ». Parallèlement, Gramsci ébauche ce qui serait pour lui une véritable histoire politique de l’Europe :

En Europe, de 1789 à 1870, on a eu une guerre de mouvement (politique) dans la Révolution française et une longue guerre de position de 1815 à 1870 ; à l’époque actuelle, on a eu politiquement la guerre de mouvement de mars 1917 à mars 1921 et s’en est suivie une guerre de position dont le représentant, non seulement pratique (pour l’Italie), mais idéologique, pour l’Europe, est le fascisme. 14

Gramsci établit ainsi un parallèle entre le processus du xixe siècle et celui de l’après-première Guerre mondiale. Dans les deux cas, à une période de guerre de mouvement et d’expansion politique et militaire succède une longue période de guerre de position et de révolution passive, pendant laquelle les classes dirigeantes traditionnelles reprennent le pouvoir mais doivent tenir compte des exigences des masses. La façon dont Gramsci date la guerre de mouvement menée par les bolcheviks fait sens  : il la situe de la révolution de février 1917 (mars 1917 dans le style nouveau, c’est-à-dire le calendrier grégorien) à mars 1921, une borne qui renvoie très probablement au lancement de la NEP, que Lénine désignait clairement comme une « retraite » nécessaire pour ne pas se couper de la masse des paysans.

Avec l’échec en Pologne, en Allemagne et le choix de la NEP, la période expansive qui allait de pair avec la guerre de mouvement prend fin. L’URSS a échoué à « briser le système hégémonique » capitaliste, chose que Gramsci croyait possible en août 1919, au moment où l’Armée rouge semblait sur le point de prendre Varsovie, avant la contre-offensive polonaise 15. Durant la période de révolution passive et de guerre de position qui suit, le fascisme joue un rôle déterminant ; il est à la pointe de la guerre de position que le capitalisme mène, en Europe, contre l’URSS et les aspirations des masses populaires, dans une situation mondiale marquée par l’hégémonie du capitalisme états-unien.

Gramsci analyse la situation italienne de 1931 comme marquée par la « concentration inouïe de l’hégémonie ». Mais il estime également que la « guerre de siège » se déroule aussi à l’échelle mondiale, entre le bloc bourgeois et le bloc communiste.

Jean-Claude Zancarini

Une dernière remarque qui montre que l’élaboration théorique de Gramsci est à prendre « en bloc » : ce n’est que par souci pédagogique qu’on envisage tour à tour les concepts qu’il utilise (guerre de position, lutte pour l’hégémonie, révolution passive) pour penser le fascisme mais aussi l’état du monde et les actions politiques ayant pour but de le changer. Gramsci pense, et écrit que « la guerre de position, en politique, c’est le concept d’hégémonie » 16. Et il a établi ce lien entre hégémonie et guerre de position dès le cahier 6, § 138, en août 1931 :

Passé et présent. Passage de la guerre de manœuvre (et de l’attaque frontale) à la guerre de position dans le champ politique également. Cela me paraît être la plus importante question de théorie politique posée par la période de l’après-guerre, et la plus difficile à résoudre correctement. Elle est liée aux questions soulevées par Bronstein [= Trotski] qui, d’une façon ou d’une autre, peut être tenu pour le théoricien politique de l’attaque frontale dans une période où elle ne peut qu’être cause de défaite. […]  La guerre de position demande d’énormes sacrifices à des masses innombrables de population ; c’est pourquoi une concentration inouïe de l’hégémonie est nécessaire et donc une forme de gouvernement plus « interventionniste », qui prenne plus ouvertement l’offensive contre les opposants et organise en permanence l’« impossibilité » d’une désagrégation interne : contrôles en tous genres, politiques, administratifs, etc., renforcement des « positions » hégémoniques du groupe dominant, etc. Tout cela indique qu’on est entré dans une phase culminante de la situation politico-historique, puisque, dans la politique, la « guerre de position », une fois gagnée, est décisive définitivement. C’est-à-dire qu’en politique, la guerre de mouvement subsiste tant qu’il s’agit de conquérir des positions non décisives et donc que toutes les ressources de l’hégémonie et de l’État ne sont pas mobilisables, mais quand, pour une raison ou pour une autre, ces positions ont perdu leur valeur et que seules les positions décisives ont de l’importance, alors on passe à la guerre de siège, dense (compressa), difficile, qui requiert des qualités exceptionnelles de patience et d’esprit inventif. En politique, le siège est réciproque, en dépit de toutes les apparences, et le seul fait que le dominant doive faire étalage de toutes ses ressources, montre à quel point il prend en considération son adversaire. 17

