Ankara. Le 14 juillet 2004, l’adoption de la loi N° 5218 a définitivement permis l’abolition de la peine de mort en Turquie, où aucun prisonnier n’a été exécuté depuis octobre 1984 (4). Le pays a également signé le protocole N° 13 de la Convention européenne des droits de l’homme, qui prévoit l’abolition de la peine de mort en toute circonstance (3), devenant ainsi un candidat nettement plus éligible à l’adhésion à l’Union. Aujourd’hui, alors que cela fait 34 ans que la peine capitale n’existe plus de fait et 14 ans qu’elle a disparu du droit, l’abolition est remise en cause.

La tentative de putsch du 15 juillet 2016 a agi comme un catalyseur sur la société turque : une partie de l’opinion a revendiqué le rétablissement de la peine capitale, en défilant notamment dans les rues avec le slogan “İdam isteriz !” (“Nous voulons la peine de mort”) et une maquette de Fethullah Gülen, le coupable présumé du coup d’État, pendue par le cou (2). De vives discussions surtout r le sujet ont repris lorsque le président Erdoğan a défendu le rétablissement de la peine de mort après l’assassinat de Nurcan Karakaya et son bébé de 11 mois à Hakkari par des terroristes : suite à ces événements, Recep Tayyip Erdoğan s’était affirmé prêt à signer la loi sur le rétablissement de la peine de mort si elle passe au Parlement (7). Or, la Turquie demeure divisée. Une partie de la population se positionne activement contre la peine capitale, risquant même parfois d’être accusée de traîtrise. Par exemple, le vice-président du Parti républicain du peuple (Cumhuriyet Halk Partisi : CHP), Özgür Özel, a récemment fait le lien entre l’absence de la peine capitale et le fait d’être dans une vraie démocratie (6).

Quels seront les effets du retour de la peine de mort sur les relations déjà réduites entre la Turquie et l’Union ? Le président Erdoğan semble insoucieux de ses conséquences : selon ses mots, le seul consentement dont il a besoin est celui de Dieu – ni celui de Hans ni celui de George (1).

Perspectives :

  • Aucun agenda n’a été fixé. Seul le président du Parti de la grande unité (Büyük Birlik Partisi : BBP) et député AKP d’Ankara Mustafa Destici a affirmé qu’il proposera d’en débattre au Parlement en octobre 2018 (5). Selon Mustafa Destici, le retour de la peine capitale devrait viser les terroristes et les violeurs.

Sources :

  1. Cumhurbaşkanı Erdoğan’dan idam açıklaması, Anadolu Ajansı, 1er août 2018.
  2. Türkiye idam cezasını geri getirebilir mi ?, BBC Türkçe, 1er août 2018.
  3. Ce protocole peut être consultée sur le site officiel de la Cour européenne des droits de l’homme.
  4. Cette loi peut être consultée sur le site officiel de la Grande Assemblée Nationale de Turquie (Türkiye Büyük Millet Meclisi : TBMM).
  5. BBP’den son dakika idam açıklaması : Ekim ayında Meclis’e sunacağız, Hürriyet, 5 août 2018.
  6. CHP’li Özel : İdama karşıyız, Hürriyet, 7 août 2018.
  7. Erdoğan : İdam cezası için atacağımız adım yakındır, T24, 1er août 2018.