Le limogeage du ministre de la Défense Yoav Gallant est survenu à la suite de son discours du samedi 26 mars, dans lequel celui-ci appelait à retarder le projet de réforme judiciaire, demandant notamment à la coalition au pouvoir d’attendre la reprise des travaux du Parlement après les vacances d’avril. 

Des milliers de personnes sont descendues aujourd’hui dans les rues de Tel Aviv et d’autres grandes villes, intensifiant les manifestations qui se déroulent dans le pays depuis janvier contre le projet de loi.

  • Ces dernières semaines, un nombre croissant de réservistes israéliens, y compris des pilotes de chasse, ont menacé de se retirer du service volontaire si les lois étaient adoptées.
  • Ce lundi, le principal syndicat d’Israël a lancé une grève, annulant en conséquence les vols en partance de l’aéroport international Ben Gourion ; le principal syndicat de médecins a aussi annoncé que ses membres rejoindraient la grève. 

Selon les médias Keshet 12 et Inet, des ministres de la droite du gouvernement de Netanyahou ont menacé de rompre la coalition au pouvoir s’il délayait son projet de réforme judiciaire.

  • Benjamin Netanyahou, qui a repris ses fonctions fin 2022, dirige le gouvernement le plus à droite qu’ait connu Israël depuis sa fondation. La coalition de partis de droite et d’extrême-droite qui a permis sa réélection comprend le Likoud, le Shas, le Judaïsme unifié de la Torah et le Parti sioniste religieux.

Les partenaires nationalistes et ultra-orthodoxes de Netanyahou se plaignent que la Cour suprême fasse obstacle à l’expansion des colonies de Cisjordanie, la détention des migrants cherchant refuge et l’exemption du service militaire pour les hommes désirant poursuivre des études religieuses.

  • En 2020, la Cour a annulé une loi qui autorisait le gouvernement à exproprier des terres privées appartenant à des Palestiniens si des colons juifs y avaient construit ; elle avait aussi invalidé en 2017 les lois exemptant les hommes de communautés ultra-orthodoxes du service militaire obligatoire, suscitant l’opposition des partis Shas et du Judaïsme unifié de la Torah, qui les représentent à la Knesset. 
  • En janvier dernier, la Cour a aussi décrété que le leader du Shas, Aryeh Deri, ne pouvait pas faire partie du cabinet de M. Netanyahou, étant donné qu’il avait promis de ne pas entrer dans la fonction publique dans le cadre d’un accord de plaidoyer lors de sa condamnation pour des délits fiscaux.

Face  aux invalidations prononcées par la Cour, le projet de loi vise ainsi à réduire son rôle dans la législation.  

  • En l’état du projet, celui-ci permettrait à la Knesset de passer outre les révisions judiciaires de la législation. Actuellement, la décision du tribunal est définitive ; mais la réforme prévoit que la Knesset puisse voter à la majorité simple pour empêcher tout contrôle judiciaire de la législation ou pour l’annuler après coup.
  • La loi donnerait aussi aux membres de la Knesset appartenant à la coalition gouvernementale une majorité au sein de la commission qui nomme les juges de la Cour ; celle-ci pourrait conduire à l’abandon des accusations de corruption à l’encontre de Netanyahou.

Le projet de réforme judiciaire prévoit également que la Cour suprême ne puisse invalider une loi que si elle viole manifestement une disposition des lois fondamentales. Actuellement, la Cour interprète la garantie légale de la dignité de la personne comme protégeant également le droit à l’égalité, la liberté d’expression et la liberté de religion, mais ces droits ne sont pas explicitement mentionnés dans les lois fondamentales.