Le nouveau plan quinquennal de la Chine dans les mots de Xi Jinping (traduction inédite)

Pour « écrire un nouveau chapitre dans les annales des miracles de la croissance économique rapide », Xi Jinping puise dans le répertoire maoïste.

Nous traduisons et commentons son Explication du nouveau plan quinquennal au Comité central.

Auteur
Shengyu Wang
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© Shen Hong

Lors du Quatrième Plénum, Xi Jinping a dévoilé le 15e plan quinquennal chinois et son nouveau modèle de gouvernance exigeant. Avant son Explication officielle, des « orientations stratégiques pour la mise en œuvre complète, scientifique et précise de l’esprit du Plénum », signées de la main de Xi, avaient été publiées par les médias officiels chinois. On y lisait ceci : « Toutes les régions et tous les départements doivent adhérer à une approche systémique, agir consciemment dans l’intérêt général et jouer l’échiquier national. Il faut savoir jouer du piano, planifier une région sans oublier l’ensemble, se baser sur le présent sans ignorer le long terme, mettre l’accent sur les points importants sans négliger le reste. »

Dans ce court extrait, deux métaphores puisées dans le répertoire de l’ère Mao donnent une clef de lecture essentielle.

La première, « 全国一盘棋 » (« l’échiquier national »), traduit une vision de coordination absolue — à l’initiative du sommet de l’État.

La seconde, « jouer du piano », évoque la délicate habileté requise pour harmoniser les priorités disparates et parfois contradictoires du système.

La tension entre ces métaphores est immédiatement apparue lorsque Xi, lors de ce même Plénum, a détaillé les thèmes directeurs du prochain 15e plan quinquennal.

Dans son Explication au Comité central du 15e plan quinquennal que nous traduisons ci-dessous, le dirigeant chinois s’est concentré sur l’équilibre entre la croissance économique, une répartition plus équitable des revenus, l’amélioration de la productivité du travail et le développement de ce qu’il appelle les « nouvelles forces productives de qualité ».

Dans ce grand projet centralisé, on trouvait pourtant une directive cruciale et apparemment contradictoire : les cadres locaux doivent mettre en œuvre les réformes en « s’adaptant aux conditions locales » (因地制宜).

Cette juxtaposition met en évidence le paradoxe central de la gouvernance dans cette nouvelle ère qu’ouvre Xi : comment un contrôle stratégique rigide, allant du sommet vers la base, peut-il coexister avec la nécessité d’une prise de décision locale et flexible ?

La résolution de cette contradiction est au cœur du projet politique de Xi.

Pour y parvenir, il faut une coordination nuancée et de haut niveau, comme le suggère sa deuxième métaphore : « jouer du piano ».

Dans son usage maoïste original, tiré du discours de 1949 intitulé « Les méthodes de travail des comités du Parti » (党委会的工作方法), « jouer du piano » était une métaphore pour désigner une gouvernance habile et coordonnée. En 1949, fort de sa victoire dans la guerre civile chinoise, Mao Zedong s’attachait à consolider le pouvoir du Parti communiste, à unifier une nation fragmentée et à entamer la tâche monumentale de la transformation socialiste. Cette métaphore symbolisait le défi consistant à gérer plusieurs tâches complexes sans créer de dissonance politique. 

Mao disait : « Les dix doigts doivent tous bouger, mais pas tous en même temps. Il doit y avoir un rythme et une coordination mutuelle. »

Cette analogie est redevenue d’actualité au plus haut degré de l’État en Chine au moment de l’élaboration de son 15e plan quinquennal.

Les dirigeants locaux sont désormais censés promouvoir simultanément l’autonomie technologique, contrer les effets du déclin démographique et stimuler la consommation intérieure — un ensemble vertigineux d’impératifs concurrents qui doivent être harmonisés en une seule action cohérente.

Xi a réitéré l’objectif de mettre la Chine au niveau d’une économie développée de taille moyenne d’ici 2035. Pour y parvenir, les économistes affirment que la Chine doit maintenir un taux de croissance d’au moins 5 %.

La marge de manœuvre pour les expérimentations locales qui ont historiquement alimenté la croissance reste cependant limitée.

