Londres. Début janvier le gouvernement britannique a annoncé son plan de long-terme pour le service public de santé. En retard, à cause du Brexit. À l’occasion de son soixante-dixième anniversaire, le NHS entend se réformer afin de faire face aux inégalités grandissantes et à une population vieillissante. Si approuvé par les ministres, ce nouveau plan abrogerait des parties cruciales du Health and Social Care Act de 2012, qui favorisait le financement par des groupes privés, comme Virgin Care et Care UK, et qui est accusée d’avoir créé un environnement compétitif (1). Le plan promet d’améliorer les soins de santé mentale et de maternité, davantage de contrôle sur les soins pour les personnes âgées, une meilleure prévention des maladies, une augmentation de la main d’œuvre et une meilleure adaptation à l’ère du numérique (2). Mais il n’y aurait ni les fonds ni le personnel nécessaire pour le mettre en place, selon le parti travailliste (3).

Theresa May avait promis, au mois de juin dernier, qu’afin de soulager le NHS, son gouvernement – n’ayant plus à supporter la contribution britannique au budget européen – pourrait y injecter 20 milliards de livres supplémentaires chaque année, jusqu’en 2023. Une promesse accusée d’être essentiellement utile à endiguer une crise immédiate, sans pour autant donner de garanties sur les exigences d’une population vieillissante.

Au centre de la campagne référendaire dont les négociations arrivent à un tournant, le NHS a subi depuis le 23 juin 2016 des pertes considérables sur son personnel de santé. Les Brexiters les plus fervents étaient allés jusqu’à défendre l’idée que l’argent que le Royaume-Uni versait à l’Europe devait servir pour être réinjecté dans un service de santé en souffrance. Le slogan « Let’s Fund Our NHS Instead » faisait les unes des tabloïds. En réalité, depuis le Brexit, selon une étude publiée par la “Health Foundation”, le nombre d’infirmières en provenance de l’Union aurait chuté drastiquement, de 87 pour cent, passant de 6400 en 2016-2017 à 800 l’année suivante (4).

Persuadée de l’effet destructif du Brexit sur le NHS, la British Medical Association, le plus grand syndicat de médecins britannique, qui représente 160 000 professionnels et étudiants, soutenait en juillet dernier l’idée d’un second référendum, afin que les citoyens obtiennent un dernier mot sur les termes de l’accord final. Le syndicat avait adhéré à la campagne lancée par le journal The Independent, intitulée “Final Say”, qui avait obtenu environ 500 000 signatures. Aujourd’hui, c’est le parti travailliste qui soutient l’idée d’un deuxième vote. Et, selon un sondage cité par The Independent samedi dernier, 59 % des électeurs du parti travailliste interviewées dans des bastions du Leave et en faveur d’un second référendum pensent que le Brexit sera négatif pour le système de santé (5).

Quoi qu’il en soit, le sujet du NHS ne s’est jamais éloigné du centre du débat national. Il s’agit peut-être le seul sujet ayant survécu au monopole du Brexit. Sans doute un signe que les problèmes du pays étaient à rechercher davantage au niveau national qu’au niveau européen.

Perspectives :

  • Le parti travailliste devrait présenter un amendement de soutien à un second référendum au moment où Theresa May soumettra l’accord de divorce (révisé) aux députés de Westminster, à savoir le 12 mars.

Sources :

  1. CAMPBELL Denis, Scrap laws driving privatisation of health service, say NHS bosses, The Guardian, 28 février 2019.
  2. The NHS Long Term Plan, 7 janvier.
  3. NHS 10-year plan : Labour attacks Theresa May over proposals, BBC News,6 janvier 2019.
  4. Large drop in the number of new nurses coming from the EU to work in the UK, The Health Foundation, novembre 2018.
  5. KENTISH Benjamin, Brexit : Boost for Corbyn as Labour voters in party’s heartlands back Final Say referendum, The Guardian, 3 mars 2019.

Vera Marchand