- La nouvelle est tombée ce matin lorsque le Premier ministre sortant, Claude Joseph, a annoncé l’assassinat du Président dans un communiqué, relayé par France 24 et par l’AFP. Le texte mentionne « un groupe d’individus non identifiés, dont certains parlaient en espagnol », qui a blessé mortellement Jovenel Moïse, décédé peu après.
- La dernière décision de Jovenel Moïse en tant que Président remonte à lundi 5 juillet, lorsque celui-ci a nommé un nouveau Premier ministre, Ariel Henry, afin de former un nouveau gouvernement. Les mandats des chefs de gouvernement à Haïti durent rarement plus d’un an ; le dernier était resté en poste durant trois mois à peine.
- La situation est extrêmement confuse puisque, comme le dit Jean-Marie Théodat dans un entretien accordé au Grand Continent qui paraîtra demain : « Lequel des deux Premiers ministres – l’ancien et le nouveau qui n’a pas encore été investi – peut, au regard de la loi, assurer l’intérim ? L’ancien premier ministre, Claude Joseph, prend des mesures aujourd’hui et semble encore en selle. Nous allons donc vers une véritable confusion institutionnelle. »
- Avec plus de 11 millions d’habitants, Haïti est le pays des Caraïbes le plus peuplé, et également celui soumis à la plus forte insécurité, matérialisée par la présence d’un nombre important de gangs, et d’infrastructures trop faiblement développées pour relayer l’autorité de l’État. Le pays, qui a gagné son indépendance vis-à-vis de la France en 1804, a été gravement touché par le séisme de 2010 qui a fait plus de 200 000 morts, et au moins autant de blessés. Les gouvernements se succèdent depuis, sans réussir à redresser le pays.
- Jovenel Moïse, Président d’Haïti depuis novembre 2016, a dû faire face depuis le début de son mandat à un contexte intérieur critique. L’histoire récente du pays est rythmée par d’importantes manifestations, critiquant le gouvernement pour le prix des denrées alimentaires et du carburant importé sur l’île, mais également par un taux élevé de criminalité et de corruption.
- L’opposition avait déjà, selon les dires du Président, essayé de l’assassiner en février dernier, l’accusant de prolonger son mandat au-delà de la durée prévue de 5 ans. Celui-ci s’était défendu en disant que son mandat devait durer une année supplémentaire, car il n’était entré en fonctions qu’un an après son élection, en raison d’accusations de fraude électorale.
- Le mandat de Jouvenel Moïse a déjà fait l’objet d’un nombre important de critiques, notamment lorsque celui-ci a annoncé vouloir réécrire la Constitution, ou bien gouvernait par décrets, après avoir dissous le Parlement en janvier 2020. L’ONU ainsi que plusieurs pays, dont les États-Unis, avaient déjà appelé à la tenue d’élections présidentielles et législatives dès que possible.
Nous ferons paraître demain un entretien avec Jean-Marie Théodat dans lequel celui-ci revient sur les causes profondes à l’origine de ce drame.