La vente de terrain, principale source de revenus des gouvernements locaux, étant en diminution, ceux-ci dépendent désormais davantage des transferts directs du gouvernement central. Cette dépendance budgétaire est flagrante : en 2025, les transferts financiers du gouvernement central vers les collectivités locales devraient dépasser 10 340 milliards de yuans, et pour de nombreuses provinces, ces fonds représentent plus de la moitié de leurs recettes budgétaires publiques. Cette bouée de sauvetage financière a été stratégiquement transformée d’un outil de péréquation en un instrument de commandement, mettant en œuvre le concept d’« échiquier national unique ». 

Ce changement révèle une tension fondamentale dans l’évolution du modèle de gouvernance chinois. Pendant des décennies, le système a fonctionné comme un « autoritarisme décentralisé au niveau régional » 1, dans lequel les gouvernements locaux dotés de moyens financiers ont transformé des milliers de localités en moteurs de croissance, au prix toutefois d’un surinvestissement important et d’une surcapacité industrielle. Comme le soulignent Neil Thomas et Lobsang Tsering : « Le thème le plus récurrent, et peut-être surprenant, est celui des initiatives de développement régional et local. Xi est à l’origine d’une série de projets d’intégration économique, tels que la région métropolitaine de la Grande Baie de Guangdong-Hong Kong-Macao, la Ceinture économique du Yangtsé et Beijing-Tianjin-Hebei (« Jing-Jin-Ji »). Il a également dirigé d’autres projets régionaux : le port franc de Hainan, la nouvelle zone de Xiong’an et les zones nationales de développement industriel de haute technologie. » 2

Les gouvernements locaux étant désormais dépendants des transferts centraux pour leur budget, le système chinois remplace le problème de l’expansion incontrôlée par un nouveau risque : l’érosion potentielle des initiatives locales nécessaires à une gouvernance flexible et innovante. Pour parvenir à ce compromis fondamental, Pékin doit agir avec prudence. La réalisation de ses objectifs économiques à long terme nécessite en effet de trouver un équilibre entre la nécessité d’un contrôle centralisé et le risque d’étouffer le dynamisme même qui a propulsé l’économie.

La question de savoir si un système politique hautement centralisé peut encore favoriser l’innovation et des choix de développement judicieux est celle sur laquelle Xi Jinping a fait un pari décisif. Face aux tensions commerciales et technologiques avec les États-Unis du moins, celui-ci a rapporté bien plus que nombre d’observateurs ne l’avaient prévu.

Explication des recommandations du Comité central du Parti communiste chinois pour l’élaboration du 15e plan quinquennal pour le développement économique et social national

Camarades,

Au nom du Bureau politique du Comité central du Parti, je vais maintenant vous présenter brièvement le projet de recommandations du Comité central du Parti communiste chinois pour l’élaboration du 15e plan quinquennal pour le développement économique et social du pays.

I. Le processus d’élaboration

L’élaboration de plans à moyen et long terme pour guider le développement économique et social est un moyen important par lequel notre Parti gouverne le pays. Alors que nous achèverons cette année le 14e plan quinquennal (2021-2025), il est nécessaire d’élaborer le 15e plan quinquennal (2026-2030).

La réalisation de cette tâche est d’une importance vitale pour faciliter le développement durable et sain de notre économie et de notre société et pour asseoir la Chine sur des bases plus solides afin de réaliser pour l’essentiel la modernisation socialiste, comme prévu.

En janvier de cette année, le Bureau politique a décidé que le 20e Comité central discuterait des recommandations pour le 15e plan quinquennal lors de sa quatrième session plénière. Un groupe a alors été créé dans le but de rédiger les recommandations sous l’égide du Comité permanent du Bureau politique.

J’étais à la tête de ce groupe, tandis que mes collègues Li Qiang, Wang Huning, Cai Qi et Ding Xuexiang en étaient les vice-présidents. Le groupe comprenait également les responsables des départements et des localités concernés. Le 11 février, le groupe a tenu sa première réunion, après quoi le travail de rédaction a officiellement commencé.

Tout au long du processus de rédaction, le Comité central a suivi une approche démocratique et s’est appuyé sur un vaste réservoir de sagesse, menant des enquêtes et des études approfondies et sollicitant les opinions de tous les secteurs.