Ce passage fait référence à la situation spécifiquement italienne créée par le fascisme. Dans le contexte de l’après-guerre et, en Italie, après la victoire du fascisme, la guerre de position est particulièrement exacerbée et signifie une mise en place de toutes les ressources de l’hégémonie, un contrôle complet de la société civile par l’État. Gramsci analyse donc la situation italienne de 1931 comme étant marquée par la « concentration inouïe de l’hégémonie ». Mais il estime également que la « guerre de siège » se déroule aussi à l’échelle mondiale, entre le bloc bourgeois et le bloc communiste. Dans cette situation, l’attaque frontale ne peut qu’échouer. La seule modalité de la lutte de classe est la guerre de position, le « siège réciproque »  : que ce siège soit réciproque, y compris en Italie où la situation des forces antifascistes et en particulier du PCd’I est « désespérée », montre bien que l’optimisme de la volonté est toujours présent… Et ce n’est pas le moindre legs de l’œuvre-vie d’Antonio Gramsci.

Une généalogie du « gramscisme de droite »

Ce cadrage historique, clef pour comprendre la pensée de l’auteur des Quaderni, peut également être l’occasion d’exposer sommairement l’histoire de l’appropriation indue de Gramsci par l’extrême droite, entre l’Italie et la France, en insistant sur sa double origine, italienne — via le groupe (néo)fasciste italien Ordine nuovo — et française — via Fabrice Laroche, alias Alain de Benoist, inventeur français de l’expression « gramscisme de droite ». 

Pino Rauti (1926-2012) fut — malgré son jeune âge à l’époque — un ancien combattant de la République sociale italienne, le dernier avatar du fascisme italien. Il fonde en 1950 une revue dont le titre est tout un programme  : Imperium. Il incite Julius Evola (1898-1974) à écrire un texte qui puisse donner des « orientations » aux « hommes debout », fidèles à « l’esprit légionnaire » qui errent dans un « monde en ruines »  : Orientamenti (1950). En désaccord avec la ligne qu’il estime parlementariste et modérée de la direction du MSI, Pino Rauti organise en 1954 un groupe « spiritualiste », très lié à la pensée de Julius Evola. Dès lors, le journal du groupe, Ordine nuovo. Mensile di politica rivoluzionaria s’occupe de politique et de culture, avec pour but la formation idéologique de militants plus que d’éventuels résultats électoraux. Dans le sous-titre « politique révolutionnaire » est à lire comme une allusion assez claire à la « révolution fasciste » : le mot d’ordre des SS, « mon honneur se nomme fidélité » figure en exergue de la revue… et des membres du groupe sont impliqués dans les attentats de la stratégie de la tension, dans les années 1970  : ainsi, Franco Freda et Gianni Ventura, qui animent le groupe de Padoue d’Ordine nuovo, sont certainement parmi les responsables du premier de ces attentats, la bombe à la Banque de l’Agriculture de Milan, en décembre 1969. 

Le nom de la revue s’inspire de « l’ordre nouveau européen » des nazis et de l’idée d’Ordre, bien présente dans les textes d’Evola. Mais c’est aussi une tentative de captation de Gramsci, puisqu’il reprend le nom de la « revue hebdomadaire de culture socialiste », Ordine nuovo, fondée à Turin, le 1er mai 1919 par Antonio Gramsci et ses jeunes camarades. Pour un Italien de ces années-là, le titre Ordine nuovo renvoyait d’abord, sinon uniquement, à Gramsci et au communisme. La double référence à Evola et à Gramsci est pérenne dans les rangs des partisans de Rauti, surnommé le « Gramsci nero », ce dont il se disait fier. Pino Rauti lance, de 1977 à 1981, les « Campi Hobbit », réunions annuelles, à la fois festives et politiques, qui font office de lieu de formation des jeunes militants (la fille de Pino, Isabella, aujourd’hui membre du gouvernement de Giorgia Meloni, y a connu — tout en lisant les textes de Gramsci et d’Evola — son mari, Gianni Alemanno, militant musclé du Front de la Jeunesse du MSI qui fut maire de Rome de 2008 à 2013).

