Zhao Yanjing sur la crise immobilière en Chine
Doctrines de la Chine de Xi | Épisode 20
Mois après mois, les prix et ventes de biens immobiliers en Chine continuent de baisser, accentuant le défi pour les autorités chinoises qui cherchent désormais à relancer le marché par des investissements massifs. Dans ce texte en six points, Zhao met la responsabilité de la crise actuelle sur les efforts « maladroits et populistes » du Parti pour contrôler le marché du logement chinois – et en tirer profit pour soutenir la croissance économique du pays. La solution qu'il propose ne serait être qu'un remède temporaire à ce qu'il qualifie de « crise de survie ».
- Auteur
- David Ownby •
- Image
- © CFOTO/SIPA
Zhao Yanjing est professeur d’urbanisme à l’Université de Xiamen dans la province du Fujian, et un commentateur régulier des affaires nationales et internationales de la Chine. Il écrit des articles sur des sujets d’actualité dans un style très étincelant, adoptant un « ton de vérité » similaire à celui de Sun Liping. Zhao s’est fait remarquer pour la première fois juste après le début de la pandémie, avec un article sur la façon dont la Chine devrait « mettre au point son discours » sur le virus. L’article traduit ici 1 — sur la crise de l’immobilier en Chine — est beaucoup plus proche du domaine d’expertise de Zhao en tant qu’urbaniste. Zhao l’a d’abord publié sur le site Web Aisixiang le 18 mai 2022, après quoi il a été repris par des publications et des sites Internet financiers.
Le marché immobilier chinois est tentaculaire et joue un rôle considérable dans la prospérité économique de la Chine — et donc, dans une certaine, mesure du monde. De nombreux analystes ont démontré l’effondrement du marché immobilier chinois — ce qui a fait éclater la bulle économique chinoise et est devenu un facteur du ralentissement économique mondial. Le marché était pourtant en plein essor depuis des décennies, l’immobilier résidentiel constituant le principal moyen d’investissement pour la plupart des Chinois. Ce boom a bien sûr alimenté la spéculation, qui incite naturellement les promoteurs à emprunter toujours plus d’argent pour construire toujours plus de maisons afin de répondre à la demande.
Selon Zhao, la cause de la crise actuelle réside dans les efforts maladroits et populistes du gouvernement central pour contrôler les coûts du logement par le biais de contrôles des prix et d’autres mesures, ce qui signifie que les promoteurs ne peuvent pas faire de profits et payer leurs dettes. Si des sociétés comme Evergrande — qui a le plus fait la une des journaux — font faillite ou se déclarent en faillite, les banques et les prêteurs du monde entier commenceront à rappeler leurs dettes à l’échelle du secteur, et l’économie s’effondrera, affectant les promoteurs, les prêteurs, les propriétaires, l’industrie de la construction, l’industrie de la rénovation résidentielle… Une version de ce phénomène s’est produite au Japon au début des années 1990, et l’économie japonaise ne s’en est jamais complètement remise.
Dans la crise actuelle, Zhao souligne à juste titre le rôle surdimensionné que les terrains et les ventes de terrains ont joué dans le développement économique de la Chine — les gouvernements locaux en particulier ont tiré parti des ventes de terrains pour soutenir la croissance économique — et fait remarquer que lorsque le gouvernement central intervient pour ralentir la spéculation par le biais de contrôles des prix et d’autres mesures de ce type, cela « tue leur poule aux œufs d’or ». En surface, cela place Zhao du côté des promoteurs capitalistes et contre les pauvres consommateurs qui souffrent, mais comme il le dit, le marché des capitaux de la Chine est essentiellement le marché immobilier, et si les valeurs immobilières ne continuent pas à augmenter, la logique du système devient rapidement malsaine et la croissance systémique ralentit.
Alors qu’en conclut-il ? La proposition de Zhao est double : les gouvernements central et locaux devraient agir rapidement — voire même immédiatement — pour inverser les politiques de l’année dernière qui visaient à refroidir le marché en mettant fin à la spéculation, car sans spéculation, les prix des actifs baissent et certaines incitations saines disparaissent. Dans le même temps, Zhao insiste — en citant Singapour comme modèle — sur le fait que les gouvernements devraient investir massivement dans des logements abordables pour contrebalancer la spéculation.
