Bruxelles. Jeudi, en parallèle du sommet de l’Otan, se tenait le conseil Energie UE-USA. Au lendemain des déclarations de Trump contre Nord Stream 2, le secrétaire à l’Énergie Rick Perry y a promu le GNL américain. Le président « pense que Nord Stream 2 n’est pas dans le meilleur intérêt de l’Union européenne et je parie qu’il sera plus que satisfait de le dire au président Poutine » ce lundi, a-t-il affirmé. « Le président a souvent évoqué le concept de ‘l’Amérique d’abord’ mais ne vous trompez pas. Cela ne veut pas dire ‘l’Amérique toute seule’. Cela veut dire que quand vous pensez à un nouveau fournisseur sur le marché, que vous pensez à un nouveau partenaire innovant, nous voulons que vous pensiez d’abord à l’Amérique » a expliqué Rick Perry, révélant ainsi l’approche politique qu’ont les États-Unis du marché gazier européen, faisant fi de l’intérêt économique de l’acheteur (1).
Maros Sefcovic, le vice-président de la Commission européenne en charge de l’Union de l’Énergie, soutient que le GNL américain « pourrait changer la donne dans l’effort de diversification et de renforcement de la sécurité énergétique ». Pour autant, ce changement ne surviendra pas demain. En effet, les terminaux concernés que sont, par exemple, ceux de la Pologne et de la Lituanie sont de taille réduite, 5 bcm (milliards de mètres cubes) chacun, alors que le projet de terminal croate ne fait que 2 bcm. Par comparaison le projet Nord Stream 2 est de 55 bcm.
Les auteurs d’American gas to the rescue ? The impact of US LNG exports on european security on russian foreign policy (2) expliquent que les exportations états-uniennes de GNL vers l’Europe s’inscrivent dans une stratégie à long terme, car l’évolution de la production américaine a renforcé la position européenne permettant aux Européens de renégocier certains contrats. En forçant Gazprom, entreprise étatique, à baisser ses prix, le GNL états-unien pourrait porter un coup direct aux moyens financiers russes. Pourtant, au premier trimestre, la part du GNL américain était de 1 % du total des importations de GNL de l’Union, contre 6 % à la même période il y a un an. Cela s’explique par l’attractivité, pour les entreprises américaines, des marchés GNL asiatiques et sud-américains, bien plus lucratifs que le marché européen. La compétitivité supérieure de ces marchés n’est pas une situation nouvelle et explique en partie la faible utilisation des terminaux GNL européens. Le taux moyen d’utilisation des terminaux GNL en Europe était de 53 % en 2010 puis a encore diminué à 25 % en 2013, avant d’atteindre 19 % en 2014, la moyenne mondiale était de 33 %.
Perspectives :
- L’évolution des exportations GNL des Etats-Unis vers l’Europe sera à observer au fur et à mesure que l’UE comblera ses lacunes en matière d’installations GNL en Europe centrale et orientale.
Sources :
- Les Etats-Unis font la promotion du gaz américain auprès de l’UE, AFP, 12 juillet 2018.
- BORDOFF Jason et HOUSER Trevor, American gas to the rescue ? The impact of US LNG exports on european security on russian foreign policy , Columbia|SIPA Center on Global Energy Policy, 2014.