Martin Thomas, The End of Empires and a World Remade ; A Global History of Decolonization, Princeton University Press
« Jusqu’à récemment, les empires étaient omniprésents. Ils façonnaient les frontières, attisaient les conflits et définissaient les conditions de la politique internationale. L’effondrement des empires a entraîné une réorganisation fondamentale de notre monde. La décolonisation s’est déployée à travers les territoires aussi bien qu’à l’intérieur de ceux-ci. Ses luttes se sont internationalisées et sont devenues transnationales. C’est pourquoi Martin Thomas raconte l’histoire du lien intrinsèque de la décolonisation avec la mondialisation. Il retrace les liens entre ces deux processus de transformation : la fin des empires formels et l’accélération de l’intégration mondiale, la réorganisation des marchés, les échanges culturels et les migrations.
The End of Empires and a World Remade montre à quel point la décolonisation a façonné le processus de mondialisation dans le sillage de l’effondrement des empires. Dans la seconde moitié du XXe siècle, la décolonisation a catalysé de nouvelles coalitions internationales ; elle a déclenché des partitions et des guerres ; et elle a remodelé la dynamique Nord-Sud. La mondialisation a promis aux décolonisés un meilleur accès aux ressources essentielles, à des réseaux d’influence plus larges et à des publics mondiaux, mais sa variante néolibérale a renforcé les inégalités économiques et les formes impériales d’influences politiques et culturelles. En passant en revue ces deux histoires interdépendantes à travers le monde, de l’Amérique latine à l’Asie, Martin Thomas explique pourquoi les nations nouvellement indépendantes ont été si lourdement pénalisées. »
Parution le 19 mars
Ghassan Salamé, La tentation de Mars. Guerre et paix au XXIe siècle, Fayard
« Nous sommes entrés dans l’âge de la dérégulation de la force. À la fin de la guerre froide, les raisons de croire à l’effacement de Mars, sinon au triomphe de Vénus, s’accumulaient pourtant : la dissuasion nucléaire n’avait-elle pas apaisé les ardeurs des bellicistes ? Les idéologies ne s’étaient-elles pas effondrées ? Le « doux commerce » international ne devait-il pas garantir la paix ?
Après leur floraison simultanée, les fondements d’une telle promesse se sont toutefois érodés les uns après les autres : la vague de démocratisation a atteint un plateau, la mondialisation a décéléré, la révolution technologique a brimé la liberté après l’avoir servie, la culture a été sollicitée pour fracturer plutôt que pour rapprocher, la question nucléaire a été rouverte et le multilatéralisme n’a cessé de s’étioler. Une occasion sans doute historique pour bâtir un système global équilibré et pacifié a été manquée. À présent, il s’agit de comprendre la « tentation de Mars » qui caractérise notre temps et l’urgence de la contrecarrer. »
Parution le 6 mars
Sophie Baby, Juger Franco ? Impunité, réconciliation, mémoire, La Découverte
« Le général Franco, décédé le 20 novembre 1975 après avoir présidé pendant près de quarante ans au destin de l’Espagne, n’a pas été jugé et ne le sera jamais. Mais le legs du dictateur parvenu au pouvoir en 1939 à l’aide des avions de Hitler et des troupes de Mussolini, après trois ans de guerre civile, le sera-t-il un jour ? Comment peut-on refuser encore de condamner le franquisme dans un pays devenu depuis les années 1980 une démocratie consolidée, pleinement intégrée à l’Union européenne ?
Sophie Baby observe les impulsions et les obstacles à l’insertion de l’Espagne dans l’âge global de la mémoire, qui s’est emparé du monde occidental face aux traces irréductibles des violences de masse qui l’ont endeuillé. Elle remonte aux années d’après-guerre pour suivre la généalogie mondialisée du trouble des responsabilités criminelles franquistes, qui conduisit à brouiller les positions de victime et de perpétrateur. Elle resitue la péninsule au cœur d’un espace euro-américain de circulation des dispositifs de mémoire et de justice, tour à tour mauvaise conscience du monde libre, modèle de réconciliation démocratique, championne de la justice universelle ou modèle d’impunité. Par l’exploration de sources inédites, l’enquête exhume les projets alternatifs et marginalisés et s’ancre dans l’expérience vécue – un tribunal international, une ville emblématique, un prisonnier, une veuve de déporté incarnent le récit. »
Parution le 14 mars
Sophie Wahnich, La Révolution des sentiments. Comment faire une cité. 1789-1794, Seuil
« Les révolutionnaires français n’ont jamais cessé de redouter le risque majeur de toute révolution : qu’elle bascule dans la guerre civile. Celle-ci advient lorsque les sentiments sociaux, les affects qui relient les humains entre eux ont été déniés, bafoués, ou empêchés. Au lendemain des mois terribles de l’hiver et du printemps 1794, Saint-Just constate ainsi, lucide, que « la révolution est glacée ».
