Temps de lecture: 1 min

Ici, la fin de l’histoire n’a pas eu lieu

Le 18 juin, le président russe Vladimir Poutine a entamé une visite de deux jours en Corée du Nord où il a affiché son amitié avec Kim Jong-un. C’est la première qu’il s’y rendait depuis 2000.

En quelle année sommes-nous ?

Derrière un style et une esthétique qui rappellent les grandes démonstrations de force diplomatiques de l’Union soviétique — mais aussi les parades de la République populaire de Chine de Mao à XI — le chef du Kremlin et le maître de Pyongyang ont fait plus qu’échanger des banalités.

Régner contre le jour

Depuis le début de l’invasion de l’Ukraine, Pyongyang a été l’un des rares pays à soutenir et approvisionner militairement l’armée russe dans le cadre de sa guerre d’agression.

Les stormtroopers de Pyongyang

La dernière fois que Vladimir Poutine s’est rendu en Corée du Nord à l’été 2000, la Russie venait d’intégrer trois ans plus tôt le G7 — élargi puis renommé G8 —, le nouveau président russe recevait au Kremlin son homologue américain Bill Clinton, invité à s’adresser à la Douma, et le PIB par habitant en Russie entamait une progression faramineuse qui conduira à une multiplication par dix en moins d’une décennie. Presque un quart de siècle plus tard, la Russie est un État paria pour le monde occidental, avec à sa tête un dirigeant faisant l’objet d’un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale (CPI).

Des membres de l’Escorte d’honneur à côté de leur moto lors cérémonie d’accueil du président russe Vladimir Poutine à l’aéroport de Pyongyang, en Corée du Nord, le 19 juin 2024. © AP Photo/Vladimir Smirnov

Effigies

La Corée du Nord est l’un des rares pays où le président russe est encore en mesure de se rendre sans avoir à craindre d’être arrêté. Depuis l’invasion de février 2022, la capacité de déplacement de Poutine s’est réduite à la Chine, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, les ex-républiques soviétiques ou bien l’Iran. Le dirigeant nord-coréen s’est quant à lui rendu en Russie en septembre dernier.

Le dirigeant nord-coréen Kim Jong Un, au centre, offre un tableau au président russe Vladimir Poutine, à droite, dans la maison des invités d’État à Pyongyang, en Corée du Nord, le mercredi 19 juin 2024. © AP Photo/KCNA

Drive my car : l’esthétique carbonée des autocrates

Là où les dirigeants occidentaux aiment à se montrer dans des cadres verdoyants lorsqu’ils veulent jouer la carte de l’écologie, une partie importante de la rencontre entre Poutine et Kim était articulée autour de la voiture — filmés façon « Top Gear ».

La ville s’habille en Poutine

D’ordinaire déjà totalement aseptisée et hautement surveillée, la dystopique Pyongyang a pour l’occasion été « décorée » à l’image de Vladimir Poutine — le long des six voies et sur les facades des immeubles.

Bannière avec le portrait du président russe sur la façade d’un bâtiment à Pyongyang le 18 juin 2024. © AP Photo/Dmitry Azarov

Saines lectures

En amont de la visite de Poutine, les médias d’État russes ont évoqué un « programme très riche » qui couvrira une large palette de sujets : économie, énergie, transports, agriculture, liens interrégionaux, questions de sécurité, de coopération dans l’arène internationale.

Les enfants de Kim

Dans les faits, Vladimir Poutine s’est rendu en Corée du Nord principalement pour une chose : les obus d’artillerie dont l’armée russe a cruellement besoin pour conserver son avantage sur le terrain.

Avec les orthodoxes de Corée du Nord

L’église de la Trinité vivifiante (평양정백사원) à Pyongyang, en Corée du Nord, est la première et seule église orthodoxe du pays. Relevant du Patriarcat de Moscou et de toutes les Russies — dont le chef est l’intime de Poutine Kirill — elle a été consacrée le 13 août 2006 et propose un service liturgique en langue coréenne.

Le président russe Vladimir Poutine (à droite) visite l’église de la Trinité vivifiante à Pyongyang. © Bureau de presse et d’information du président russe/Gavriil Grigorov/TASS/Sipa USA

Aurus Motors : rouler sur l’or russe

Les dirigeants se sont mutuellement conduit à bord d’une imposante Aurus, un nouveau constructeur russe de voiture de luxe dont le nom est une contraction d’aurum (or en latin) et Rus. Là encore, ces cylindrées semblent à contre-courant du renouveau de l’industrie automobile vers l’électrique.

Vladimir Poutine et Kim Jong Un sortant ensemble d’une voiture Aurus à Pyongyang, en Corée du Nord, le mercredi 19 juin 2024. © AP Photo/Gavriil Grigorov

Celui qui boit le dernier a perdu

Depuis le début de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine, le ministère de la Défense sud-coréen estime que Pyongyang a envoyé à la Russie environ 7 000 conteneurs remplis de munitions — capables de contenir jusqu’à 5 millions d’obus d’artillerie. Bien que datées et peu performantes pour la plupart, ces munitions permettent à Moscou de raser les villages et villes ukrainiennes et de harceler les positions de Kiev.

Le rouge de la première guerre froide

Les dirigeants russe et nord-coréen ont trouvé dans la nouvelle configuration que ce voyage entérine un arrangement qui semble bénéficier aux deux pays. D’une part Kim ouvre à Poutine les portes de ses hangars remplis d’obus, de missiles et autres armements. En retour, le président russe fournit une assistance technologique et des systèmes d’armements lourds (chars d’assaut, avions) que Pyongyang ne pourrait développer seul.