Les propos entre Trump et Zelensky rapportés hier, mardi 15 juillet, par le Financial Times concernant de potentielles frappes ukrainiennes en Russie à l’aide d’armes américaines ont été accueillis avec beaucoup de prudence au Kremlin.
- Lors d’un appel le 4 juillet, le président américain aurait demandé à son homologue ukrainien : « Volodymyr, pouvez-vous frapper Moscou … ? Pouvez-vous frapper Saint-Pétersbourg aussi ? » 1
- La Maison-Blanche a depuis nié ces informations et déclaré que l’Ukraine « ne devrait pas viser Moscou ».
- Lundi 14 juillet, le président américain a déclaré qu’il autoriserait l’envoi de nouveaux systèmes à l’Ukraine « pour plusieurs milliards de dollars », financés par des pays de l’OTAN.
Moscou s’est pour le moment contenté de « condamner » les livraisons occidentales à Kiev et a « souligné que celles-ci prolongeront le conflit », tout en n’empêchant pas la Russie d’atteindre ses objectifs de guerre 2.
Le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a minimisé l’importance de ces fuites et déclaré que ces dernières s’avéraient généralement être « fausses », arguant que : « Ce genre de discours circule depuis un certain temps déjà » 3.
- L’administration Biden avait déjà envoyé des ATACMS à Kiev en 2023, ce qui avait permis à l’Ukraine de frapper des cibles situées dans des régions frontalières russes, comme l’oblast de Briansk et de Koursk en novembre dernier.
- En réaction, la Russie avait frappé la ville ukrainienne de Dnipro avec un missile Oreshnik, capable de transporter une ogive nucléaire, afin d’envoyer un avertissement à Kiev quant à des frappes longue distance en territoire russe.
- Les médias d’État russe diffusaient alors à la télévision des estimations du temps de trajet requis pour qu’un missile Oreshnik atteigne les capitales européennes : 12 minutes pour Varsovie, 15 pour Berlin, 20 pour Londres et Paris.
L’Ukraine a frappé à plusieurs reprises le territoire russe en profondeur depuis février 2022 en utilisant des drones longue portée qui ont ciblé des bases militaires, des aérodromes, des raffineries et réserves de pétrole, ou bien des métropoles. En mai 2023, deux drones ukrainiens avaient atteint le toit du Kremlin, au cœur de Moscou, avant d’être abattus par les défenses russes.
- Selon les données d’ACLED, on recense plus de 25 000 frappes ukrainiennes en territoire russe depuis février 2022, la majeure partie correspondant à des drones de courte et moyenne portée visant les oblasts russes frontaliers : Belgorod, Koursk, Briansk et, dans une moindre mesure, Rostov et Voronej.
- Moscou et sa métropole ont été visées à plus de 80 reprises, Saint-Pétersbourg 4 fois. Les villes de Kazan, Samara, Volgograd ou encore Krasnodar ont également été ciblées.
La potentielle livraison par Washington de missiles Tomahawk placerait la capitale russe ainsi que Saint-Pétersbourg à portée de Kiev, les deux villes se situant respectivement à 500 et 850 kilomètres des frontières de l’Ukraine. Dans l’attente d’une décision américaine, Kiev aurait lancé en novembre la production de masse de missiles balistiques de conception ukrainienne Hrim-2, dont la portée maximale pourrait atteindre 500 kilomètres.
- La Russie espère certainement pouvoir dissuader la Maison-Blanche d’autoriser la vente de nouveaux systèmes offensifs, qui pourraient inclure des missiles de croisière Tomahawk (d’une portée de 1 600 km) ou bien ATACMS (300 km).
- Vladimir Poutine avait menacé les soutiens de l’Ukraine de « lourdes conséquences » lors de précédentes annonces de livraisons de chars américains Abrams, britanniques Challenger et allemands Léopards en 2023.
- Le président russe avait laissé entendre qu’il pourrait considérer cette assistance comme relevant d’une « cobelligérance ». Il n’a toutefois jamais mis ses menaces à exécution, bien qu’il ait révisé la doctrine russe en matière d’utilisation de son arsenal atomique en novembre.
- Ces menaces semblent toutefois avoir contribué à dissuader l’Allemagne de livrer des missiles Taurus à l’Ukraine. En avril, la porte-parole du ministère des Affaires étrangères russe avait déclaré que Moscou considérerait des frappes par l’Ukraine de ces missiles en territoire russe comme une implication « directe » de Berlin.
- Si Friedrich Merz avait déclaré être favorable à la livraison de Taurus — un sujet tabou pour le précédent gouvernement Scholz —, le ministre de la Défense allemand Pistorius a toutefois indiqué dans une interview donnée le 13 juillet que Berlin ne livrerait pas ces missiles à Kiev.
Sources
- Christopher Miller, Henry Foy, Max Seddon et Lauren Fedor, « Donald Trump asked Volodymyr Zelenskyy if Ukraine could hit Moscow, say people briefed on call », Financial Times, 15 juillet 2025.
- « Песков оценил планы Трампа отправить Украине оружие за счет Европы », РБК, 14 juillet 2025.
- « Песков связал с фейками сообщения о призыве Трампа « надавить на Москву », РБК, 15 juillet 2025.