Les révolutionnaires comprennent que ce ne sont pas « la machine à gouvernement » et ses lois de contraintes qui pourront réparer une société meurtrie ni instaurer l’harmonie espérée, mais bien l’ensemble des institutions civiles. Instituer des lieux où le peuple se rassemble fera renaître sa sensibilité comme faculté de juger.
L’amour, l’amitié, le courage, la confiance, la foi en l’impossible, tous ces sentiments républicains sont sollicités pour déjouer une économie cruelle, réduire la division sociale, faire cesser les conflits religieux, promouvoir le pouvoir politique de chacun des citoyens. Alors pourra se constituer un nouvel art de vivre plein d’humanité, seule garantie d’une nouvelle « communauté des affections ». En se tournant vers ce passé mal compris, Sophie Wahnich cherche aussi des outils pour faire face à ce qui peut advenir aujourd’hui. »
Parution le 29 mars
M’hamed Oualdi, L’esclavage dans les mondes musulmans. Des premières traites aux traumatismes, Amsterdam
« Au cours de la dernière décennie, la présence de certaines formes d’« esclavage moderne » en Libye ou au Qatar a été fortement médiatisée, donnant matière à une série de controverses sur la traite d’esclaves au sein des mondes musulmans. Cet ouvrage de M’hamed Oualdi s’attache à ébranler les représentations erronées qui entourent ce phénomène historique. L’historien réfute le lieu commun qui voudrait que l’esclavage soit tabou au sein des sociétés musulmanes contemporaines. Il souligne la diversité des traites qui prennent place depuis la période médiévale au sein des mondes musulmans, loin de la vision homogénéisante d’un esclavage « islamique » unifié.
M’hamed Oualdi remet ainsi en cause les historiographies cherchant à comparer cette forme d’esclavage à la traite atlantique dans le but de relativiser la gravité historique de cette dernière. Pour ce faire, il décrit la pluralité des fonctions exercées par les esclaves au sein des mondes musulmans. En se concentrant ensuite sur la période moderne, M’hamed Oualdi analyse les processus d’affranchissement de ces esclaves. Il rend ainsi saillant le caractère ambivalent des politiques abolitionnistes alors mises en œuvre par les puissances européennes. En parallèle, il présente les pensées abolitionnistes musulmanes qui se sont développées dans l’ensemble de ces régions. Enfin, l’historien interroge la présence de l’esclavage dans les sociétés musulmanes. »
Parution le 1er mars
Gerd Krumeich, Als Hitler den Ersten Weltkrieg gewann. Die Nazis und die Deutschen 1921–1940, Herder
« Comment un parti dissident et violent a-t-il pu devenir en quelques années un mouvement de masse dévastateur portant Adolf Hitler au pouvoir ? Quels facteurs ont été décisifs pour le succès des nazis ? Gerd Krumeich part en quête de réponses à ces questions en s’appuyant sur les recherches qu’il a menées pendant des décennies sur la Première Guerre mondiale et ses conséquences. Il constate que l’importance de la défaite de la Première Guerre mondiale dans la propagande nazie et dans les discours d’Hitler a été jusqu’à présent largement sous-estimée dans l’explication de l’attractivité du NSDAP et de la radicalisation d’un antisémitisme meurtrier, voire marginalisée avec le concept de « légende du coup de poignard dans le dos ».
