Caracas. Les nouvelles mesures économiques prises une semaine après le début du second mandat de Maduro ne semblent pas susciter beaucoup d’espoir chez les Vénézuéliens. Quatre jours après son entrée en fonction, le président a annoncé une augmentation du salaire minimum à 18 000 bolivars souverains, soit l’équivalent de six dollars par mois. La forte crise économique que traverse le pays a décrédibilisé la gestion socialiste du gouvernement et creusé les inégalités sociales qui, en 2012, ont atteint des taux similaires à ceux des années 19901 et se sont aggravées entre 2008 et 2014 (-0,1 dans l’indice Gini)2.

La légitimité du second mandat de Maduro a été remise en question par l’opposition vénézuélienne et l’opinion publique internationale, qui ne reconnaissent pas les résultats des élections de mai 2018. Ces élections ont été convoquées par une Assemblée illégitime après deux manœuvres de Maduro pour discréditer l’opposition et assurer son triomphe en rendant impossible toute supervision des élections par la communauté internationale. Une autre polémique a été déclenchée par le président au moment de prêter serment, il y a un peu plus d’une semaine, devant la Cour suprême de justice et non devant l’Assemblée nationale (comme en dispose la Constitution) parce que cette dernière est accusée d’« outrage à la justice ».

Depuis la création du Groupe de Lima par quatorze pays américains en 2017 pour structurer la position continentale vis-à-vis du Venezuela, peu de gouvernements de la région restent fidèles à ce qui fut autrefois le « grand frère » vénézuélien. Dans ce nouveau paysage géopolitique, seuls les présidents de la Bolivie, du Nicaragua, de Cuba et du Salvador ont assisté à la cérémonie d’inauguration et demeurent des soutiens du président Maduro. De leur côté, les gouvernements de la Russie, de la Chine, de la Turquie et de l’Iran ont envoyé des représentants diplomatiques. Le Mexique, également membre du Groupe de Lima, mais qui a joué un rôle de médiateur dans le dialogue avec l’opposition vénézuélienne depuis 2017, a envoyé le chargé d’affaires de son ambassade au Venezuela, démontrant ainsi qu’il est un des rares pays d’Amérique latine capable de jouer le rôle d’interlocuteur devant la communauté internationale en raison de la sympathie politique entre le gouvernement vénézuélien et le président récemment élu Andrés M. López Obrador.

Pour ce nouveau mandat (2019-2025), Maduro est d’ores et déjà confronté à une dynamique intérieure insoutenable qu’il ne pourra probablement pas inverser compte tenu de la détérioration structurelle de la politique économique et sociale, de la chute du prix du pétrole, du manque de soutien international et des sanctions imposées par les Etats-Unis et l’Union européenne3. La crise vénézuélienne a des effets directs sur la géopolitique régionale, tant diplomatiquement que socialement, avec l’apparition de mesures de sécurisation dans les pays frontaliers pour se protéger des flux migratoires vénézuéliens qui continuent à se disperser à travers le continent.

Perspectives :

  • Des pays comme le Paraguay, le Chili et l’Argentine ont annoncé la rupture des relations diplomatiques avec le Venezuela. Souhaitant le retour de la démocratie au Venezuela, il faudra suivre les stratégies qu’ils poursuivent pour atteindre cet objectif, au-delà de l’isolement international.
  • Le 14 janvier 2019, Nicolás Maduro a présenté le Plan de la Patria 2019-2025 qui propose entre autres la réduction du taux de chômage et le renforcement des programmes alimentaires. Encore une fois, ce document montre les aspirations sans définir les mécanismes pour y parvenir.
  • Le faible degré d’institutionnalisation des organisations régionales telles que l’UNASUR et le Mercosur limite fortement la pression des pays de la région sur le gouvernement vénézuélien pour qu’il respecte ses engagements en termes de démocratie et de droits de l’homme. Il reste à observer les éventuelles actions du Groupe de Lima soutenues par les organisations multilatérales.
Sources
  1. Observatoire politique de l’Amérique latine (OPALC), IEP, Paris. Venezuela, nos indicateurs.
  2. Comisión Económica para América Latina y el Caribe (CEPAL), Panorama Social de América Latina, 2017.
  3. Union Européenne, Venezuela : La UE renueva sanciones por un año, 6 novembre 2018.