Le 22 janvier, le Comité central a publié la « note d’intention sur la sollicitation d’avis concernant les recommandations pour le 15e plan quinquennal étudié lors de la quatrième session plénière du 20e Comité central du PCC », afin de recueillir les avis de certains membres du Parti et de personnalités non membres du Parti.

Fin février, le Comité central a organisé six équipes pour mener des projets de recherche dans 12 divisions administratives de niveau provincial. Parallèlement, il a demandé à certains départements centraux du Parti et de l’État de mener des recherches sur 35 thèmes clés.

Le 30 avril, j’ai présidé à Shanghai un séminaire sur le développement économique et social prévu lors du 15e plan quinquennal pour certaines provinces, régions autonomes et municipalités relevant directement du gouvernement central. 

Lors d’un colloque sur le 15e plan quinquennal, organisé à Shanghai le 30 avril 2025 avec des dirigeants locaux sélectionnés, Xi a déclaré que le Parti « doit évaluer de manière proactive l’impact des changements de la situation internationale sur la Chine et ajuster et optimiser notre structure économique en conséquence ».

Le 10 septembre, le Comité permanent de l’Assemblée nationale populaire (CPAN), dirigé par Zhao Leji, collaborateur de longue date de Xi, a publié un rapport préparatoire soulignant que « par rapport aux précédentes périodes de plan quinquennal, la caractéristique la plus marquante du ‘15e plan quinquennal’ est l’incertitude externe ». Reprise dans des remarques faites par la Commission nationale pour le développement et la réforme (CNDR) — l’agence du Conseil des affaires de l’État chargée de la planification économique —, cette perspective a façonné les préparatifs du Plénum.

Par la suite, j’ai chargé le camarade Li Qiang de présider trois séminaires distincts destinés à la communauté économique, à la communauté scientifique et technologique et aux représentants du niveau primaire. Nous avons également sollicité des avis en ligne, recevant plus de trois millions de commentaires, qui ont ensuite été triés et condensés en plus de 1 500 suggestions.

Toutes les personnes consultées ont convenu que consacrer la quatrième session plénière à l’examen des recommandations pour le 15e plan quinquennal était essentiel pour mieux tirer parti du rôle des plans de développement nationaux en tant que guide stratégique, exploiter davantage la force puissante qui découle de l’unité de l’ensemble du Parti et de tout le peuple chinois, construire un grand pays et faire progresser le renouveau national sur tous les fronts grâce à la modernisation chinoise.

La conclusion générale est que, pendant la période du 15e plan quinquennal, la Chine sera confrontée à la fois à des opportunités stratégiques et à des risques et défis en matière de développement, ainsi qu’à une multiplication des incertitudes et des facteurs imprévus. Néanmoins, les conditions et les tendances sous-jacentes de la croissance économique et sociale à long terme resteront inchangées.

Les personnes consultées ont exprimé le souhait que nous définissions la philosophie générale, les principes fondamentaux, les principaux objectifs, les tâches stratégiques et les principales mesures pour le développement économique et social au cours de la période du 15e plan quinquennal, afin de promouvoir un développement de haute qualité et de donner à la Chine des bases plus solides pour réaliser pour l’essentiel la modernisation socialiste.

Le 4 août, un projet de propositions a été soumis à certains membres du Parti, y compris à certains hauts responsables retraités, pour consultation. L’avis des comités centraux d’autres protagonistes politiques, des dirigeants de la Fédération nationale de l’industrie et du commerce de Chine et de personnalités sans affiliation politique a également été sollicité.

D’après les commentaires que nous avons reçus, il est clair que le projet de propositions bénéficie du soutien total de toutes les localités et de tous les départements consultés. Il fait l’unanimité sur le fait qu’il définit avec précision l’étape historique dans laquelle entreront la cause du Parti et le pays au cours de la période du 15e plan quinquennal, qu’il fournit une analyse approfondie des changements profonds et complexes de l’environnement de développement de la Chine et qu’il présente une conception et un plan stratégique de haut niveau pour notre développement au cours des cinq prochaines années.

En tant que document contenant des principes directeurs solides et bien ciblés, des objectifs clairs et précis, des tâches réalistes et des mesures pragmatiques, il servira de nouveau plan directeur et d’appel à l’action pour faire progresser la modernisation de la Chine sur la base des progrès réalisés jusqu’à présent.