Krumeich propose une réinterprétation de la relation entre Hitler et les Allemands en dépassant la limite temporelle habituelle de 1933. Il en résulte une nouvelle histoire de la montée du national-socialisme courant de ses prémisses jusqu’au début de la Seconde Guerre mondiale. »
Parution le 11 mars
Asaf Elia-Shalev, Israel’s Black Panthers ; The Radicals Who Punctured a Nation’s Founding Myth, University of California Press
« Israel’s Black Panthers raconte l’histoire des jeunes et pauvres juifs israéliens originaires du Maroc qui ont remis en question le statu quo politique de leur pays et se sont rebellés contre la hiérarchie ethnique de la vie israélienne dans les années 1970. Inspirés par le groupe américain du même nom, les Black Panthers ont organisé des manifestations et une campagne politique d’un an pour les droits des mizrahim, ou juifs d’origine moyen-orientale. Ils ont réussi à ébranler l’establishment du pays et à changer le cours de l’histoire d’Israël grâce à la mobilisation massive d’une classe inférieure juive.
S’appuyant sur des documents d’archives et des entretiens avec des militants pour retracer l’histoire du mouvement, Asaf Elia-Shalev explore les parallèles entre les Black Panthers israéliens et américains, offrant une perspective unique sur la lutte mondiale contre le racisme et l’oppression. »
Parution le 19 mars
Hanno Hochmuth, Berlin. Das Rom der Zeitgeschichte, Ch. Links
« La ville de Berlin s’est trop souvent retrouvée au centre de l’actualité au cours du XXe siècle. Elle a été tour à tour une capitale monarchique, une capitale démocratique, une capitale fasciste et une capitale socialiste. C’est de là que sont parties deux guerres mondiales qui se sont répercutées avec force démesurée sur la ville. C’est à Berlin que la guerre froide a connu son apogée avant d’y trouver sa fin symbolique. La ville a été au centre de l’histoire mondiale comme Rome l’était il y a deux mille ans.
C’est pourquoi Berlin peut être considérée comme la Rome de l’histoire contemporaine. Hanno Hochmuth aborde l’histoire et le présent de Berlin de manière topographique et photographique. En partant des attributions populaires de la ville, il se rend dans 51 lieux historiques et raconte ainsi l’histoire de Berlin au XXe siècle. »
Parution le 14 mars
Nina Valbousquet, Les âmes tièdes. Le Vatican face à la Shoah, La Découverte
« L’ouverture exceptionnelle des archives du pontificat de Pie XII (1939-1958), en 2020, n’a pas mis fin aux controverses autour des silences du pape face aux atrocités nazies. Mais, au-delà des polémiques, que révèlent ces nouvelles sources ? Qu’apportent-elles à notre compréhension de la Shoah, de la Seconde Guerre mondiale et du pouvoir religieux ? Permettent-elles de saisir plus finement les profondes ambivalences du Vatican, entre charité et préjugé, face aux persécutions antijuives ?
S’appuyant sur trois années de dépouillement de ces fonds considérables à Rome, Les Âmes tièdes restituent les motivations, réflexions et dilemmes des personnes impliquées dans cette histoire, leurs voix mais aussi leurs silences. Dépassant une approche classique focalisée sur le pape et sur la diplomatie, cet ouvrage éclaire les enjeux politiques, humanitaires, religieux et culturels des choix du Saint-Siège. Il resitue cette question dans la longue durée des relations entre l’Église et les Juifs, afin d’évaluer le poids d’une culture pluriséculaire d’hostilité dans les réponses du Vatican face aux persécutions antisémites, avant et pendant la guerre, mais aussi après la Shoah. Ce niveau de violence inédite contre une minorité a-t-il ébranlé le vieux substrat d’antijudaïsme chrétien ? Enfin, en faisant entendre la voix des acteurs de terrain et des persécutés, en particulier des familles mixtes judéo-chrétiennes, ce livre interroge plus largement la résilience du religieux face au génocide et la capacité de nos sociétés civiles à répondre aux violences de masse. »
Parution le le 14 mars
Ilko-Sascha Kowalczuk, Walter Ulbricht. Der kommunistische Diktator (1945-1973), C.H. Beck
« Le deuxième volume de la monumentale biographie d’Ilko-Sascha Kowalczuk sur Walter Ulbricht montre comment le militant est devenu un dictateur. Il éclaire le parcours de Walter Ulbricht, mais aussi plus généralement l’histoire de la RDA et du communisme allemand. Dès le printemps 1945, Ulbricht a poursuivi son rêve de longue date de créer une Allemagne communiste et est devenu le véritable fondateur de la RDA en tant qu’homme le plus important de Staline en Allemagne, bien qu’il ne soit devenu formellement le plus haut fonctionnaire de la RDA qu’en 1960.
