Le point majeur du plan est l’annonce de la construction d’un nouveau complexe industriel pour les semi-conducteurs avancés d’ici 2042 dans la ville de Yongin, près de Séoul, grâce à des investissements privés d’environ 300 000 milliards de wons, soit l’équivalent de 228 milliards de dollars. 

  • En janvier dernier, le gouvernement a aussi proposé d’augmenter le taux de déduction fiscale pour les investissements dans les puces et autres technologies stratégiques de 8 % à 15 % pour les grandes entreprises.
  • Le gouvernement accordera également cette année des subventions pour l’électricité et l’eau, des ressources essentielles pour les installations de semi-conducteurs ; il consacrera au moins 19 milliards de dollars sur cinq ans à la recherche et au développement de technologies stratégiques, dont l’intelligence artificielle1

La Corée du Sud abrite la plus grande base de production de puces mémoire au monde, les semi-conducteurs représentant près de 20 % des exportations totales du pays. Samsung et SK Hynix sont les premiers fabricants mondiaux de puces mémoire et ont également investi massivement pour s’imposer davantage dans le secteur de la fabrication de puces logiques, dirigé par l’entreprise taïwanaise TSMC2.

Les mesures du gouvernement coréen répondent à un contexte de compétition technologique croissante entre grandes puissances autour des semi-conducteurs. La rivalité se cristallise autour d’un axe États-Unis/Chine. 

  • Par l’intermédiaire du CHIPS Act, les États-Unis ont prévu 53 milliards de dollars de subventions pour la fabrication de semi-conducteurs, et un programme de crédit d’impôt pour tenter d’augmenter la production nationale, qui a fortement chuté au cours des dernières décennies. 
  • En octobre 2022, Washington a imposé des restrictions importantes sur les exportations de puces et d’équipements de fabrication de puces de pointe vers la Chine, afin de freiner la croissance des capacités de Pékin en matière de semi-conducteurs.
  • Après avoir présenté un programme de soutien au secteur des semi-conducteurs de 143 milliards de dollars en décembre, la Chine a finalement mis en pause sa politique d’investissements massifs visant à développer une industrie nationale de production de puces3.

Alors que ses entreprises de semi-conducteurs construisent de nouvelles usines aux États-Unis, la Corée du Sud s’inquiète des conditions attachées au CHIPS Act pour bénéficier des subventions américaines.

  • Samsung a lancé en 2021 la construction d’une nouvelle usine au Texas, dans laquelle l’entreprise a investi 19 milliards de dollars ; SK Hynix prévoit également de construire aux États-Unis une usine de conditionnement de puces de pointe4.
  • Cependant, le CHIPS Act prévoit que les entreprises opérant sur le sol des États-Unis qui bénéficient du soutien fédéral soient tenues de partager avec le gouvernement américain une partie de leurs bénéfices dépassant les projections initiales d’un seuil convenu.
  • Les entreprises bénéficiant de subventions n’auront aussi pas le droit de s’engager dans des efforts conjoints de recherche et de licence de technologie ou d’accroître leur capacité de fabrication de semi-conducteurs dans certains pays étrangers – dont la Chine – pendant dix ans ; or, Samsung Electronics et SK Hynix exploitent tous deux des usines de fabrication de puces en Chine.

L’annonce du plan coréen survient alors que les États-Unis, par la voix de leur secrétaire d’État au Commerce Gina Raimondo, ont déclaré vouloir intensifier leur effort d’investissement dans le secteur des semi-conducteurs, en ajoutant aux fonds prévus par le CHIPS Act un effort de formation de la main d’oeuvre américaine.

Sources
  1. Jiyoung Sohn, « South Korea Plans Mega Chip-Making Base to Stay Ahead », The Wall Street journal, 15 mars 2023
  2. « Samsung Joins Korea’s $400 Billion Bid to Lead in Key Tech », Bloomberg, 15 mars 2023.
  3. « Battered by Covid, China Hits Pause on Giant Chip Spending Aimed at Rivaling US », Bloomberg, 4 janvier 2023.
  4. Song Jung-a, « US chip subsidies alarm Korean companies with tough conditions », Financial Times, 3 mars 2023.