Ce projet de propositions témoigne de notre initiative historique ; il propose d’écrire un nouveau chapitre dans les annales des miracles de la croissance économique rapide et de la stabilité sociale à long terme ; il propose aussi d’ouvrir de nouveaux horizons pour la modernisation de la Chine. Il exercera sans aucun doute une influence significative et profonde sur la cause du Parti et du pays.

En outre, les personnes consultées ont soumis de nombreux avis et suggestions constructifs sur le projet. Le groupe de rédaction les a examinés un par un et les a intégrés autant que possible dans le texte. Au total, nous avons apporté 218 ajouts, révisions et simplifications au document sur la base de 452 avis et suggestions.

Au cours du processus de rédaction, le Comité permanent du Bureau politique s’est réuni à trois reprises et le Bureau politique à deux reprises pour examiner et réviser les versions préliminaires du projet. Tous ces efforts ont abouti au projet final que nous avons soumis à la délibération de cette session plénière.

On peut dire que le travail de rédaction de ce document est un autre exemple frappant de la démocratie interne au Parti et de la façon dont peut s’exercer de façon globale la démocratie populaire. 

II. Principales considérations et contenu général 

Lors de la rédaction du projet de propositions, notre considération générale était que nous devions élaborer des plans systématiques et des dispositions stratégiques pour le développement économique et social de la Chine pendant la période du 15e plan quinquennal, sur la base du plan stratégique en deux étapes visant à faire de la Chine un grand pays socialiste moderne à tous égards, tel qu’énoncé lors du 20e Congrès national du Parti.

Notre travail de rédaction s’est appuyé sur une compréhension précise de la place importante qu’occupe la période du 15e plan quinquennal dans le processus de réalisation fondamentale de la modernisation socialiste et sur une analyse approfondie du contexte national et mondial.

Tout au long du processus de rédaction, nous avons respecté les points suivants.

Premièrement, rester orienté à la fois vers les objectifs et les problèmes. Tout en conservant l’orientation fondamentale consistant à consolider les bases et à aller de l’avant sur tous les fronts, nous avons élaboré des plans systématiques visant à asseoir la Chine sur des bases plus solides pour réaliser pour l’essentiel la modernisation socialiste, et nous avons mis au point des mesures robustes, bien ordonnées et efficaces pour remédier aux insuffisances et combler les faiblesses, en mettant l’accent sur les nouvelles tendances de la transformation mondiale sans précédent que nous connaissons actuellement et sur les problèmes majeurs de notre développement.

Deuxièmement, appliquer la pensée systémique. Nous avons élaboré un plan global pour tous les aspects du développement économique et social et de la construction du Parti, compte tenu de la nécessité de mettre en œuvre de manière coordonnée le Plan intégré à cinq sphères et la Stratégie globale à quatre volets.

Troisièmement, approfondir davantage la réforme, de manière globale. Nous avons considéré la réforme comme un moyen à la fois de résoudre les difficultés rencontrées au cours du développement et de générer une plus grande dynamique et une plus grande vitalité en matière de développement.

Quatrièmement, s’ouvrir davantage au monde extérieur. Nous avons souligné la nécessité de coordonner l’utilisation des facteurs de production mondiaux et des ressources du marché tout en poursuivant le développement par nos propres moyens.

Le projet de propositions comprend 15 parties, réparties en trois sections principales. La première section, qui comprend les première et deuxième parties, donne un aperçu général des principales réalisations de la Chine en matière de développement au cours de la période du 14e plan quinquennal, la position importante de la période du 15e plan quinquennal en tant qu’étape cruciale pour tirer parti des succès passés afin d’ouvrir de nouvelles perspectives pour réaliser pour l’essentiel la modernisation socialiste, les changements profonds et complexes auxquels sera confronté l’environnement de développement de la Chine au cours de la période du 15e plan quinquennal, la philosophie directrice du développement économique et social au cours de cette période, ainsi que les principes fondamentaux à suivre et les principaux objectifs à poursuivre au cours de cette période.

La deuxième partie est consacrée à la discussion et comprend 12 sections (de la 3e à la 14e). Elle se concentre principalement sur les questions qui ont une incidence sur les intérêts généraux et à long terme et prévoit des dispositions sectorielles pour les tâches stratégiques et les principales mesures à mettre en œuvre au cours de la période du 15e plan quinquennal. Elle examine les approches et les tâches principales dans les domaines du développement industriel, de l’innovation scientifique et technologique, du marché intérieur, de la structure économique, de l’ouverture, de la revitalisation rurale, du développement régional coordonné, du développement culturel, du bien-être public, du développement vert, de la sécurité et du développement, et de la défense nationale.

