Ursula von der Leyen et António Costa cherchent à tourner la page de l’échec des négociations commerciales avec les États-Unis en recentrant leur action sur la défense et le conflit en Ukraine.

  • Dans son discours du 1er septembre au Forum stratégique de Bled, en Slovénie, le président du Conseil européen, António Costa, a affirmé que « l’ère de la naïveté est révolue » et que la paix sans défense crédible n’était qu’une « illusion ».
  • Il a également évoqué la frustration provoquée par l’accord sur les droits de douane conclu avec les États-Unis, admettant son caractère déséquilibré, tout en défendant sa valeur géopolitique : « Nous ne nous réjouissons certainement pas du retour des droits de douane ou des limites d’un cadre commercial déséquilibré. Toutefois, nous devons être honnêtes quant à la situation dans son ensemble. Dans le monde interconnecté d’aujourd’hui, le commerce, la diplomatie et la sécurité sont inévitablement liés ».
  • Dans ses propos, Costa a laissé entendre que la sécurité de l’Europe de l’Est, l’engagement américain au sein de l’OTAN et la situation en Ukraine avaient constitué des considérations centrales lors des négociations commerciales et dans la décision de l’Union d’accepter des droits de douane de 15 %.
  • Selon Costa, engager une escalade par des tarifs douaniers de rétorsion, à un moment où « notre frontière orientale est menacée », aurait été imprudent.

C’est la deuxième fois en une semaine que de hauts responsables européens laissent entendre que l’Union a consenti à un accord désavantageux afin de préserver le parapluie sécuritaire américain.

  • La semaine dernière, Sabine Weyand, à la tête de la direction générale du Commerce de la Commission, a affirmé qu’il n’y avait eu « aucune négociation à proprement parler » avec les États-Unis, mais plutôt un compromis stratégique en faveur de la sécurité.
  • « En réalité, il ne s’agissait pas d’un équilibre classique des intérêts, mais de la garantie d’un paquet politique plus large », a-t-elle expliqué au quotidien allemand Süddeutsche Zeitung.

Costa a affirmé que l’Union restera attachée à la défense de ses règles de marché, chercherait à diversifier ses relations commerciales avec des pays tiers et s’emploiera à renforcer sa propre industrie de défense.

  • La Commission présentera au Conseil informel des dirigeants de l’Union du mois d’octobre un plan sur cinq ans qui vise à « améliorer et accélérer les capacités de défense de l’Europe, à la vitesse et à l’échelle nécessaires ».
  • Elle prévoirait également d’établir un bilan semestriel des investissements des États membres 1.

La présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, mène actuellement une tournée dans les pays frontaliers de la Russie, de l’Ukraine et de la Biélorussie. 

  • Elle a déclaré que la coalition de volontaires menée par la France et le Royaume-Uni avait établi une « feuille de route claire » pour l’envoi éventuel de soldats en Ukraine, afin de garantir la paix. Elle a également assuré que les plans de déploiement étaient « assez avancés » et bénéficiaient du soutien des États-Unis 2.
  • Ces affirmations n’ont pas été confirmées par la Maison-Blanche, qui reste ambiguë, voire même contradictoire quant au type de garanties que les États-Unis seraient prêts à fournir.
  • Le ministre allemand de la Défense, Boris Pistorius, a d’ailleurs réagi en déclarant : « L’Union européenne n’a aucune responsabilité ni compétence en matière de déploiement de troupes, pour qui que ce soit et pour quelque raison que ce soit. »
  • Selon des sources citées par Axios, le président américain et des hauts responsables de la Maison-Blanche estiment que ce sont les Européens qui freinent la conclusion d’un accord de paix en encourageant Zelensky à adopter une position maximaliste.
  • Selon ces mêmes sources, le département du Trésor aurait préparé une liste de sanctions que les Européens devraient adopter à l’encontre de la Russie.
  • Celle-ci comprend notamment un arrêt complet des achats d’énergies fossiles russes et des sanctions secondaires visant l’Inde et la Chine — les deux principaux importateurs d’hydrocarbures russes 3.

Jeudi 4 septembre, le président français Emmanuel Macron et le Premier ministre britannique Keir Starmer organiseront une réunion de la coalition des volontaires à Paris. Le président ukrainien Zelensky sera présent, tout comme la plupart des dirigeants ayant déjà assisté à la réunion de Washington, le 18 août.

Sources
  1. Henry Foy, « Von der Leyen plans twice yearly review of EU countries’ defence investments », Financial Times, 1er septembre 2025.
  2. Henry Foy, « Europe has ‘pretty precise’ plan to send troops to Ukraine, von der Leyen says », Financial Times, 31 août 2025.
  3. Mike Allen et Barak Ravid, « White House believes Europe secretly undoing Ukraine war’s end », Axios, 30 août 2025.