Mardi dans l’après-midi, des explosions ont eu lieu dans la ville polonaise de Przewodów, à quelques kilomètres de la frontière avec l’Ukraine. Deux personnes ont été tuées. 

Les explosions semblent avoir été provoquées par des missiles russes. On ignore toutefois pour le moment si les missiles ont été tirés intentionnellement vers la Pologne par la Russie.

Le contexte. La Russie aujourd’hui a frappé avec environ 90 missiles plusieurs villes, y compris Kiev, en ciblant en particulier les infrastructures énergétiques ukrainiennes. La violence et l’étendue de l’attaque a produit des black-out jusqu’en Moldavie. Selon les autorités, 10 milions d’Ukrainiens seraient actuellement sans électricité.

Cette attaque semble être une réaction à la libération de la ville de Kherson par les forces armées ukrainiennes. Le président Zelensky venait de s’y rendre lundi. Il avait déclaré que la libération de la seule capitale régionale capturée par la Russie depuis le début de la guerre en février marquait « le début de la fin de la guerre ».

Ce soir, dans son adresse quotidienne, Zelenksy a accusé la Russie d’avoir voulu viser « un territoire de l’OTAN ».

Le Ministère de la défense de la Russie nie toute implication en parlant d’une « provocation délibérée » : « aucune frappe n’a été effectuée contre des cibles proches de la frontière entre l’Ukraine et la Pologne par des moyens de destruction russes. »1

Les réactions internationales. Joe Biden, qui se trouve à Bali pour le G20, a téléphoné au président polonais Andrzej Duda après avoir été informé de l’explosion. Le président polonais a également parlé avec le président ukrainien Vladimir Zelensky, ainsi qu’avec le secrétaire général de l’OTAN Jens Stoltenberg qui affirme suivre « la situation et que les Alliés se consultent étroitement. »

De son côté, Charles Michel vient de proposer l’organisation d’une « réunion de coordination » des pays de l’Union présents au G20 (Allemagne, France, Italie).

En tant que membre de l’OTAN, la Pologne est couverte par la garantie de l’article 5 qui prévoit qu’une « attaque armée » contre l’un des membres de l’alliance sera comprise comme une attaque contre tous les alliés. Toutefois la définition de ce que représente une « attaque armée » (ainsi que de la nature de la réponse) est laissée à la discrétion des alliés.

La Pologne pourrait solliciter l’application de l’article 4 qui prévoit que les pays membres peuvent porter une question à l’attention du Conseil de l’Atlantique Nord (la plus haute instance de prise de décisions politiques de l’OTAN) et l’examiner avec les Alliés. Cet article stipule que : « les parties se consulteront chaque fois que, de l’avis de l’une d’elles, l’intégrité territoriale, l’indépendance politique ou la sécurité de l’une des parties sera menacée »2.

Et maintenant ?

Les ambassadeurs de l’OTAN se réuniront demain matin à Bruxelles. On peut s’attendre à une déclaration réaffirmant la solidarité de l’OTAN avec la Pologne tout en mettant en garde la Russie contre les conséquences de la répétition d’un tel acte.

Il est probable que la Pologne augmente son influence sur la définition géopolitique du front européen, en accédant à certaines demandes, formulées depuis le début de la guerre : installer des armes nucléaires de l’OTAN sur son territoire ; obtenir l’envoi d’armes plus sophistiquées vers l’Ukraine ; installer une défense aérienne renforcée de la frontière et donc de la région. Il est beaucoup moins probable en revanche qu’elle parvienne à obtenir l’imposition d’une no fly zone sur le territoire ukrainien ou qu’elle obtienne l’autorisation de riposter, même si d’une manière proportionnée.

Sources
  1. Минобороны России назвало провокацией заявления о падении « российских » ракет в Польше, Url : https://tass.ru/armiya-i-opk/16335637
  2. Le processus de consultation et l’article 4, Url : https://www.nato.int/cps/fr/natohq/topics_49187.htm