Selon un rapport publié le 11 juillet par l’entreprise Digital Science et le projet Dimensions, la Chine est désormais, avec plus de 40 % des citations universitaires dans le champ de l’intelligence artificielle, de loin le leader mondial de la recherche sur l’IA 1.
- Le rapport, qui repose sur une base de données de plusieurs centaines de milliers d’articles académiques publiés depuis 2000, révèle que des chercheurs rattachés à des universités chinoises ont publié l’an dernier plus d’articles (environ 24 000) que leurs pairs européens, américains et britanniques ensemble (19 000).
- L’écart entre la Chine et le reste du monde est d’autant plus visible en matière de nombre de brevets déposés l’an dernier dans le domaine de l’IA : plus de 35 000 pour Pékin, contre 2 600 pour les autres grandes puissances (Union, États-Unis, Royaume-Uni, Canada, Japon et Corée du Sud confondus).
Si les États-Unis conservent une avance en matière d’infrastructures, qui devrait être davantage confortée suite aux annonces par Trump du mardi 15 juillet de 90 milliards de dollars de nouveaux investissements dans le secteur de l’énergie et des centres de données en Pennsylvanie 2, la Chine développe aussi son réseau d’alimentation de l’IA via son initiative « Données de l’Est et Informatique de l’Ouest » (东数西算).
- Lancée en février 2022, celle-ci vise à relier l’est du pays, où se trouve la majeure partie des centres de recherche et universités leaders en matière d’IA, avec le centre et l’ouest du pays, riches en ressources énergétiques, notamment renouvelables.
- Pour fonctionner, les data centers qui entraînent les modèles d’IA en faisant tourner des milliers de processeurs et cartes graphiques et qui alimentent les chatbots ont besoin d’un accès direct à d’importantes quantités d’énergie.
- En reliant l’ouest à l’est via des « corridors informatiques », Pékin veut développer une infrastructure permettant de mieux répondre à la demande générée dans les régions côtières en connectant les campus à des centres de calcul via des réseaux de fibre optique s’étalant sur des milliers de kilomètres à travers le pays 3.
- L’Agence internationale de l’énergie estime que la consommation d’électricité des centres de données devrait presque doubler entre 2025 et 2030, passant de 485 TWh à 945 — et tripler d’ici 2035.
Quelques jours seulement avant l’arrivée de Trump le 20 janvier, le conseiller à la sécurité nationale de Biden, Jake Sullivan, lançait un appel à la nouvelle administration : si les États-Unis ne parviennent pas à devancer la Chine en matière d’IA, les conséquences pour le monde pourraient être « dramatiques et extrêmement négatives » 4.
- Sullivan craignait notamment qu’une IA globale dominée par la Chine ne provoque une « avalanche de désinformation », bouleverse le marché du travail et ne conduise à la « démocratisation d’armes extrêmement puissantes et meurtrières ».
- L’ancien conseiller à la sécurité nationale exprimait également son inquiétude quant au pouvoir — « équivalent à celui des États-nations » — que le contrôle de l’IA conférait aux entreprises.
- Selon Sullivan, Pékin et Washington devaient aussi dépasser le stade de la rivalité pour permettre une forme de coopération en matière de surveillance des acteurs et de régulation des usages de l’IA, afin que la technologie ne soit pas utilisée « de manière catastrophique ».
Sources
- Daniel W. Hook, DeepSeek and the New Geopolitics of AI China’s ascent to research pre-eminence in AI, Dimensions et Digital Science, 11 juillet 2025.
- Jarrett Renshaw, « Trump joins tech and energy executives amid AI push », Reuters, 15 juillet 2025.
- “东数西算”工程稳步推进, Gouvernement chinois, 14 avril 2024.
- Jim VandeHei et Mike Allen, « Behind the Curtain : A chilling, « catastrophic » warning », Axios, 18 janvier 2025.