Selon un communiqué des Corps des gardiens de la révolution islamique, au moins sept officiers, dont Mohammad Reza Zahedi, supervisant des opérations de l’Iran au Moyen-Orient ont été tués à Damas lundi, lorsque des frappes israéliennes ont touché un bâtiment diplomatique iranien dans la capitale syrienne.

  • La frappe a tué trois généraux de la Force Al-Qods, l’unité de renseignement du Corps des gardiens de la révolution islamique, et quatre autres officiers.
  • Mohammad Reza Zahedi est l’officier le plus haut gradé du Corps des gardiens de la révolution tué depuis l’assassinat de Qassem Soleimani par les États-Unis en 2020. Il était chargé des relations avec le Hezbollah au Liban et les milices pro-iraniennes en Syrie. Sur la façade de l’ambassade iranienne à Damas, à quelques mètres des décombres du bâtiment visé par le raid israélien, est d’ailleurs affichée une photo géante de Qassem Soleimani.
  • Si Israël frappe régulièrement des cibles en Syrie et au Liban depuis le 7 octobre, il s’agit de l’une des attaques les plus meurtrières de la guerre des proxys qui oppose Israël et l’Iran, qui fait peser le risque d’une escalade dangereuse compte tenu à la fois à la localisation et à la cible visée.

En l’absence de relations diplomatiques entre Téhéran et Washington, le ministre iranien des affaires étrangères, Hossein Amir Abdollahian, a déclaré dans un message publié sur X1 que l’Iran avait convoqué l’ambassadeur suisse à 00h45, heure locale, et demandé qu’un « message important », soulignant la responsabilité des États-Unis, soit transmis à Washington : en tant qu’allié d’Israël, « les États-Unis doivent rendre des comptes ».

  • La Maison Blanche a fait savoir que les États-Unis n’étaient pas impliqués dans la frappe israélienne et qu’ils n’en avaient pas eu connaissance en amont.
  • Cette déclaration préventive est frappante par rapport à la communication de l’administration américaine lors de l’assasinat du général Soleimani en 2020, quand le président Trump avait simplement publié sur Twitter (aujourd’hui X) une photo avec le drapeau américain, avant que le Pentagone n’indique avoir « tué » Qasem  Soleimani, « sur ordre du président »2.
  • Selon des responsables israéliens et américains, Téhéran a informé l’administration Biden quelques minutes avant que son armée de l’air ne procède à des frappes, mais n’a pas demandé le feu vert des États-Unis.

Anthony Blinken est aujourd’hui à Paris, où il discutera de la question avec le Président français, Emmanuel Macron. Il n’y pas eu pour le moment aucune réaction à l’échelle européenne.

Selon les médias d’État russes, le Conseil de sécurité des Nations unies tiendra une réunion publique, demandée par Moscou, sur la frappe cet après-midi à 15h, heure de New York. L’Iran a également appelé le Conseil de sécurité des Nations unies à se réunir de manière « urgente »3.

  • L’attaque a été qualifiée par la représentation de l’Iran aux Nations unies de « violation flagrante de la Charte des Nations unies, du droit international et du principe fondamental de l’inviolabilité des locaux diplomatiques et consulaires ».
  • La porte-parole des forces de défense israéliennes a déclaré pour CNN que la frappe n’a pas visé une représentation diplomatique : « D’après nos renseignements, il ne s’agit ni d’un consulat ni d’une ambassade » mais « d’un bâtiment militaire des Forces Al-Qods déguisé en bâtiment civil à Damas ».

Pour rappel : un consulat est un bâtiment administratif situé à l’extérieur du territoire national, tandis qu’une ambassade — notamment la chancellerie politique — incarne l’État.

  • La portée de l’attaque serait différente selon la localisation. 
  • Selon les données OSM que nous utilisons pour établir notre carte, la frappe aurait touché un bâtiment appartenant à l’ambassade : probablement pas la chancellerie politique, mais il ne s’agirait pas d’un consulat, contrairement à ce qui a été avancé par une partie de la presse française.

Une réunion du Conseil suprême de sécurité nationale iranien a eu lieu dans la nuit. Selon la déclaration publiée, celui-ci a pris des « décisions appropriées ». Une intensification des affrontements entre les deux pays et leur proxys est la plus probable, alors que la porte parole du ministère iranien des affaires étrangères a déclaré que l’Iran « se réserve le droit de réagir et décidera de la nature de la réponse et de la punition à infliger à l’agresseur ». 

  • Le Hezbollah, la milice libanaise soutenue par l’Iran, a déclaré qu’il « ne se privera pas de punir et de se venger de l’ennemi ». Le 29 mars, Israël a également revendiqué une frappe au Liban ayant tué Ali Abed Akhsan Naim, commandant adjoint de l’unité des missiles et des roquettes du Hezbollah4.
  • Le Hamas, le Jihad Islamique palestinien, ainsi que le Front populaire de libération de la Palestine ont également réagi en condamnant l’attaque.

Le ministère des affaires étrangères saoudien a condamné l’attaque, exprimant son rejet des violations des règles de l’immunité diplomatique, « pour quelque raison que ce soit »5

  • Le conseiller à la sécurité de Biden, Jake Sullivan se rendra jeudi en Arabie saoudite pour rencontrer le prince héritier Mohammed Ben Salmane ; leurs discussions devraient inclure le potentiel accord de normalisation avec Israël, dont les négociations avaient commencé avant le 7 octobre.

Le porte-parole du ministère des affaires étrangères chinois Wang Wenbin a déclaré que la Chine « condamnait l’attaque » et « s’opposait à toute action pouvant mener à une escalade des tensions ». Nous suivrons la séquence dans nos prochaines publications.