L’agenda politique suédois pour 2021

La ministre des Affaires étrangères suédoise, Ann Linde, a présenté le 24 février devant le Parlement suédois les grandes lignes de la politique étrangère pour l’année à venir¹. La ministre a évoqué de nombreux sujets d’actualité internationale, des conflits aux frontières de l’Union européenne à l’environnement, en passant par les relations entre le royaume scandinave et la Chine. Le discours navigue entre tradition diplomatique suédoise et innovations.

Le discours de la ministre a été l’occasion de réaffirmer les éléments traditionnels de la politique étrangère suédoise. Dans la droite lignée de la diplomatie de la «  superpuissance morale  » définie par le Premier ministre Olof Palme dans les années 1970, Ann Linde a d’abord rappelé l’engagement de la Suède en faveur du droit international, du règlement pacifique des conflits et en faveur de l’ONU. Elle a ainsi salué les efforts internationaux en faveur du désarmement, notamment l’application du traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN) et le renouvellement du traité New Start entre les États-Unis et la Russie. La ministre a en outre rappelé la «  diplomatie féministe  » suédoise, initiée en 2014 pour promouvoir l’égalité entre les hommes et les femmes dans le cadre des relations internationales². Ann Linde a souligné que cet axe serait prioritaire dans le cadre de la présidence suédoise de l’OSCE pour l’année 2021.

La relation entre sécurité intérieure et extérieure a occupé une place importante dans le discours de la ministre. Cette dernière a ainsi explicité le rôle que la Suède entend jouer au sein de l’Union Européenne, affirmant que l’Union est un prérequis pour le «  bien-être  » du pays. Mais elle a surtout insisté sur la coopération militaire. Ann Linde a ainsi affirmé qu’en cas d’attaque contre un pays européen ou nordique, le royaume scandinave interviendra, s’éloignant ainsi de sa politique de stricte neutralité. De plus, la ministre a admis que le pays devrait encore renforcer sa coopération avec ses alliés européens, en prenant pour exemple l’envoi récent de 150 soldats des forces spéciales suédoises au Mali, en soutien à la task force Takuba³. Toutefois, A. Linde a fermé la porte à une adhésion prochaine à l’OTAN. En décembre 2020, le Riksdag a pourtant autorisé le gouvernement à conclure une alliance en temps de paix, premier pas vers une adhésion à l’alliance atlantique. Dans son discours, Ann Linde a exclu une telle possibilité, indiquant que la Suède ne «  changerait pas de politique de sécurité  », privilégiant une alliance défensive avec les autres pays nordiques. À l’issue de la présentation, le parti du Centre (Centerpartiet, centre-droit) a demandé au gouvernement (Sociaux-démocrates et Verts) de recevoir les partis du Riksdag, majoritairement en faveur de l’adhésion, pour revenir sur une telle décision. 

Enfin, une partie notable du discours d’Ann Linde a été consacré aux puissances rivales de l’Union européenne. La Russie a ainsi été condamnée une nouvelle fois, à la fois pour son annexion de la Crimée en 2014 et pour le non-respect des principes démocratiques dans la répression des manifestants. Mais c’est surtout la Chine qui a été évoquée par A. Linde, cette dernière indiquant qu’en dépit de la coopération bilatérale, la Suède «  s’inquiète des activités dangereuses pour la sécurité du pays et de ses entreprises  ». En début de semaine, les services secrets suédois (Säpo) ont indiqué que les activités d’espionnage dans le royaume se sont multipliées, notamment du fait de la Chine⁴. Ann Linde a rappelé à cette occasion que la Suède a créé en janvier dernier un «  Centre national de connaissances » sur la Chine, hébergé à l’Institut de politique étrangère (Utrikespolitiska institutet), pour étudier la stratégie chinoise vis-à-vis de la Suède.