Strasbourg. Après douze mois de travaux, le Parlement européen a adopté la semaine passée à Strasbourg le rapport conclusif de la Commission spéciale Pesticides. Très attendu, ce rapport d’initiative est venu pointer les failles du processus européen d’autorisation des produits phytosanitaires. La confidentialité des études fournies par les industriels, l’opacité des décisions et les lacunes des évaluations scientifiques, ont notamment été attaqués par les parlementaires européens.

Ces derniers ont proposé en retour une série d’améliorations. Le texte voté prône notamment un meilleur accès à l’information et une transparence accrue tout au long du processus, grâce à l’inscription des études de l’industrie dans un registre accessible à tous, à la publication de procès-verbaux détaillés des décisions prises au sein de la Commission ainsi que des justifications précises de l’utilisation du principe de précaution.

En outre, les parlementaires soulignent une fois encore le besoin de renforcer le budget des agences sanitaires en charge de l’autorisation des produits : l’EFSA (Agence Européenne de Sécurité Alimentaire) et l’ECHA (Agence Européenne des produits Chimiques) qui manquent de moyens pour accomplir au mieux leurs missions.

En ce qui concerne le glyphosate, le conseil scientifique devra réexaminer toutes les études disponibles concernant son effet cancérogène probable.

Ces conclusions semblent pour autant n’être que le début d’un nouveau chapitre sur l’évaluation des pesticides en Europe. En effet, des travaux (2) publiés en parallèle du vote sont venus confirmer la présence de plagiat dans le dossier de renouvellement du glyphosate. Dans ce dossier, dont était en charge l’agence d’évaluation des risques allemande (BFR), 50 % de l’évaluation des études indépendantes étaient en réalité plagiés sur les documents fournis par la Glyphosate Task Force (Coalition d’entreprises demandant la réautorisation du Glyphosate).

Prétendre être l’auteur de propos en provenance de l’industrie est scientifiquement discutable, mais lorsqu’en plus ce plagiat mène l’autorité sanitaire à mettre de côté des études probantes quant aux effets cancérogènes probables du glyphosate (1), c’est la crédibilité de ces conclusions qui est mise en question.

L’Europe a donc encore du chemin à faire pour clarifier son système d’autorisation des pesticides et rétablir un sas d’indépendance entre industrie et agences sanitaires.

Perspectives :

  • Prise en compte des recommandations du Parlement européen et modifications du processus d’autorisation des pesticides par la Commission.
  • Possible commission d’enquête sur le plagiat de l’agence d’évaluation des risques allemandes (BFR).
  • Évaluation par la Commission de la possibilité de charger l’EFSA de rechercher la littérature indépendante.

Sources :

  1. GREISER Eberhard, Statement by official expert Prof. Dr Eberhard Greiser to the public “Glyphosate” hearing, 28 September 2015, p.11.
  2. WEBER Stefan, BURTSCHER-SCHADEN Helmut, Detailed Expert Report on Plagiarism and superordinated Copy Paste in the Renewal Assessment Report (RAR) on Glyphosate, 2019.