Le Conseil européen se hâte lentement. Lors de leur dernière réunion en visioconférence, le 23 avril, les chefs d’Etat et de gouvernement ont convenu du principe d’un Plan de relance européen (Recovery Plan) et en a confié la préparation à la Commission européenne, qui devrait le présenter le 13 mai au plus tôt. Mais avant que ce plan ne devienne réalité courent cinq délais, qui sont autant de défis pour l’Europe  :

  1. Diplomatique  : le plan de relance sera arrimé au cadre financier pluriannuel (CFP) déterminant le budget européen sur la période 2021-2027. Le Conseil européen s’était déjà âprement divisé sur ce cadre en février, avant la crise sanitaire. La Commission en prépare une nouvelle mouture, à partir de sa proposition initiale qui remonte à 2018. Arriver à mettre d’accord les Vingt-Sept sur ce nouveau cadre financier et sur les modalités du plan de relance qui lui est assorti va exiger des trésors de diplomatie.
  2. Pratique  : La diplomatie à distance a ses limites. Plusieurs dirigeants européens estiment que conclure un accord sur un plan de relance d’une telle magnitude avec le cadre financier pluriannuel exigera un sommet européen en présentiel, qui permet les incontournables apartés. Mais nul ne peut savoir encore quand un telle rencontre physique sera possible.  
  3. Politique  : on l’a vu au Conseil européen du 26 mars comme à l’Eurogroupe début avril, qui restera le plus long de l’histoire à date de cette instance : le clivage Nord-Sud de la zone euro a fait son retour dans la recherche d’un plan de relance. Le débat se cristallise désormais sur la répartition entre prêts et subventions que ce plan financera. Mettre les Vingt-Sept d’accord exige un compromis politique, dont il appartient à la France et à l’Allemagne de créer les conditions. Le leadership de ce moteur mal en point est attendu. Un plan B doit être préparé si aucun compromis n’était trouvé.
  4. Bureaucratique  : les sommes levées sur les marchés pour financer le plan de relance devront ensuite transiter par le budget européen et ses programmes et procédures pour être investies dans les régions et secteurs économiques à relancer. C’est un délai en aval de l’accord politique des Vingt-Sept à trouver.
  5. Financier  : pendant tout ce temps, il faut que les taux d’emprunt d’Etats du Sud sur le marché obligataire ne se tendent pas. La dégradation de la note italienne par l’agence Fitch la semaine dernière n’a pas suscité de vent de panique. Les leçons tirées de la crise des dettes souveraines ont permis une réactivité et une anticipation de la Banque centrale européenne, qui laisse du temps aux Vingt-Sept pour s’entendre sur leur plan de relance. Mais ce temps n’est pas infini et la relance ne peut être trop retardée.