La troisième et dernière section comprend la 15e partie et les conclusions. Cette section prévoit principalement des dispositions pour les tâches liées au maintien et au renforcement de la direction centralisée et unifiée du Comité central du Parti, à la promotion de la démocratie socialiste et de l’État de droit, à la mise en œuvre des travaux concernant Hong Kong, Macao et Taïwan, à la promotion de la construction d’une communauté en proposant un avenir commun, et à la mobilisation de l’initiative, de l’enthousiasme et de la créativité de l’ensemble de la société.

III. Quelques points clefs

Le projet de propositions contient un certain nombre de points importants et de mesures majeures, dont je vais brièvement expliquer quelques-unes ici.

Premièrement, la position privilégiée de la période du 15e plan quinquennal

La modernisation socialiste ne peut être réalisée que par un processus historique de développement progressif et continu.

Elle nécessite le travail acharné et ininterrompu de générations successives.

Le projet de propositions souligne que la période du 15e plan quinquennal constituera une étape cruciale pour tirer parti des succès passés et ouvrir de nouvelles perspectives afin de réaliser pour l’essentiel la modernisation socialiste.

Ce jugement repose sur la mission historique de cette période. Le 20e Congrès national du Parti a fixé l’objectif de réaliser pour l’essentiel la modernisation socialiste d’ici 2035. Nous avons jeté des bases solides pour y parvenir en prenant un bon départ au cours des cinq premières années, qui ont constitué la période du 14e plan quinquennal.

La période couverte par le 15e plan quinquennal sera cruciale, car nous nous efforcerons de renforcer ces bases et d’avancer sur tous les fronts vers cet objectif. Un 15e plan quinquennal bien conçu et sa mise en œuvre efficace nous permettront de disposer de bases encore plus solides pour réaliser pour l’essentiel la modernisation socialiste d’ici 2035.

Conformément à ce positionnement de base, le projet de propositions présente les plans de développement pour la période du 15e plan quinquennal. Tout en reprenant les concepts et les approches du 14e plan quinquennal, il identifie avec précision les tendances générales du développement de la Chine au cours des cinq prochaines années et définit une philosophie générale, des principes fondamentaux, des objectifs majeurs et des tâches stratégiques à la fois tournés vers l’avenir et réalistes. Il est important que nous saisissions cette occasion pour consolider et renforcer nos atouts, éliminer les obstacles au développement, combler nos lacunes, prendre l’initiative stratégique dans un contexte de concurrence internationale intense et réaliser des percées majeures dans les tâches stratégiques d’importance globale pour la modernisation chinoise. Tout cela nous permettra de réaliser des progrès décisifs vers la réalisation fondamentale de la modernisation socialiste.

Deuxièmement, les objectifs de développement économique et social pour la période du 15e plan quinquennal

Il est essentiel de définir d’une bonne manière des objectifs de développement pour élaborer et mettre en œuvre les plans quinquennaux.

Dans le projet de propositions, nous avons défini les principaux objectifs de développement économique et social en fonction du positionnement de base pour la période du 15e plan quinquennal et des exigences spécifiques de cette étape.

Un critère important pour parvenir à la modernisation socialiste d’ici 2035 est que le PIB par habitant de la Chine soit alors équivalent à celui d’un pays moyennement développé. Cela nous oblige à maintenir un rythme approprié de développement économique et social pendant la période du 15e plan quinquennal.

Sur la base de recherches approfondies et d’analyses scientifiques, le projet de propositions avance une série d’objectifs importants, tels que garantir une croissance économique dans une fourchette appropriée, réaliser des gains réguliers en matière de productivité totale des facteurs, libérer pleinement le potentiel de croissance, garantir que les revenus personnels augmentent au même rythme que la croissance économique et que les rémunérations augmentent parallèlement à la productivité du travail, et continuer à élargir la classe moyenne.