Pour lui, il s’agit de la meilleure façon de permettre à toujours plus de Chinois d’accéder à la classe moyenne — et finalement à la classe supérieure. Ceux qui ont été évincés du marché de l’immobilier résidentiel l’année dernière peuvent passer quelques années dans des maisons subventionnées, économiser leur argent et accumuler des actifs pour entrer sur le marché spéculatif de l’immobilier à un moment donné s’ils le souhaitent. Zhao soutient qu’un investissement massif de l’État dans des logements abordables serait beaucoup plus intelligent que la construction de plus de routes et d’aéroports, qui concentrent habituellement les « dépenses d’infrastructure » de la Chine lorsque les temps sont durs.
Zhao présente un certain nombre d’arguments et de propositions techniques, même s’il est difficile d’évaluer la probabilité que les logements abordables construits par l’État puissent facilement compléter les logements spéculatifs construits par les promoteurs dans un marché aussi vaste que celui de la Chine. Singapour — dont la superficie est beaucoup plus réduite — n’a pas cette problématique. Mais l’argument de Zhao transmet certainement la complexité de la situation, ainsi que les défis auxquels est confronté le gouvernement chinois.
1 — Évaluation de la situation actuelle
Les données immobilières d’avril sont sorties, et bien qu’il semble que les prix des logements aient baissé, nous sommes très loin d’une situation « stable, saine et durable ». Les dernières données montrent que la question de savoir si l’effondrement de l’immobilier aura un large impact sur l’économie n’est plus à discuter. Le fait est que la chute des prix des logements n’a ni stimulé l’économie réelle ni résolu le problème du logement. Au milieu d’un « changement majeur qui se produit une fois par siècle dans le monde », la récente politique immobilière a mis l’économie chinoise en danger.
L’idée d’un « changement majeur du monde une fois par siècle » est fréquemment utilisée en Chine comme un raccourci pour marquer l’idée que l’ascension de la Chine marque un changement fondamental dans l’histoire du monde. Voir par exemple l’article de Yuan Peng, « La pandémie de coronavirus et un changement qui ne se produit qu’une fois par siècle ».
Quel est l’état actuel de l’immobilier en Chine ? À mon avis, il est en crise. Le diagnostic que nous posons en ce moment est extrêmement important, car il décidera si des ajustements prudents de la situation suffiront, ou si au contraire il est temps de se précipiter aux soins intensifs, car si nous ne nous mettons pas sous respirateur au moment absolument opportun, l’économie chinoise peut s’effondrer en un clin d’œil. Les problèmes immobiliers ont déjà des effets d’entraînement sur le système financier, et la chute rapide de l’économie chinoise depuis l’année dernière est principalement le résultat du ralentissement de l’immobilier. Malgré l’accent mis à plusieurs reprises par le gouvernement central sur la prévention du risque systémique, les dernières données économiques montrent que la possibilité d’un risque systémique a augmenté, le point de déclenchement étant l’immobilier.
La propagation rapide de l’épidémie et les changements dans la situation internationale ont sans aucun doute eu un impact sur l’économie chinoise au deuxième trimestre. Mais il s’agit d’égratignures et de contusions, et non de « pathologies sous-jacentes » de l’économie chinoise, et bien qu’ils puissent sembler mauvais, leurs effets sont en fait superficiels et fugaces. Tant qu’il n’y a pas de problèmes avec le système financier, l’économie reviendra immédiatement à la vie une fois ces crises passées. Le développement économique de la Chine, qui s’est remise à plusieurs reprises de crises, illustre le fait que la capacité à résister à des chocs externes incertains dépend essentiellement de sa propre résistance. Et le degré de résistance dont la Chine peut faire preuve est déterminé par le marché des capitaux chinois, dont le cœur est l’immobilier.
Il existe un danger que des chocs externes tels que l’épidémie ou la détérioration des relations internationales soient utilisés pour expliquer le récent ralentissement économique. Surestimer l’impact de l’épidémie et trop se concentrer sur des événements inattendus tels que la guerre russo-ukrainienne peut conduire à un diagnostic fatal de la situation économique de la Chine. Bien que l’impact de ces facteurs sur l’économie chinoise ne puisse être ignoré, ce n’est que lorsqu’ils sont transmis par le système financier qu’ils peuvent déclencher un chaos à l’échelle de l’économie. Ce chaos peut à son tour amplifier les conséquences des chocs externes et même provoquer des chocs externes qui auraient pu être évités à l’origine. Et la cause première du chaos dans le système financier est la principale source de capital de la Chine – l’immobilier. Si la crise de l’immobilier n’est pas résolue, alors ni la politique monétaire ni la politique fiscale n’auront d’effet bénéfique, et la catastrophe qui n’a pas eu lieu en 2008 pourrait bien se produire.
2 — Pourquoi sommes-nous dans une crise ?