Il a toujours pu affirmer son pouvoir, notamment lors du soulèvement du 17 juin 1953, qui était dirigé contre son règne. Lorsque celui-ci fut à nouveau menacé en 1960/61, il construisit le mur. Ulbricht s’est ensuite réinventé et a tenté de changer la RDA dans un cadre limité en tant que « père de la nation ». Cela échoua à cause de ses adversaires conservateurs à la tête du SED. La chute d’Ulbricht, malade et âgé, en 1970/71 n’était toutefois pas uniquement due à ce puissant groupe soutenu par Moscou. »
Parution le 14 mars
Luca Addante, Le Colonne della Democrazia. Giacobinismo e società segrete alle radici del Risorgimento, Laterza
« Durant la Révolution française, les Jacobins ont été les premiers, en France, à revendiquer la liberté et l’égalité, la justice sociale et la souveraineté populaire. Un programme auquel ont adhéré de nombreux Italiens, qui ont convergé dans un mouvement unitaire né pendant le Triennat républicain (1796-1799), animant la naissance de l’associationnisme politique et du journalisme. L’objectif principal du mouvement était l’unification de l’Italie en un seul État républicain, démocratique et constitutionnel. Cette première génération du Risorgimento a entamé sa longue lutte, dans le creuset politique et idéologique qui a vu se forger les principaux courants des deux siècles suivants : libéralisme, démocratie, républicanisme, socialisme, communisme, anti-colonialisme et féminisme.
Ce premier mouvement politique italien cachait en son sein une société secrète, « les Colonnes de la Démocratie », d’où naquit la mystérieuse Société des Rayons, première société secrète du Risorgimento sur le tronc de laquelle fleurirent d’autres, dont la plus célèbre fut la Charbonnerie. Le livre retrace la genèse de ce mouvement qui donna naissance au Risorgimento, poursuivant un programme politique très avancé qui n’a été que partiellement mis en œuvre avec l’unification de l’Italie et plus pleinement – mais pas entièrement – réalisé dans la résistance au nazisme et au fascisme. »
Parution le 1er mars
Romain Bertrand, Les Grandes Déconvenues. La Renaissance, Sumatra, les frères Parmentier, Le Seuil
« On dit que la France, au XVIe siècle, a manqué son rendez-vous avec le Monde, puisqu’elle n’aurait pris aucune part à l’épopée de l’exploration des sociétés lointaines – flirtant avec le Brésil, mais boudant l’Asie. Pourtant, deux capitaines dieppois, Jean et Raoul Parmentier, conduisent jusqu’à l’île de Sumatra, en 1529, deux nefs de fort tonnage. Ils en ramènent des plaies, des bosses et un peu de poivre. Aujourd’hui oubliée, leur navigation fut érigée au XIXe siècle en preuve incontestable d’une contribution française glorieuse à la geste des Grandes découvertes. C’est toute la Renaissance occidentale qui aurait débarqué, sous pavillon tricolore, en Insulinde. La fable est flatteuse pour l’idée que nous nous sommes longtemps faite de nous-mêmes comme de pionniers, voire de missionnaires de la « modernité ».
Il n’est pas certain qu’elle résiste à l’examen. Menée en archives et dans les méandres des chroniques, l’enquête oblige à s’intéresser d’un même mouvement au monde des marins normands et à celui des négociants malais, à la cour de François Ier et à celle du sultan de Tiku, à la poésie mariale du « Puy » de Rouen et à celle des maîtres de mystique musulmans. Ce qui se joue alors le long du troisième parallèle, lorsque les Dieppois font relâche à Sumatra, ne se comprend qu’à condition de rouvrir les portes de la comparaison – entre l’Europe et l’Asie du Sud-Est aussi bien qu’entre le savoir des « gens de mer » et celui des érudits. En nous aidant à contempler, défardées, nos grandes déconvenues, cette traversée nous invite à penser la « modernité » au pluriel et la Renaissance au conditionnel. »
Parution le 1er mars
Fernando del Rey et Manuel Álvarez Tardío, Fuego cruzado. La primavera de 1936, Galaxia Gutenberg
« Le long « printemps 1936 » a été le moment le plus important de l’histoire de l’Espagne au XXe siècle. Cinq mois entre les élections de février et le coup d’État de juillet ont décidé de l’avenir de la République. Pourquoi la démocratie n’a-t-elle pas été consolidée et la confrontation s’est-elle dangereusement intensifiée ? Y a-t-il vraiment eu beaucoup de violence politique ? Qui a miné le pluralisme et assiégé l’État de droit ? Qu’ont fait les gouvernements de la gauche républicaine ?
