Oslo. Le fait que la Norvège et le reste de la Scandinavie considèrent la Russie comme une menace potentielle n’a rien de nouveau. Mais le discours prononcé le 7 janvier dernier par le Ministre norvégien de la Défense, Frank Bakke-Jensen, a surpris par sa dureté et par l’obscurité avec laquelle il a décrit les relations entre son pays et Moscou1 .

S’adressant à un auditoire composé de hauts responsables militaires et d’experts en défense de la Société Militaire, le ministre a utilisé des tons inhabituellement directs et explicites, accusant le Kremlin de miner l’unité de l’Occident et la coopération internationale. De plus, depuis l’annexion de la Crimée en 2014, Moscou aurait eu une attitude défiante vis-à-vis de l’Occident et à ses institutions, ce qui “a des conséquences négatives pour la sécurité de la Norvège et de ses alliés”.

Le discours de Bakke-Jensen s’inscrit dans un contexte de militarisation croissante de la région : depuis l’an dernier, la Norvège accueille 400 marines américains dans le camp nord de Setermoen, en plus des 300 unités logées à Værnes (au centre du pays) depuis début 2017. Cette décision a contrarié le président Poutine, qui a parlé d’une croissante pression de l’OTAN dans la région. D’autre part, en septembre dernier, la Russie a organisé les plus grands exercices militaires jamais effectués dans l’Arctique (en collaboration avec la Chine) dans lesquels 300 000 soldats étaient impliqués2 .

La Russie et l’OTAN ont tous deux tendance à rejeter la responsabilité de la montée des tensions sur l’autre camp et à décrire leurs propres actions comme défensives. Il n’est donc pas surprenant que Bakke-Jensen décrive le rôle montant de l’OTAN en Europe du Nord comme une réponse à la situation géopolitique. Pour la même raison, le ministre a confirmé que les dépenses de la défense de la Norvège – déjà augmentées de 30 % au cours des cinq dernières années3 – continueront à augmenter.

Perspectives :

  • Dans son rapport annuel, l’Agence de Sécurité danoise a également souligné les risques associés à l’activisme russe et à la militarisation croissante de la région4 .
  • De la part de l’OTAN, la démonstration de force la plus impressionnante a sans aucun doute été l’exercice Trident Juncture 18, qui, d’octobre à novembre dernier, a impliqué 50 000 unités5 .
  • La militarisation croissante de la région n’a pas, à ce jour, sapé le climat de coopération substantielle entre les pays arctiques, mais reste un signal d’alarme pour l’avenir.

Sources :

  1. Danish Defence Intelligence Service, Intelligence Risk Assesment 2018.
  2. MARSON J., NATO Exercise Sends Warning to Russia, Message to Members, The Wall Street Journal, 30/10/2018.
  3. North Atlantic Treaty Organization, Trident Juncture 18, 25/10/2018.
  4. STAALESEN A., “Russia is our biggest concern”, The Barents Observer, 09/01/2019.
  5. Russia begins its largest ever military exercise with 300,000 soldiers, The Guardian & Agence France-Presse, 11/09/2018.

Luca Lottero

Sources
  1. STAALESEN A., “Russia is our biggest concern”, The Barents Observer, 09/01/2019.
  2. Russia begins its largest ever military exercise with 300,000 soldiers, The Guardian & Agence France-Presse, 11/09/2018.
  3. MARSON J., NATO Exercise Sends Warning to Russia, Message to Members, The Wall Street Journal, 30/10/201
  4. Danish Defence Intelligence Service, Intelligence Risk Assesment 2018
  5. North Atlantic Treaty Organization, Trident Juncture 18, 25/10/2018.