La réponse de la Chine à la crise d’aujourd’hui dépendra de notre compréhension de la façon dont la Chine a surmonté les crises passées. La raison pour laquelle je considère l’immobilier comme la source de la crise actuelle est que l’immobilier était étroitement lié à la sortie de la Chine des crises passées.
La première crise a eu lieu en 1989. L’explication courante de la fin de cette crise est la tournée d’inspection dans le sud de Deng Xiaoping en 1992, qui a permis à la Chine de sortir de la crise de 1989 et de briser enfin l’embargo américain. D’un point de vue politique, c’est correct. Mais l’économie chinoise avait déjà commencé à rebondir en 1991, lorsque le taux de croissance a bondi de 3,9 % en 1990 à 9,3 %, et lorsqu’il a atteint 14,2 % après la tournée de Deng, on peut dire qu’elle était en surchauffe. Quelle a donc été la véritable raison de la fin de la crise en 1991 ? C’est la publication par le Conseil d’État, le 19 mai 1989, du « Règlement provisoire de la République populaire de Chine sur l’octroi et le transfert des droits d’utilisation des terres appartenant à l’État dans les zones urbaines », qui a été mis en œuvre en 1990. C’est précisément ce règlement qui a transformé d’énormes quantités de terrains urbains en actifs de valeur et a permis aux gouvernements locaux d’utiliser ces terrains comme garantie pour réaliser des investissements à grande échelle. En l’absence de cette mesure, l’effet économique de la tournée du sud de Deng aurait été fortement réduit.
La deuxième crise a eu lieu en 1997. L’explication acceptée pour expliquer comment la Chine a survécu à la « crise financière asiatique » est que « le gouvernement chinois a mis en œuvre une politique fiscale proactive et une politique monétaire prudente, a travaillé à l’expansion de la demande intérieure et à la stimulation de la croissance économique, a approfondi la réforme des entreprises d’État et a lancé la réforme du système de sécurité sociale, en se concentrant sur les retraites et l’assurance médicale pour les employés ». En fait, ces politiques étaient là depuis le début, et ce qui a vraiment fait la différence, c’est la réforme du logement de 1998. C’est cette politique qui a permis à un très grand nombre de familles urbaines d’acquérir les actifs nécessaires pour devenir une classe possédante. Dans le même temps, elle a également insufflé la vie aux bâtiments inachevés laissés par l’économie précédemment en surchauffe, et l’immobilier a commencé à devenir l’industrie pilier de l’économie chinoise qu’elle est aujourd’hui.
La réforme de 1998 a mis fin à la pratique de longue date selon laquelle les unités de travail ou les entreprises fournissaient des maisons aux employés, et est passée à un mécanisme de marché.
La troisième crise a eu lieu en 2008. La question de savoir si la réponse de la Chine a été réussie ou non fait encore débat. Mais le fait est que l’économie chinoise a commencé à rattraper et à dépasser celle du monde développé à ce moment-là, et que les économies d’avant 2008 et d’après 2008 sont deux choses complètement différentes. L’explication de ce résultat n’est guère contestée : ce sont les investissements expansionnistes et anticycliques de quatre mille milliards de RMB du gouvernement central qui ont permis à la Chine de sortir de la crise. Alors pourquoi les autres grands acteurs n’ont-ils pas sorti leurs propres « quatre trillions » à l’époque ? Parce qu’ils ne les avaient pas. Alors d’où venaient les « quatre trillions » de la Chine ? Des gouvernements locaux. Sur les quatre mille milliards, le gouvernement central en a versé un, tandis que les gouvernements locaux étaient responsables de trois d’entre eux, et certains spécialistes estiment que les quatre mille milliards ont finalement généré quelque 30 mille milliards de RMB d’investissements en chaîne. La majeure partie de cette somme provenait donc des gouvernements locaux et du capital social, ce qui n’était absolument pas le cas dans d’autres pays.
La question est donc de savoir pourquoi les gouvernements locaux et la société chinoise disposaient de tant de fonds à cette époque. La réponse clé est qu’après 2004, les revenus fonciers des gouvernements locaux ont explosé, car la mise en œuvre obligatoire de la politique « 831 » d’appel d’offres public pour les terrains vendus par les gouvernements locaux a permis à ces derniers d’obtenir d’énormes montants de financement grâce aux ventes de terrains. L’envolée de la valeur de l’immobilier urbain a fourni une énorme quantité de crédit à la société dans son ensemble. Les gens pointent souvent du doigt l’entrée de la Chine dans l’OMC pour expliquer cette croissance. C’est assez vrai, mais cela repose sur l’hypothèse que la politique foncière de 2004 a transformé de manière inattendue la Chine en une puissance financière. Dans une économie ouverte, le commerce ne profite qu’aux pays disposant de capitaux à investir. Cela explique pourquoi d’autres pays qui ont rejoint l’OMC plus tôt que la Chine, et à des conditions plus favorables, n’ont pas obtenu les mêmes résultats que cette dernière.
