• Aujourd’hui à 16h, le président de la République a tenu une conférence de presse principalement vouée à présenter les contours de la présidence française du conseil de l’Union. Cette présidence démarre dans 24 jours dans un contexte politique et sanitaire difficile. Alors que les chiffres liés au Covid-19 se dégradent partout en Europe, le début de la présidence française coïncide également à la fois avec une phase de renforcement des mesures sanitaires et d’accélération de la campagne présidentielle française. 
  • Exercice important pour la réputation diplomatique d’un État européen, la présidence tournante le sera d’autant plus dans un contexte d’instabilité politique sur le plan interne. 
  • Au-delà des grandes orientations regroupées sous le triptyque “relance, puissance, appartenance”, peu d’éléments concrets relatifs au dossier mis en avant pendant la présidence étaient jusqu’ici connus. Cette prise de parole du président était donc particulièrement attendue.  
  • Clément Beaune, Secrétaire d’État chargé des affaires européennes a d’abord présenté l’emblème, la pièce de monnaie qui symboliseront la présidence française, mais aussi la carte de réunion ministérielles qui rythmeront le semestre. La devise officielle, déjà connue précédemment, est « relance, puissance, appartenance ». La pièce dessinée par la Monnaie de Paris et frappée à Pessac en Gironde symbolise, pour les 20 ans de l’euro, le chêne et l’olivier. La pièce sera en circulation dès janvier 2022. Enfin, plus de 20 réunions ministérielles seront accueillies dans toutes les régions françaises pendant les six mois de la présidence. 
  • « Passer d’une Europe de coopération à l’intérieur de nos frontières à une européenne puissante dans le monde, pleinement souveraine, libre de ses choix et maître de son destin. » Voici la phrase retenue par le président pour résumer l’ambition de la présidence. Le 19 janvier, Macron se présentera devant les députés européens à Strasbourg pour son premier grand discours officiel.
  • Une Europe plus souveraine. La réforme de l’espace Schengen, sous l’angle assumé de la maîtrise des frontières, est le premier thème abordé par le Président. Ce faisant, il annonce sa volonté de soutenir la mise en place de réunions régulières des ministres chargés de l’immigration. Deuxième élément, la création d’un mécanisme de soutien d’urgence aux frontières en cas de crise. Ce mécanisme permettrait à Frontex d’intervenir de façon plus systématique et aux renforts d’autres États membres d’être déployés dans un cadre plus efficace. Troisièmement, le président souhaite faire avancer le paquet migratoire européen. Dossier difficile et bloqué depuis sa présentation par la Commission européenne, ce dossier particulièrement périlleux risque toutefois de faire l’objet d’un fort blocage de pays comme la Hongrie ou la Pologne et d’être difficile à faire aboutir dans le contexte électoral français. 
  • Deuxième élément clé de la souveraineté, la politique de défense. Après un bref rappel des avancées opérées depuis 2017, le président a réaffirmé sa volonté de faire aboutir la Boussole stratégique, le document de référence qui permettra de définir une stratégie commune au niveau européen, au mois de mars 2022. Emmanuel Macron a pris soin de rappeler, au lendemain de l’entrée en fonction du nouveau gouvernement allemand, l’importance de la bonne mise en cohérence de cette stratégie avec l’Otan. L’espace maritime, le spatial et le cyber devraient être particulièrement à l’honneur de ce document stratégique. Sur le plan des projets, le renforcement de l’industrie de défense et le déploiement d’exercices stratégiques communs devraient être privilégiés.
  • Stratégie de voisinage. Le président souhaite focaliser les initiatives de la présidence française sur la relation avec le continent africain et prévoit un sommet entre l’Union africaine et l’Union européenne les 17 et 18 février 2022. Il souhaite également privilégier les Balkans occidentaux, avec une conférence prévue au mois de juin et des investissements ciblés. 
  • Bâtir un nouveau modèle européen de croissance. Il s’agit du deuxième axe de la présidence française, que le président souhaite articuler autour de la production et de la croissance mais aussi de l’Europe sociale. Le 10 et 11 mars, un sommet exceptionnel des 27 chefs d’État sera organisé à cet effet. Le président souhaite renforcer l’économie européenne par le biais de plans d’investissements et d’alliances industrielles nouvelles dans des domaines déjà identifiés comme étant des projets stratégiques d’intérêts communs tels que l’hydrogène, les batteries, l’espace ou les semi-conducteurs.