Le titre Ordine nuovo renvoyait d’abord, sinon uniquement, à Gramsci et au communisme. La double référence à Evola et à Gramsci est pérenne dans les rangs des partisans de Rauti, surnommé le « Gramsci nero », ce dont il se disait fier.

Jean-Claude Zancarini

Dans les années 1960, Alain de Benoist milite au sein de la Fédération des étudiants nationalistes, fondée au printemps 1960, et assure le secrétariat de la rédaction des Cahiers universitaires sous le pseudonyme de Fabrice Laroche 18. En 1963, il participe à la création d’Europe-Action qui rassemble des militants issus de Jeune Nation, de la Fédération des étudiants nationalistes et d’anciens activistes OAS. C’est à ce moment-là qu’on a le premier indice de ses liens avec l’Italie et les néo-fascistes italiens. Dès la fin de l’année 1963, Fabrice Laroche publie dans les colonnes d’Europe-Action un long article sur le Mouvement social italien (MSI), le parti d’extrême droite se réclamant ouvertement du fascisme, en particulier de la période de la République sociale italienne (République de Salò, septembre 1943 — avril 1945). Le MSI est, pour lui, le parti « le plus important de tous ceux qui se considèrent héritiers d’une politique écrasée en 1945, mais aussi l’un des plus mal connus d’Europe. » Il présente les deux âmes idéologiques du néo-fascisme, « les doctrinaires les plus sérieux qu’eut le fascisme » : Giovanni Gentile et Julius Evola. Il critique la ligne de participation au système parlementaire des dirigeants du MSI et présente favorablement le groupe Ordine nuovo, qui « rassemble, sous l’autorité de Pino Rauti, tous les responsables de la tendance ‘evolienne’ » et « se réclame d’une philosophie et d’une éthique politique européenne » avec « des positions nationalistes révolutionnaires ».

Après ce premier article de fond, Fabrice Laroche engage une collaboration directe avec Ordine nuovo. Dès avril 1964, une note des renseignements italiens signale la collaboration active entre le Mouvement Ordine Nuovo de Pino Rauti et les groupes néofascistes français autour de la revue Europe-Action. Une autre note sans date, mais sans doute autour de 1964, annonce que « le chef de la FEN, Fabrice Laroche, en accord avec les dirigeants d’Ordine Nuovo, a proposé la constitution d’un ‘Bureau européen d’études’ dont devront faire exclusivement partie les représentants des groupes et des revues néo-fascistes ‘les plus sérieuses et les plus qualifiées’ au niveau européen ».

Il n’est donc pas très hasardeux d’estimer que sa connaissance de Gramsci vient directement des rapports qu’il a établi à ce moment-là avec les camerati italiens d’Ordine nuovo… et non d’un vague intérêt pour le bureau « italien » de l’UEC et des lectures faites un peu au hasard, comme il le déclare à Anthony Crézégut qui l’interroge pour sa thèse sur « l’invention » de Gramsci en France 19. Toujours est-il qu’après avoir écrit quelques pages sur Gramsci dans ses deux livres de la fin des années 1970, Vu de droite (1977) et Les Idées à l’endroit (1979) 20, il décide, après la victoire de François Mitterrand en mai 1981, de tenir avec ses amis du GRECE (Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne créé en 1968) un colloque intitulé « Pour un ‘gramscisme de droite’ », dont les actes ont été publiés en avril 1982 21.

La connaissance de Gramsci d’Alain de Benoist vient directement des rapports qu’il a établi à ce moment-là avec les camerati italiens d’Ordine nuovo.