En outre, en réponse aux problèmes majeurs de la phase actuelle, tels que la pression économique exercée de l’extérieur et l’insuffisance de la demande effective, le projet de propositions fixe également des objectifs, notamment celui d’augmenter de manière notable les dépenses de consommation et de renforcer le rôle de la demande intérieure en tant que principal moteur de la croissance économique.

Élaborés sur la base de l’expérience passée, les objectifs de développement économique et social figurant dans ce projet de propositions sont principalement de nature qualitative, car il s’agit d’un document d’orientation générale. Les exigences quantitatives nécessaires et certaines dispositions spécifiques devraient être étudiées et déterminées lors de l’élaboration du 15e plan quinquennal pour le développement économique et social national.

Troisièmement, promouvoir un développement de haute qualité

Suivant l’approche du 14e plan quinquennal, ce projet de propositions définit également la promotion d’un développement de haute qualité comme l’objectif principal du développement économique et social au cours de la période du 15e plan quinquennal.

Il fixe pour exigences la poursuite du développement économique comme tâche centrale, l’application intégrale et fidèle de la nouvelle philosophie de développement sur tous les fronts, la promotion d’une croissance économique de plus haute qualité tout en réalisant une augmentation appropriée de la production économique, et la promotion d’un développement économique durable et sain et d’un progrès social global.

Pour promouvoir un développement de haute qualité, nous devons avant tout intensifier nos efforts pour atteindre une plus grande autonomie et une plus grande force dans le domaine des sciences et des technologies, développer activement de nouvelles forces productives de qualité et réaliser des progrès substantiels et de nouvelles percées dans la stimulation de l’innovation scientifique et technologique, la promotion de nouveaux moteurs de croissance et l’amélioration structurelle et la modernisation de l’économie.

Le projet de propositions souligne le rôle moteur de l’innovation scientifique et technologique et établit des plans globaux pour moderniser le système industriel, renforcer l’autonomie et la puissance scientifiques et technologiques et accélérer la transition écologique à tous les niveaux.

Il propose de promouvoir la modernisation des industries traditionnelles, de favoriser les industries émergentes et les industries d’avenir et de renforcer les fondements de l’économie réelle. Il recommande de promouvoir les avancées en matière d’innovation et les percées dans les technologies essentielles de domaines clefs, de renforcer l’intégration complète entre l’innovation technologique et industrielle, de poursuivre le développement intégré de l’éducation, des sciences, des technologies et des ressources humaines, et de faire progresser la Digital China Initiative.

Il recommande également d’accélérer le développement d’un nouveau système énergétique et de passer plus rapidement à des pratiques de production et à des modes de vie respectueux de l’environnement. Il convient de noter que le développement de nouvelles forces productives de qualité dépend de la présence de certaines ressources, ce qui signifie que nous devons évaluer correctement la faisabilité de tous les plans pertinents. En soulignant dans le projet de propositions la nécessité de développer de nouvelles forces productives de qualité en fonction des conditions locales, nous voulons inciter toutes les parties concernées à adopter une approche saine, rationnelle et réaliste dans leur travail et à s’abstenir de se lancer tête baissée dans de nouvelles initiatives.

Quatrièmement, renforcer l’économie nationale et promouvoir des flux économiques nationaux et internationaux sans entrave

Alors que le paysage international devient de plus en plus difficile et complexe, nous devons agir plus rapidement pour créer un nouveau modèle de développement et garder fermement l’initiative en matière de développement. À l’heure actuelle et pour quelque temps encore, nous devons nous efforcer de renforcer l’économie nationale et de stimuler les flux économiques nationaux, afin de tirer parti de la stabilité de l’économie nationale pour nous prémunir contre les incertitudes de l’économie internationale.

À cette fin, le projet de propositions souligne la nécessité de renforcer l’économie nationale et présente des plans globaux concernant le développement d’un marché intérieur robuste et d’une économie de marché socialiste de haut niveau. Il insiste sur la nécessité de poursuivre la stratégie d’expansion de la demande intérieure, d’œuvrer à l’amélioration du niveau de vie tout en augmentant les dépenses de consommation, d’investir à la fois dans les actifs physiques et dans le capital humain, de stimuler la consommation, d’accroître les investissements efficaces et d’éliminer les goulets d’étranglement et les obstacles qui entravent le développement d’un marché national unifié.

Ce passage fait clairement écho au discours du Secrétaire du Parti communiste chinois le 1er juillet 2025 devant la Commission centrale des affaires financières et économiques, que nous avions commenté dans la revue.

