Taishan. Le premier EPR opérationnel au monde est en cours de mise en service à Taishan, dans la province du Guangdong, au sud-est de la Chine (1). Cet European Pressurized Reactor est un système de production d’électricité par fission nucléaire de 3e génération.
Il s’agit à l’origine d’un projet franco-allemand post-Tchernobyl co-mené par Siemens et Framatome. Un réacteur EPR atteint une puissance nette de 1660 MW – par comparaison, un réacteur de seconde génération atteignait une puissance nette de l’ordre de 1450 MW (2). L’Autorité de sûreté nucléaire chinoise a annoncé en avril qu’elle autorisait le chargement en combustible du réacteur qui est donc actuellement en cours (1). Il s’agit du plus important contrat commercial pour l’industrie nucléaire française (3).
Fruits d’un contrat de construction entre la CGN – China General Nuclear Power Corporation – et Areva signé en 2007, les réacteurs EPR du Guangdong sont en chantier depuis 2009. Le projet est dirigé par une coentreprise détenue à 70 % par la CGN et à 30 % par le groupe EDF (3) qui a acquis la filiale d’Areva regroupant les activités autour des réacteurs en 2016 (4).
Premier marché du nucléaire civil mondial dans un contexte de diminution de la part du charbon dans son mix énergétique – 62 % en 2016, le taux le plus bas enregistré depuis le milieu des années 2000 où cette part atteignait 74 % (5) – la Chine représente un terrain d’avenir pour la technologie européenne EPR, même si le retard de 4 ans accumulé par le chantier de Taishan a favorisé l’émergence d’une concurrence américaine. Mais le groupe EDF a su conserver son avance et doit maintenant prouver la pertinence de sa technologie afin de pérenniser sa présence en Chine. Cet objectif est à mettre en perspective avec le projet EPR d’Olkiluoto en Finlande, où les retards de construction et les surcoûts ont placé Areva en grande difficulté et l’ont menée à une restructuration profonde. À Taishan, ce partenariat franco-chinois souligne la forte volonté de Pékin de développer son parc en s’appuyant sur des technologies de dernière génération. Cependant, la CGN et la CNNC – China National Nuclear Corporation – ont démarré en 2015 leur propre projet, Hualong-1, ouvertement destiné à concurrencer EPR (6).
Si les entreprises chinoises possèdent une capacité financière avantageuse, le groupe EDF conserve une expertise et une expérience aguerries. La concurrence est donc complémentaire dans le cadre de projets communs, mais présage tout de même un rapport de force croissant à l’avenir. L’objectif de la Chine est d’acquérir sa propre expertise grâce au transfert de technologies, et le marché chinois en matière d’énergie est désormais très concurrentiel pour la France particulièrement face à la Russie – Atomstroyexport – et aux États-Unis, ces derniers ayant manqué de peu la possibilité de mettre en service le premier EPR avec l’achat par la Chine du réacteur 3e génération REP AP1000 au groupe Westinghouse. Il aurait dû être mis en service début 2018, mais l’Autorité de sûreté nucléaire chinoise a mis fin à la procédure pour effectuer de nouveaux tests de sûreté (7).
Perspectives :
- Fin 2018 : mise en service du premier réacteur EPR à Taishan.
- 2019 : mise en service du second réacteur EPR à Taishan.
Sources :
- BP Statistical Review 2017, “China’s energy market in 2016” .
- Communiqué de presse, “EDF et Areva signent les accords engageants pour la cession des activités d’Areva NP”, EDF, 16 novembre 2016.
- Site officiel Framatome, “Grands projets, Taishan 1 & 2”.
- “Chine : nouveau retard pour le réacteur AP1000”, Le Figaro et AFP, 13 février 2018.
- Revue Générale Nucléaire, “Taishan : feu vert pour le chargement du combustible du premier EPR”, Société Française d’Énergie Nucléaire, 16 avril 2018.
- SCHAEFFER Frédéric, “Nucléaire : la Chine prêt à mettre en service le premier EPR au monde”, Les Echos, 9 janvier 2018.
- World Nuclear Association, “Taishan 1, China”.