Minatitlán. Le soir de vendredi 19 avril, des hommes armés ont interrompu la fête de famille qui se tenait dans l’un des restaurants de Minatitlan, dans l’État de Veracruz. Quatorze personnes ont été assassinées. Les autorités suspectent le Cartel Jalisco Nueva Generación (CJNC) d’être responsable de ce massacre qui serait lié aux affrontements entre les groupes CJNG et Zetas pour le contrôle du trafic de drogue dans la région.

Le massacre de Veracruz n’est malheureusement pas un cas isolé. Au cours des trois premiers mois de cette année, près de 8 500 personnes ont été assassinées au Mexique, soit une augmentation de 9 % par rapport à l’année dernière, et un record du début d’année le plus violent de l’histoire du pays1. Cette violence exacerbée est en grande partie due à la dissolution des cartels en groupes armés plus petits et volatiles, ce qui a généré une recrudescence de la concurrence entre groupes et réduit la capacité d’intervention des forces de sécurité. Parallèlement, l’État mexicain et particulièrement ses services de sécurité continuent de faire état de cas de corruption et de connivence avec les acteurs illégaux . sans réformes profondes des institutions de sécurité et de justice du pays, il est probable que l’escalade de violences se poursuive.

Lors de la campagne électorale de 2018, López Obrador avait promis une stratégie radicalement différente à celle de ses prédécesseurs pour affronter le problème endémique de crime organisé au Mexique. S’appuyant sur une plateforme progressiste avec pour slogan “becarios sí, sicarios no” (“oui aux boursiers, non aux tueurs à gage”), l’actuel président s’est engagé à retirer l’armée des régions dévastées par la violence liée aux drogues et à se concentrer sur l’éducation, les programmes sociaux et la création d’emplois. Cependant, en réponse au massacre de Veracruz, AMLO a assuré que la sécurité serait rétablie grâce á l’installation de la Garde Nationale dans la région. Le président a en effet opté pour une militarisation accrue en annonçant dès son entrée en fonction la création de cette nouvelle force de police militarisée. Une telle initiative semble motivée par l’espoir d’obtenir des résultats rapides plutôt que d’assumer la lourde tâche de créer un contrôle efficace des forces de sécurité mexicaines, et pourrait créer un dangereux précédent concernant les pouvoirs constitutionnels conférés aux forces armées du pays2.

Malgré les promesses de López Obrador, le gouvernement n’a donc présenté aucune proposition concrète pour prévenir les violations des droits de l’homme perpétrées par les forces de sécurité et démanteler les organisations criminelles qui les composent. Par ailleurs, le gouvernement a annoncé en février que l’État mettait fin à tout financement des organisations de la société civile. L’incapacité du gouvernement à rétablir et à renforcer les institutions civiles locales a pourtant permis aux groupes criminels de continuer à fonctionner ou de ressurgir de manière encore plus violente.

Perspectives

  • D’après un rapport récent du International Crisis Group3, l’Union et ses Etats membres pourraient contribuer à contrer la violence croissante au Mexique :
  • Recommander au Mexique de reformuler sa ‘guerre contre la drogue’ en un ensemble de conflits armés internes, ce qui permettrait d’instaurer des politiques de sécurité adaptées au niveau régional.
  • Soutenir la réforme du système de sécurité par le biais d’une assistance technique et d’un échange de bonnes pratiques avec les décideurs mexicains, notamment dans le cadre des dialogues politiques sur la sécurité et la justice menés régulièrement entre l’Union et le Mexique.
  • Le Système National de Recherche de Personnes (SNBP) mérite une attention et un soutien particuliers, étant donné son rôle potentiel dans l’établissement de la vérité sur la violence qui a ravagé diverses régions, la restauration de la confiance en l’État et la création d’un nouveau modèle de collaboration avec la société civile.