Jean-Claude Zancarini

Il s’agit pour le GRECE de définir une stratégie de reconquête après la victoire de la gauche. Les textes des intervenants font allusion à Gramsci sans le citer ni entrer dans une quelconque analyse. « Pour nous, énonce d’emblée Michel Wayoff qui ouvre le colloque, être ‘gramscistes’, c’est reconnaître l’importance de la théorie du « pouvoir culturel »  : il ne s’agit pas de préparer l’accession au pouvoir d’un parti politique, mais de transformer les mentalités pour promouvoir un nouveau système de valeurs, dont la traduction politique n’est aucunement de notre ressort. » Pierre Vial, dans une intervention consacrée aux intellectuels, ne cite pas Gramsci mais Alain de Benoist  : « faire référence au ‘gramscisme’ pour définir notre action, c’est d’abord et avant tout reprendre à notre compte, et essayer d’incarner, la définition que donne Gramsci des ‘intellectuels organiques’. En utilisant cette expression — ajoute Vial — Gramsci « assigne aux intellectuels un rôle précis. Il leur demande de gagner la guerre culturelle ». Dans sa propre intervention, Alain de Benoist explicite le lien assez ténu avec le penseur sarde  : « Citant Gramsci, nous n’avons cessé de dire que dans les sociétés développées, la conquête du pouvoir politique passe par celle du pouvoir culturel ».

Dans l’entretien qu’il donne à Anthony Crézégut, Alain de Benoist revient sur ce moment. Il déclare avec franchise  : « Je ne suis pas du tout un spécialiste de Gramsci » — sur lequel, de fait, il n’a écrit qu’une dizaine de pages. Quant à ses amis, il rapporte que la plupart se disaient : « Il faut faire du ‘gramscisme’, on doit être gramsciens, mais ils n’avaient pas lu Gramsci à vrai dire, même pas une ligne. […] Dans le Figaro magazine, j’ai essayé de développer ce thème-là […] ce ‘gramscisme de droite’, c’était dire aux gens  : vous êtes des cons, vous n’avez pas d’idées, vous ne répondez pas à l’hégémonie de la gauche. Tout cela est resté lettre morte. »

Depuis 2007, la famille Le Pen a maintenu la référence à Gramsci sans que soit élaborée une pensée qui aille plus loin que celle de la nécessité de gagner la bataille des idées.

Jean-Claude Zancarini

La suite, c’est le retour à droite de cette référence à Gramsci qui se résume à l’idée simpliste qu’il est nécessaire de gagner la bataille des idées si l’on veut gagner des élections. L’année 2007 marque ce retour : successivement Nicolas Sarkozy (« au fond, j’ai fait mienne l’analyse de Gramsci : le pouvoir se gagne par les idées » 22) et Jean-Marie Le Pen (« c’est l’écrivain communiste italien Gramsqui [sic] qui écrit : les victoires idéologiques précèdent les victoires électorales » 23) font référence à Gramsci. Alain de Benoist se gausse de Sarkozy (« les bras m’en tombent ») et suggère l’influence de quelque conseiller, en laissant entendre qu’il pourrait s’agir de Patrick Buisson. Quant à Le Pen, le fait qu’il prononce Gramsqui est un indice assez net de sa méconnaissance de « l’écrivain communiste italien ». Depuis 2007, la famille Le Pen a maintenu la référence, sans que soit élaborée une pensée qui aille plus loin que celle de la nécessité de gagner la bataille des idées. En Italie, un très récent colloque (24 septembre 2024) organisé par la fondation d’extrême droite Alleanza Nazionale, « Da Gramsci a Gentile » entendait poser la question « existe-t-il une hégémonie culturelle ? ». Lui non plus, donc, ne va pas plus loin.

Le « gramscisme de droite » semble donc au total une expression vide de sens, utilisée par des gens qui, comme l’âne de la fable de La Fontaine, revêtent la peau du lion pour se montrer plus intelligents, plus forts, plus redoutables qu’ils ne le sont. Ils se revendiquent de Gramsci parce qu’il est sans doute encore un peu risqué pour eux de mettre en avant leurs vrais maîtres à penser, par exemple Charles Maurras ou Julius Evola — même si ces noms circulent dans les franges les plus radicales de l’extrême droite internationale. Se présenter comme suffisamment ouverts et non sectaires pour se réclamer du communiste Gramsci, considéré comme « l’inventeur de l’hégémonie culturelle », c’est faire une opération de récupération qui montre qu’ils ne savent pas que la pensée de l’hégémonie est toujours à mettre en relation avec les autres concepts qu’utilise Gramsci — comme nous l’avons montré ci-dessus à propos de son analyse du fascisme et dans notre livre L’œuvre-vie d’Antonio Gramsci 24 — et qui ne prend sens qu’en lien avec les aspirations d’un homme qui a toujours lutté pour l’émancipation des subalternes, pensé le national en lien avec une conception internationaliste et désiré un communisme synonyme d’égalité et de démocratie.