Les deux concepts interdépendants qu’il mobilisait — au cœur des défis économiques actuels de la Chine — sont « l’involution » (nèijuǎn, 内卷), entendue comme une concurrence interne intense qui entraîne une baisse des rendements, et le « marché national unifié », entendu comme objectif de politique économique ; cela fait longtemps qu’il est à l’agenda de Xi Jinping. 

Dans ce discours, celui-ci abordait directement les symptômes de l’involution — tels que les guerres de prix ruineuses et la concurrence désordonnée — en les présentant comme des obstacles majeurs à un « développement de haute qualité ». Mais les racines de ce problème sont profondément ancrées dans la structure fondamentale de l’économie politique chinoise. La théorie du « régionalisme autoritaire décentralisé » du professeur Xu Chenggang constitue un cadre essentiel pour comprendre cette dynamique.

Selon ce modèle, le fondement institutionnel de l’économie politique chinoise se caractérise par une structure particulière : le gouvernement central fixe des objectifs nationaux généraux et des indicateurs de performance clefs — de la production d’acier à la croissance du PIB — tout en accordant aux gouvernements locaux une autonomie importante pour atteindre ces objectifs. Toutefois, cette décentralisation de la gestion économique s’accompagne d’une centralisation politique extrême. 

Grâce à l’appareil organisationnel du Parti communiste, le centre exerce un contrôle étroit sur les deux leviers de pouvoir les plus importants : le contrôle du personnel — via le pouvoir de nomination, de promotion et de révocation de tous les fonctionnaires — et le contrôle idéologique de la société.

Cette structure transforme l’économie nationale en une compétition politique.

Si la concurrence sur le marché peut être un jeu à somme positive, le système politico-économique léniniste de la Chine en fait souvent une compétition à somme nulle.

Avec moins de postes disponibles à chaque niveau successif du gouvernement, les fonctionnaires locaux sont engagés dans une lutte acharnée pour un nombre limité de promotions.

Cette intense concurrence entre les juridictions a été un puissant moteur de croissance — mais elle est également le principal facteur à l’origine du comportement faussé des entreprises. Pour remporter cette course politique, les fonctionnaires accordent des subventions conditionnelles aux entreprises en fonction de l’augmentation de leur capacité de production, conduisant directement à la surcapacité qui afflige actuellement l’industrie chinoise des véhicules électriques et des panneaux solaires, alimentant les guerres de territoire pour l’accès au marché et la domination régionale.

Les dirigeants centraux sont parfaitement conscients des effets néfastes de distorsion de concurrence que ce système peut produire.

Face à ce problème structurel, l’antidote de Pékin est le « marché national unifié ».

Inventée pour la première fois par l’actuel vice-Premier ministre He Lifeng en 2015, cette politique vise à démanteler les barrières érigées par les gouvernements locaux pour protéger leur territoire. L’objectif est de remplacer un paysage fragmenté de marchés locaux protégés par un marché national unique, intégré et efficace, régi par des règles unifiées, éliminant ainsi le protectionnisme local.

Il souligne la nécessité de stimuler toutes les entités du marché, d’accélérer l’amélioration des institutions et des mécanismes d’allocation des facteurs de production basés sur le marché, et de rendre la gouvernance macroéconomique plus efficace. Le projet de propositions appelle également à promouvoir des flux économiques internationaux plus larges, à élargir l’ouverture au niveau institutionnel, à préserver le système commercial multilatéral et à poursuivre une coopération de haute qualité dans le cadre de l’initiative des « Nouvelles routes de la soie ».

Cinquièmement, réaliser des progrès solides vers la prospérité commune pour tous

La modernisation chinoise est la modernisation de la prospérité commune. Depuis le 18e Congrès national du Parti, nous sommes restés fidèles à notre aspiration initiale et avons abordé les problèmes du point de vue des intérêts du peuple. Cela nous a permis de faire progresser le développement régional coordonné, d’adopter des mesures énergiques pour garantir et améliorer le bien-être du peuple, de remporter la victoire dans la lutte contre la pauvreté et de construire une société modérément prospère à tous égards.

