Amériques

Trump aux Nations unies : un moment unipolaire

À New York, les États Unis reçoivent dans leur capitale internationale — qui est aussi celle de l’empire Trump — leurs affidés. Pour distribuer les bons et les mauvais points.

Mais sont-ils réellement si puissants ?

L’impasse moyen-orientale, le refus de la transformation écologique de l’économie et l’incapacité à comprendre la demande des peuples de voir leur autonomie respectée ont glacé une salle qui s’attendait à entendre des énormités.

Nous avons sélectionné les moments clefs de cette intervention.

S’exprimant à la tribune des Nations unies, qui célèbrent cette année leur 80e anniversaire, Donald Trump s’est livré ce mardi 23 septembre à une critique de l’institution — et de l’Occident. 

S’éloignant fréquemment de son texte, il a prononcé un discours de plus d’une heure, soit quatre fois le temps qui lui était imparti.

Il y a six ans, à la même tribune, Trump avait prononcé un discours structuré et enflammé. 

Aujourd’hui, à cause d’un problème technique, il a commencé par faire du stand-up.

Tourner en dérision les Nations unies plutôt que de répondre aux critiques — est-ce le signe d’une victoire ? 

Seulement en partie. 

En effet, lorsque le prompteur a de nouveau été opérationnel et que le discours a cessé d’être un « rant » de meeting politique pour redevenir un exposé argumenté de doctrine, l’écart entre la position des États-Unis et celle du reste du monde est apparu saisissant.

Parmi les principales cibles de son réquisitoire figurent son prédécesseur Joe Biden, les éoliennes, le maire de Londres, Nicolas Maduro, les alliés de l’OTAN qui achètent encore le pétrole russe, l’Union européenne et sa politique migratoire et climatique ou encore le Brésil, accusé de persécuter son ami Jair Bolsonaro.

Sur le fond, le président américain s’en est pris, à grands renforts d’approximations et de contre-vérités, aux ravages présumés de l’immigration et des énergies renouvelables. Deux sujets qu’il a reliés en les qualifiant de forces « détruisant une grande partie du monde libre ». 

À l’image du slogan qui l’a porté à la Maison-Blanche à deux reprises, il a livré son conseil pour redonner sa grandeur au monde : « il faut des frontières solides et des sources d’énergie traditionnelles pour redevenir une grande puissance. »

Mais son déni total du changement climatique, qu’il qualifie de « plus grande escroquerie jamais perpétrée dans le monde », a été accueilli avec incompréhension par la plupart des dirigeants mondiaux qui sont précisément confrontés à ces défis. 

Rhétoriquement, son discours procède par agglutination d’éléments — confus et impossibles à lire de manière linéaire et en intégralité.

C’est pourquoi, contrairement à notre format habituel qui privilégie l’exhaustivité, nous avons ici fait le choix de vous proposer de l’écouter en transcrivant des passages clefs.

Le contraste n’aurait pas pu être plus marqué entre l’éloge de l’autonomie et de la démocratie ainsi que la dénonciation de l’ingérence et des tentations impériales du président brésilien Lula, l’accueil positif réservé par la salle à son discours et la froideur des délégués face à la prise de parole du président américain. 

Ce n’est plus l’incompréhension qui anime les personnes qui reçoivent ce message — on a déjà fait le deuil des États-Unis.

Dans un article important qui paraît demain dans la revue, Henry Farrell et Abraham Newman parlent de l’enshittification de l’empire américain.

En cherchant à mettre en scène ce moment impérial, les États-Unis sont-ils en train d’accélérer la fin de l’Occident ?

1 — Faire la leçon au monde 

« En seulement huit mois depuis mon entrée en fonction, nous avons obtenu des engagements et des fonds déjà versés. 17 000 milliards de dollars. Imaginez un peu. Quatre ans, moins de 1 000 milliards. Huit mois, bien plus que 17 000 milliards de dollars sont investis aux États-Unis. Et cet argent afflue désormais de toutes les régions du monde. »

« Mais aujourd’hui, après seulement huit mois d’administration, nous sommes le pays le plus en vue au monde. Et aucun autre pays ne nous arrive à la cheville. L’Amérique a la chance d’avoir l’économie la plus forte, les frontières les plus solides, l’armée la plus puissante, les amitiés les plus solides et l’esprit le plus fort de toutes les nations sur Terre. Nous vivons véritablement l’âge d’or de l’Amérique. »

« Au cours des huit premiers mois de mon premier mandat, j’ai bâti la plus grande économie de l’histoire du monde. Nous avons connu la meilleure économie jamais vue. Dans toute l’histoire du monde. Et je suis en train de refaire la même chose. Mais cette fois-ci, c’est encore plus grand et encore mieux. »

« Sur la scène internationale, l’Amérique est à nouveau respectée comme elle ne l’a jamais été auparavant. »

« À tous les terroristes qui font passer clandestinement des drogues toxiques aux États-Unis. Sachez que nous vous anéantirons. »

2— Les moments stand-up pour attaquer les Nations unies 

« J’ai mis fin à sept guerres, j’ai négocié avec les dirigeants de chacun de ces pays, et je n’ai jamais reçu le moindre appel des Nations unies pour m’aider à conclure l’accord. » 