Fuego cruzado raconte l’histoire de cette période d’une manière inédite : en respectant le fait que ses protagonistes ne savaient pas ce qui allait se passer dans les mois suivants et que toutes les issues étaient possibles. Le livre explique avec précision comment le gouvernement a réagi au défi de la violence politique, en analysant le rôle de tous les acteurs. Il enquête de manière monographique sur toutes les victimes de cette violence – morts et blessés graves – et sur les responsables. Grâce à une base de données constituée au fil des ans à partir de nombreuses sources primaires, il offre une évaluation statistique précise pour comprendre ces mois. Fuego cruzado plonge le lecteur dans ce scénario qui a finalement débouché sur une issue peu glorieuse et permet de comprendre comment et pourquoi certaines des démocraties de l’entre-deux-guerres se sont effondrées. »
Parution le 20 mars
Elizabeth N. Saunders, The Insiders’ Game : How Elites Make War and Peace, Princeton University Press
« L’une des opinions les plus répandues sur les dirigeants démocratiques est qu’ils hésitent à recourir à la force militaire parce que les électeurs peuvent leur demander des comptes, ce qui, en fin de compte, rend les démocraties plus pacifiques. Comment les dirigeants peuvent-ils alors faire la guerre face à l’opposition populaire ou mettre fin à des conflits lorsque l’opinion publique les soutient encore ? The Insiders’ Game fait la lumière sur cette énigme persistante, en soutenant que les principales contraintes qui pèsent sur les décisions de guerre et de paix proviennent des élites, et non du public.
Elizabeth Saunders se concentre sur trois groupes d’élites – les conseillers présidentiels, les législateurs et les responsables militaires – pour montrer comment la dynamique de ce jeu d’initiés est essentielle pour comprendre l’utilisation de la force dans la politique étrangère américaine. Elle étudie comment les préférences des élites diffèrent de celles des électeurs ordinaires et comment les dirigeants doivent négocier avec les élites pour s’assurer de leur soutien à la guerre. Elle explique pourquoi les dirigeants déclenchent et prolongent des conflits dont l’opinion publique ne veut pas, mais elle montre aussi comment les élites peuvent obliger les dirigeants à changer de cap et à mettre fin aux guerres. »
Parution le 26 mars
Peter Longerich, Abrechnung. Hitler, Röhm und die Morde vom 30. Juni 1934, Molden
« En 1934, un an après la « prise de pouvoir », le régime nazi traverse une grave crise. Les succès politiques ne sont pas au rendez-vous, la première euphorie parmi les partisans est retombée. Ernst Röhm continue à développer sa « section d’assaut » et exige la poursuite de la « révolution nationale-socialiste », tandis que des forces ultraconservatrices se forment. En juin 1934, Hitler règle ses comptes dans le sang : il fait liquider Röhm et les dirigeants de la SA de sang-froid.
Mais les meurtres s’intensifient. Peter Longerich reconstitue les dessous complexes du « putsch de Röhm » et montre grâce à l’analyse approfondie de « rapports d’humeur » contemporains, comment la population a réagi aux meurtres. Sa conclusion : la « Nuit des longs couteaux » a été un événement central dans l’histoire du Troisième Reich, qui a ouvert la voie à la domination exclusive d’Hitler. »
Parution le 14 mars
Melissa Teixeira, A Third Path ; Corporatism in Brazil and Portugal, Princeton University Press
« Après la Grande Dépression, alors que le monde cherchait de nouveaux modèles économiques, le Brésil et le Portugal ont expérimenté le corporatisme comme une « troisième voie » entre le capitalisme de laissez-faire et le communisme. Dans une société corporatiste, le gouvernement intègre verticalement les groupes économiques et sociaux dans l’État afin de pouvoir gérer le travail et la production économique. Dans les années 1930, les dictatures de Getúlio Vargas au Brésil et d’António de Oliveira Salazar dans l’Empire portugais se sont emparées des idées corporatistes pour relancer le développement économique dirigé par l’État.
