• C’est la première fois qu’Alexander de Croo et Olaf Scholz se rencontrent dans ce format. Si les discussions porteront sur un large panel de sujets : les effets de la guerre en Ukraine sur la relance européenne, la défense et la sécurité en Europe, les processus d’adhésion à l’UE. L’hydrogène est un des sujets stratégiques qui seront abordés, particulièrement depuis que des tests réussis d’utilisation d’hydrogène vert dans des environnements industriels voient le jour, le dernier exemple en date étant sur un site industriel d’ArcelorMittal au Canada, le 2 mai dernier1.
  • En raison de la dépendance allemande au gaz naturel russe et face à la guerre en Ukraine, le chancelier allemand a redoublé d’efforts sur la scène internationale pour développer l’hydrogène dans le pays. Fin avril, celui-ci visitait d’ailleurs une station de production d’hydrogène au Japon avant de déclarer que « l’Allemagne et le Japon sont déjà des leaders technologiques dans de nombreux domaines lorsqu’il s’agit de transition énergétique. Dans le cadre de notre partenariat énergétique, nous allons encore approfondir cette coopération. L’hydrogène joue un rôle très décisif à cet égard, y compris pour l’utilisation industrielle », le 28 avril à Tokyo. Quelques jours après, l’Allemagne et l’Inde signaient un accord sur la coopération germano-indienne dans le domaine de l’hydrogène2.
  • En juillet 2020, la Commission européenne dévoilait sa stratégie hydrogène3. D’ici 2040, la Commission prévoit d’investir 140 milliards d’euros dans la production, mais aussi le transport et l’utilisation d’hydrogène décarboné via l’utilisation des fonds de l’Union, mais aussi de prêts de la Banque européenne d’investissement. Fin décembre 2021, la Commission publiait sa stratégie de décarbonation (deuxième paquet), qui accorde une large part à l’hydrogène4.
  • Après avoir rappelé le soutien de l’Allemagne et de la Belgique à l’Ukraine contre la Russie, Olaf Scholz et Alexander De Croo ont souligné, dans leur conférence de presse, l’importance de la coopération énergétique entre les deux pays5. Le Premier ministre belge a ainsi rapporté qu’il y a désormais plus de gaz qui transite par la Belgique pour approvisionner l’Allemagne que par l’Ukraine, avant de féliciter le changement de position du chancelier Scholz sur l’embargo européen vis-à-vis du pétrole russe.
  • Dans ce contexte, pour éviter des conséquences économiques importantes en Europe, l’hydrogène a été reconnu par les deux parties comme un des moyens disponibles pour remplacer les énergies fossiles provenant de Russie. Dans un discours prononcé au Collège d’Europe en octobre 2021, Alexander De Croo reconnaissait déjà le rôle que l’hydrogène vert peut jouer dans une stratégie européenne de l’endiguement du changement climatique.
  • Les deux dirigeants ont également discuté de l’élargissement aux Balkans. S’ils se sont prononcés en faveur de ce dernier, le chancelier Scholz a soutenu l’idée que cette intégration devait se faire plus rapidement, tandis que le Premier ministre belge, De Croo, a rappelé la nécessité de se conformer à l’acquis communautaire, correspondant aux critères de Copenhague adoptés en 1993. . 
  • Pour autant, la plupart des grands défis que pose l’hydrogène n’ont pas été traités. Un hydrogène produit à base d’énergies fossiles (notamment du gaz naturel) n’est pas si vertueux d’un point de vue écologique car la transformation de l’électricité en hydrogène puis de nouveau en électricité entraîne des déperditions en chaîne. Au-delà de la décarbonation de l’industrie, l’utilisation de l’hydrogène pour alimenter le chauffage ou les voitures suppose de grandes infrastructures de transport et de distribution, aujourd’hui inexistantes, bien que de nombreux projets soient en cours de déploiement.
  • Dans tous les cas, le développement de l’hydrogène s’inscrit résolument dans la planification écologique nationale et européenne. Il faut pour autant, selon Louis de Catheu et Ruggero Gambacurta-Scopello, dépasser l’État régulateur pour laisser place à l’État développementaliste appliqué à la transition, bâtissant des coalitions au service d’une « politique industrielle verte ».