Washington. Plus d’un an après le début des négociations, le processus de révision de l’Accord de libre-échange nord-américain (Alena) entre les États-Unis, le Mexique et le Canada a pris fin le 30 septembre. L’accord entre Washington et Ottawa fait suite à celui déjà signé entre le premier et Mexico à la fin d’août. Le nouvel accord trilatéral, qui réglemente un échange commercial de 1 200 milliards de dollars, abolit l’ancien nom en le remplaçant par Usmca, c’est-à-dire l’accord États-Unis-Mexique-Canada.

Bien que l’Usmca maintienne l’esprit de libre-échange régional établi par l’Alena en 1994, elle comporte certains changements importants par rapport à son prédécesseur. Comme les médias l’ont déjà largement rapporté, l’Usmca met à jour plusieurs clauses régissant les marchés de l’automobile, du lait et de l’agriculture entre les trois signataires (4). Dans chacun de ces domaines, il semble que ce sont les États-Unis, et en particulier la figure de Trump, qui ont globalement bénéficié de la révision de l’accord (3). En effet, le Canada et le Mexique, considérant les exportations vers leurs voisins américains comme un stimulant vital pour leur propre croissance économique et leur prospérité, ont préféré faire des concessions, même importantes, plutôt que de mettre en péril le commerce avec le marché américain. De ce fait, il est significatif que l’Usmca ne prévoit pas l’exemption pour le Canada ou le Mexique des droits sur l’aluminium et l’acier imposés par l’administration Trump dans un passé récent.

L’Usmca réglementera alors également le commerce numérique, dans la lignée du Partenariat transpacifique, déjà rejeté par le président américain. Plus important encore est l’ajout d’une clause qui pourrait avoir un impact significatif sur la souveraineté de chacun des signataires et qui pourrait mettre en péril la survie à long terme de l’Usmca ; cette clause donne à chaque membre le droit de veto sur les accords de libre-échange conclus par d’autres avec des pays tiers. Cela pourrait être une condition préalable à la dénonciation de l’Usmca et à sa transformation en un ou plusieurs accords bilatéraux (2).

Perspectives :

  • Selon les procédures de négociation des accords commerciaux approuvées par le Congrès en 2015, le président Trump dispose de 60 jours à compter de la signature de l’Usmca pour informer le Congrès du contenu de l’accord et de son impact sur la législation existante. Dans les 105 jours suivant la signature de l’accord, la Commission du commerce international (Itc) des États-Unis doit réaliser une étude sur l’impact économique de l’accord. Le texte de l’Usmca a été publié par l’administration Trump le 1er octobre, ce qui signifie que d’ici la fin novembre, le Congrès doit exprimer son approbation, ce qui semble probable, ou le rejeter.
  • Trump a déclaré que l’Usmca “est le plus grand accord jamais signé dans l’histoire des États-Unis”. En outre, selon des sources internes au sein de l’administration, l’Usmca “deviendra le modèle” pour Washington dans la négociation et la signature des “futurs accords commerciaux” (1). À la lumière de l’accord conclu en juillet entre Juncker et Trump, cela affectera également l’Union. En particulier, Bruxelles devra tenir compte du modus operandi purement bilatéral des États-Unis, qui vise à affirmer son poids économique en assurant une interface individuelle avec les États membres. Cela annulerait le contrepoids offert par l’Union et le marché commun.

Sources :

  1. CAPORAL Jack Caporal, REINSCH William Alan, From NAFTA to USMCA : What’s New and What’s Next ?, Center for Strategic and International Studies, 3 octobre 2018.
  2. CHIN Jessica, USMCA Contains ‘Unprecedented’ Clause Giving U.S. Veto Over Canadian Trade Deals, The Huffington Post, 4 octobre 2018.
  3. LONG Heather, USMCA : Who are the winners and losers of the ‘new NAFTA’ ?, The Washington Post, 1 octobre 2018.
  4. MURPHY Jessica, SHERMAN Natalie, USMCA trade deal : Who gets what from ‘new Nafta’ ?, BBC, 1 octobre 2018.