En mars 2004, le ministère des Terres et des Ressources et le ministère de la Supervision ont publié conjointement l’ordonnance n° 71, exigeant qu’à partir du 31 août 2004, tous les terrains destinés à des projets commerciaux soient vendus par le biais d’un appel d’offres public, et que les gouvernements locaux ne concluent plus d’accords sur la base de facteurs historiques ou de relations personnelles. Dans le même temps, les promoteurs étaient tenus de payer les frais de transfert de terrain en temps voulu, et le gouvernement pouvait reprendre le terrain s’il restait inexploité pendant deux ans.
Étant donné que l’immobilier a été la fusée qui a propulsé la croissance passée de la Chine, les conséquences de l’extinction actuelle de l’immobilier pourraient également être étendues.
3 — Pourquoi la politique immobilière a-t-elle échoué ?
Où la politique immobilière a-t-elle échoué ? Premièrement, en opposant « logement » et « spéculation » ; et deuxièmement, en confondant l’augmentation de la capacité avec l’immobilier dans son ensemble.
Depuis quelque temps, la théorie économique n’a pas réussi à comprendre véritablement la nature financière de l’immobilier. Le terme « financement foncier » lui-même reflète une mauvaise compréhension de la nature de l’immobilier, en pensant à tort que la vente de terrains et l’achat de maisons sont les seuls aspects de l’immobilier. La fonction première de l’immobilier n’est pas le financement direct mais la création de crédit. Tout modèle d’entreprise peut être financé tant qu’il dispose de flux de trésorerie, et la capacité de financement dépend de la disponibilité de garanties. Le rôle de l’immobilier est de servir de garantie. Par conséquent, attribuer une valeur à l’immobilier par le biais des transactions du marché et lui donner de la liquidité est la fonction principale du marché immobilier. L’aspect transactionnel de l’immobilier consiste simplement à fixer les prix et à créer de la liquidité pour les biens immobiliers non négociés.
L’immobilier chinois est une affaire de finance depuis le début : vendre des terrains et des maisons relève de la finance, tandis qu’acheter des terrains et des maisons relève de l’investissement. Bien que les décideurs politiques aient tenté de résoudre le problème du « logement » par le biais du marché immobilier, cet objectif n’a jamais été atteint. Le financement et la consommation sont intrinsèquement incompatibles, et les tentatives d’atteindre les objectifs de consommation par des moyens financiers sont la principale source du dilemme dans la conception de la politique immobilière, en ce sens que si l’objectif est le « logement », vous devez avoir la « spéculation ». Si vous écartez la « spéculation », la croissance économique sera sous-capitalisée, ce qui conduira à un ralentissement économique si la situation n’est pas grave, ou à une crise si elle l’est.
Dans ce cas particulier, l’immobilier finance principalement les gouvernements locaux, et le gouvernement central reçoit très peu de bénéfices. Cela fait longtemps que les différents ministères et départements du gouvernement central, qui prennent les politiques de gestion occidentales pour parole d’évangile, se méfient de ces revenus « hors plan ». Afin de « corriger » la dépendance foncière des gouvernements locaux et de leur faire prendre au sérieux leur responsabilité de « loger » leurs citoyens, le gouvernement central a introduit une série de politiques visant à contrôler les prix des logements. Un aspect essentiel de ces politiques a été « d’augmenter le volume et de diminuer les prix », c’est-à-dire de supprimer la « hausse excessive » des prix du logement en augmentant l’offre de terrains sur le marché.
C’est précisément cette politique, ainsi que le démantèlement ultérieur des bidonvilles et des villages urbains, ainsi que la rénovation urbaine, qui ont finalement poussé le marché immobilier dans un état de surproduction, ce qui signifie que le délai de vente des logements commerciaux s’est allongé de plus en plus. Puis sont venues les restrictions de prix, les restrictions d’achat, les restrictions de prêt, tout le paquet. Tout cela s’est ajouté à une série d’interventions qui, au cours de l’année dernière, a finalement brisé le plus grand marché financier du monde, un marché qui avait refusé de sombrer pendant vingt ans. À partir de la dernière moitié de 2021, l’immobilier a connu une chute généralisée, ce qui a suffi à dilapider tous les gains que nous aurions pu réaliser grâce à une gestion supérieure de l’épidémie. Face à la crise économique chinoise, sauver l’immobilier est devenu la priorité absolue.