  • Réforme des règles budgétaires européennes. Le président évoque également la réforme du cadre budgétaire et financier de l’Union et annonce un session de réflexion stratégique autour de la réforme des règles budgétaires européennes lors de la réunion des 10 et 11 mars. Ici, Emmanuel Macron aborde avec précaution le dossier le plus délicat de la présidence française. L’Union bancaire et des marchés des capitaux ont également été mentionnées, deux dossiers sur lesquels la France n’était pas forcément attendue. Lors des questions-réponses, le Président lie explicitement la réforme des règles budgétaires à la nécessité de réaliser des investissements au niveau européen, dans la continuité des mesures mises en place dans le contexte de crise liée au Covid. Dans sa réponse, le président entretient une certaine ambiguïté autour des règles de convergences financières, mais aussi de la questions des ressources propres ou de la pérennisation de Next Generation EU. 
  • Ambition climatique. Emmanuel Macron souhaite pousser des dossiers clés liés au changement climatique dans le cadre du paquet Fit for 55, à commencer par la mise en place du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, cheval de bataille français de longue date. Afin de renforcer la mise en cohérence de la politique commerciale et climatique, le président souhaite pousser la mise en place de clauses miroir afin de garantir la réciprocité des règles commerciales avec les partenaires hors d’Europe. Denis Redonnet, récemment nommé Chef de l’application des règles commerciales au sein de la Commission européenne, jouera un rôle clé dans cette articulation avec Paris. La lutte contre la déforestation importée, également mentionnée par le président, participe de la même logique. 
  • Faire de l’Europe une puissance du numérique. Le président souhaite approfondir le marché intégré du numérique, notamment en accélérant l’aboutissement de l’acte pour le marché numérique (DMA) et de l’acte pour les services numériques (DSA), deux dossiers portés par Thierry Breton et qui devraient aboutir durant la présidence française. Le président souhaite également que, d’ici au printemps, les textes permettant de parachever la taxation des multinationales au niveau international soit mise en place au niveau européen.
  • Relancer l’Europe sociale. Le président, citant le rapport Blanchard-Tirole, souhaite articuler l’équilibre entre croissance et protection en relançant les dossiers propres à l’Europe sociale. Après un rappel de la directive sur les travailleurs détachés, le président a souhaité aller plus loin avec la directive sur les salaires minimums dans l’Union européenne, un dossier déjà bien avancé sous présidence slovène et qui devrait aboutir rapidement, dans les premières semaines de la présidence française. La directive sur la transparence salariale pour mettre fin aux écarts de salaires entre les hommes et les femmes et le texte sur les quotas dans les Conseils d’administration seront également privilégiés et pourraient aboutir avant la fin du semestre. 
  • Une Europe humaine. Sur ce dernier point, le président parle de l’angle appartenance de la présidence française. Il annonce, dans ce cadre, plusieurs initiatives, à commencer par la conférence sur l’avenir de l’Europe qui doit aboutir au mois de mai 2022 et dont le bilan est pour le moment très mitigé. Le président fait un lien entre le résultat de la conférence et l’approfondissement de la construction européenne, en n’excluant pas l’ouverture de négociations pouvant mener à la réforme des traités. Le président insiste également sur les valeurs européennes et fait une référence indirecte aux dérives en Pologne et en Hongrie. Il annonce notamment un fonds de soutien européen aux journalistes indépendants et d’investigation, une stratégie de lutte contre le racisme et l’atisémisite, une législation sur les violences faites aux femmes. Le président, qui se rend à une réunion des pays du groupe de visegrad dans les prochains jours, reste sur une ligne de “construction de compromis utiles” qui témoigne d’une stratégie d’apaisement avec Viktor Orban et Mateusz Morawiecki. 
  • Relancer un grand travail sur l’histoire de l’Europe. Le président souhaite bâtir un cadre académique où les historiens européens pourront mener un travail indépendant. Il annonce sa volonté d’initier ce travail en France par la mise en place d’un comité indépendant pour forger une historiographie de l’Europe. Le président souhaite également organiser une grande réunion de 40 universités européennes en juin 2022 et annonce sa volonté de créer une académie d’Europe qui réunira des intellectuels de l’Union européenne pour proposer des actions culturelles sur l’ensemble du continent. A l’occasion des 30 ans d’ARTE, le président souhaite développer des initiatives culturelles pour développer l’accès aux œuvres culturelles sur tout le territoire européen. Le président souhaite enfin développer un service civique européen de six mois ouvert à tous les jeunes de moins de 25 ans.