Tout cela a créé des conditions favorables pour progresser vers la prospérité commune. La section sur les principes directeurs souligne la nécessité de réaliser des progrès solides vers la réalisation de cet objectif. Cela représente également une exigence globale pour le développement économique et social pendant la période du 15e plan quinquennal.

Fermement ancré dans l’objectif de la prospérité commune et la nécessité d’assurer et d’améliorer le bien-être du peuple, le projet de propositions recommande une série de politiques et de mesures équilibrées et accessibles visant à promouvoir un plein emploi de haute qualité, à optimiser le système de répartition des revenus, à développer une éducation qui réponde aux attentes de la population, à affiner le système de sécurité sociale, à promouvoir un développement de haute qualité dans le secteur immobilier, à faire progresser l’initiative Healthy China 2030, à soutenir un développement démographique de qualité et à déployer des efforts constants pour garantir un accès équitable aux services publics de base.

Afin de réduire les disparités entre les zones rurales et urbaines et entre les régions, il propose une série de mesures pratiques visant à accélérer le rythme de la modernisation agricole et rurale, à faire progresser de manière constante la revitalisation rurale globale, à améliorer la structure économique régionale et à promouvoir un développement régional coordonné. Dans le but de garantir une vie culturelle riche pour tous, il appelle à des efforts pour promouvoir et mettre en pratique les valeurs socialistes fondamentales, stimuler les programmes culturels, accélérer le développement des industries culturelles et étendre l’influence et l’attrait de la civilisation chinoise.

Sixièmement, garantir à la fois le développement et la sécurité

La sécurité est une condition préalable au développement, tandis que le développement est une garantie de sécurité. Au cours des cinq prochaines années, la Chine connaîtra une augmentation notable des incertitudes et des facteurs imprévisibles, ce qui rendra beaucoup plus difficile la tâche d’assurer à la fois le développement et la sécurité. En vue de moderniser le système et les capacités de sécurité nationale de la Chine, le projet de propositions recommande des mesures visant à améliorer le système de sécurité nationale, à renforcer les capacités de sécurité nationale dans des secteurs clés, à améliorer la gouvernance en matière de sécurité publique et à améliorer le système de gouvernance sociale.

Dans le but de promouvoir une modernisation de haute qualité de la défense nationale et des forces armées, il propose d’accélérer le développement de capacités de combat avancées, de moderniser la gouvernance militaire et de consolider et d’améliorer les stratégies nationales et les capacités stratégiques, telles qu’elles sont intégrées l’une dans l’autre.

Septièmement, maintenir le leadership global du Parti

Nous devons maintenir et renforcer la direction générale du Parti, car elle constitue la garantie fondamentale de la modernisation de la Chine. Afin d’améliorer la capacité du Parti à diriger les efforts de développement économique et social de la Chine, le projet de propositions souligne la nécessité de maintenir et de renforcer la direction centralisée et unifiée du Comité central du Parti, d’affiner les mécanismes de mise en œuvre des décisions et des plans majeurs du Comité central du Parti, de continuer à appliquer les nouvelles théories du Parti pour parvenir à l’unité de pensée, de volonté et d’action, de suivre la bonne approche dans la sélection et la nomination des fonctionnaires, d’améliorer le système d’évaluation des performances des fonctionnaires, de prendre des mesures coordonnées pour améliorer les organisations du Parti de premier niveau dans tous les secteurs, de continuer à mettre en œuvre avec détermination la décision en huit points de la direction centrale du Parti sur l’amélioration de la conduite du Parti et du gouvernement, d’améliorer les systèmes de contrôle du Parti et de l’État, et de poursuivre la lutte acharnée, longue et sans merci contre la corruption.

Camarades,

La tâche principale de cette session plénière est d’examiner les recommandations pour le 15e plan quinquennal. Je vous invite tous à examiner attentivement ce projet, à discuter des questions en profondeur et à soumettre des suggestions constructives afin d’améliorer efficacement le projet de propositions et de faire de cette session plénière un succès.

Sources
  1. Nous reprenons ici un concept de Chenggang Xu. Voir par exemple « The Fundamental Institutions of China’s Reforms and Development », Journal of Economic Literature, Vol. 49, No. 4, décembre 2011, pp. 1076–1151.
  2. Neil Thomas, Lobsang Tsering, « Xi’s Personal Priorities : What Matters Most to China’s Leader ? », Asia Society, 30 juillet 2025.
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