Depuis le début du mois de juin, l’armée russe a multiplié ses offensives en direction de la région frontalière de Soumy, dans le nord-est de l’Ukraine. Quelques jours auparavant, Vladimir Poutine ouvrait la porte, lors d’un déplacement à Koursk, à la création d’une zone tampon voire à l’annexion de la région dans sa totalité.

  • La Russie contrôle actuellement environ 200 km² de territoire ukrainien dans la région de Soumy. Moscou revendique par ailleurs se trouver à moins de 20 kilomètres de la capitale régionale.
  • Depuis le retrait des forces ukrainiennes de Koursk en avril, de l’autre côté de la frontière, l’armée russe a capturé plusieurs villages le long de l’autoroute H-07.
  • La ligne de front y est toutefois contestée, comme en témoigne la capture puis la libération à deux reprises en l’espace d’un mois du village d’Andriivka, situé à moins de 5 kilomètres de la frontière.

La menace d’une poussée russe vers la ville de Soumy est jugée très sérieuse par Kiev, qui continue de renforcer ses défenses en posant des filets anti-drones au-dessus des routes, en creusant des tranchées pour l’infanterie, des fossés anti-chars et en posant des barbelés. Lorsqu’elle progresse, l’armée russe prend toutefois le contrôle de ces fortifications — dont certaines n’avaient pas encore été installées — derrière lesquelles elle se retranche, avant de mener de nouvelles offensives 1.

  • Les forces russes ont conquis 100 km² supplémentaires dans la région au cours des 30 derniers jours. Une part importante de ce territoire se trouve toutefois le long de la frontière, en direction de Bilopillia, et non en profondeur vers la ville de Soumy.
  • Cette stratégie semble destinée à créer la « zone tampon » évoquée par Poutine le mois dernier, qui pourrait s’étendre jusqu’à l’oblast de Tchernihiv, plus au nord, qui partage sa frontière avec le Bélarus.
  • La largeur de cette zone n’est toutefois pas tant dictée par un nombre fixe de kilomètres — le chiffre de 10 à 12 kilomètres est régulièrement évoqué par le pouvoir russe — que par la topographie de la région frontalière, qui est traversée par de nombreux cours d’eau et vallons.
  • L’objectif affiché par la Russie demeure cependant d’empêcher l’Ukraine d’être à portée d’artillerie de la frontière — ce qui pourrait inclure la capture de la ville de Soumy, qui se trouve à moins de 50 kilomètres de la Russie.

Selon un haut responsable de l’OTAN, les avancées tactiques réalisées par les forces russes au cours des dernières semaines se sont traduites par un niveau très élevé de pertes. Épuisée, l’armée russe se trouverait dans l’incapacité — du moins à court terme — d’encercler la ville de Soumy si l’ordre lui en était donné par le Kremlin 2. Cette conclusion rejoint une précédente évaluation de l’Institute for the Study of War 3.

  • Lors du Forum économique international de Saint-Pétersbourg, Vladimir Poutine a déclaré que l’objectif de Moscou n’était pas de prendre la ville de Soumy, tout en ajoutant qu’il « n’excluait pas cette possibilité » 4.
  • Le régime russe, durement marqué par l’incursion ukrainienne de Koursk lancée à l’été 2024, fait ainsi peser une menace militaire réelle en massant plus de 50 000 hommes sur ce secteur du front, mais nourrit également un objectif politique.
  • Les multiples attaques ukrainiennes lancées en Russie — notamment l’opération Toile d’araignée — au cours des derniers mois ont mis en lumière les lacunes de l’appareil sécuritaire russe et affaibli l’image du Kremlin à l’international, mais également en Russie.
  • Mercredi 25 juin, le secrétaire d’État américain Marco Rubio a déclaré que l’armée russe devrait avoir beaucoup de mal à atteindre ses objectifs territoriaux, en dépit de ce que pense Vladimir Poutine 5.
Sources
  1. Publication sur Telegram de DeepState, 20 juin 2025.
  2. Сергей Сидоренко, « В НАТО считают нереальным окружение Сум и говорят о значительных потерях армии РФ », Європейська правда, 24 juin 2025.
  3. Angelica Evans, Grace Mappes, Christina Harward, Anna Harvey, Jennie Olmsted, Jessica Sobieski, et George Barros avec Nate Trotter, Russian Offensive Campaign Assessment, June 2, 2025, Institute for the Study of War.
  4. Пленарное заседание Петербургского международного экономического форума, Kremlin, 20 juin 2025.
  5. Felicia Schwartz, « Europe wants Trump to sanction Russia. Rubio says not yet. », Politico, 25 juin 2025.