Bolzano. Dans la révolution de l’économie circulaire, théorisée entre autres par l’architecte Thomas Rau (5), et mise en avant lors du congrès Klimahouse, la matière acquiert des droits et un passeport à part entière. Les ressources terrestres, dont nous disposons en quantités limitées, intègrent une banque de données qui permet leur recensement et garantit la durabilité de leur usage. Ainsi l’actuelle culture du déchet disparaît-elle au profit d’une vision circulaire, “du berceau au berceau” selon les termes de Monika Griefahn, co-fondatrice de Greenpeace Germany et membre du SPD.

Plus encore, cette vision suppose d’abandonner la notion de propriété sur la matière et de lui préférer les notions de location ou d’usufruit. Dans le cadre de l’industrie du bâtiment par exemple, le constructeur et l’habitant utilisent des matériaux, comme le ciment, le bois et le métal ; ils jouissent d’un service pour un temps limité à l’issue duquel le matériau réintègre le circuit économique. On ne crée plus ni n’extrait tant que l’on emploie et valorise la matière existante. Cette conception, et plus généralement les politiques de promotion de l’économie circulaire en Europe, proposent de réconcilier économie industrielle et durabilité.

Les récentes révélations au sujet de la destruction de marchandises pratiquée par Amazon (2) ou des grands groupes textiles (1) ont scandalisé une opinion publique européenne sensibilisée tant aux enjeux écologiques qu’à l’expérience de la paupérisation.

Si de l’avis de nombreuses associations, l’économie circulaire n’occupe pas encore la place qui lui est due dans l’agenda politique, les acteurs du monde économique se félicitent déjà de l’action européenne en la matière. La Commission Européenne s’est en effet vue remettre le prix de l’économie circulaire 2019 au sommet de Davos (4), pour son paquet « Economie circulaire » adopté en 2015 et prévoyant 54 mesures pour rationaliser la gestion des produits et des matériaux.

L’économie circulaire concentre donc de nouveaux espoirs en Europe : elle pourrait non seulement permettre la création de filières industrielles innovantes, mais aussi contribuer à la densification et à la réindustrialisation du tissu économique européen tout en permettant de respecter les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Selon un rapport récent du cabinet McKinsey, l’économie circulaire pourrait représenter pour l’Europe une croissance additionnelle de 0,6 point et jusqu’à 48 pour cent de réduction des émissions de CO2 (3).

Sources :

  1. FERRIER M., Why does Burberry destroy its products and how is it justified ?, The Guardian, 20/07/2018.
  2. Gaspillage : comment Amazon détruit et jette des millions d’objets neufs chaque année, Latribune.fr, 14/01/2019.
  3. La Commission Européenne sacrée chef de file de l’économie circulaire au Forum économique mondial, NewsPress, 28/01/2019.
  4. Growth within : A circular economy vision for a competitive Europe, McKinsey, juin 2015.
  5. The Universal Declaration of Material Rights, Turntoo, 2015.

Matteo Riviera