Ce qui distingue le corporatisme portugais et brésilien des expériences d’économie mixte menées dans d’autres pays, c’est la manière dont Vargas et Salazar ont démantelé les institutions démocratiques libérales, célébrant leurs efforts pour limiter les libertés individuelles et la propriété dans le but de relancer l’économie et d’instaurer la paix sociale. En retraçant le mouvement des personnes et des idées à travers l’Atlantique Sud, Melissa Teixeira montre comment deux pays peu réputés pour leur créativité économique sont devenus des centres majeurs d’expérimentation politique. Les fonctionnaires portugais et brésiliens ont créé des lois et des agences pour contrôler les prix et la production, ce qui a généré de nouvelles frictions sociales et de nouveaux problèmes économiques, car les individus et les entreprises ont essayé de se soustraire aux règles. Pourtant, selon Teixeira, malgré les échecs et les frustrations des expériences corporatistes du Brésil et du Portugal, les idées et les institutions testées dans les années 1930 et 1940 ont constitué une nouvelle boîte à outils juridique et technique pour l’essor de la planification économique, façonnant la manière dont les gouvernements réglementent les relations de travail et de marché jusqu’à aujourd’hui. »
Parution le 19 mars
Sante Lesti, Il mito delle radici cristiane dell’Europa. Dalla Rivoluzione francese ai giorni nostri, Einaudi
« La frontière entre le vrai et le faux est souvent ténue. C’est le cas s’agissant des « racines chrétiennes de l’Europe », qui peuvent être aussi bien une représentation objective, voire scientifique, de la réalité, qu’une représentation idéologique de celle-ci, c’est-à-dire un mythe.
Depuis plus de deux siècles, en effet, s’affrontent deux manières apparemment proches, mais extrêmement différentes (voire opposées) de raconter l’histoire européenne et, en particulier, le rôle qu’y a joué la religion chrétienne. La première, qui trouve ses racines dans la redécouverte romantique de la religion, présente simplement le christianisme comme un élément fondamental du passé de l’Europe ; la seconde, qui remonte à la Contre-Révolution française et européenne de la dernière décennie du XVIIIe siècle, présente au contraire le christianisme comme l’élément clé de ce passé. Ce livre reconstruit la longue histoire de la seconde, depuis le siège de Lyon par l’armée révolutionnaire française (1793) jusqu’à l’actuel Premier ministre italien Giorgia Meloni, en passant par de nombreux autres lieux, acteurs (pratiquement tous masculins) et événements de l’histoire européenne des deux derniers siècles. »
Parution le 5 mars
Stéphane Audoin-Rouzeau, Annette Becker, Samuel Kuhn et Jean-Philippe Schreiber (dir.), Le choc. Rwanda 1994 : le génocide des Tutsi, Gallimard
« Le Rwanda a sombré au printemps 1994 dans un drame historique majeur : un génocide décimant la plus grande partie de la population tutsi et dévastant le pays. C’est le choc qu’a provoqué cet événement que les auteurs et autrices du présent ouvrage, originaires du Rwanda, de Belgique, de France, entendent explorer : leur propre saisissement d’abord et la manière dont il a pu orienter leur travail d’investigation, d’écriture ou de création. Puis les racines culturelles, idéologiques, sociales et politiques de l’accomplissement du génocide.
Car ce crime de masse systématique, prémédité et planifié, est toujours le fruit d’un enchaînement complexe de causalités. Interroger le génocide des Tutsi, c’est tenter de comprendre les ressorts de notre regard sur les violences extrêmes, de notre morale, de nos lâchetés, de nos collusions. De comprendre aussi les contours de notre commune humanité. »
Parution le 7 mars
Paul R. Josephson, Hero Projects ; The Russian Empire and Big Technology from Lenin to Putin, Oxford University Press
« De Lénine et Staline à Poutine, le développement économique de la Russie s’est appuyé sur des technologies de grande échelle. Ces « mégaprojets » ont été au cœur de la croissance économique et de la puissance militaire du pays. Malgré leurs coûts environnementaux et sociaux considérables, ces technologies « héroïques » ont progressé au service des intérêts débridés des représentants de l’État, de l’orgueil démesuré des ingénieurs et de l’adhésion des masses à une idéologie nationale de réussite glorieuse et de grandeur militaire.