La « transformation des trois vieilles » semble faire référence à une politique de Guangdong visant à reconstruire « les vieilles villes, les vieilles usines et les vieux villages. » La plupart de ce dont Zhao semble parler dans ce passage relèverait de la rubrique générale de ce que nous appelons « rénovation urbaine. »
Seuls les actifs dont les prix augmentent sont dignes d’être investis. Dans un cycle de concurrence entre producteurs, il ne suffit pas de supprimer diverses restrictions à l’achat pour créer l’attente d’une hausse des prix des actifs. Les répressions répétées sur les prix des logements indiquent au marché qu’une fois que les prix recommenceront à augmenter, les efforts du gouvernement pour maintenir les prix bas reviendront également. De plus, l’énorme pression pour vendre le stock de terrains restant sur le marché obligera les promoteurs à les libérer à un prix plus bas. Mais la loi des marchés financiers est précisément que lorsque les prix baissent, la demande aussi.
La politique de suppression des prix du logement est largement fondée sur une mauvaise compréhension du marché des capitaux. De nos jours, tout le monde décrit le marché des capitaux avec le terme négatif de « bulle », mais peu de gens donnent une définition précise de ce qu’est une bulle, et de nombreux responsables politiques tiennent pour acquis que les bulles sont mauvaises, et que plus elles sont grosses, plus elles sont mauvaises. En fait, le prix de tout actif est sa valorisation future, et toute valorisation, grande ou petite, est une bulle. Des valorisations plus élevées signifient des bulles plus grosses ; des bulles plus grosses signifient des capitaux moins chers. Alors, est-il préférable que le capital soit cher ou bon marché ? Un entrepreneur n’a aucun problème à répondre à cette question. Le problème n’est pas qu’une grosse bulle est mauvaise, mais que la bulle ne peut pas être infiniment grosse. Avant que la bulle n’éclate, plus le prix de l’actif est élevé, mieux c’est [du point de vue de l’entrepreneur] !
La vraie question est de savoir comment empêcher la bulle d’éclater. Que signifie l’éclatement d’une bulle ? En termes simples, c’est le passage des actifs d’une situation dans laquelle « la demande dépasse l’offre » à une situation dans laquelle « l’offre dépasse la demande ». Le risque de bulles d’actifs est déterminé à la fois par le prix et l’échelle. Ce n’est pas que plus les prix sont bas, plus les choses sont sûres, car une fois que l’échelle est hors de contrôle, quel que soit le niveau des prix, l’offre finira par dépasser la demande, et la bulle éclatera ; à l’inverse, tant que la demande est suffisante – ou que l’échelle de l’offre est suffisamment petite –, la bulle n’éclatera pas même si les prix deviennent très élevés. Il y a encore des gens qui étudient comment empêcher la bulle immobilière d’éclater, alors que le flux constant de ventes aux enchères sans vente (流拍) et de personnes qui rendent des maisons aux promoteurs (退房) montre que la bulle immobilière a déjà éclaté dans de nombreuses villes ! La question est maintenant de savoir comment restaurer les liquidités !
4 — Des mesures d’urgence
Si l’analyse ci-dessus selon laquelle l’immobilier est déjà en crise est correcte, la chose à faire dès maintenant est d’amener l’immobilier aux soins intensifs, car quelles que soient les complications qui pourraient résulter d’une opération précipitée, la chose à faire est de faire battre à nouveau le cœur de l’immobilier ! Les problèmes actuels du marché immobilier chinois sont le résultat de la politique erronée qui a cherché à « augmenter le volume et supprimer les prix ». C’est justement cette stratégie qui a produit le changement soudain, au troisième trimestre de 2021, de l’attente que l’offre ne puisse pas répondre à la demande, à l’attente que l’offre dépasse la demande. Dès qu’un actif entre dans la catégorie « offre supérieure à la demande », il perd immédiatement sa liquidité. Afin d’arrêter la chute des prix, nous devons d’abord ajuster notre stratégie pour modifier les attentes.