« C’est triste que j’aie dû faire ces choses à la place des Nations unies. »

« L’ONU est censée mettre fin aux invasions. »

« Tout ce que j’ai obtenu des Nations unies, c’est un escalator qui s’est arrêté à mi-chemin. Et puis un téléprompteur qui ne fonctionnait pas. »

« Dans ce cas, quel est le rôle des Nations unies ? L’ONU a un potentiel énorme. Mais elle est loin d’exploiter ce potentiel. Pour l’instant, elle se contente principalement d’écrire des lettres très fermes, sans jamais y donner suite. Ce ne sont que des paroles en l’air, et les paroles en l’air ne résolvent pas les guerres. »

3 — La crise migratoire imaginaire 

« Non seulement l’ONU ne résout pas les problèmes qu’elle devrait résoudre, mais trop souvent, elle crée en fait de nouveaux problèmes que nous devons résoudre. » 

« Le meilleur exemple est la question politique numéro un de notre époque : la crise de l’immigration incontrôlée. »

« Tout système qui entraîne le trafic massif d’enfants est intrinsèquement mauvais, mais c’est exactement ce qu’a fait le programme migratoire mondialiste et c’est là tout le problème. »

« Lorsque vos prisons sont remplies de soi-disant demandeurs d’asile qui ont remercié votre gentillesse, et c’est ce qu’ils ont fait, ils ont remercié votre gentillesse par des crimes. Il est temps de mettre fin à l’expérience ratée des frontières ouvertes. Vous devez y mettre fin maintenant. Je peux vous dire que je suis vraiment doué pour ce genre de choses. Vos pays vont droit en enfer. En Amérique, nous avons pris des mesures audacieuses pour mettre rapidement fin à l’immigration incontrôlée. Dès que nous avons commencé à détenir et à expulser tous ceux qui franchissaient la frontière et à renvoyer les étrangers en situation irrégulière hors des États-Unis, ils ont tout simplement cessé de venir. »

« L’ONU soutient les personnes qui entrent illégalement aux États-Unis. » 

« Les Nations Unies financent une offensive contre les pays occidentaux et leurs frontières. »

« Aux États-Unis, nous rejetons l’idée que des foules venues de pays étrangers puissent être autorisées à traverser la moitié du globe, à franchir nos frontières, à violer notre souveraineté, à commettre des crimes sans retenue et à épuiser notre filet de sécurité sociale. »

3 — Le climat et la transition énergétique

Le changement climatique est « la plus grande escroquerie jamais perpétrée dans le monde. »

« L’effet principal des politiques écologiques a été de redistribuer la production manufacturière des pays développés vers les pays polluants qui enfreignent les règles. »

« Je me souviens avoir entendu parler de l’empreinte carbone, puis le président Obama montait à bord d’Air Force One, un énorme Boeing 747, pas un nouveau, mais un vieux modèle équipé d’un vieux moteur qui rejette tout dans l’atmosphère. Il a parlé de l’empreinte carbone, puis il est monté à bord et a pris l’avion de Washington à Hawaï pour jouer au golf, puis il est remonté dans ce grand et magnifique avion et est rentré, et il a reparlé du réchauffement climatique et de l’empreinte carbone. C’est une arnaque. »

« N’utilisez jamais le mot “charbon” — utilisez uniquement les mots “charbon propre et beau”. »

« Si vous ne vous détournez pas de cette arnaque verte, votre pays va courir à sa perte. »

« Tout vert, c’est tout banqueroute, voilà ce que cela représente. »

« Ces grandes éoliennes sont tellement pathétiques et mauvaises, tellement chères à exploiter, et elles doivent être reconstruites sans cesse, et elles commencent à rouiller et à pourrir. »

« Nous sommes prêts à fournir à tous les pays des ressources énergétiques abondantes et abordables s’ils en ont besoin, et la plupart d’entre vous en ont besoin. »

5 — Sur les armes nucléaires et l’Iran 

« Les armes biologiques sont terribles, mais les armes nucléaires le sont encore plus. Et nous incluons les armes nucléaires dans notre appel à la cessation du développement des armes nucléaires. Nous le savons, je le sais, et je le vois tout le temps. Monsieur, voulez-vous voir ? Je regarde des armes si puissantes que nous ne pouvons tout simplement pas les utiliser. Si nous les utilisions, le monde pourrait littéralement prendre fin. Il n’y aurait plus d’Organisation des Nations Unies dont on pourrait parler. Il n’y aurait plus rien. »

​​« Aujourd’hui, la plupart des anciens commandants militaires iraniens, voire presque tous, ne sont plus parmi nous. Ils sont morts. Il y a trois mois, lors de l’opération Midnight Hammer, sept bombardiers américains B2 ont largué des bombes de 1.430.000 livres chacune sur les principales installations nucléaires iraniennes, les détruisant complètement. Aucun autre pays au monde n’aurait pu faire ce que nous avons fait. Aucun autre pays ne dispose de l’équipement nécessaire pour faire ce que nous avons fait. Nous avons les armes les plus puissantes au monde. Nous détestons les utiliser, mais nous avons fait ce que les gens voulaient faire depuis 22 ans. »

