Damas. Dans la nuit du vendredi 20 au samedi 21 juillet, la France et la Russie ont mené une opération humanitaire conjointe vers une ancienne enclave rebelle, reprise par le régime depuis le début du printemps. La séquence est passée relativement inaperçu dans la presse, mais indique peut-être un tournant dans les relations entre Européens et Russes sur la question du conflit syrien (2). Ainsi, cinquante tonnes de matériel médical ont été acheminées de la France vers la base russe de Hmeinim en Syrie. Une aide humanitaire destinée au quartier de la Ghouta orientale et distribuée sous la supervision du Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies. Le montant du matériel médical, qui s’élèverait à 400 000 euros, est à destination des nombreux blessés, victime des combats qui ont eu lieu en mars et en avril dernier (1). Combats qui se sont soldés par la victoire des forces pro-régimes sur celles des rebelles.

L’annonce de cette opération humanitaire a de quoi surprendre, mais elle fait suite aux deux déplacements du président Macron en Russie, en mai dernier au forum de Saint-Pétersbourg et lors du mondial de football. Deux visites marquées par la volonté française de trouver des accords avec la Russie sur le dossier syrien. Paris semble avoir pris acte des victoires militaires de l’armée syrienne et souhaite avoir son mot à dire dans les futures négociations politiques.

C’est une première dans le camp des Occidentaux, toujours largement opposés à l’idée de voir Assad conserver le pouvoir en Syrie et hostiles aux négociations avec le régime et son allié russe. Cependant, froissée par les États-Unis de Donald Trump et un Royaume-Uni en cours de Brexit, la France a toutes ses chances d’amener l’Union sur ses nouvelles positions concernant le conflit syrien et laisse entrevoir d’autres collaborations avec la Russie. Les dirigeants russes semblent ouverts aux discussions avec les européens dans le processus de paix, tout en voulant conserver la main sur les événements futurs en Syrie. Bien que le ton ai changé entre Moscou et Paris, le Quai d’Orsay tempère et affirme qu’il s’agit d’une mission humanitaire et non d’une affaire politique.

Perspectives :

  • Début septembre : Prochaine rencontre dans le cadre du “processus de Genève”. Lors des prochaines rencontres, un rapprochement entre les positions russe et européenne permettrait peut-être d’ouvrir la voie à des accords entre les différents camps syriens.
  • Prochaine rencontre dans le cadre du “processus d’Astan” : en cas d’échec du processus de Genève, Paris pourrait espérer à moyen terme pouvoir faire parti des observateurs du sommet.

Sources :

  1. ABGRALL Thomas, Syrie : une mission humanitaire commune pour réchauffer les relations franco-russes, France 24, 27 juillet 2018.
  2. FILIU Jean-Pierre, La France dans le piège russe en Syrie, 22 avril 2018.