Seuls les actifs dont les prix augmentent sont dignes d’être investis. Dans un cycle de concurrence entre producteurs, il ne suffit pas de supprimer diverses restrictions à l’achat pour créer l’attente d’une hausse des prix des actifs. Dans un marché où « l’offre dépasse la demande », il n’y a pas de liquidation rapide, et les prix n’augmentent pas. Le stock de terrains déjà sur le marché ne peut que créer une énorme pression à la vente, obligeant ainsi les promoteurs à les libérer à un prix inférieur. Mais ce n’est pas le prix qui détermine la demande sur le marché des capitaux, mais le fait que les prix augmentent ou baissent. Tant que les prix baisseront, même s’ils ne sont pas élevés, la demande diminuera. La seule façon de restaurer la liquidité est que les actifs passent d’un état de « surabondance » à un état de « sous-abondance ». Pour ce faire, la condition préalable est de vendre le plus rapidement possible les terrains destinés aux logements commerciaux qui sont déjà sur le marché. Si nécessaire, le gouvernement devrait être sur le marché pour un rachat inversé à grande échelle. Ce n’est que lorsque le marché se rendra compte qu’il n’y aura bientôt plus de maisons à vendre que les attentes passeront de l' »offre excédentaire » à la « demande excédentaire ».
De nombreuses personnes tiennent pour acquis que, puisqu’il a fallu déployer tant d’efforts pour maintenir les prix de l’immobilier à un niveau bas, ils rebondiront immédiatement avec vengeance une fois la pression retombée. Mais la réalité est que, tout comme dans le cas des taux de fécondité, le fait qu’il soit difficile de les maintenir à un niveau bas ne signifie pas qu’ils vont rebondir automatiquement. La tarification du capital basée sur les attentes est comme une bulle qui, une fois éclatée, ne peut être reconstituée. Au point de transition entre l’offre supérieure à la demande et la demande supérieure à l’offre, la relation « prix-volume » est non linéaire : lorsque la demande du marché est de 100 unités, une augmentation de l’offre de 99 à 101 unités entraînera un passage soudain de la concurrence entre consommateurs à la concurrence entre producteurs, et une chute discontinue correspondante des prix du marché des prix des consommateurs aux prix des producteurs.
Comme il s’agit d’une situation d’urgence, chaque instant compte. Si nous ne mettons pas le secteur de l’immobilier tout de suite sous « assistance respiratoire », le marché immobilier risque de prendre le chemin du Japon, c’est-à-dire que même s’il n’entre pas immédiatement en état de choc, nous pourrions assister à une hibernation à long terme, dans laquelle le marché devient un légume. C’est pourquoi la fixation de l’immobilier exige une médecine forte, sans tergiversations ni hésitations. Les options concrètes de secours d’urgence comprennent :
- Mettre immédiatement fin à la politique inappropriée de suppression des prix de l’immobilier, et supprimer les contrôles de prix qui empêchent les promoteurs de dégager le marché, donnant ainsi au marché un signal clair que les prix des logements sont en train de monter !
- S’éloigner de la gestion des prix pour se tourner vers la gestion des quantités. Considérer l’écoulement du stock de biens existants comme l’objectif le plus important à court terme, ce qui nécessite de prendre le délai de vente et non les prix comme l’indicateur de base pour évaluer si la politique immobilière fonctionne correctement dans les différentes parties du pays.
- Utiliser le taux de vente pour déterminer l’offre de biens commerciaux dans les villes. Dans les villes qui n’ont pas atteint le taux de vente souhaité, nous devons cesser d’ajouter de nouvelles offres sur les marchés. À l’heure actuelle, de nombreuses villes utilisent le ralentissement de l’immobilier pour accélérer l’injection d’encore plus de biens sur le marché, à tel point que même les industries d’État qui appartiennent aux municipalités s’y joignent pour soutenir le marché, ce qui revient à boire du poison pour étancher sa soif.
- Pour maintenir le prix élevé des actions sur le marché des capitaux, les entreprises devraient procéder à des rachats inversés. Sur le marché foncier, le gouvernement devrait faire de même, et dans les villes où la période de vente est particulièrement longue, les gouvernements devraient envisager des rachats de terrains, afin de ramener l’immobilier à une situation où la demande dépasse l’offre le plus rapidement possible. Plutôt que d’investir dans des projets d’infrastructure inutiles, les obligations spéciales du gouvernement central (专项债) devraient être investies dans les terrains des gouvernements locaux, car une fois la liquidité rétablie sur le marché immobilier, ces investissements peuvent immédiatement devenir des actifs de grande valeur.
- Tous les projets qui conduisent directement ou indirectement à une augmentation significative de l’offre de logements commerciaux, tels que l’amélioration des villages urbains, la rénovation urbaine, la conversion résidentielle des propriétés industrielles/commerciales/bureaux/hôtels, et la rénovation à grande échelle des bidonvilles doivent être arrêtés immédiatement. La rénovation urbaine doit s’appuyer sur un financement indépendant et non sur la vente de terrains.