6 — Sur la guerre en Ukraine 

« Je me suis également efforcé sans relâche de mettre fin aux massacres en Ukraine. Je pensais que ce serait facile. Parmi les sept guerres que j’ai arrêtées, je pensais que celle-ci serait la plus facile en raison de mes relations avec le président Poutine, qui ont toujours été bonnes. »

« Je pensais que ce serait la plus facile. Mais, vous savez, en temps de guerre, on ne sait jamais ce qui va se passer. Il y a toujours beaucoup de surprises, bonnes ou mauvaises. »

« Tout le monde pensait que la Russie gagnerait cette guerre en trois jours. Mais cela ne s’est pas passé ainsi. Cela devait être une petite escarmouche rapide. Cela ne donne pas une bonne image de la Russie, cela lui donne une mauvaise image. »

« Quoi qu’il arrive à partir de maintenant, cela aurait dû prendre quelques jours, certainement moins d’une semaine. Et ils se battent depuis trois ans et demi, tuant entre cinq et sept mille jeunes soldats. Principalement, principalement des soldats des deux côtés, chaque semaine. Entre cinq et sept mille jeunes morts. »

« Mais, de manière inexcusable, même les pays de l’OTAN n’ont pas réduit leurs achats d’énergie et de produits énergétiques russes, ce que j’ai découvert il y a environ deux semaines, à ma grande consternation. Réfléchissez-y. Ils financent la guerre contre eux-mêmes. Qui a déjà entendu parler d’une telle chose ? »

7 — Sur l’Europe 

« Vos pays sont en train d’être ruinés. »

« L’Europe est en grande difficulté. Elle est envahie par une vague d’immigrants clandestins sans précédent. Les immigrants clandestins affluent en Europe. »

« Si rien n’est fait immédiatement, l’immigration et leur politique énergétique suicidaire causeront la mort de l’Europe occidentale. »

« Je suis le président des États-Unis, mais je m’inquiète pour l’Europe. J’aime l’Europe, j’aime les Européens, et je déteste la voir dévastée par l’énergie et l’immigration, ce monstre à deux têtes qui détruit tout sur son passage, et ils ne peuvent plus laisser cela se produire. »

« Et je reconnais beaucoup de mérite à l’Allemagne. L’Allemagne était engagée dans une voie très néfaste, tant en matière d’immigration que d’énergie. Elle s’était lancée dans la transition écologique et se dirigeait vers la faillite. Puis une nouvelle équipe dirigeante est arrivée et a rétabli l’utilisation des combustibles fossiles et du nucléaire. L’Allemagne va bien. C’est désormais sûr et on peut le faire correctement. Mais ils sont revenus à leur position initiale et ont ouvert de nombreuses centrales, des centrales énergétiques, des centrales de production d’énergie. Et ils s’en sortent bien. Je félicite beaucoup l’Allemagne pour cela. »

« L’Europe a réduit son empreinte carbone de 37 %. Réfléchissez-y. Félicitations, Europe. Beau travail. Vous avez perdu beaucoup d’emplois, beaucoup d’usines ont fermé, mais vous avez réduit votre empreinte carbone de 37 %. »

« Les factures d’électricité européennes sont désormais quatre à cinq fois plus élevées qu’en Chine et deux à trois fois plus élevées qu’aux États-Unis. »

8 — Sur la religion 

« Ensemble, défendons la liberté d’expression et la liberté d’opinion. »

« Protégeons la liberté religieuse, y compris celle de la religion la plus persécutée au monde aujourd’hui. Elle s’appelle le christianisme. »

9 — Sur la Chine 

« Vous savez, ils utilisent le charbon, ils utilisent le gaz, ils utilisent presque tout. Mais ils n’aiment pas le vent. Mais ils aiment sacrément bien vendre des éoliennes. »

« La Chine et l’Inde sont les principaux bailleurs de fonds de la guerre en cours, car ils continuent d’acheter du pétrole russe. »

10 – Sur les tarifs 

« Aux États-Unis, nous voulons des échanges commerciaux et un commerce florissant avec tous les pays, avec tout le monde. Nous voulons aider les nations. Nous allons aider les nations. Mais cela doit aussi être équitable et réciproque. »

« C’est pourquoi les États-Unis appliquent désormais des droits de douane à d’autres pays. Et tout comme ces droits de douane nous ont été appliqués pendant de nombreuses années… nous avons utilisé les droits de douane comme mécanisme de défense sous l’administration Trump. »

« Mais dans le passé aussi, le Brésil, pouvez-vous le croire, a imposé des droits de douane injustes à notre nation. Mais aujourd’hui, grâce à nos droits de douane, nous leur rendons la pareille, et nous leur rendons la pareille très durement. »

« En tant que président, je défendrai toujours notre souveraineté nationale et les droits des citoyens américains. Je suis donc très désolé de dire cela, mais le Brésil se porte mal et continuera à se porter mal. »

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