Selon plusieurs sources consultées par le New York Times1, le PDG d’OpenAI, Sam Altman, a proposé à plusieurs investisseurs internationaux un nouveau plan pour développer une infrastructure mondiale d’intelligence artificielle (IA) nécessitant un investissement initial de plusieurs milliers de milliards de dollars.

  • Sa thèse est simple. L’IA devrait circuler et être disponible comme l’électricité : tout comme le courant a transformé le monde, Altman espère que les centres de données permettront de diffuser l’IA comme un service omniprésent.
  • Lors de conversations privées révélées par le New York Times, Sam Altman aurait déclaré : « à mesure que la disponibilité de l’électricité s’est répandue, on a trouvé de meilleures façons de l’utiliser ».

Son projet inclurait la construction de nouvelles usines de puces et de centres de données à travers le monde, notamment au Moyen-Orient, en Asie et aux États-Unis.

  • Altman semble avoir initialement envisagé que les Émirats arabes unis financent des usines de puces, chacune coûtant jusqu’à 43 milliards de dollars, qui pourraient être utilisées par Nvidia et d’autres acteurs pour alimenter les centres de données IA.
  • Aux États-Unis, Altman a plaidé en faveur de centres de données d’une valeur de 100 milliards de dollars chacun, capables de contenir deux millions de puces IA. Leur consommation d’électricité s’élèverait à 5 gigawatts, soit 20 fois plus qu’un centre de données classique.
  • En Allemagne, OpenAI explorerait la construction d’un centre de données dans la mer du Nord pour exploiter 7 gigawatts d’énergie éolienne.
  • Selon plusieurs sources, lorsque Sam Altman a visité le siège de TSMC à Taïwan peu après avoir commencé sa collecte de fonds, il aurait indiqué à ses dirigeants qu’il lui faudrait 7 000 milliards de dollars et de nombreuses années pour construire 36 usines de semi-conducteurs et des centres de données supplémentaires.
  • Cette idée a été jugée irréaliste par les dirigeants de TSMC, l’un des plus grands fabricants mondiaux de semi-conducteurs. L’une des personnes présente lors des échanges l’aurait qualifié de « podcasting bro ».

La participation potentielle des Émirats arabes unis et d’autres acteurs internationaux à la construction de ces infrastructures critiques aurait soulevé des préoccupations en matière de sécurité nationale aux États-Unis, notamment quant au risque d’une influence accrue de la Chine.

  • En réponse à ces critiques, Altman aurait revu son ambition à la baisse, visant un financement de quelques centaines de milliards de dollars, en priorisant la construction de centres de données aux États-Unis. Toutefois, le créateur de ChatGPT aurait mis en garde : si les États-Unis refusent de collaborer avec les Émirats, la Chine pourrait saisir l’opportunité.
  • Le 23 septembre, une réunion à la Maison-Blanche entre le président Biden et le président des Émirats, Mohamed bin Zayed, a abouti à un engagement pour renforcer la coopération dans le domaine de l’IA2.

La recherche d’un modèle économique devient pressante pour Sam Altman : OpenAI a en effet un problème de rentabilité.

  • S’il réalise plus de 3 milliards de dollars de ventes annuelles, ses coûts s’élèvent à environ 7 milliards de dollars par an.
  • Les visites se sont effondrées au cours des derniers mois depuis l’introduction du modèle amélioré de ChatGPT, GPT-4, au premier trimestre 2023 : elles ont été divisées par 7 entre avril et juin 2024, passant de 1,8 milliard par mois à 260 millions.
  • OpenAI cherche à lever 6,5 milliards de dollars pour soutenir son activité qui serait valorisée à 150 milliards de dollars. Parmi les investisseurs potentiels : Microsoft, Nvidia, Apple et MGX (Émirats arabes unis).
  • Pour le moment, l’objectif — dont les détails sur le financement et les constructions ciblées sont encore flous — est de créer une fédération lâche d’entreprises, y compris des constructeurs de centres de données (comme Microsoft), des investisseurs et des fabricants de puces, afin de soutenir l’essor de l’IA.
  • Comme le montrait Quinn Slobodian dans nos pages, les pays du Golfe sont l’un des rares réservoirs de capitaux dans lesquels il est possible de puiser à une époque où les taux d’intérêt de plus en plus élevés ont tari les autres sources de financement : « les Saoudiens ont tout simplement l’avantage d’avoir de l’argent liquide ». Les Émirats ont d’ailleurs placé l’IA au centre de leur stratégie de diversification économique, dans un contexte où l’urgence climatique et les engagements pris par les États en faveur de la réduction des émissions de gaz à effet de serre créent de l’incertitude quant à l’avenir des exportations d’hydrocarbures.