Dans Hero Projects, Paul R. Josephson retrace comment, au cours des cent dernières années, les tsars, commissaires et oligarques russes ont développé des mégaprojets pour créer le plus grand empire du monde. Construits par des paysans, des prisonniers du goulag et des volontaires communistes, ces projets de grande envergure – pipelines à travers la toundra, voies ferrées de l’Europe à l’océan Pacifique, centrales hydroélectriques et canaux du nord-ouest à l’Asie centrale aride, installations nucléaires – ont à jamais modifié le paysage, la politique et la société russes. Paul Josephson démontre que si ces projets ont été accueillis par le public comme des merveilles technologiques, ils ont toujours servi en fin de compte à enrichir le Kremlin et à démontrer les prouesses technologiques de la nation sur la scène mondiale. Et ils continuent d’être une caractéristique majeure du régime politique autoritaire russe au XXIe siècle ; exploitant les ressources de la Russie et encourageant une « renaissance » autoproclamée des armes et des réacteurs nucléaires, le gouvernement russe a décidé d’investir dans les technologies de l’information et de la communication. »
Parution le 5 mars
Lire l’étude Paul Josephson dans nos pages sur les projets colossaux de Lénine à Poutine.
Susana Sueiro Seoane, El anarquista errante. La aventura transatlántica del tipógrafo Pedro Esteve (1865-1925), Marcial Pons
« La vie de l’imprimeur catalan Pedro Esteve, figure emblématique de l’internationalisme libertaire et ami proche d’Errico Malatesta, s’est déroulée pendant la période « glorieuse » du mouvement anarchiste, d’abord en Espagne, puis à Cuba et aux États-Unis, où il est mort prématurément en 1925.
Parmi les travailleurs immigrés espagnols, italiens, cubains et portoricains de New York, Paterson (New Jersey), Tampa (Floride) et des camps miniers de l’Ouest, il accomplit un immense travail d’agitation et de propagande. Où qu’il vive, sa maison est un lieu de rencontre et de passage obligé pour des anarchistes d’horizons très divers. Les journaux qu’il a fondés avaient des lecteurs dans toute l’Europe, les Amériques et l’Afrique du Nord. Cette enquête révèle les raisons pour lesquelles il est devenu un personnage diffus, opaque et insaisissable, qui n’a pas reçu l’attention qu’il méritait jusqu’à présent. »
Parution le 1er mars
Enric Juliana, España : el pacto y la furia, Arpa
« Pacte et fureur apparaissent dans le titre de ce livre comme une synthèse de la période longue et convulsive qui va des attentats du 11 mars 2004 à la législature de l’amnistie. En Espagne, on négocie et on lutte avec fureur. Une réforme très rapide de la Constitution a été décidée pour garantir le paiement de la dette, la loi d’abdication du roi Juan Carlos I a été décidée en quelques jours, un accord a été trouvé pour l’application de l’article 155 en Catalogne, et de nombreuses coalitions ont été négociées à différents niveaux de gouvernement. Depuis six ans, l’Espagne a un gouvernement de coalition soutenu par une majorité parlementaire très plurielle. L’Espagne est l’un des pays les plus polarisés après les États-Unis, l’Argentine, la Colombie et l’Afrique du Sud.
Après deux décennies de travail journalistique intense à Madrid, Enric Juliana nous offre sa vision de cette période, au cours de laquelle nous avons subi une grave crise économique et une autre crise territoriale sans précédent, nous avons été confinés chez nous par une pandémie, nous avons entendu de nouveaux tambours de guerre et nous nous sommes approchés de changements technologiques vertigineux. Les compétences reconnues d’Enric Juliana comme observateur et analyste de la réalité politique et sociale espagnole, et de ses liens avec la réalité internationale, atteint son apogée dans ce livre. Juliana tente d’expliquer ce qui s’est passé au cours des vingt dernières années et ce que pourrait être l’Espagne dans les années à venir. Un récit ambitieux qui part d’un constat que nous pouvons tous partager aujourd’hui : 2004 vit en 2024. »
Parution le 13 mars