Wiesbaden. Située au carrefour entre la Rhénanie et la Bavière, traversée par le Main, la Hesse est une des régions les plus riches d’Allemagne. Darmstadt, Wetzlar, Wiesbaden, Kassel, et surtout Francfort-sur-le-Main sont des centres industriels, technologiques et financiers d’envergure mondiale. Outre les sièges de la plupart des grandes banques allemandes, la Hesse accueille aussi les usines Opel (à Rüsselsheim), les géants de l’industrie pharmaceutique allemande, la Banque centrale européenne ou encore le centre de contrôles de l’Agence spatiale européenne, l’ESA (à Darmstadt). En outre la région est un noeud de communication très important : l’aéroport de Francfort est le plus grand d’Allemagne et le 4e d’Europe, et le trafic ferroviaire et fluvial est intense.

Aujourd’hui et depuis 2013, la CDU gouverne la Hesse avec les Verts dans une coalition “noire-verte”, qui fut alors la 1ère expérience du genre. Le ministre-président Volker Bouffier est un poids lourd des chrétiens démocrates. A 66 ans, il a présidé le Bundesrat (conseil des représentants des Länder) et occupe actuellement le poste de vice-président de la CDU. Cependant son parti est presque assuré de perdre environ 10 points de pourcentage aux élections régionales du 28 octobre (2). Bouffier, suffisamment modéré pour faire alliance avec les Verts, est un proche de Merkel, et la chancelière a beaucoup à perdre en cas de déroute trop importante la semaine prochaine.

À l’inverse, les Verts ne semblent pas affectés par leur participation au gouvernement depuis cinq ans et caracolent à nouveau dans les intentions de vote (20 pour cent) portés par leur tête de liste, l’actuel ministre de l’économie et numéro 2 du gouvernement, Tarek Al-Wazir. Au contraire, le SPD, dans l’opposition régionale depuis 1999, chuterait de 30 pour cent à 21 % des suffrages. La structuration du paysage politique allemand en deux partis de masse (“Volksparteien”), CDU/CSU et SPD, suivis par plusieurs petits partis (“Kleinparteien”) semble de plus en plus remise en cause (4). Ainsi l’AfD va sans doute faire son entrée dans le parlement régional, un des derniers qui ne comptait pas sur ses bancs le parti d’extrême droite. Ils devraient constituer la 4e force avec plus de 10 pour cent des suffrages.

Même si la défaite subie par la CSU en Bavière dimanche dernier a été moins grave qu’initialement prévue (3), la campagne en Hesse a revêtu un caractère stratégique pour les chrétiens démocrates. La secrétaire générale du parti a affirmé juste après la soirée électorale bavaroise “tout tournera autour de la Hesse durant les deux semaines à venir” (1). Les séries noires au niveau régional pour un parti au pouvoir annoncent souvent un coup de tonnerre aux élections nationales suivantes. En 2017 avant les élections fédérales, le SPD avait perdu le contrôle de plusieurs Länder, rendant la campagne nationale plutôt morose. À la CDU/CSU et chez les sociaux-démocrates, les voix s’élevant contre la grande coalition vont devenir difficiles à ignorer.

Perspectives :

• 28 octobre 2018 : élections régionales en Hesse.
• La tendance allemande qui se dessine au niveau local pourrait aussi être celle des élections européennes de 2019. Au lieu de constituer deux blocs dominants de gauche et de droite, les électeurs pourraient donner forme à un système à 4 ou 5 partis de forces comparables.

Sources :

  1. Annegret Kramp-Karrenbauer : CDU will sich auf Hessen konzentrieren, Die Zeit, 15 octobre 2018.
  2. Grüne im Höhenflug, CDU und SPD rutschen ab, Hessenschau, 19 octobre 2018.
  3. HUBLET François, Une volée de bois vert pour la CSU, les socio-démocrates plongent et les Électeurs libres jubilent, La Lettre du Lundi, 14 octobre 2018.
  4. KIRCHER Ruth, Zukunft der Grünen. Auf dem Weg zum Volkspartei ?, Tagesschau, 19 octobre 2018.