Zhao ajoute un détail technique concernant le « rapport de volume » (容积率), qui est un moyen de calculer la surface de plancher hors-sol ajoutée par un projet spécifique.
- Après avoir vendu les terrains qui sont entrés sur le marché et le stock de maisons existant, nous devons poursuivre la pratique des « ventes de famine », afin que l’offre de nouveaux terrains et la croissance démographique affichent la même courbe. La priorité absolue doit être accordée à la gestion des prix des transactions sur le marché secondaire du logement, et l’objectif principal de la gestion du marché commercial du logement doit être d’assurer la liquidité du parc de logements et des terrains.
5 — Guérir la maladie
La contraction de l’offre de terrains pour les logements commerciaux entraînera inévitablement une baisse des investissements fixes et une augmentation du coût de la vie pour les résidents. Ce déficit doit être comblé par la construction à grande échelle de logements abordables (保障房). Face à la crise actuelle, nous devons construire autant de logements abordables que possible, le plus rapidement possible. Si en un an nous ajoutons 50 millions d’unités, de 50 mètres carrés chacune, à un coût moyen de 5 000 RMB par mètre carré – y compris le prix de référence du terrain –, cela représente un investissement fixe de 12 500 milliards de RMB. En raison des loyers stables qu’il produira, la qualité de cet investissement est bien meilleure que celle des infrastructures anciennes ou nouvelles, avec leurs rendements marginaux décroissants. En 2020, bien que seulement quelque 13,56 millions d’unités de logements commerciaux aient été vendues, cela représente l’économie de cent millions de nouveaux résidents urbains. Alors que nous entrons dans la prochaine phase de diminution de l’offre, le choix politique est simplement entre fournir des logements abordables dans huit ans ou dans deux ans.
Le mot que Zhao utilise pour « ancienne infracture » est tiegongji 铁公基, qui fait référence aux investissements dans les chemins de fer, les autoroutes, les aéroports, les services publics, etc.
Au-delà de l’investissement lui-même, l’énorme consommation représentée par l’achat d’appareils électroménagers, de meubles et de rénovations suffirait à combler l’écart de la demande de logements commerciaux en déclin. Si la moitié des ménages chinois pouvaient atteindre le niveau de richesse que l’on trouve dans les pays développés, la « guerre » serait terminée, car la taille même de l’énorme marché de consommation écraserait tous les concurrents, y compris les États-Unis. La construction de logements abordables stimulera directement les dépenses de consommation et insufflera rapidement un nouvel élan au marché. Lorsque nous disons « le logement n’est pas une question de spéculation », nous ne voulons pas nous débarrasser de la spéculation, mais plutôt augmenter le nombre de logements. Sans logements abordables, même si le marché immobilier revient à son niveau précédent, il ne sera toujours pas « stable, sain et durable. » Pour être durable, nous devons faire la distinction entre deux marchés.
Le modèle de Singapour « une petite quantité de logements commerciaux à prix élevé + un grand nombre de logements locatifs à bas prix » prouve que ce n’est que lorsque les logements commerciaux et les logements abordables se soutiennent mutuellement, l’un remplissant la fonction de « spéculation » et l’autre celle de « logement », qu’il est possible d’élaborer des politiques ciblées – prix pour les logements abordables, échelle/volume pour les propriétés commerciales. Et ce n’est qu’alors que nous pourrons arriver à un marché immobilier « stable, sain et durable ». L’expérience mondiale en matière de développement urbain montre que les villes où le prix des logements est élevé sont bonnes pour les économies à forte intensité de capital, comme les start-ups industrielles et la recherche et le développement, mais pas pour celles à forte intensité de main-d’œuvre, comme les opérations et la fabrication ; les villes où le prix des logements est bas sont bonnes pour les économies à forte intensité de main-d’œuvre, comme la fabrication et les opérations, mais elles sont mauvaises dans les économies à forte intensité de capital engagées dans l’innovation et l’entrepreneuriat. Seules les villes dotées d’un double système de logement – comme Singapour et Shenzhen – peuvent répondre aux besoins contradictoires du capital et de la main-d’œuvre.
La mise en œuvre de cette stratégie de « double voie » est plus facile à dire qu’à faire. Comme pour tous les systèmes à double voie, la plus grande difficulté du système de logement réside dans la difficulté de séparer le marché des marchandises et celui des logements abordables. Comme les logements commerciaux sont difficiles à titriser et à échanger, l’investissement dans les logements commerciaux nécessite l’achat de logements physiques. La réforme du système de logement en 1998 a commencé par un système à double voie dans lequel « le logement abordable était principal et le logement commercial était secondaire ». La raison pour laquelle nous nous sommes retrouvés avec un marché très spéculatif et pauvre en logements est que la différence de prix entre les logements commerciaux et les logements abordables a donné lieu à d’énormes activités d’arbitrage.