Sources
  1. « Il popolo delle scimmie », L’Ordine nuovo, 2 janvier 1921.
  2. « Sovversivismo reazionario », L’Ordine nuovo, 22 juin 1921.
  3. Q 1, § 48, p. 59. Pour les Quaderni del carcere [«Cahiers de prison»], nous suivons l’édition critique Einaudi de 1975, sous la direction de Valentino Gerratana. Nous indiquons le numéro du Quaderno (en abrégé Q), suivi de celui de la note (précédé du signe du paragraphe §) puis de la page. Nous traduisons.
  4. Ibid. ; dans 13, § 37, il écrit « l’exercice de l’hégémonie devient, de façon permanente, difficile et aléatoire » (p. 1638).
  5. Gramsci fait allusion à un discours fréquent dans les journaux de l’époque sur la perte de la foi de la jeunesse dans les vieux idéaux, et notamment dans la conception religieuse du monde.
  6. Fenomeni morbosi  : « morbides » dans le sens de « pathologiques », sans arrière-plan moral ou psychologiques.
  7. Q 3, § 34, p. 311.
  8. Q 13, § 23, p. 1603.
  9. Q 3, § 42, p. 319-321, (Juin-Juillet 1930). Passé et présent.
  10. Q 3, § 48, dont le titre, Spontanéité et direction consciente, est à lui seul un programme d’action.
  11. Q 6, § 136, p. 800 (août 1931) : « quand le parti donné veut empêcher qu’une autre force, porteuse d’une nouvelle culture, devienne elle-même « totalitaire » ; et on a une phase régressive et objectivement réactionnaire, même si la réaction (ce qui advient toujours) ne se reconnaît pas comme telle et cherche à se présenter elle-même comme porteuse d’une nouvelle culture. »
  12. Q 4, § 69, p 513. Deuxième rédaction, Q 13, § 23, p. 1603-1604.
  13. Q 8, § 236, p. 1089 : « La révolution passive se vérifierait dans le fait de transformer la structure économique, ‘de façon réformiste’, d’une économie individualiste à une économie planifiée (dirigée), et l’avènement d’une « économie moyenne », entre l’économie individualiste pure et l’économie intégralement planifiée, permettrait de passer à des formes politiques et culturelles plus avancées, sans cataclysmes radicaux et destructeurs sous forme exterminatrice [senza cataclismi radicali e distruttivi in forma sterminatrice] Le ‘corporatisme’ pourrait être ou devenir, en se développant, cette forme économique moyenne de caractère ‘passif’ ».
  14. Q 10 I, § 9, p. 1229.
  15. « La Russia potenza mondiale », L’Ordine nuovo, 14 août 1920.
  16. Q 8 §52, p. 973.
  17. Q 6, § 138, p. 801-802.
  18. Les informations sur Fabrice Laroche — Alain de Benoist sont tirées du livre de l’historienne Pauline Picco, Liaisons dangereuses. Les extrêmes droites en France et en Italie (1960-1984), PUR, 2016.
  19. Anthony Crézégut, « Inventer Gramsci au XXe siècle », thèse de doctorat d’histoire, Institut d’études politiques de Paris — Sciences Po, 2020, en ligne sur these.hal.science ; en cours de parution à Lyon, ENS éditions.
  20. Vu de droite, Copernic, 1977, p. 456-460 et Les Idées à l’endroit, chapitre « Le pouvoir culturel », Éditions libres-Hallier, 1979, p. 250-259.
  21. Pour un « gramscisme de droite ». Actes du XVIème colloque national du G.R.E.C.E., Palais des congrès de Versailles, 29 novembre 1981, Le Labyrinthe, 1982.
  22. Le Figaro, 17 avril 2007.
  23. Discours de Jean-Marie Le Pen, 1er mai 2007, diffusé sur BFM TV.
  24. Romain Descendre, Jean-Claude Zancarini, L’œuvre-vie d’Antonio Gramsci, Paris, La Découverte, avril 2023. Sur l’hégémonie, voir le chapitre 22, p. 409-435.