Berlin. Si le salaire minimum est revalorisé tous les deux ans (6), le gouvernement fédéral a décidé dans une ordonnance du 31 octobre 2018 de mettre en place une hausse graduelle au titre de l’année 2019 (5). Ce faisant, il a suivi les recommandations que la commission en charge du salaire minimum lui avait faites le 26 juin 2018 (3). En 2020, le salaire minimum passera ainsi de 9,19 à 9,35 euros bruts de l’heure.

La hausse graduelle est une première depuis l’introduction du salaire minimum, puisque la dernière revalorisation s’était faite en une seule fois. Selon la Commission en charge du salaire minimum, il s’agit de préparer les employeurs à une augmentation du coût de la main-d’œuvre (1). Au moment d’introduire le salaire minimum, le coût de la main-d’œuvre fut en effet un véritable point de discorde.

Environ 4 millions d’employés seraient concernés (2) par cette hausse globale de 5,8 %, jugée insuffisante par certains syndicats et personnalités politiques. En octobre dernier, le ministre fédéral des finances, Olaf Scholz, appartenant à la SPD, a ainsi affirmé qu’un salaire minimum de 12 euros de l’heure serait décent (4).

De même que le montant du salaire minimum, le respect de la loi par l’employeur est un sujet de préoccupation pour les syndicats. En effet, l’institut allemand pour la recherche économique estime qu’en 2016, 1,8 million d’employés (7) avaient un salaire inférieur au seuil minimal, alors qu’ils devaient bénéficier du salaire minimum.

À l’heure où le mouvement des gilets jaunes fait des émules en Allemagne (8), on peut se demander si une revalorisation du salaire minimum tous les deux ans, ainsi que cela est prévu par la loi, est encore adéquate. De plus, si un conflit social majeur a lieu cette année en Allemagne, la hausse graduelle du salaire minimum apparaîtra vite inadaptée. C’est d’ailleurs ce qu’on a pu voir en France avec les protestations des gilets jaunes. Le SMIC a certes été revalorisé en tenant compte de l’inflation, mais à cela il faut ajouter que la prime d’activité a été revalorisée de façon exceptionnelle, en appliquant dès février les augmentations prévues pour avril 2019 et pour 2020. La prime d’activité n’est pas comparable au SMIC, il est vrai, mais elle bénéficie à une partie des travailleurs au SMIC. Cette revalorisation de la prime d’activité, qui a été assimilée à tort par le gouvernement à une augmentation du SMIC, n’a pas suffi à éteindre le conflit. A fortiori, on peut penser qu’une augmentation graduelle du salaire minimum en Allemagne, qui tient compte de l’inflation, ne suffira pas à éteindre un conflit s’il se présente.

Perspectives :

  • Sachant que la conjoncture économique en Allemagne est favorable et que les craintes exprimées par les organisations d’employeurs au moment de l’introduction du salaire minimum ne se sont pas réalisées, les revendications des syndicats en Allemagne et des manifestants seraient probablement accueillies en cas de conflit social majeur

Sources :

  1. Commission en charge du salaire minimum, Avis de la commission du 26 juin 2018, p. 3.
  2. Commission en charge du salaire minimum, Deuxième rapport sur les effets du salaire minimum, p. 54, 26/06/2018.
  3. Commission en charge du salaire minimum, Zweiter Beschluss und Bericht 2018, 26/06/2018.
  4. « Zwölf Euro Mindestlohn sind angemessen », Frankfurter Allgemeine Zeitung, 31/10/2018.
  5. Gouvernement fédéral allemand, Mindestlohn steigt, 20/11/2018.
  6. Article 9 alinéa 1er du Mindestlohngesetz (MiLoG).
  7. RÖVEKAMP Marie, Nicht einmal das Mindeste zahlen, Der Tagesspiegel, 25/01/2018.
  8. VU Vanessa, Hundert gelbe Weste, Die Zeit, 18/12/2018.

Ingrid Kis