Le deuxième problème est l’énorme quantité de financement. Le logement et les services publics connexes (écoles, hôpitaux, villes) nécessitent une grande quantité de capitaux. Le marché du logement commercial finance ces services publics par la vente de terrains et l’achat de maisons. Si jamais l’offre de logements commerciaux devient incontrôlable, les recettes des ventes de terrains diminueront naturellement et les investissements dans les logements abordables se tariront. Le budget d’aucune ville n’est suffisant pour couvrir entièrement le logement abordable, ce qui nécessite des sources de financement alternatives pour compléter les ventes de terrains. Le système de fonds de prévoyance de Singapour utilise l’emploi stable comme flux de trésorerie pour résoudre ce problème. Mais il est également difficile pour les parts de ce système de devenir un actif très liquide pour les ménages. Il est donc difficile pour les ménages singapouriens de participer à la croissance de la richesse sociale par le biais de l’immobilier.
La véritable solution à ce problème a été la « réforme du logement de 1998 » en Chine. Il s’agissait d’une grande innovation en Chine qui a été grossièrement sous-estimée. De nombreuses personnes considèrent aujourd’hui la « réforme du logement » comme un simple « passage du public au privé » et ignorent les 30 premières années de logements abordables. La réforme du logement en Chine ne consistait pas à « changer un mauvais système en un bon », mais plutôt à « compléter un système inachevé ». Sans les anciens logements publics, aucune « transformation » n’aurait été possible. Dans le système à deux voies de la Chine, les voies ne sont pas parallèles, mais séquentielles, le logement public ayant été suivi par le marché. C’est la plus grande différence entre la Chine et Singapour, et elle explique la plus grande efficacité de la réforme du logement en Chine. La réforme du logement de 1998 a ouvert la porte au financement direct par les gouvernements locaux et a créé la première génération de la classe moyenne chinoise. La croissance rapide de la richesse de cette classe moyenne a soutenu la position de la Chine en tant que plus grand marché intérieur unique en dehors des États-Unis, offrant ainsi à la Chine le meilleur levier pour affronter la concurrence mondiale. En répétant la « réforme du logement », la Chine pourrait transformer l’ensemble de sa population urbaine en une classe moyenne propriétaire de biens immobiliers commerciaux.
L’astuce pour résoudre avec succès les deux problèmes majeurs d' »arbitrage » et de « financement » dans la réforme du logement de 1998 était, en termes simples, de « louer d’abord, acheter ensuite ». Lorsque les salaires étaient bas, cela revenait à louer l’unité de travail. Après la réforme de 1998, les loyers ont été réduits en tenant compte de l’ancienneté de travail, puis les familles ont racheté le loyer avec un paiement forfaitaire. Si les nouveaux logements abordables suivent le même chemin, en limitant l’éligibilité (aux personnes qui n’ont actuellement pas de maison mais qui ont un emploi stable), en limitant le prix (en fonction des coûts), en limitant les normes (taille de l’unité), en plus de décourager les ventes secondaires de ces unités pendant une plus longue période, on peut parvenir à une séparation efficace entre les logements abordables et les logements commerciaux. Les loyers stables et la maturité peuvent soutenir le marché du logement commercial, de sorte que le logement abordable lui-même peut servir de financement hypothécaire, résolvant ainsi complètement le problème du financement du logement abordable. Suite à la réforme du logement, les logements abordables, ainsi que les limitations sur les ventes secondaires, partageront la prime de l’amélioration des services publics urbains par la hausse des prix des logements, et toutes les familles pourront s’enrichir rapidement.
6 — Conclusion
Une bonne politique n’est pas une politique sans faille, mais une politique qui peut équilibrer les crises à court terme et les avantages à long terme, une politique qui peut identifier les priorités stratégiques. L’économie chinoise actuelle doit arrêter l’hémorragie avant d’opérer le patient. Sans la reprise du principal marché des capitaux, l’immobilier, le rythme cardiaque de l’économie ne se rétablira pas, et d’autres opérations chirurgicales réussies ne changeront pas la situation générale de récession économique, et la crise économique provoquera des troubles sociaux. Nous devons être capables d’identifier rapidement les vrais problèmes de cette « crise de survie », sinon nous ne ferons qu’encourir un plus grand danger si nous essayons de conduire la voiture en appuyant sur le frein et l’accélérateur en même temps.